Severus Snape dans le monde Moldu ?

Severus Snape se promenait dans Londres.

Vêtu d'un costume sombre à la coupe parfaite, il allait tranquillement dans les rues, ne se préoccupant même pas des regards gourmands qui se baladaient sur lui. Alors qu'à Hogwarts il se complaisait à s'habiller d'une lourde robe noire de Potions et de badigeonner ses cheveux d'une solution très grasse pour les protéger, une fois dans le monde Moldu, il se laissait aller à prendre soin de son apparence et à faire tourner les têtes. Certes, son nez un peu long pouvait être considéré comme disgracieux mais ses nombreuses conquêtes s'accordaient à dire que tout son corps avait une harmonie certaine et donnait un charme sans pareil. Tout à son avantage, donc.

Il entra dans une petite maison et attendit patiemment que le maître des lieux vienne l'accueillir.

-Severus ! fit un homme dans la trentaine. Je ne t'attendais pas si tôt !

-J'ai pu me libérer, déclara simplement Severus.

Les deux hommes s'installèrent dans un bureau où un verre leur fut servi.

-Alors, Juan, comment va notre petite entreprise ? demanda Severus

Alors que le dénommé Juan allait de son compte-rendu, Severus plongea dans ses souvenirs.

Il venait à peine de sortir d'Hogwarts et déjà, Voldemort venait après lui. Il avait été séduit par ses belles paroles mais ses antécédents avec son père avaient bien ancré en lui que chaque chose demandait une contrepartie. Malheureusement, il ne l'avait compris que trop tard, en vérité trois jours après avoir pris la Marque des Ténèbres. Voir de ses propres yeux ses potions d'excellente qualité être perverties et utilisées pour torturer des Moldus, des Nés Moldus, des Sang Mêlés voire des Sang Pur avait de quoi dégoûter toute personne avec un minimum de sens moral. Dont Severus faisait partie. Aussitôt, il était allé voir Dumbledore et avait accepté de devenir espion pour lui. Pour le protéger, le vieil homme lui avait conseillé de ne pas cacher sa mission à son ancien maître. Ce qu'il avait fait et après quelques Doloris bien sentis, il s'en était sorti.

Mais Severus ne voulait dépendre de qui que ce soit. Il avait repris contact avec un ami à lui, Juan Locke, qui s'était exilé pour poursuivre ses études de Médicomagie. Son diplôme obtenu, ce dernier avait ouvert un cabinet en France et Severus s'était associé à lui pour lui fournir toutes les potions de soin qu'il fallait. Une fois la chute de Voldemort annoncée, le maître de Potions avait proposé au Médicomage un projet fou : ouvrir une clinique privée non loin de Londres. Peu de Sorciers en effet n'aimaient les manières rustres de St Mungo et s'ils en avaient les moyens, ils préfèreraient plutôt aller dans un endroit à leur écoute. Emballé, Juan avait accepté et depuis, la clinique Black Rose avait une réputation à faire pâlir tous les hôpitaux Sorciers. Devant la fuite des patients vers cet établissement d'un nouveau genre, St Mungo avait bien tenté de faire intervenir le Ministère pour le faire fermer mais Severus et Juan avaient bien fait les choses et de plus, Black Rose marchait sur des fonds privés, ce qui la rendait totalement hors de portée du Ministère. Même s'il avait pris le poste de professeur de Potions à l'école de sorcellerie, Severus gardait toujours un œil sur la clinique.

-J'ai un nouveau patient, fit soudain Juan. Un Moldu.

-Ah bon ? s'étonna Severus

Avec son père Moldu violent, il avait tout fait pour ne plus s'approcher d'eux. Pas qu'il haïsse les Moldus, seulement qu'il savait qu'il pouvait s'attendre au pire de leur part.

-Oui, répondit Juan. Un enfant, en fait. Il vient du Surrey.

-Qu'est-ce qu'il a de particulier ? interrogea Severus

-Ses parents ont été orientés par un collègue Cracmol, expliqua Juan. Je l'ai appelé et il m'a dit que c'était par pur hasard qu'il était tombé sur eux.

-Raconte, pressa Severus.

-Ils racontent que leur fils a toujours eu une petite queue en bas du dos, sourit Juan. Mais qu'inexplicablement, en une nuit, elle s'est mise à grandir pour devenir … une queue de rat.

-C'est possible ? demanda Severus

-La queue en bas du dos ? Oui, confirma Juan. Mais elle est enlevée quelques mois après la naissance chez les Moldus. Quant à chez nous, les rares fois où ça arrive, c'est supprimé tout de suite. Mais si tu parles de la transformation, c'est de la magie ou je ne m'y connais pas.

-Intentionnelle ? fit Severus

-Je ne crois pas, hésita Juan. C'est puissant et en même temps brouillon. Magie accidentelle, j'en suis quasiment sûr. Mais crois-moi, le gosse qui a fait ça est très puissant.

-Assez pour passer sous les détecteurs du Ministère ? sursauta Severus

L'homme s'était penché sur le mode de détection des Nés Moldus ou assimilés par le Ministère. Des capteurs magiques étaient disséminés à travers tout le pays et donnaient l'alerte quand un pic de magie était repéré. Sauf quand une source de magie était proche et dissimulait le lanceur. Dans ces cas-là, notamment aux alentours de Diagon Alley, des capteurs plus précis étaient posés.

-Il aurait dû les faire exploser, tu veux dire, sourit Juan. Ça fait deux jours que j'essaie de démanteler ce qu'il a fait. Et j'en viens à croire qu'il me faudrait son aide pour enlever ce qu'il a fait.

-C'est pour ça que je suis là, devina Severus.

-Tu es professeur dans une école, déclara Juan. Enfin, pas le plus pédagogue mais tu sais comment t'y prendre avec les enfants. Tu pourrais le convaincre d'inverser ce qu'il a fait.

-Et si je n'y arrive pas ? demanda Severus

-Alors tant pis, haussa des épaules Juan. Je ferais de la chirurgie Moldue.

-Donne-moi l'adresse du gosse, capitula Severus.

Lui aussi était intrigué. Peu d'enfants pouvaient contrer la puissance d'un Médicomage de la renommée de Juan. D'un geste de baguette, il changea ses habits en quelque chose de moins conventionnel puis transplana vers la gare la plus proche.

N'étant jamais allé dans le Surrey, Severus s'était rabattu sur les transports Moldus pour arriver à bon port. Tranquillement, il se promena dans les rues de Little Whining, la ville où habitait le petit garçon hospitalisé. Devant les regards suspicieux des habitants, il partit à leur rencontre et se présenta comme un futur habitant de la ville. Tout de suite, les regards se firent plus chaleureux et les langues se délièrent. Il en apprit bien plus qu'il ne voudrait sur les voisins. Mais les commères s'arrêtèrent toutes sur un évènement récent : l'hospitalisation d'un petit garçon.

-Vous voyez, fit la vieille femme, le petit Piers s'est fait attaquer par le délinquant de neveu des Dursley. Ses parents l'ont immédiatement emmené voir un médecin quand il s'est plaint d'un mal de dos. Et quand ils lui ont demandé qui lui avait fait ça, il a tout de suite désigné ce vaurien.

Severus, poliment, but une gorgée de thé.

-Je ne suis pas sûr de comprendre, hésita Severus.

-C'est vrai, vous n'êtes pas d'ici, sourit la femme. Ce vaurien s'en prend toujours à un groupe de garçons dont fait partie le petit Piers. Il leur vole leurs affaires, ou autres choses encore. Mais c'est la première fois qu'il frappe. Pourtant, il est largement plus petit que tous les autres. En fait, on ne croirait même pas qu'il a huit ans, il en fait moins que ça.

-Ce garçon devrait être puni … fit Severus.

-Oh, mais il va l'être, s'exclama la femme. Dursley compte bien le placer à St Brutus, le centre de redressement pour mineurs.

-Il y a donc une école par ici, fit Severus, voulant franchement changer de sujet.

-Vous avez des enfants ? s'enthousiasma la femme

-Non, je suis professeur, expliqua Severus.

-Bien sûr, fit la femme. Elle se trouve à quelques rues d'ici.

Après avoir obtenu les indications nécessaires, Severus prit congé de la commère et se rendit à l'école. C'était à son avis le seul moyen de savoir lequel d'entre eux était Sorcier, bien que son instinct lui disait de s'intéresser au neveu des Dursley.

Une fois devant la bâtisse, il se jeta un sort de Désillusion et entra à l'intérieur. Il se rendit directement dans le bureau du directeur, heureusement absent, et regarda les dossiers des enfants d'environ huit ans. Il trouva rapidement celui de Piers et vit que le directeur avait annoté les amis du petit garçon. Par curiosité, il regarda les dossiers et tomba sur celui de Dudley Dursley. Il grimaça en voyant la photo, il ressemblait vraiment à un cochon. Mais il se figea net en relevant le nom de sa mère.

Pétunia Dursley née Evans.

Se pouvait-il qu'il soit tombé sur la sœur de Lily ? Pour en avoir le cœur net, il continua à lire le dossier. Et il tomba des nues.

Point particulier : son cousin vit avec lui. Nom : Harrison James Potter.

Le souffle de Severus se coupa. Dumbledore n'aurait pas osé placer le Survivant dans une famille Moldue, qui plus est dans celle de Pétunia Evans, sa tante, qui haïssait tout ce qui appartenait à la magie, non ?

Avec précipitation, Severus s'empara du dossier du jeune Harry Potter. Et se figea.

Harry ne paraissait vraiment pas ses huit ans. On lui aurait donné six, tout au plus. Ses lunettes étaient visiblement cassées et rafistolées avec du ruban adhésif et il avait l'air malade. Severus pouvait concéder qu'il ressemblait beaucoup à James Potter. Mais alors qu'il s'était préparé à haïr le Survivant pour être le fils de James Potter, il vit de plein fouet qui était Harry Potter. Un orphelin qui ne savait pas qui était ses parents. Et cette haine factice s'estompa d'elle-même, remplacée par une inquiétude légitime pour le bien-être d'un enfant. Il passa directement aux notes du directeur.

Les parents de Dudley Dursley, les tuteurs d'Harry Potter, sont très clairs à son sujet : il serait un fainéant et ferait toujours des bêtises. Certains de ses camarades se sont souvent plaints de s'être fait volé des affaires et ils accusaient tous le jeune Potter. Ses devoirs seraient toujours bâclé selon ses professeurs mais il a des notes plus que correctes lors des contrôles et montre toujours un intérêt discret sur ce qui est fait en classe. Sa petite taille et ses airs malades ont tout de suite alertés ses professeurs mais Pétunia Dursley a déclaré qu'il serait de constitution faible. Mais elle n'a jamais autorisé qu'Harry soit examiné par un médecin ni que l'infirmière de l'école ait accès à son dossier médical. Il est toujours vêtu de vêtements trop grands pour lui mais encore une fois, Pétunia Dursley nous a dit que c'était ainsi que son neveu préférait s'habiller.

Severus nota que les dernières lignes étaient manuscrites.

Les professeurs successifs d'Harry Potter et de Dudley Dursley ainsi que moi-même nous pressentons qu'il se passe des choses pas très claires au 4 Privet Drive, là où les deux enfants vivent. Plusieurs fois, quand Mrs Dursley venait chercher son fils en voiture, le jeune Potter repartait à pied et seul. La différence de qualité des vêtements entre les deux cousins est flagrante et ayant moi-même des enfants, je sais qu'ils mettent toujours ce que les parents leur donnent de mettre. Le jeune Potter est quelqu'un de très craintif et calme, ce qui ne colle pas avec le caractère de délinquant dont se plaignent souvent les Dursley. Caractère qu'a totalement le jeune Dursley. Les plaintes contre le jeune Potter proviennent toutes de la bande de Dursley mais j'ai contre eux le triple provenant de tous les enfants de leur classe et des classes inférieures. L'ancien directeur est parti il y a deux ans après une dizaine d'années de bons et loyaux services car il avait trouvé un meilleur poste. La vérité, après que je sois allé lui parler, c'est qu'on l'avait remercié car il avait demandé à ce que les services sociaux enquêtent sur les Dursley. Quand ils ont appris cela, ils ont fait jouer leurs relations pour faire déclarer par l'enquêteur qu'il n'y avait rien d'anormal dans le foyer Dursley et ont fait renvoyer le directeur. C'est malheureux à dire mais s'il se passe effectivement quelque chose avec Harry Potter, nous sommes tous dans l'impossibilité de faire intervenir les organismes gouvernementaux.

Severus grogna. Les notes étaient vraiment alarmantes et connaissant Pétunia Evans, les soupçons de maltraitance sous-entendus pourraient bien être véridiques. Il fit une copie du dossier de Potter et, après mûres réflexions, celui de Dursley aussi, avant de rentrer chez lui. Il lut attentivement les deux dossiers avant de se décider à regarder de plus près ce fameux 4 Privet Drive.