-Tu es allé manger des gâteaux avec Hadès ? S'exclama de manière hystérique Hyôga.

Seiya plaqua son oreiller sur le visage, espérant ainsi atténuer le son, mais peine perdue.

-Promis, je te rapporterai une coupe de glace, marmonna-t-il.

Le cygne continua de hurler son mécontentement, sous le regard blasé des convalescents. Shun posa ses cartes avec un sourire victorieux.

-Encore gagné ! Passez les cailloux !

Grognant, Rune, Kanon et Myû payèrent le plus jeune.

-Mais c'est un véritable démon du jeu, geignit Kanon. Je vais finir par croire que tu triches !

Il n'obtint qu'un sourire moqueur alors que les cartes étaient redistribuées.

-Vous croyez que Hyôga cherche à tuer Seiya juste avec ses cordes vocales ?

-En tout cas, il a de la voix ! Ricana Kanon.

Rune émettait des bouffées violentes de cosmos. Il voulait du silence, du calme ! Et si il pouvait gagner, aussi, ça le détendrait sûrement...

Excédé, Mü assomma Hyôga de sa béquille pour le contraindre au silence, ce qui fit soupirer d'aise tout un chacun.

-J'avais oublié à quel point il pouvait monter dans les aigus, marmonna Seiya en se frottant les oreilles. Merci chevalier.

-Ce fut un plaisir, ricana-t-il.

Il claudiqua jusqu'à la couche du Sagittaire qui l'accueillit d'un sourire.

-Chevalier Pégase ! Chevalier Pégase !

La spectre menue arrivait en courant auprès de son appelé. Elle souffla plusieurs fois avant de lâcher son message.

-Maître Hadès demande à vous voir ! Il espère que vous êtes en meilleure condition que la fois précédente et vous attends au même endroit ! Pépia-t-elle.

Elle sautillait sur place, les yeux brillants, ce qui fit sourire les chevaliers réveillés, et soupirer les spectres.

-Ah... Ah bon ? Eh bien, je ne vois pas pourquoi refuser...

-Ah ! Et avant de partir, j'aimerais vous demander un service. Voyez-vous, notre seigneur adore se gaver de sucreries, ainsi que de fruits des bois...

-J'avais cru remarquer, en effet.

-Si vous pouviez faire de sorte qu'il se... calme avec cette frénésie, ce serait un soulagement pour chacun d'entre nous.

Elle remarqua l'air interloqué du jeune homme et entreprit de développer.

-Notre roi est fragile du ventre. Lorsqu'il fait un peu trop bombance de ces gâteries, il doit tenir le lit. Il est insupportable dans ces moments-là ! Se plaignit-elle. Donc si nous pouvions éviter pareil ennui dans notre situation actuelle...

-J'y veillerai, promit Seiya en se levant.

Il sortit de la salle sous les remerciements de quelques spectres.


-Pourquoi est-ce que tout me revient ?

-Les sceaux ne sont pas éternels. Plus la personne qui les place est puissante, plus longtemps ils dureront. Tout est une question de temps.

Hadès se servit en jus de fruits, surveillant le chocolat qui fondait.

-Qui les a posés ? Vous ? Athéna ?

-Non. Mais je ne sais plus qui en a eut la charge. Peut-être ma sœur, ce qui expliquerait alors son dévouement envers vos âmes...

Il piqua une friandise d'un coup de bâton et le plongea dans le saladier.

-À moins que ça ne soit une décision de Zeus. Mais de là à pouvoir déterminer si ce fut une sagesse ou une folie, ce n'est pas à moi d'en juger.

Pour appuyer ses propos, Hadès secoua sa brochette chocolatée avant de mordre dedans.

-Est-ce que ça signifie que nous allons bientôt avoir nos mémoires à nouveau sous scellés ?

-Il y a de grandes chances pour que ça en soit le cas. En fait, il faudrait pour cela que la divinité responsable se faire connaître. L'avenir seul nous le dira. Parle-moi plutôt des flashs qui te reviennent... Tu veux bien ? Tu peux te servir, aussi...


C'était un endroit paisible. Une cascade se déversait dans un large bassin taillé par les ans dans la roche. L'herbe y poussait grasse et verte, douce et sucrée.

Ce lieu se trouvait être le point de détente d'un jeune homme à la beauté quasi divine. Il aimait s'y baigner et capter les rayons du soleil sur sa peau nue, loin de ses camarades et du Sanctuaire.

Voici d'ailleurs arriver l'habitué de ce coin qui se dévêtit sans pudeur. Ce refuge était suffisamment reculé de l'Homme pour qu'il n'en soit pas inquiété.

Il lui fallut rejoindre l'eau pure pour enfin se rendre compte de la présence d'un autre homme.

-Bonjour.

Surpris, il manqua de boire la tasse mais se ressaisit bien vite, observant l'intrus.

Le cheveu court et ébouriffé, noir de nuit, les yeux sombres et insondables, la peau pâle et les membres fins. Il était très bel homme, en convint-il.

-Je ne voulais pas troubler votre quiétude. Pardonnez mon intrusion.

-Reste, ordonna presque l'inconnu. Tu ne me déranges aucunement. Et de la compagnie rend la baignade plus agréable. À moins que ce ne soit toi qui aspire à la solitude ?

-Nullement. Je m'appelle Adonis.

-Enchanté.

Ils se turent afin de savourer la plénitude du moment. Mais si Adonis avait fermé les yeux, ce n'était pas le cas de son vis-à-vis qui le dévisageait sans trop d'insistance.

Il avait vraiment un physique divin, ses sœurs ne lui avaient pas mentis...

Les boucles châtains retombaient sur le visage fin, les paupières aux longs cils obstruaient les yeux noisettes. Il avait pu voir plus tôt à quel point le corps entier semblait avoir été sculpté par le meilleur des artisans, tout en muscles sans que ce n'en soit un excès, et une peau délicatement bronzée par le soleil grec.

Mais le temps passe et il faut bientôt se séparer.

Soupirant, l'intrus sortit de l'eau en premier et passa la main dans sa chevelure trempée. Il grogna lorsqu'il parvint à sa nuque.

-Un problème ? S'enquit Adonis.

-Mon petit-frère s'est amusé à me couper les cheveux, résultat j'ai beaucoup de mal à me faire à leur nouvelle courteur. Rien de bien grave, au fond.

Le châtain le fixa d'un regard pensif.

-Je n'arrive pas à vous imaginer avec des cheveux longs... Je crois bien avoir une préférence pour la coupe que vous avez maintenant.

Se stoppant dans ses gestes, il tourna un air interrogatif.

-Tu trouves ? Remarque, ça pourrait faire rager mon frère, ça...

Achevant son habillement, il le remercia avant de partir.

-Peut-être nous reverrons-nous, chevalier Pégase.


-Adonis a fait partie de la première génération des servants d'Athéna. À cette époque, il n'y avait pas encore cette histoire de réincarnation et les dieux foulaient la même terre que ses croyants. Mais lorsque cette religion à dieu unique est arrivée, il nous a bien fallu céder la place. Sans compter que nous commencions à nous affaiblir avec la disparition des prières à notre encontre.

-On peut ainsi tuer un dieu ?

-C'est un moyen complexe et long, mais oui, approuva Hadès d'un faible sourire.

Seiya sembla perdu dans ses pensées, suçotant sa cuillère.

-Pourquoi ? Tu comptes de nouveau attenter à mon éternité ? Demanda-t-il mi-moqueur mi-inquiet.

Il ne reçut qu'un roulement d'yeux qui lui donna presque envie de tirer la langue très puérilement.

-Je ne fais que me renseigner.

-Mais bien sûr, c'est ce qu'on dit ! Ricana-t-il légèrement.

Il enfourna sa brochette entière dans sa bouche avec un air de sale gamin qu faisait une bêtise en totale connaissance de chose.

-Tu n'es pas totalement remis de tes blessures, je me trompe ?

-Mais... mais...

-Et n'essaye pas de le cacher, ça fait une dizaine de minutes que ton cosmos s'est fait hiératique. Et je peux sentir d'ici le sang de tes plaies.

-Pas du tout !

Machinalement, il passa la main sur les bandages qui s'ensanglantaient petit à petit. De la mauvaise foi ? Non, pas du tout.

-Allez, viens, je t'accompagne.

Un peu gêné de cette promiscuité renforcée, Seiya n'osa pas regarder ailleurs que ses pieds.

-À quoi penses-tu, chevalier ? Encore des flashs ?

-Hein ? Euh non, pas du tout, je... je ne pensais à rien.

Bien que se souvenir du corps nu d'un dieu ennemi n'aidait pas beaucoup à la réflexion, les méninges de Seiya tournait à plein régime.

Elles étaient d'autres vies à lui bourdonner dans le crâne. Il pouvait accéder à la pensée la plus secrète de chacun de ses prédécesseurs (il a même été une fille, une fois), il avait connaissance du plus petit élément de leur vie. Leurs amis, leur famille, leur maître, leurs collègues.

Et Hadès. Hadès qui revenait. En visiteur ou en affaires. Déguisé ou l'identité à nue.

Toutes les premières rencontres où les premiers Pégase réapprenaient à le connaître, tous les rendez-vous partagés et les rencontres imprévues...

Hadès qui parlait, établissait des théories stupides, se faisait charmeur, se taisait, dormait, embrassait...

Parce que la Guerre Sainte n'était qu'une invention récente, créée par la folie des dieux pour qui le temps traînait lamentablement.

Parce qu'il y a eut un avant, ainsi qu'un après. Mais l'après n'était que sang, déception et mort, et que tout le monde le connaît.

L'avant, c'est le miel, le sucre. Une pomme d'amour, en somme.

-Vous avez bien dit que c'était votre sœur qui répartissait les âmes ?

-Tout à fait. Pourquoi ?

-Y avait-il une marge d'erreur ?

-Il pouvait y avoir jusqu'à deux erreurs d'âmes. Mais jamais comme aujourd'hui.

-Ah, d'accord... Dans quel camp ?

-Poséidon et Athéna, généralement. Elle ne s'entend pas trop avec eux, donc...

-Logique.

Leurs paroles se firent plus rares, à mesure qu'ils s'approchaient de leur but. Tous deux réfléchissaient. Seiya se passait en accéléré les souvenirs auxquels il pouvait accéder alors que Hadès pensait juste au repas qu'on lui préparait en cuisine. Chacun ses préoccupations, en somme.


Voracity666

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