Auteur : thegirlwiththeradishearrings

Traductrice : Hermi-kô


Le Plus Dur des Cœurs


Sauvage est la première pensée de Tywin en voyant le corps affamé d'Arya Stark qu'on tire contre son gré dans la salle du trône. Violente, pense-t-il tandis que le roc qu'elle a caché dans la paume de sa main ravage la figure du garde qui lui tord le bras dans le dos. Intelligente elle l'est : les braies et la tunique de garçon déguisent les attraits féminins de sa personne qu'on devine aux joues caves et à la poitrine naissante, très intelligente. Aiguisées sont ses dents, qu'elle enfonce dans les doigts de ses ravisseurs. Cruel est le regard dans ses yeux d'un gris de glace qui défie Cersei et sa cour. Rouge est la couleur de son sourire, du sang suintant de ses lèvres éclatées. Moqueur est la courbette qu'elle fait avec réluctance, et qu'elle ne fait qu'après avoir craché par terre et s'être fait tirer les cheveux. Familiarité est dans l'air autour d'elle et la fascination teinte le sang-froid qui le définit. Prédateur sont ses mouvements quand elle coule un regard au garçon sans pitié qui siège sur son trône, comme si elle se prépare à le tuer, imaginant son exécution avec une délectation et une précision sans noms.

Plus tard, il l'a fait mander à la Tour de la Main. Si elle est surprise de son geste l'expression est cachée, verrouillée derrière des portes fermées. Elle se tient devant lui dans une robe de coton gris trois tailles trop petite pour elle. On lui fait savoir qu'elle a refusé de porter quoi que ce soit d'autre que les habits d'une malle poussiéreuse amenée par son père il y a des années. Elle ne fait pas signe de vouloir s'asseoir et la Main n'en attend pas moins d'elle.

"Tu es intelligente," déclare-t-il pour commencer.

"Si je ne l'étais pas, je serai morte depuis longtemps." Elle ne s'embarrasse pas des formalités et ils savent tous les deux pourquoi elle est là.

Se mettant debout, Tywin pose la main sur la table et se met à scruter l'enfant. Le nez est le même, oui, bien que les épaules soient plus élancées cette fois et le cou plus long, ressemblant moins à une fille. Sa main prend doucement sa mâchoire entre ses doigts pour relever son visage et croiser son regard. Il veut être précis dans ses déductions.

"Mon lord de Lannister," elle raille, un rictus se peignant sur ses traits. "J'espérais que vous ne m'ayez pas oublié, j'ai grandi, vous voyez. Sansa m'a à peine reconnu, j'ai cru que vous aussi." Il sait de quoi elle parle. Des murmures de Harrenhal résonne dans sa tête et l'image de son échanson dépenaillé lui apparaît.

Déconcertant est la sensation dans son abdomen. "Nan, c'est ça ?"

"Nan est parti. C'est Arya maintenant."

"La rumeur voulait que la mort ait pris tous les Stark."

"Ay, certains. Robb et mon père peuvent témoigner." Ses lèvres se tordent de dégoût et d'un mouvement de la tête elle se libère de sa prise. Un tel acte de désobéissance se doit d'être puni chez une fille de plus basse naissance mais Tywin la prend pour un cas particulier aussi lui adresse-t-il simplement un regard froid. "Mais pas nous tous, mon lord."

Lord Tywin a toujours été bon à dresser les bêtes sauvages -ses enfants impertinents, les lions captifs des tréfonds de Casterly Rock, les chevaux turbulents- mais il n'essaiera pas de la maîtriser elle. L'apprendre peut-être, mais certaines bêtes resteront toujours ainsi, sauvages et féroces et non contenues. Ça lui va, pense Tywin. Tout ceux qu'Arya Stark a côtoyé ont essayé de la briser, de lui arracher ses griffes, de la rendre civile, mais ce n'est pas dans sa nature de plier ou d'être brisée, et Tywin n'oserait pas aller contre sa nature propre.