Me revoilà pour une petite suite, en fait. J'pensais pas en faire, mais j'ai besoin de pousser un peu plus les bases de leur relation pour continuer. C'est plus un épilogue.


Il était dix-neuf heures quand Makoto rentra chez lui après l'entraînement. Comme souvent depuis quelques jours, Haru avait préféré rester à la piscine plus longtemps, le laissant marcher seul le long du chemin du retour. Sans Haru, il avait tendance à ruminer ses inquiétudes, à propos de toutes sortes de choses, et lorsqu'il déposa ses affaires dans sa chambre, il était maussade. Il avait à peine adressé un sourire à sa famille, et il s'en voulait un peu pour ça. Ils n'y étaient pour rien. Sa mère cherchait à le soutenir par tous les moyens, mais devant son mutisme elle ne pouvait pas faire grand chose. Il lui assurait inlassablement que tout allait bien, pour ne pas l'inquiéter. Ren et Ran devaient bien sentir qu'il était moins disponible pour eux, parfois il n'était simplement pas d'humeur.

D'abord il s'inquiétait pour Haru, évidemment. Mais ce qui le préoccupait le plus était ce qui s'était passé avec Rin. Sur ce lit même où il était assis. Rin lui avait dit des choses qui l'avaient profondément touché. Ce n'était pas complètement surprenant de sa part, Rin savait être très gentil et très attentionné, Makoto n'en doutait pas une seconde, mais il avait été plus loin que ça. Et ils s'étaient embrassés. Ce n'était pas le genre de chose que l'on faisait entre amis. Et pourtant Rin était avant tout son ami. Un ami qu'il avait vu s'éloigner plusieurs fois, d'abord en Australie, puis à Samezuka. Mais malgré cela, leur lien n'avait jamais été entamé.

Lorsqu'ils étaient ensemble tout était facile, ils allaient au cinéma de temps en temps, buvaient des café après les cours, jouaient aux jeux vidéo chez l'un ou chez l'autre, se donnaient régulièrement des nouvelles par textos. Depuis que Rin avait retrouvé ses rêves, il était épanoui et son entrain était communicatif. Makoto aimait particulièrement l'entendre rire. Parfois ils sortaient avec les autres, Haru, Nagisa et Rei. Sousuke aussi. Mais dans ces moments-là, Rin n'était plus complètement à lui. Makoto s'effaçait et, bon prince, laissait les autres profiter du jeune homme, sans pouvoir s'empêcher d'être un peu contrarié. Quand Haru était là, la presque totalité de l'attention de Rin se concentrait sur lui. Il cherchait à le taquiner, à le provoquer, à le toucher en permanence. Avec Sousuke, ils avaient leurs propres jeux d'enfance, ajoutés à leur complicité de camarades de chambre. Même Nagisa ne lâchait pas Rin un instant lorsqu'ils étaient en groupe. Seul Rei restait un peu en retrait, toujours impressionné par le charisme de ce garçon qui avait longtemps fait partie de la vie de ses amis. C'était pour cela que Makoto préférait Rin lorsqu'ils étaient seuls tous les deux. Lorsqu'il était avec Makoto, Rin était un peu différent. Il était plus calme, son regard était plus doux, sa voix était plus posée, ses gestes étaient plus détendus. Makoto aimait beaucoup ce Rin là, aussi. Il pouvait à peine détacher ses yeux de lui. Il dégageait quelque chose de fascinant, et Makoto se sentait privilégié de compter parmi ses amis les plus proches. Mais jamais il n'aurait osé pensé que Rin voudrait un jour l'embrasser. Il s'était parfois surpris à admirer les lignes de ses muscles lorsqu'il nageait, mais il devait être loin d'être le seul. Rin s'était sculpté un corps parfait. Et en y repensant, Makoto appréciait énormément le contact de Rin. Lorsqu'il passait une main dans son dos pour le saluer, lorsqu'il ponctuait ses plaisanterie d'un petit coup de poing sur son épaule, ou plus rarement lorsqu'ils se prenaient dans les bras comme après le relais de l'année précédente. Rin était très tactile, il avait dû attraper ça en Australie, et Makoto n'aurait voulu qu'il perde cette habitude pour rien au monde. Il en était arrivé à espérer qu'ils se touchent. Alors oui, peut-être que Makoto était amoureux de Rin.

Il poussa un léger soupir. Allongé de côté sur son lit, il contemplait le mur de sa chambre d'un air perplexe. De toute façon, après le désir sourd qu'il avait senti monter en lui quand Rin l'avait embrassé, il ne pouvait plus douter de ses sentiments à son égard. Rin était son ami, mais plus seulement.
Fort de cette découverte, il prit son téléphone pour lui envoyer un message. Mais au moment de l'écrire, le courage lui manqua. Cela faisait presque une semaine qu'ils ne s'étaient pas revus depuis ce qui s'était passé dans sa chambre, après leur footing, et il n'osait pas faire le premier pas. Il se disait que Rin n'avait sans doute pas envie de le voir, sinon il l'aurait déjà appelé. Peut-être regrettait-il leur soudain rapprochement.

Alors qu'il étendait la main pour reposer son téléphone, la poitrine serrée, il reçut un SMS. C'était Rin. Son cœur s'emballa.

« Yo. Il faut qu'on se voie. T'as fini l'entraînement ? »

C'était bref, ambigu. Makoto répondit : « Oui. » Il voulut écrire autre chose, mais les mots ne venaient pas. Il finit par n'envoyer que ça.

La réponse de Rin ne se fit pas attendre : « Cool. Si t'as pas encore mangé, on peut aller se faire des ramens au restau vers chez toi. »

Makoto était troublé. Rin lui écrivait comme si de rien n'était.

« D'accord », répondit-il.

« Dans 20 min, ça te va ? »

« Oui. »

« Cool. Pas très loquace, mais efficace, ça me plaît. A tout à l'heure. »

Le jeune homme fronça les sourcils en encaissant la remarque. Troublé, il prit son sac et descendit au rez-de-chaussée. Dans la cuisine sa mère commençait à préparer le repas.

- Maman, je vais manger avec Rin, ça ne t'ennuie pas ?

Elle se tourna vers lui en s'essuyant les mains :

- Ah, non pas du tout, vas-y ! Mais ne rentre pas trop tard, tu as cours demain.

- Oui, ne t'inquiète pas.

- Je ne m'inquiète pas, rétorqua-t-elle en souriant d'un sourire qui ressemblait en tous points à celui de Makoto. Dis bonjour à Rin de ma part.

- D'accord. A tout à l'heure !

- Amuse-toi bien !

Il ferma la porte de la maison derrière lui et partit à pied. Le restaurant était à dix minutes de marche de chez lui. C'était un petit boui-boui qui ne payait pas de mine, mais le cuisinier n'était pas mauvais et il avait l'avantage de ne pas être très loin de Samezuka non plus, en train. Makoto attendit Rin moins longtemps qu'il ne l'avait imaginé. Ce dernier lui fit un signe de la main, un sourire détendu accroché aux lèvres.

- Oi ! Ca va ?

- Oui et toi ?

- Ouais.

- Tu as fait vite, remarqua Makoto.

Rin eut un sourire gêné :

- Ah oui. J'ai eu un train rapidement. Et puis je sais que tu manges plus tard que ça, alors j'étais déjà parti quand je t'ai envoyé le message. On va s'installer ?

Il lui prit le bras et l'entraîna à l'intérieur du restaurant. Ils s'assirent à l'une des rares tables qui s'ajoutaient aux places du bar. Après qu'ils eurent commandé, Makoto sentit le regard de Rin peser sur lui tandis que lui-même fixait ses baguettes avec attention.

- Makoto, quelque chose ne va pas ? Demanda le garçon d'une voix inquiète.

- Pourquoi tu dis ça ?

Rin sourit tendrement.

- Parce que tu as l'air bizarre. Et tu regardes ailleurs.

Le jeune homme prit la main de Makoto pour en retirer les baguettes avec lesquelles il jouait nerveusement et les posa sur la table. Puis il garda sa main dans la sienne. Makoto fixa leurs deux mains d'un air un peu ahuri.

- J'ai attendu que tu m'appelles, idiot, déclara Rin.

- Ah... ehm... moi aussi...

- C'est ce que j'ai fini par comprendre, oui.

Il lâcha doucement sa main pour fouiller dans son sac :

- Au fait, je t'ai ramené tes vêtements !

Il tendit à Makoto une pile de vêtement bien pliés qui sentaient bon la lessive. Le jeune homme la rangea soigneusement dans son sac. Rin et lui étaient tous les deux très attachés au rangement et à l'ordre, c'était un de leurs points communs.

Leurs ramens arrivèrent, et ils mangèrent en discutant de la semaine passée. De l'entraînement des deux équipes, de leurs familles, de leurs amis, des cours, de la fin de l'année qui approchait. Makoto expliqua à Rin qu'il hésitait encore (en fait, il attendait de savoir où iraient ses deux meilleurs amis) mais qu'il pensait demander une bonne université à Tokyo, puisqu'il avait de bonnes notes et de bons résultats au club de natation.

- Finalement tu ne restes pas dans le coin ?

- Je n'en vois pas trop l'intérêt.

- Cool. Tu t'en doutes, mais il y a de grandes chances que j'aille à Tokyo aussi. Je suis content.

Makoto contempla quelques secondes le beau sourire de Rin, en réalisant peu à peu qu'ils n'allaient pas se dire adieu à la fin de l'année. Il avait envie de le prendre dans ses bras.

- Et Haru ?

Makoto tressaillit. Le bref sentiment de sécurité qui l'avait envahi quelques secondes plutôt s'évanouit aussi vite qu'il était arrivé. Haru, c'était bien le centre de la plupart de ses soucis. Il baissa les yeux et expliqua la situation à Rin. Haru n'arrivait plus à nager comme avant, il semblait triste et préoccupé en permanence, ne rentrait plus avec lui le soir.

- J'ai essayé de l'appeler plusieurs fois, dit Rin d'une voix sombre, mais je ne me suis pas inquiété plus que ça. Tu le connais, il ne répond jamais. Je n'aime pas du tout ce que tu dis...

- Je ne sais plus quoi faire, Rin. Il me fait peur, Nagisa et Rei sont du même avis.

Voir Makoto triste était insupportable pour la plupart des gens, mais surtout pour Rin. Il posa avec grand bruit son bol de ramens vide sur la table et s'écria :

- On va trouver une solution ! Je vais y réfléchir, ne t'en fais pas. On va le sortir de là.

Makoto lui adressa un petit sourire reconnaissant. Il jeta un coup d'oeil à l'heure qui avançait beaucoup trop vite.

- Il va falloir que j'y aille, dit-il, j'ai promis à ma mère que je ne rentrerai pas trop tard.

- Okay !

Ils prirent leurs affaires et payèrent leur repas. Une fois dehors, l'air de la nuit les rafraîchit agréablement. Makoto raccompagna Rin à la station de train qui n'était pas très loin. Ils marchaient en silence, si près l'un de l'autre que leurs bras se frôlaient. Makoto ne pouvait s'empêcher de penser à leur étreinte de la semaine passée. Il avait été soulagé de voir que son amitié avec le garçon n'en avait pas souffert, qu'ils pouvaient continuer à se voir et à se parler comme avant. Mais il ne pouvait s'empêcher d'en vouloir un peu plus. Il lançait de temps en temps des regards timides à Rin, mais celui-ci ne semblait pas les voir. Avec Haru, il n'avait pas besoin de mots pour communiquer. Avec Rin c'était différent. Il allait devoir être plus explicite s'il voulait lui faire comprendre ce qu'il ressentait.

A une centaine de mètres de la station, Makoto s'arrêta brusquement. Rin continua encore quelques pas puis se retourna, un sourcil levé. Il était beau sous la lumière des réverbères. Makoto combla la distance qui les séparait et le prit dans ses bras, enfouissant son visage dans son cou. Il sentit les bras de Rin s'enrouler lentement autour de sa taille et renforça un peu leur étreinte.

- Makoto, soupira Rin à mi-voix.

Le jeune homme se contenta de sourire contre son épaule, puis il le repoussa un peu pour pouvoir l'embrasser. Rin ne sembla même pas surpris par son initiative, il se laissa complètement aller contre lui et lui rendit son baiser comme s'il avait attendu ce moment toute la soirée. Toute la semaine. Makoto sentait parfois les dents pointues de son ami contre sa langue, c'était assez bizarre mais pas désagréable. Cela donnait un goût très particulier aux baisers de Rin. Les mains de ce dernier s'accrochèrent à son T-shirt en haut de son dos, tandis qu'il laissait échapper un gémissement étouffé. Makoto frissonna en entendant la voix de Rin de cette façon. Il passa une main sous son T-shirt, caressa son ventre chaud, sentit la chair de poule naître sous ses doigts. Il lui fallut se faire violence pour rompre leur baiser et leur permettre de reprendre leur souffle. Il continuait cependant à serrer Rin contre lui, et le regardait, haletant, en caressant tendrement sa joue. Rin était aussi rouge que ses cheveux.

- Tu es adorable, murmura Makoto d'une voix plus grave que d'habitude.

Rin fit la moue et tenta de le repousser sans aucune conviction :

- Ne dis pas des choses pareilles.

Le jeune homme se contenta de sourire en appuyant son front contre celui de Rin.

- Je ne te pensais pas aussi entreprenant, chuchota Rin.

- Tu serais surpris, alors.

Les mains de Makoto repassèrent sous son T-shirt. Il l'embrassa dans le cou et derrière l'oreille, lui arrachant une sorte de ronronnement involontaire. Son odeur, sa chaleur, et la douceur de sa peau étaient envoûtantes, et Rin mit un certain temps avant de trouver la force nécessaire pour le repousser.

- Arrête, quelqu'un va nous voir...

- Viens chez moi...

- Makoto ! Il est tard, j'ai cours demain. Et avec toute ta famille à la maison ?

- Hm... Encore une minute.

Rin ne se fit pas prier. Il prit le visage de Makoto entre ses mains et joignit violemment leurs lèvres. Ce dernier recula de quelques pas pour s'éloigner de la lumière des réverbères, et s'arrêta lorsque son dos cogna contre un arbre. Rin pressa tout son corps contre le sien en grognant. Leurs langues se mêlaient sans aucune pudeur, ils avaient de plus en plus chaud. Rin avait l'impression que sa poitrine allait exploser, toucher Makoto de cette manière le rendait dingue. Lorsqu'il sentit les mains du garçon s'accrocher à sa ceinture, il crut qu'il allait perdre le contrôle. Mais l'odeur des arbres et la brise nocturne lui clarifièrent l'esprit, et il attrapa les deux mains de son ami pour les éloigner de son pantalon.

- Makoto... Je vais y aller, murmura-t-il sans lâcher ses mains.

Appuyé contre l'arbre dans la pénombre, sa longue silhouette légèrement courbée, Makoto offrait un spectacle fascinant. Ses grands yeux verts aux pupilles dilatées brûlaient de désir, sa mâchoire était crispée, son souffle court. Les muscles de son cou saillaient sous l'effort qu'il faisait pour ne pas arracher les vêtements de Rin. Il se mordit les lèvres, serra ses mains dans les siennes et lâcha d'une voix sourde :

- Alors vas-y.

Rin hocha la tête, le contempla encore quelques secondes pour graver cette image dans sa mémoire, puis s'éloigna rapidement vers la station de train, en essayant de calmer le désir lancinant qui palpitait en-dessous de sa ceinture.

Makoto le regarda partir en souriant, puis il rentra chez lui d'un pas lent, en admirant les lumières qui perçaient la nuit. A présent il en était sûr, il était amoureux de Rin.


Bon, il ne se passe pas grand chose dans les faits, mais ils fallait qu'ils clarifient leurs sentiments.