Note de l'auteur : Histoire à chapitres (pour une fois).

Chapitre 1 :

Stiles était exténué.

Il avait du mal à retrouver son souffle, la main collée au niveau de son foie, la respiration haletante, le cœur battant à tout rompre — . Loin devant lui, le reste de la classe continuait la course dans un brouillard à couper au couteau. Le Coach, de très mauvaise humeur ce matin-là, avait décidé de remuer sa troupe dans les pires conditions météorologiques en ce mois de janvier. Le dernier match avait été une telle catastrophe qu'il avait juste envie de pendre chacun de ses joueurs — même Scott et Isaac, ces deux meilleurs élèves — par les pieds juste au-dessus d'un grand lac de magma en fusion. Il s'en fichait de savoir que trouver un tel lac était presque impossible, tout comme il lui était totalement impossible d'accepter son odieuse défaite face à une équipe dont la cote de popularité au sein de leur propre lycée frôlait le négatif. Tout était de la faute de McCall. Il s'était fait exclure du terrain pour faute. Stilinski l'avait remplacé et n'avait rien arrangé les histoires. Il était totalement incapable de courir dix mètres sans craquer. Isaac avait beau être rapide, cela n'avait pas suffi à sauver les meubles.

Maintenant, ils devaient tous courir au petit matin, dans une atmosphère humide et avec une visibilité réduite au minimum. Bien fait pour eux. S'il l'avait pu, le Coach leur aurait demandé de courir en portant des poids et en chantant en canon le discours de son film préféré.

Stiles se laissa tomber lourdement sur le sol, dos contre un arbre, relevant un genou contre sa poitrine, prenant appui avec son coude sur son genou avant de passer sa main sur son visage ruisselant de sueur.

Il savait pertinemment bien qu'il était le dernier de la course. De base, il n'avait aucune chance de gagner contre Scott et Isaac. Danny avait une excellente endurance et ce ne fut pas une surprise quand ce dernier dépassa allègrement Stiles.

Stiles n'avait aucune endurance à la course et alors ? Ses poumons avaient du mal à se remplir si vite, à amener tout cet oxygène dans chaque cellule de son corps. Son sang ne savait plus où aller : vers le cerveau si souvent sollicité par des discours incohérents ou vers les jambes pour tenter de survivre à cette course ?

Stiles avait toujours été nul en sport et cela n'allait pas en s'arrangeant. Scott avait l'avantage « loup-garou » ainsi qu'Isaac. Ce que l'hyperactif avait était un souffle court, des jambes couardes et des réflexes de moineau dyslexique. Oui, il était certain que même les oiseaux avaient ce genre de problème quand ils se mettaient à chanter au printemps.

Il rejeta la tête en arrière, les yeux fermés. Son cœur battait toujours à tout rompre dans sa poitrine ; sa respiration se calmait doucement. Il n'entendait rien. Il ne se préoccupait de rien, même pas de la course ou des sarcasmes du Coach sur le fait que Stiles avait un don à la course proportionnel à la capacité de Scott à se concentrer plus de deux minutes en classe quand Allison lui décrochait un sourire des plus magnifiques.

Stiles se sentait bien, assis contre cet arbre. L'envie de rester exactement à cet endroit toute la journée lui caressait l'esprit tandis que le brouillard se levait petit à petit. Il fera peut-être quinze fois le tour du terrain de Crosse quand ils reviendront à l'école. Ou il rangera le local où était entreposé le matériel de sport. Quoi que puisse être sa punition — s'il devait y avoir une —, Stiles ne s'en préoccupait pas. Il était bien.

Du moins, il l'avait été dix minutes. Dix petites minutes. Exactement, le temps qui s'était écoulé entre sa pause et l'arrivée en trombe du labrador-garou. Il laissa échapper un soupir d'exaspération avant de se lever en prenant appui sur le tronc d'arbre. À deux mètres de lui, Isaac ne paraissait absolument pas essoufflé — pourquoi le serait-il ? — le visage rempli de malice, un sourire au coin.

Stiles leva les yeux au ciel, ne prenant même pas la peine de lui adresser la parole avant de se mettre de nouveau en route vers le point d'arrivée de la course en marchant à son rythme. À hauteur de l'orphelin, l'hyperactif lui décocha un regard interrogateur. Pourquoi avait-il fait demi-tour exactement ? Isaac était certes un loup-garou, voire un connu étant extrêmement rapide. Tout de même, c'était étrange. Le Coach lui avait-il demandé de venir le chercher ? Non. La course devait à peine être terminée. Et encore, Stiles était certain que tous les participants — excepté lui bien sûr — n'étaient toujours pas arrivés.

« Quoi ? fit-il au loup-garou en levant un sourcil. Qu'est ce qu'il y a ? J'ai un truc sur le visage ? »

Comme toute réponse, Isaac éclata de rire avant d'attraper Stiles avec force et de le mettre sur son dos comme un paquet. Le fils du Shérif avait la tête en bas, les jambes se balançant dangereusement contre le torse de son ravisseur, le ventre écrasé sur son épaule droite.

« Lâche-moi ! Bon sang, Isaac, qu'est ce que tu fais ? s'écria Stiles, en donnant des coups de pieds, cherchant un moyen de se libérer. Ça va, je peux marcher ! Hé ! Tu m'entends ? »

Isaac resta silencieux. Il se mit à courir sans chercher à rendre l'expérience agréable pour son fardeau, le secouant dans tous les sens. Ce dernier donna des coups de poing dans le dos du loup-garou en alternance avec des coups de pieds. Il ne trouvait absolument pas cela drôle ; et le simple fait de forcer sur son ventre pour se relever suffisait à lui donner mal au cœur.

Qu'avait-il fait à l'univers pour avoir mérité d'être entouré de loups-garou obstinés et légèrement mutins ?

Après trente secondes de supplice, Stiles se sentit basculer en avant. Il chercha fébrilement quelque chose à quoi s'accrocher avant de tomber lourdement sur les fesses sous les rires hystériques de ses camarades de classe. Le Coach fit taire l'assemblée avant de s'approcher de l'adolescent qui se massait le derrière, soupçonnant fortement d'avoir le bassin cassé ; néanmoins, cela ne suffira pas à l'empêcher d'empailler Isaac et de faire une écharpe avec ses poils de stupide loup-garou. À ce propos, Scott riait aussi de bon cœur, appuyé sur l'épaule de Danny. Stiles ne pouvait pas le voir d'où il était. Ce n'était pas pour cela qu'il ne reconnaissait pas le rire de son meilleur ami depuis toujours.

« Maintenant que notre ami Stilinski a été retrouvé sain et sauf et que vous êtes rassurés sur son sort, non que je ne doutasse pas de sa parfaite santé, je vous propose de rebrousser chemin vers le terrain de Crosse. Que quelqu'un tienne le bras de Stilinski, je ne voudrais pas qu'il prenne deux heures à rentrer. Imaginez que dans ce brouillard se cache un tueur en série et qu'il décide pour ne raison ou pour une autre de s'en prendre à notre cher ami le traînard, ce serait bien problématique pour nous tous. Du moins, pour moi. Pour vous je ne sais pas. Après tout, depuis quelques mois, vous perdez des camarades à la pelle et personne n'a l'air de s'en préoccuper sauf quand on vous tend la carotte de monter vos notes si vous vous magnez le train pour les retrouver. Mais moi, vous savez, un élève de moins c'est une copie de moins. C'est une tête de moins à me souvenir. Une réunion de parents en moins à me taper pour expliquer aux géniteurs que je n'arriverais pas à faire de leur progéniture un génie vu qu'ils se sont mis à deux pour le faire et que je suis bien seul à corriger les défauts. Mais quand vous êtes sur le terrain, le travail d'équipe c'est primordial. Et si un de vos camarades, un de vos coéquipiers manque à l'appel, vous devez vous bouger les miches pour le chercher et le retrouver. Isaac nous a montré un bel esprit de confraternité dans ce groupe de minables que vous êtes. »

Le Coach désigna de la main le principal intéressé, qui lui répondit d'un hochement de tête approbateur, avant d'ordonner à toute sa troupe de moins que rien de se remettre à courir. Stiles lança un regard noir au loup-garou avant de se tourner vers son meilleur ami qui lui tendit la main pour l'aider à se relever. L'hyperactif fixa cette chose à cinq doigts avant de se lever, d'épousseter son pantalon de sport et d'éructer un tas de jurons sur son humiliation et le fait qu'Isaac l'avait promené comme un sac de patates. Ce dernier avait toujours ce sourire narquois — d'abruti, pensait plutôt Stiles — et observait le départ des autres élèves pour le retour à l'école.

Stiles était toujours d'humeur massacrante à la fin de la journée. Isaac avait raconté à tout le monde qu'il était parti le chercher, car il s'inquiétait de ne pas le voir arriver. Sauf que Danny avait précisé, que c'était en fait un pari entre plusieurs personnes. Certains avaient prétendu qu'il s'était perdu. D'autres qu'il avait eu un malaise. D'autres encore qu'il s'était fait attaquer par une bête féroce — limite, cela pouvait coller à la réalité. Un petit paquet avait émis l'hypothèse que Stiles s'était simplement enfui et qu'il avait décidé de sécher le cours de sport. Scott avait demandé à Isaac d'aller le chercher vu qu'il était plus rapide que lui et que le Coach n'avait pas semblé vouloir le quitter d'une semelle. Stiles n'avait pas d'endurance. C'était un fait connu. Si Isaac lui avait simplement demandé comment il allait, lui proposer de le soutenir, de courir doucement avec lui… mais non. C'était bien plus simple de se moquer du pauvre Stilinski.

Il aimait jouer à la Crosse. Il n'avait aucune envie de laisser tomber l'unique activité scolaire qu'il lui plaisait. Bon, il ne se retrouvait pas souvent sur le terrain, coltiné à chauffer le banc des remplaçants. Cependant, il encourageait ses coéquipiers — en espérant tout de même qu'un se fasse suffisamment mal pour être exclu du terrain et le remplacer. En fin de compte, il réparait les pots cassés, d'une certaine manière.

Stiles rentra chez lui en râlant contre le labrador-garou comme il aimait l'appeler. Isaac n'allait pas s'en sortir comme cela. Non, absolument pas. Stiles avait plus d'un tour dans son sac. Et surtout, il y avait l'Alpha de ce crétin d'orphelin de ses deux : Derek Hale, celui qui partageait son existence depuis un peu moins d'une semaine de manière plus étroite. Cela faisait juste cinq jours. Juste cinq petits jours. Mais cinq jours, c'était suffisant pour être bien rodé comme couple. Du moins, Stiles en était convaincu. Et même si Derek se contentait d'un sourcil levé comme réponse, l'hyperactif l'aurait prévenu à juste titre que s'il revoyait Isaac, il risquerait de le pendre par les pieds ou lui broyer de l'aconit tue-loup et de lui faire avaler au petit déjeuner à la petite cuillère.

Sur le réfrigérateur, Stiles trouva un mot de son père lui expliquant qu'il ne rentrerait pas avant minuit à cause du travail. Il lui avait laissé de l'argent sur la table au cas où l'adolescent voudrait manger en ville avec ses amis ou aller au cinéma. Le jeune homme laissa échapper un soupir d'exaspération avant de retirer la note, de la plier et de la mettre dans la poche de son pantalon. Stiles ne savait pas exactement pourquoi il gardait systématiquement chaque feuille, chaque note, chaque papier que lui laissait son père. Il les rassemblait dans une boîte en carton dans sa chambre, se trouvant en dessous de son lit. Il en avait parlé à Derek sans vraiment chercher une quelconque explication. Le loup-garou lui avait soufflé avec un sourire en coin que s'ils s'envoyaient des lettres et non pas des messages via téléphone, Stiles aurait sans aucun doute tout gardé et tout fourré dans une boîte quelque part dans sa chambre. L'adolescent s'était contenté de hausser les épaules.

Pour l'heure, qu'importaient les notes, les messages romantiques ou les lettres qui n'arriveraient pas : Isaac regrettera ce qu'il avait fait. On ne prenait pas Stiles pour un sac de patates impunément. C'était comme cela. Il ne savait pas encore ce qu'il allait faire exactement. Toutefois, il demandera l'avis de Derek plus pour la forme qu'autre chose.

Stiles envoya un message à Derek lui expliquant qu'il était chez lui — seul — et qu'il avait quelque chose d'important à lui dire et que cela ne pouvait pas se faire via un tel système de messagerie. L'Alpha lui répondit presque aussitôt qu'il se mettait en route et qu'il sera là dans une dizaine de minutes. Il ne semblait pas s'inquiéter de ce que Stiles avait à lui dire. C'était tout lui.

La vengeance était un plat qui se mangeait froid. Dans le cas de Stiles, plutôt glacial. Il se moquait bien des remarques du style : « C'est pas un peu exagéré comme réaction ? Il voulait te retrouver, c'était tout ! ». Ou encore des choses comme : « Imagine que tu aies fait un malaise, tu aurais été heureux que quelqu'un eût pensé à venir te chercher ! ». Tout ce qui voulait était de montrer à Isaac que malgré le fait qu'il ne fût pas loup-garou comme lui, Stiles méritait un tant soit peu de respect. Surtout si maintenant, il partageait la couche de son chef de meute.

Stiles et Derek n'avaient encore rien fait d'intime mis à part de s'embrasser — à peine langoureusement, il fallait le dire. Stiles n'arrivait pas encore à gérer ses émotions. Il restait figé sur place, les traits fermés à chaque fois que Derek essayait d'être tendre dans leur échange. Il avait pourtant envie de ces baisers, d'être dans les bras du loup-garou, d'enfouir sa tête dans le cou de ce dernier. Peut-être avait-il besoin d'un peu de temps pour se rendre compte que le ténébreux Derek Hale le considérait maintenant comme son petit-ami.

Tandis que son esprit vagabondait entre quelques idées de tortures pour méchant loup-garou Beta, Stiles se prépara un chocolat chaud. Il était en train de tourner sa cuillère dans le lait quand on sonna à la porte. Il ne prit pas la peine d'aller ouvrir, se contentant d'un simple « c'est ouvert ! » avant d'avaler une gorgée. Il entendit les pas discrets de l'Alpha se rapprocher alors qu'il laissa échapper un juron après s'être rendu compte que son chocolat chaud était un peu brûlant. Derek Hale enveloppa la taille de Stiles, qui lui tournait le dos, avant de déposer un baiser à la base du cou de l'adolescent, le faisait tressaillir des pieds à la tête.

« Pourquoi as-tu l'odeur d'Isaac sur toi ? s'enquit l'Alpha d'une voix rauque. »

Comme toute réponse, Stiles fit volte-face avant d'esquisser un sourire facétieux. Il effleura la joie de Derek du bout des doigts, scrutant son regard interrogateur.

« Il faut qu'on parle, murmura l'adolescent d'une voix qui se voulait presque dramatique. »

Fin du chapitre 1.