Nos Corps à la Dérive

Les blas-blas de Xérès : Et voici le nouveau chapitre de cette fiction, qui approche de plus en plus de la fin ! Et je dois dire que c'est un peu un soulagement pour moi, car ce sera ma dernière fiction Harry Potter, je pense, avant un moment. J'ai besoin de changer d'air et de me découvrir dans d'autres univers que celui-là. J'avais réussi le défi avec The faces of Insanity (FarCry 3) et maintenant je suis dans une phase Outlander qui m'amuse comme une petite folle. Mais j'irai au bout de cette fiction malgré tout, il reste peut être 2 ou 3 chapitres seulement, donc profitez-en bien !

Merci à tous pour vos follow/fav et en particulier à mon chéri, Annelise, Luna, Plumette, Fleur d'Ange, elisendre, Wizzette, Anno1, xbiidx, Nedwige Stark, Acide'nette, Mariiiiion, Najuja, Dramionelover, AllcatsAB, Rose974 pour leurs reviews ! Bonne lecture !

RAR :

Luna : merci pour ta review et ta réactivité ! Première review après la publication, tu es une rapide ahah. J'espère que ce chapitre te plaira aussi ! Gros bisous !

Dramionelover : héhéhé eh oui le confinement m'a ramenée d'entre les morts ahah. Et si jamais tu es une fan d'Outlander, il y aura aussi du Outlander à lire ce soir (Number one Stephen Bonnet fan here, je n'ai pas honte, j'adore les pirates sanguinaires XD) J'espère que la suite te plaira ! Gros bisous !

AllCatsAB : ahah ravie de te faire retomber dans ton adolescence ! J'espère que la suite te plaira !

oOo

Chapitre 15 : Sirius

Petit cochon, gentil petit cochon, puis-je entrer ?
Non, non, par le poil de mon menton, répondit le premier petit cochon.
Alors le loup se gonfla les joues, souffla, souffla de toutes ses forces, et la maison de paille s'envola.

~o~

« I don't want a lot for Christmas, there is just one thing I need… I don't care about the presents, underneath the Christmas tree… »

Rémus Lupin poussa un grognement las en entendant la voix de Mariah Carey émaner de la télévision du salon. Dans un coin de la pièce, le sapin décoré par Nymphadora brillait de mille feux, ses guirlandes clignotantes hypnotisant littéralement le petit Teddy, assis par terre dans son pyjama rouge et blanc, entouré de cadeaux encore empaquetés.

« Je le jure sur ma vie, si j'entends encore une fois cette chanson à compter de demain 26 décembre… », marmonna-t-il avec une grimace.

Dans la cuisine, où elle préparait le petit-déjeuner gargantuesque de leur matin de Noël, Nymphadora gloussa et reprit en chœur : « All I want for Christmaaaaas is youuuuuuuu… » sous le regard peu amène de son mari. « Allez, Rémus, c'est Noël. Ne sois pas si grognon… Tu es rentré tard hier soir ? Je suis tombée dans le coma peu après vingt heures, Teddy m'a épuisée, pire que le boulot, celui-là… »

« Vers vingt-et-une heures », répondit-il en se frottant les yeux du revers de la main. « Je suis resté pour soutenir cette pauvre McGonagall qui a eu la brillante idée de coller Harry Potter en retenue un 24 décembre au soir. Apparemment, Albus et elle envisagent sérieusement de le suspendre voire de l'exclure définitivement… »

« Pourquoi ça ? », demanda Nymphadora, son instinct de flic reprenant le dessus. Toute information concernant les agissements de l'entourage d'Hermione Granger était importante, même si officiellement l'affaire était classée.

« Il a provoqué une bagarre hier. Il maintient qu'Hermione… aurait menti quant aux intentions de son ex-petit ami avant sa mort et il supporte mal qu'elle se soit rapprochée de Draco Malfoy. »

« Hum… un meurtre, ça crée des liens et ça en défait… », marmonna-t-elle. « A quel point ils se sont rapprochés, exactement ? »

« Tu ne vas pas t'y mettre toi aussi ? », s'esclaffa Rémus en secouant la tête. « Je sais ce que tu insinues, mais Hermione est une élève sérieuse, studieuse, avec un cœur en or. Et il se trouve que dernièrement, Malfoy a eu besoin d'aide, mais ça s'arrête là. »

« Tu as sûrement raison… », soupira-t-elle en achevant de décorer une montagne de pancakes avec des fruits, du sirop d'érable et autres sucreries. « J'ai essayé d'imaginer tous les scénarii possibles dans cette histoire. J'en suis même venue à soupçonner Granger elle-même, à un certain stade, ou même Malfoy et Granger qui s'uniraient pour la venger de tous ceux qui lui ont fait du mal. J'ai envisagé un trouble dissociatif de l'identité à la Norman Bates, où un alter ego de Granger éliminerait ses ennemis… »

Rémus laissa échapper un rire tout en se servant une tasse de café. « Alors désormais, interdiction de regarder autre chose que les dessins animés de Teddy, la télé ne te fait clairement pas du bien… » Il grimaça subitement et elle fronça les sourcils.

« Migraine ? », comprit-elle aussitôt. Elle esquissa un sourire compatissant lorsqu'il hocha la tête. « Il doit y avoir du Doliprane par ici… » Se dressant sur la pointe des pieds, elle ouvrit la porte du plus haut meuble de cuisine, celui auquel ils étaient certains que Teddy ne pourrait jamais accéder avant ses dix-huit ans au moins, et en sortit une boîte jaune qu'elle lui lança.

« Merci. »

« Je t'attrape un verre d'eau. » Joignant le geste à la parole, elle sortit un verre du vaisselier et se dirigea vers l'évier pour le remplir au robinet. Lorsqu'un mouvement attira son regard par la fenêtre qui donnait sur l'arrière-cour. Elle sursauta, scrutant le jardinet couvert de neige, à la recherche de ce qui avait furtivement surgi dans sa vision périphérique. C'est alors qu'elle le vit. Le long manteau noir et sale, les cheveux et la barbe hirsutes, les énormes Rangers qui piétinaient la neige… Sirius Black ?

Elle resta quelques secondes interdite, avant de percuter ce qui n'allait pas. « Qu'est-ce qu'il fait dans notre jardin ? » s'écria-t-elle en reposant le verre d'eau dans l'évier.

« Qui ? », fit la voix de Rémus derrière elle, mais elle ne prit pas le temps de lui répondre. Ni une, ni deux, elle s'était ruée vers la baie vitrée du salon et était sortie pieds nus.

« Hey ! », aboya-t-elle à l'attention du marginal, qui se tenait tout au fond de la cour, près de la cabane à outils. Celui-ci fit un bond en entendant la voix de l'inspectrice et fila aussitôt en direction du muret qui séparait leur terrain de celui des voisins. Nymphadora partit à ses trousses, faisant fi de la neige qui glaçait ses plantes de pieds, mais il avait une longueur d'avance sur elle. Avec la souplesse d'un chat (et sûrement des années de pratique), l'homme se hissa sur le muret, l'escalada en deux secondes et disparut de l'autre côté. Dans le feu de l'action, la jeune femme s'apprêta à faire de même mais le bord tranchant d'une pierre saillante dans le vieux mur lui rappela douloureusement l'absence de chaussures à ses pieds.

« Merde… », jura-t-elle en retombant dans la neige avec une grimace. Elle jeta un dernier regard en direction du mur, le maudissant d'être aussi haut et se maudissant elle-même de ne pas être suffisamment habillée pour prendre l'homme en chasse.

« Qui c'était ? », entendit-elle demander depuis la terrasse.

Nymphadora traversa le jardin dans l'autre sens, la mine sombre. « Le marginal qui vit dans les bois… Je l'ai interrogé dans le cadre de mon enquête mais… c'est un type vraiment bizarre, si tu veux mon avis. Jusque-là je le pensais inoffensif… qu'est-ce qu'il faisait ici, bon sang… ? »

« Peut-être à la recherche de quelque chose à voler dans le coin ? Du bois de chauffage ? », suggéra Rémus sans méchanceté aucune. « Sa vie ne doit pas être facile tous les jours avec ce froid… »

La flic sourit et déposa un baiser sur les lèvres de Rémus. « C'est vrai… Je retournerai lui poser deux ou trois questions… à la fin de mes vacances ! », se défendit-elle en voyant son conjoint lever les yeux au ciel, prêt à lui faire une remarque sur les heures supplémentaires et le non-respect du temps en famille. Avant d'ajouter en bougonnant : « Je vais tout de même appeler Kingsley pour lui en parler… »

~o~

« Qu'est-ce qu'elle aime, ta mère ? », demanda Hermione en parcourant des yeux les étagères remplies d'objets de décoration divers et variés. Chose promise, chose due, ils avaient rejoint le bourg de Pré-au-Lard dès le début de l'après-midi du 26 décembre en quête de cadeaux de Noël en retard. Comme à son habitude, Hermione excellait dans cette tâche ardue, tandis que Draco se contentait de déambuler entre les rayons en vérifiant toutes les cinq secondes qu'elle était bien là à ses côtés. Une peur ridicule l'avait saisi depuis la veille, lorsqu'après s'être embrassés de longues minutes, elle avait regagné sa chambre pour la nuit : que tout cela n'ait été qu'un rêve, qu'il allait se réveiller dans le monde réel où ils n'avaient jamais échangé le moindre baiser. Mais le lendemain, elle était là, rougissante sur le pas de sa porte dans son gros manteau d'hiver, prête à affronter les éléments. A l'extérieur, elle avait pris sa main dans la sienne et ils avaient parcouru tout le chemin à pied en papotant, comme si tout était normal et que leurs mains jointes faisaient désormais partie d'une nouvelle réalité. Et depuis, il redoutait le moment où cette après-midi hors du temps s'arrêterait.

« Tu veux dire… à part les profs de Physique-Chimie aux cheveux gras ? », maugréa-t-il avec un sourire narquois.

Hermione laissa échapper un rire. « Elle en a déjà un, je ne vais pas lui en offrir un autre… », railla-t-elle tandis que Draco frémissait d'horreur à cette idée. « Non sérieusement, elle collectionne quelque chose ? Quel genre de livres elle lit… ? »

Le jeune homme haussa les épaules d'un air désolé. « Je suis nul en cadeaux. En général, on me donne une liste et je pioche dedans… En plus, je suis sûr qu'elle ne s'attend pas à ce que tu lui offres quoi que ce soit en retour alors… »

« Des fleurs ? », insista la brune à tout hasard.

« Elle adore les orchidées ! », s'écria Draco, sous le regard réjoui d'Hermione. Avant de se reprendre. « Ou peut-être est-ce les anthurium… »

Elle soupira, navrée qu'il en sache aussi peu sur sa propre mère. « Va pour les orchidées, le fleuriste de Pré-au-Lard propose les livraisons à domicile. Tu as sa nouvelle adresse ? »

« Euh oui… Oui, évidemment… tu crois quoi, Granger ? », rétorqua-t-il avec une pointe d'énervement, tandis qu'elle s'éloignait vers un rayon d'alcools exotiques pour son père. Discrètement, il sortit son téléphone portable pour y pianoter un message en quatrième vitesse.

« Tu es en train de lui envoyer un SMS pour avoir son adresse, c'est ça ? », lança-t-elle depuis l'autre bout du rayon.

« Et si tu allais voir ailleurs si j'y suis ? »

Hermione disparut dans le rayonnage adjacent, son rire résonnant dans le magasin. Après avoir acheté des cadeaux pour ses parents, les avoir emballés à la va-vite et déposés au bureau de poste, ils étaient passés chez le fleuriste, avant de finir autour d'un chocolat chaud aux Trois Balais. Draco ne cessait de s'émerveiller de la façon dont Hermione semblait trouver toute la situation parfaitement normale. Elle évoluait dans les boutiques à son aise, marchant tout contre lui, s'attardant devant les étagères de livres, comme si leur relation datait déjà de plusieurs mois et non simplement de la veille. Alors que lui-même était terrifié à l'idée de dire ou faire quoi que ce soit qui pourrait tout gâcher, elle semblait déjà avoir intégré le fait qu'ils étaient… ensemble.

Le pâle soleil de l'hiver entamait déjà son déclin lorsqu'ils décidèrent de rentrer à Poudlard, toujours main dans la main. « Oh, j'allais oublier… », fit soudain Hermione en fouillant dans son sac besace. « J'ai quelque chose pour toi. Je l'ai vu tout à l'heure, j'ai pas pu résister. »

« Granger, je croyais qu'on avait dit pas de cadeaux… », gronda-t-il en prenant entre ses mains le petit paquet rectangulaire et plat qu'elle lui tendait.

« Et moi j'ai dit que si j'en avais envie, j'en ferais… C'est rien du tout, ouvre… » Avec un soupir, Draco déchira le papier, dévoilant un petit carnet à couverture en cuir noir orné du blason de Poudlard en métal. « Tu peux noter tout un tas de trucs dedans… Les goûts des gens, pour savoir quoi leur offrir à Noël par exemple… », chantonna-t-elle en lui décochant un sourire beaucoup trop large pour ne pas être ironique. « Oh et regarde ça… » Elle tourna toutes les pages jusqu'à la fin et tapota son index sur le papier en agitant les sourcils d'un air suggestif. « Il y a même un carnet d'adresses…. »

« Tu sais qu'il y a des fonctions dans les smartphones qui font ça très bien… »

Hermione haussa les épaules en riant. « Ah bah, tu ne semblais pas en être équipé… »

« Très drôle… » Il secoua le carnet dans sa main. « Je m'en servirai comme journal d'observation. Hermione Granger dans son habitat naturel : bibliothèque, salle de cours, bibliothèque, étude, salle de cours, bibliothèque… ça promet d'être passionnant ! »

« Pour une fois qu'on te verra noter quelque chose dans un cahier, ça sera toujours ça de gagné ! », répliqua-t-elle en fuyant quelques mètres en avant, pour éviter un coup de carnet sur la tête. « Loupé ! »

Elle poussa un cri strident en le voyant s'élancer à sa poursuite et avec l'impression d'avoir de nouveau cinq ans, ils se pourchassèrent jusqu'à mi-chemin entre les dortoirs et le bâtiment principal de l'internat. A bout de souffle, Hermione s'arrêta, pliée en deux par un point de côté et leva le pouce pour signifier la trêve, mais le carnet noir s'abattit tout de même sur ses cheveux bouclés.

« Hé, j'ai dit pouce ! », protesta-t-elle, tandis qu'il s'esclaffait.

« Tu te crois où, au primaire ? Pas de pitié, ici, t'es dans la cour des grands… » Il s'apprêtait à rire de nouveau, lorsqu'il la vit froncer les sourcils et regarder en direction du sol, un peu plus loin à l'écart du chemin. « Qu'est-ce qu'il y a ? »

Hermione se redressa et quitta le chemin déneigé pour s'enfoncer dans la poudreuse, afin d'y ramasser quelque chose. Elle se retourna vers lui, alarmée.

« Ce sont les lunettes d'Harry… »

« Tu es sûre ? », demanda-t-il en approchant pour vérifier. Impossible d'en douter, Potter était le seul à raccommoder cent fois ses lunettes rondes avec du gros scotch. L'un des verres était brisé. « Il les a perdues quand on s'est battus, tu crois ? »

Hermione réfléchit un instant puis secoua la tête. « Non, il ne serait pas parti sans… Il les avait quand McGonagall l'a ramené à l'intérieur, j'en suis certaine. »

« Alors quoi, ça veut dire qu'une autre personne lui a tapé dessus depuis avant-hier ? Non pas que ça me dérange, mais ça devient redondant… »

La jeune fille ne répondit pas et jeta un regard inquiet en direction des dortoirs. « Je vais aller voir dans sa chambre… » Elle s'apprêtait à se détourner lorsqu'il lui saisit le bras pour la ramener avec douceur vers lui.

« Wow, attends, tu es sûre de vouloir… le voir après ce qu'il s'est passé ? »

Hermione hocha la tête. « Je veux juste m'assurer que tout va bien… et si jamais il m'insulte, promis je garde ses lunettes en otage. »

Draco haussa les épaules. « Ça me paraît juste… »

Ils s'apprêtaient à rebrousser chemin lorsque le regard d'Hermione accrocha une silhouette penchée au bord du lac. Sirius ?, pensa-t-elle en plissant les yeux pour mieux voir, mais le temps qu'elle se décide à l'interpeller, l'homme se redressa et prit ses jambes à son cou lorsqu'un petit groupe d'élèves qui faisait le tour du lac s'approcha en riant aux éclats. Se promettant de tirer au clair cette histoire plus tard, Hermione suivit Draco jusqu'aux dortoirs de Gryffondor. Le couloir était totalement vide et Hermione sentit ses entrailles se tordre elle avait un mauvais pressentiment. Mais si Harry n'était pas dans sa chambre, il pouvait très bien être ailleurs dans l'école, au réfectoire, ou à la bibliothèque… Bon, peut-être pas à la bibliothèque… Elle inspira profondément et remonta le couloir jusqu'à la chambre du fond. De ses doigts engourdis par le froid, elle frappa quelques petits coups sur le panneau, en vain. Elle tenta alors d'actionner la poignée et la porte s'ouvrit avec un grincement. La chambre était plongée dans la pénombre et dans une ambiance froide, comme si personne n'y était entré depuis un moment. L'habituelle odeur de cannabis flottait dans l'air, mais plus ténue, comme si le dernier joint y avait été fumé quelques jours plus tôt.

« Il est peut-être dans la Grande Salle… », marmonna Draco en saisissant la poignée de la porte. « Tu veux qu'on y aille ou bien tu laisses les lunettes ici ? »

« Je veux bien y aller, si ça ne te dérange pas ? »

Il secoua la tête en signe de dénégation et referma derrière eux. Tenant toujours les lunettes brisées par une branche, Hermione refit le trajet en sens inverse jusqu'au bâtiment principal, suivie de près par Draco, qui restait étrangement silencieux. Mais une fois au réfectoire, où se trouvaient la majorité des rares élèves restés pour Noël, le même schéma se répéta : point d'Harry Potter en vue. Ni dans la bibliothèque, ni en retenue, ni dans les vestiaires de sport (son autre repaire de prédilection). Le Gryffondor restait introuvable. Fébrile, Hermione sortit son téléphone portable de sa poche et chercha « Ginny Weasley » dans ses contacts.

« Hermione ? », fit la voix mal à l'aise de Ginny dans l'écouteur. Elles ne s'étaient plus adressé la parole depuis la dernière fois qu'ils avaient tenté de s'expliquer tous les trois. « Est-ce que tout va bien ? »

« Salut, Ginny… Désolée de te déranger, je… »

« Non, non, tu ne me déranges pas… »

« Est-ce qu'Harry est chez vous ? »

Il y eut un silence à l'autre bout de la ligne.

« Non… non… il n'est pas à l'école ? » La tension dans la voix de Ginny était montée d'un cran. « Et merde, j'étais sûre qu'il allait faire une bêtise… »

« Une bêtise ? Ginny, de quoi est-ce que tu parles ? »

La jeune fille poussa un long soupir et on entendit derrière elle la voix de Mrs Weasley lui demander qui était au bout du fil. « C'est… c'est mon amie Luna, maman, elle a besoin d'aide pour un devoir de Maths… » Une porte claqua et Hermione en déduisit, la gorge serrée, que Ginny avait dû s'isoler pour pouvoir lui parler. « Désolée… je… Maman n'a pas encore digéré… ce que tu as dit à la police… »

« T'embête pas, j'ai compris », rétorqua sèchement la brune pour couper court. « De quelle bêtise tu parles ? »

« Je ne sais pas trop… Harry était bizarre la veille de Noël. Il m'a dit qu'il s'était pris une colle et qu'il ne nous appellerait pas le 25. Qu'il avait besoin d'être seul et qu'on se parlerait à mon retour de vacances. »

« J'ai trouvé ses lunettes par terre… mais lui, impossible de mettre la main dessus… »

Elle pouvait presque sentir l'appréhension de Ginny, voir sa main crispée sur son smartphone, ses lèvres trembler, comme à chaque fois que Harry Potter faisait quelque chose de stupide. Autant dire, très régulièrement.

« Je vais aller voir McGonagall, peut-être qu'elle l'a renvoyé chez lui sans nous le dire ? », proposa Hermione, rassurante.

« Oui… Je vais appeler les Dursleys, de mon côté. Tiens-moi au courant d'accord ? Oh et Hermione ? »

« Oui ? »

Ginny baissa d'un ton et son interlocutrice dut coller son oreille contre le haut-parleur pour ne pas manquer un mot. « Je suis désolée pour maman… pour tout, en fait. J'espères que tu pourras un jour nous pardonner… »

Hermione sentit une boule se former dans sa gorge et hocha la tête, bien que Ginny ne puisse pas la voir. « Merci. On se tient au courant. » Et avant que Ginny ait pu ajouter quoi que ce soit d'autre, elle raccrocha, la mine sombre. Elle se tourna vers Draco, qui l'observait, les mains enfouies dans les poches de son pantalon.

« McGo ? », demanda-t-il, un sourcil levé et Hermione acquiesça.

« McGo… »

~o~

Nymphadora venait de déposer Teddy, endormi, dans son petit lit en le couvant du regard lorsque son téléphone portable vibra dans la poche arrière de son jean. Craignant que la vibration de l'appareil ne réveille son fils, elle se glissa rapidement hors de la chambre et attendit d'avoir atteint les escaliers qui menaient au rez-de-chaussée pour décrocher.

« Chef ? », demanda-t-elle à mi-voix, en ayant vu le nom de « Shacklebolt » s'afficher sur l'écran.

« Je viens d'avoir la Directrice adjointe de Poudlard au téléphone. Apparemment, l'un de leurs élèves aurait disparu. »

« Pourquoi ai-je le sentiment qu'il ne s'agit pas de n'importe quel élève ? »

« Parce que si ce n'était pas le cas, je ne vous aurais pas dérangée pendant vos vacances ? », proposa l'inspecteur en chef. « C'est Harry Potter. »

Une pointe d'excitation fit se dresser les petits cheveux sur la nuque de Nymphadora, son instinct de flic lui hurlant que l'affaire Granger était loin d'être terminée. « Je m'en occupe », fit-elle en s'apprêtant à raccrocher.

« Ce n'est pas tout… des témoins affirment avoir vu Sirius Black rôder autour du lac cet après-midi… il semblait instable. Il n'est pas reparu par chez vous, par hasard ? », demanda-t-il avec un grognement las.

« Autour du lac ? », répéta Tonks en fronçant les sourcils. A quelques mètres d'elle, Rémus avait monté trois ou quatre marches et la dévisageait avec un regard inquisiteur. Elle articula silencieusement 'boulot' en désignant son téléphone du doigt, avant de répondre à son supérieur : « Non, il n'est pas revenu ici… Mais j'avais prévu de lui rendre une petite visite de toute façon, ça tombe bien… » Elle fit demi-tour dans les escaliers pour se ruer dans sa chambre et enfiler des vêtements chauds, et lorsqu'elle redescendit au rez-de-chaussée, elle vit Rémus lui jeter un regard à la fois interrogateur et… déçu.

« Tu dois vraiment y aller ? », demanda-t-il avec un soupir.

L'inspectrice lui adressa un sourire d'excuse et s'avança vers lui pour déposer un bref baiser sur ses lèvres. « J'essaie de faire aussi vite que je le peux… Désolée… »

Rémus lui rendit son sourire et enfonça les mains dans les poches de son pantalon. « C'est rien… je garde le fort en attendant. »

Quelques instants plus tard, Nymphadora avait disparu dans la nuit noire en direction de Poudlard.

Après avoir récupéré les lunettes, que la Directrice adjointe de Poudlard avait intelligemment placées dans une enveloppe en papier, puis interrogé Hermione Granger et Draco Malfoy, ainsi que les élèves qui avaient aperçu Black sur le ponton, Nymphadora avait dû se résoudre à retourner au commissariat pour faire analyser sa preuve. Les recherches dans la forêt et un éventuel sondage du lac ne pourraient pas débuter avant le lever du jour, il lui restait donc quelques heures pour boucler toutes les autorisations afin que tout soit prêt pour lancer les recherches. Tout allait devoir se jouer dans la plus grande des discrétions, à présent, car s'il s'avérait effectivement qu'un nouvel élève avait été agressé ou pire, tué, alors que la principale suspecte était derrière les barreaux, cela signifierait officiellement que le meurtrier courait toujours et que l'école n'était plus un endroit sûr pour ceux qui l'habitaient. Mais en renvoyant les élèves chez eux, ils prendraient le risque que l'assassin disparaisse lui aussi dans la nature. Le temps allait donc jouer contre elle. Elle consulta sa montre et soupira en voyant s'afficher deux heures du matin. Elle ne savait si c'était la faim, la fatigue, une éventuelle hypoglycémie ou si elle couvait quelque chose mais elle se sentait légèrement barbouillée. Elle envisageait de rentrer chez elle lorsque l'un des geeks du labo frappa à la porte de son bureau.

« On a une empreinte partielle… », annonça-t-il avec un sourire.

Nymphadora se leva d'un bond de sa chaise et le suivit dans les couloirs du commissariat jusqu'à son repaire de scientifique fou, où plusieurs PC tournaient en ronronnant, cernés de produits et récipients divers plus ou moins bien rangés. « J'ai commencé par la comparer avec toutes les autres empreintes qui ont été relevées dans le cadre de notre affaire, et la mauvaise nouvelle c'est qu'elle ne correspond à aucune des personnes de cette liste. Là, j'ai lancé une recherche dans le fichier national, ça peut prendre un moment… »

« Est-ce que tu as celles d'un certain Sirius Black ? », demanda-t-elle en fronçant les sourcils.

« Tiens, je croyais que vous ne le soupçonniez pas… », railla le scientifique, qui avait dû entendre parler du désaccord entre elle et sa hiérarchie au sujet du vagabond.

« Je veux seulement m'assurer que je n'ai pas eu tort… »

Il lança une comparaison en parallèle de sa recherche, mais celle-ci revint négative, au grand soulagement de Nymphadora. Un nouveau spasme dans son estomac la secoua et elle pinça les lèvres.

« Tu m'appelles si tu as un résultat ? Je vais finir mon rapport et signaler la disparition de Potter aux collègues de la région… »

L'homme hocha la tête et elle quitta le labo pour reprendre la direction de son bureau, mais dut se rendre à l'évidence : elle devait trouver des toilettes et vite. Bifurquant dans le couloir en direction des sanitaires, elle porta une main à sa bouche et entra dans la première cabine de la pièce pour relever le couvercle. Un flot de bile acide et rance remonta dans son œsophage et elle vomit le maigre contenu de son estomac dans la cuvette, tandis que des larmes humidifiaient ses yeux par réflexe. Après trois salves consécutives, elle se sentit mieux et se laissa tomber sur le carrelage glacé des toilettes pour reprendre sa respiration. Elle avait toujours été quelqu'un qui vomissait peu : même enfant avec la grippe, ou étudiante en abusant de l'alcool, elle mettait toujours un point d'honneur à ne jamais vomir. En revanche, sa grossesse avait été un festival ininterrompu de vomissure. Du deuxième au huitième mois, Teddy l'avait quasiment contrainte à se déplacer avec une poubelle vissée sous le menton.

Comme toutes les femmes dans ces instants-là, Nymphadora se mit à rapidement faire quelques calculs dans sa tête et les mathématiques pointaient vers une seule et même conclusion : elle était probablement à nouveau enceinte. La nouvelle était plutôt bonne en soi, Rémus et elle avaient toujours prévu d'avoir un second enfant, mais l'idée de replonger dans six mois de nausées l'enchantait beaucoup moins. Elle se releva péniblement, tira la chasse d'eau et sortit de la cabine pour se laver les mains, se rincer la bouche et rafraîchir un peu son visage. La nausée s'était calmée et elle décida de terminer son travail, avant de passer à la pharmacie à l'ouverture pour acheter un test. Et ensuite, dodo…, acheva-t-elle en bâillant.

~o~

La lueur d'un feu transparaissait à travers les vitres sales de la cabane qui servait de maison à Sirius Black. Seule au milieu de la forêt, cernée par l'obscurité favorisée par de gigantesques conifères, la bicoque lui faisait penser à la maison de paille du premier petit cochon dans le célèbre conte. La structure semblait si frêle qu'il était persuadé de pouvoir l'anéantir d'un simple souffle. Il fit tourner le manche de son marteau dans sa main, appréciant son poids. Autour de lui, la forêt s'était tue, comme si tous les rares animaux qui n'étaient pas en hibernation attendaient eux aussi la suite des événements, silencieux, attentifs, aux aguets. L'univers était de son côté. Là, tapi dans l'ombre, le froid, le silence, il était dans son élément, pas comme l'autre qui préférait la lumière, la chaleur et le bruit.

Rien ne semblait bouger à l'intérieur de la cabane, mais une drôle de sensation dans sa nuque lui indiquait que ce n'était qu'un leurre. Il avait l'intime conviction que le marginal l'attendait, scrutait les ombres dans l'espoir de l'apercevoir le premier, mais il n'était pas de ceux que l'on peut duper facilement. Sans émettre le moindre son, il se baissa pour ramasser un gros caillou et le jeta de toutes ses forces en direction de la porte d'entrée sommaire. La pierre frappa les quelques planches en bois qui formaient le seuil, puis la paroi de la cabane. Le bruit provoqué sembla se répercuter contre chaque sapin, chaque pierre, chaque monticule de neige et il s'enfonça de nouveau dans les ombres, juste à temps avant que la porte de Black ne s'ouvre à la volée et qu'une décharge de plomb ne déchire l'air comme un coup de tonnerre. L'arme, un vieux fusil de chasse qui avait dû faire la guerre, fumait légèrement dans l'air glacé et le marginal balaya l'obscurité devant lui, cherchant l'origine du son qu'il avait perçu depuis l'intérieur.

Même à la distance à laquelle il se trouvait, il sentait la peur du clochard irradier par tous ses pores et déclencher en lui l'instinct du chasseur. Le fusil ne contenait plus qu'une seule cartouche, avant que Black ne soit forcé de le recharger, mais cette seule cartouche était encore un problème. Il devait le forcer à la tirer. Et ensuite alors, il bénéficierait d'une marge de manœuvre pour pouvoir frapper. Heureusement pour lui ce soir-là, la déesse Diane chasseresse semblait bel et bien son alliée et lorsqu'un lièvre blanc traversa soudain le sentier en soulevant derrière lui une gerbe de poudreuse, Black tira par réflexe, blessant fatalement le lièvre qui s'immobilisa dans la neige. Resserrant sa prise sur son marteau, il sourit de plus belle, tandis que Black se remettait de ses émotions en supposant que l'auteur du bruit suspect qui l'avait attiré hors de sa cahutte était bien l'infortuné lapin. Il le vit hésiter un instant, cassant son fusil pour en retirer les vestiges de ses cartouches fumantes, puis balayer encore les environs du regard.

Tu ne vas pas laisser ce pauvre lapin mourir inutilement, n'est-ce pas… C'est dans ta nature… Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme… Va me chercher ce foutu lapin, Sirius…

Comme s'il obéissait à l'ordre par la pensée, Sirius Black s'avança prudemment dans la neige jusqu'à l'endroit où agonisait l'animal ensanglanté, sans cesser de jeter des regards alarmés autour de lui. Mais absolument rien ne bougeait. Pas même lui, malgré l'adrénaline qui pulsait dans ses veines. Il avait toujours pensé que Black était un problème, à rôder partout autour de Poudlard… et maintenant autour du lac. Cela ne pouvait pas être une coïncidence. Il fallait éliminer le gêneur d'urgence.

Ses doigts se crispèrent autour du manche du marteau et suivant chacun des gestes de sa proie, il s'apprêta à bondir. Black remontait lentement le sentier, ralenti par la neige, jusqu'à sa cabane en tenant d'une main son fusil déchargé et de l'autre le lièvre par les oreilles. Il passa le seuil, posa le fusil près de l'entrée et le lapin dans l'évier de fortune qu'il s'était fabriqué dans un coin, avant de revenir fermer sa porte grande ouverte. Mais le coup de pied qu'il avait assené dans le panneau l'avait partiellement dégondé et il eut beau tirer dessus, il lui était désormais impossible de le fermer. Poussant un juron, il saisissait la porte à deux bras pour la replacer dans son logement, lorsqu'un mouvement dans sa vision périphérique attira son attention. Le système limbique de son cerveau réagit avant même qu'il en ait pris conscience et il plongea sur le sol, évitant de peu le marteau dirigé droit sur son crâne. La tête de l'outil frappa la cloison de sa cabane avec un bruit sinistre.

Sirius se redressa juste assez pour pouvoir se déplacer et agrippa d'une main l'encadrement de la porte pour se traîner à l'intérieur de la cabane. S'il atteignait son fusil et les cartouches avant que le marteau à nouveau ne s'abatt-

Il ne parvint jamais au bout de sa réflexion. Une véritable explosion semblait avoir retenti dans sa boîte crânienne et un flash blanc l'éblouit, comme s'il venait d'être frappé par la foudre. Il sentit sa bouche s'ouvrir mollement et l'un de ses bras était agité de spasmes. Il ne contrôlait plus rien, ni ses gestes, ni ses pensées, ni le flot de sang qui s'écoulait sur son front, ses yeux, son nez, jusque dans sa bouche.

Il releva de nouveau le marteau, faisant tourner l'outil dans sa main pour frapper cette fois avec la pointe et non la partie plate. Le métal s'enfonça de trois bons centimètres dans le crâne de Black avec un bruit d'œuf que l'on brise. Le marginal glissa sur le sol enneigé, les pieds tremblotants comme ceux d'un condamné à mort sur la chaise électrique. Son cerveau abîmé devait s'affoler, envoyant ses ultimes impulsions aux membres dans une dernière tentative désespérée de rester en vie. Trois, quatre, cinq, six coups se succédèrent, tous enfonçant un peu plus les os dans la matière grise. Deux coups supplémentaires firent exploser les yeux qui en avaient trop vu. Un coup la bouche qui aurait trop parlé. Des filets de sang et autres fluides s'écoulaient par ses oreilles qui en avaient trop entendu. En quelques minutes, le visage et le crâne de Sirius Black n'étaient plus qu'un amas informe, une bouillie de chair et d'éclats d'os mêlés, parsemée ça et là de dents pourries par une hygiène douteuse et de cheveux poisseux.

Il se redressa, cherchant à reprendre sa respiration mise à mal par l'effort physique, par le froid qui attaquait ses poumons via sa bouche grande ouverte, et admira son œuvre. Contrairement à Lavande Brown, à Ron Weasley ou à Harry Potter, Sirius Black n'avait pas été une menace à proprement parler pour Hermione, à l'instar du malheureux professeur Binns qu'il avait envoyé à l'hôpital quelques mois plus tôt. Ils étaient des victimes collatérales. Nécessaires. Pour atteindre son but.

Il n'avait pas tué le vieux Binns par respect pour son grand âge et parce que personne ne ferait le lien entre lui et une banale agression sur personne âgée. Mais Black l'avait démasqué. Il n'avait pas besoin qu'un type comme lui l'identifie. Et la planète n'avait quant à elle pas besoin de ce genre de parasites, qui touchait des allocations à n'en plus finir, vivait de petits larcins et profitait des honnêtes gens. En un sens, il s'était rendu service, à lui ainsi qu'à la communauté toute entière.

Il considéra encore longuement le visage méconnaissable de Black, puis se pencha pour essuyer méthodiquement l'intégralité du marteau sur un pan du pull-over crasseux que portait le défunt. Il laissa tomber le marteau dans la neige. Toujours laisser l'arme du crime sur place. En revanche, il n'était pas interdit d'emporter un petit souvenir. Quelque chose de symbolique…

Sortant un canif de sa poche, il se pencha sur la bouillie qui avait été le crâne de Sirius Black et se mit au travail.

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