Je m'attaque donc pour la première fois à une fiction sur l'univers de Tolkien *frissonne* comment avoir la pression en une leçon ! J'espère que vous aimerez


L'immeuble est tranquille, vous avez un petit jardin intérieur, vue dessus, les voisins gentils, le quartier agréable. Vous verrez c'est très calme, parfait si vous travaillez à la maison.

Mes fesses, songe Bilbo Baggins en se rappelant les mots de son agent immobilier.

S'il était dans sa nature de faire des scandales – ce qui n'est pas le cas, notez le - il se serait plaint, voilà ! Qu'on se le dise. Bilbo Baggins aime le calme et cet immeuble n'est pas calme.

Bilbo fulmine et fait les cent pas dans son salon.

Son pc est allumé sur une page word vierge, des feuilles vaguement gribouillées encombrent son plan de travail et une tasse de thé intacte se trouve encore à côté de l'ordinateur. Pourtant l'écrivain n'est pas au travail.

Il ne cherche pas non plus l'inspiration.

Il regarde plutôt le plafond, de la fumée lui sortant des oreilles.

Depuis deux heures que ça dure, le boucan des Oakenshield ! Lui-même vit en ermite et sort peu de son appartement, mais à chaque fois qu'il sort la poubelle, prends le courrier...il tombe nez à nez avec cette tapageuse famille. Si, les deux jeunes neveux sont excusables – c'est de leur age -, que leur oncle, le chef de famille les laisse se livrer à un tel tapage... Ce n'est pas convenable !

Un nouveau cri, suivit d'un bruit sourd retentit sur l'appartement du dessus. Bilbo inspire à fond et se jeta sur sa porte d'entrée, les poings serrés. Cette fois, s'en est trop !

« -Je vais leur dire moi ! Je vais leur dire à cette famille de sauvages…. Monsieur Gandalf.

-Monsieur Baggins. »

Bilbo sourit aimablement, un rien crispé, bats des cils. Ah. L'aimable homme aux cheveux gris n'est pas ce à quoi il s'attendait en ouvrant sa porte d'un geste vengeur. Monter les escaliers quatre à quatre, tambouriner à la porte des Oakenshield, et leur dire leur quatre vérités sans les laisser l'interrompre, voilà son plan.

Tomber nez à nez avec son éditeur, dans un costume trois pièces gris sombre soigné et le cou enrubanné dans une écharpe...c'est un imprévu. Un petit accroc dans sa quête. Bilbo s'appuie sur la tranche de la porte qu'il ne lâche pas, faisant barrière entre son éditeur adoré et l'intérieur de l'appartement.

« -Je...Vous tombez mal, vous voyez, j'allais sortir.

-Oh pieds nus ? Vous allez attraper froid,

Faussement bonhomme, Gandalf tapote son écharpe en connaisseur.

« -... Oui, c'est..un nouveau style de vie. Pour mes recherches, pour mon livre, vous voyez. »

Cet homme Bilbo le connait, et il sait que derrière ses airs bonhommes et bons enfants se cachent un esprit fourbe et manipulateur, qui ne reculera devant rien pour obtenir ce qu'il veut. Son prochain livre.

« -Oh mais c'est fort bien, dites moi en plus. »

Silence embarrassé.

Bilbo envisage d'arracher les yeux du vieil homme on pourrait le croire gentil papy, gâteux, presque sénile derrière ses rides, mais que nenni : ce n'est même plus de l'intelligence qui brille dans ses prunelles bleus, c'est de la malice, de la ruse ! On lui donnerait le bon dieu sans confession, mais il faut s'en méfier de Gandalf !

« -Comment est-ce que vous avancez ?

-Très bien, très bien. Vous me connaissez, j'avance tranquillement, dans mon coin... Je n'aime pas montrer mes brouillons, quand je travaille... »

Lorsqu'il ment, il en fait trop. Quand il est embarrassé, il ne s'arrête plus de parler. Et de sourire. Plus il a envie de mettre un pain à son vis à vis, plus il sourit. C'est pathologique .Bilbo se connaît, mais il ne s'arrête ni de parler, ni de sourire, jusqu'au moment où Gandalf l'interrompt.

« -Puisque vous ne venez pas à moi, je viens à vous monsieur Baggins, laissez-moi entrer. Vous avez bien le temps de prendre un thé, de parler avec moi. Discuter aère les idées. »

Gandalf est un géant, il a un corps sec et fin, mais élancé et Bilbo ne fait pas le poids face à lui alors que l'homme lui tapote l'épaule, nonchalamment, sans cesser d'afficher ce fichu sourire inébranlable et lui passe sous le nez sans qu'il puisse s'interposer.

8 ans que Gandalf l'édite, 8 ans. En huit années, pas une seule fois l'écrivain n'a pas été capable de l'empêcher d'entrer et même de faire exactement ce qu'il a en tête.

«-Vous me servirez bien une tasse de thé, monsieur Baggins ?

-Evidemment. »

Bilbo pince les lèvres mais referme soigneusement la porte derrière lui, avant de se diriger vers la cuisine où il met l'eau à chauffer.

Il ne peut pas se plaindre, Gandalf lui fournit à point nommée et un moyen de se distraire de cette page blanche qui l'obsède depuis des jours, et une bonne excuse pour ne pas aller mettre les points sur les i chez les Oakenshield.

Non pas qu'il n'ait pas le courage d'aller leur parler. Ou qu'il manque d'inspiration, hein.

Aucun problème de ces côtés là.

Bilbo sort le service à thé et ouvre une boîte de gâteaux, pendant que Gandalf continue à parler depuis la pièce d'à côté.

« -La fumée ne vous dérange toujours pas, n'est-ce pas ? Bâlin , est-ce que vous connaissez Bâlin ? C'est un bibliothécaire, un vrai rat de bibliothèque, un bougre fort sympathique, il a de la famille dans cet immeuble d'ailleurs, si ma mémoire est bonne. En tous cas, nos rencontres sont toujours gâchées par son caractère intraitable, voyez-vous, il refuse que je fume la pipe dans son appartement. Il a peur qu'un incendie vienne ravager ses précieux ouvrages, aaah,

Bilbo pose précautionneusement le plateau sur la table basse, devant le fauteuil où Gandalf l'attends, sa pipe fumante à la main.

«-Allons, Monsieur Baggins, parlons de votre livre. Où en êtes-vous ?

-Oh, comme ci comme ça, vous voulez du sucre ? »

Ne m'obligez pas à vous renverser du thé brûlant pour vous obliger à changer de sujet Gandalf, je vous ébouillanterai s'il le faut, promettent les yeux de l'écrivain malgré son sourire.

« -Un sucre oui merci, avec un nuage de lait. Enfin, j'espère que votre retard provient d'une jolie demoisellle ? Ou un gentleman, je ne juge pas. »

Bilbo manque de recracher son thé.

« -Quoi ? Oh, oh non ! »

Il ouvre des yeux ronds comme des billes, quoi que, plaît-il, de quoi ce vieux fou parle-t-il encore ?

« -Une amourette, voilà ce qu'il vous faut. Vous êtes enfermés devant votre ordinateur toute la journée, sur quoi voulez-vous écrire ? Croyez moi mon expérience : rien ne vaut une aventure pour relancer la machine ! »

Gandalf mâchonne l'embout de bois de sa pipe et fixe Bilbo d'un air goguenard. Bilbo ouvre la bouche, la referme. L'amusement brille dans les prunelles de l'éditeur, mais il semble tout à fait sérieux. Ce n'est pas une blague. Mon diueu.

« - Un peu de frisson, d'excitation, vous êtes encore jeune, amusez-vous ! »

Voilà. La plante en pot. Restons fixé et concentré sur la plante en pot. Pas sur le sourire de vieux pervers de Monsieur Gandalf. L'écrivain sent pourtant le regard de ce vieux fou fixé sur lui.

Gandalf est du genre opiniâtre, il ne recule devant rien. Et une fois qu'il a une idée en tête...

Bilbo fonds intérieurement, il se liquéfie. Il sent les sous-entendus pervers arriver, les incitations à aller danser toute la nuit, à profiter de son corps et de celui des autres. Il va vomir, il va mourir, il va...

« -Je vais ouvrir. »

La sonnette de la porte de l'appartement résonne comme les cloches du paradis aux oreilles de Bilbo qui jaillit littéralement de son fauteuil pour courir ouvrir.

Fili et Kili. Les deux troublions de l'étage supérieur sont sur le pas de la porte de Bilbo, qui reste un instant béa et stupéfait. S'il s'attendait à ça. C'est quoi, la réunion des tourmenteurs de Bilbo Baggins ?

Avant qu'il ait eu le temps d'ouvrir (plus grand) la bouche ou de refermer la porte, Fili prends la parole d'un ton suppliant.

« -Notre oncle va bientôt rentrer, monsieur Baggins, mais nous avons besoin de votre aide, est-ce qu'on peut entrer cinq minutes ? Mon frère ne va pas bien du tout. »

Il tient Kili par la taille, ou plutôt exactement le supporte car le brun ne semble pas pouvoir tenir debout sans son aide. Effectivement, le cadet ne semble pas au mieux de sa forme : il tremble comme une feuille et affiche une tête de chiot assez pitoyable, alors que sa tignasse sombre et enveloppée dans une serviette éponge trempée.

« -Nope, vraiment, désolé, mais...j'ai de la visite, vous comprenez...

-Oh mais je m'en allais, je m'en allais, allez-y entrer... Le thé est encore chaud, cela vous fera du bien. »

Gandalf a un dernier sourire de vieux fou ravi avant de refermer la porte de l'appartement de Bilbo sur les trois hommes.