Chapitre 1

-Pousse toi !

Le garçon bouscula brutalement Allen qui fut projeté contre le mur le plus proche. Un clou qui dépassait le blessa légèrement à l'épaule mais il n'y prêta pas garde. En fait, il n'eut absolument aucune réaction, comme toujours. Son visage restait désespérément impassible, même si toute autre personne à sa place aurait insulté la personne qui l'avait poussé sans ménagement. Mais on s'habitue à tout, même à être considéré comme un moins que rien par l'ensemble de sa classe, non, du lycée.

Il poussa un immense soupir d'ennui et attrapa son sac de cours qui avait glissé. Il le jeta sur ses épaules et sortit à son tour de la pièce, car la sonnerie venait de sonner.

-Allen ?

Il se retourna.

-Qu'est-ce qu'il y a, monsieur Reever ?

Le professeur de physique était bien embêté. Il se gratta la tête et s'approcha du jeune garçon.

-Tu ne devrais pas te laisser faire comme ça... Je sais que les autres élèves ne te traitent pas bien mais...

-Et qu'est-ce que ça changerait que je me révolte ? Le coupa Allen. J'ai déjà essayé, mais ça n'a servi à rien... Au revoir professeur.

Allen ferma la porte derrière lui pour empêcher son professeur de le suivre.

-Je suis rentré !

Il n'attendait aucune réponse. Son tuteur devait encore être bourré et entouré de femmes vu l'heure qu'il était.

Allen alla poser son sac dans sa chambre et se rendit dans la cuisine pour grignoter quelque chose. Il mourrait de faim. Il n'avait rien mangé à midi à la cafétéria du lycée car on avait "malencontreusement" renversé le contenu de son assiette.

Il ouvrit le frigo mais n'y trouva rien susceptible de l'intéresser, c'est à dire deux bières et un pack de jus d'orange. Il soupira à nouveau. Il allait devoir aller faire les courses avant d'aller travailler.

-Allen...

Allen se rendit dans le salon, sachant très bien à quoi s'attendre.

Il trouva son tuteur nu comme un ver, entouré de femmes aussi dénudées que lui. Des bouteilles de bière vides jonchaient le sol crasseux et Allen se retint de vomir. L'odeur qui régnait dans la pièce était insupportable.

-Va me chercher une bière tu veux ? Grogna l'homme en essayant de se lever.

Il titubait et Allen eut presque pitié de lui. Car il avait passé ce stade depuis longtemps.

Il retourna à la cuisine et revint avec une bouteille qu'il balança sur le canapé avant de s'éloigner.

-Je vais au boulot...

Il enleva son uniforme rapidement et s'habilla pour aller travailler. Il se dépêchait le plus possible car il n'avait pas envie de traîner dans cette maison.

Il sortit en fermant derrière lui (son tuteur était trop ivre pour le faire) et s'engagea dans la rue.

Il vivait dans un des quartiers chauds de la ville, car c'était là que les loyers étaient le moins cher. Comme son tuteur ne travaillait pas, ou plus, c'était lui qui devait le faire afin d'avoir un toit et à manger, même si ce n'était pas évident. En plus, son lycée interdisait aux élèves d'avoir un petit boulot alors si il se faisait attraper, il serait renvoyé.

Il tourna au coin de la rue et fut happé par les lumières des casinos. Il était dans le quartier des jeux. Il avisa le plus grand d'entre eux, "L'arche de Noé", et entra par derrière. Un homme l'y attendait.

-Salut gamin... prêt à plumer les clients d'aujourd'hui ?

Allen sourit et enleva sa veste.

-Je suis toujours prêt pour ça, monsieur Mikk.

Il avait rencontré le propriétaire de ce casino tout à fait par hasard, un jour qu'il avait décidé d'aller jouer pour se faire un peu d'argent. Allen était un génie au poker et aux autres jeux de hasard. Ce soir là, il venait de finir son contrat et en attendant de trouver un nouveau travail, il avait décidé d'aller jouer.

Il avait gagné et tous les autres joueurs étaient partis. Allen avait presque réussi à faire faire faillite au casino en seulement quelques heures. Bien sûr, il trichait, mais personne n'avait de preuves contre lui.

Quelques heures après être arrivé, on lui tapa sur l'épaule. Il se retourna et se retrouva face à un gentilhomme qui semblait être de condition aisé. Il portait un chapeau haut de forme et un long manteau noir. Et comme Allen n'allait pas tarder à le découvrir, il était également d'une stupéfiante beauté que rien n'égalait à part son intelligence.

L'homme, nomme Tyki Mikk, était le propriétaire du casino et, voyant le talent de Allen, décida de passer un marché avec lui. Allen pouvait jouer gratuitement dans le casino, mais devait lui reverser 50 % de ses bénéfices du soir. En revanche, il pouvait garder le reste pour lui.

Allen s'étira, sous le regard ébahi des autres personnes qui l'entouraient.

-Quinte Flush Royale !

Les autre joueurs poussèrent leurs jetons dans sa direction. Allen leur fit un grand sourire.

-Désolé messieurs mesdames ! C'est la chance du débutant !

Il disait ça à chaque fois qu'il jouait contre de nouvelles personnes.

La disposition du casino l'y aidait : il était divisé en plusieurs étages eux-même divisés en pièces où se déroulait chaque partie. En plus, comme il était jeune, les joueurs n'hésitait pas à le défier. C'est comme ça qu'il arrivait à se faire beaucoup d'argent en une soirée, mais là encore, ça dépendait des mises des autres joueurs, c'est pourquoi il devait faire semblant d'avoir un mauvais jeu. Puis, quand il pensait que les autres participants ne pouvaient pas miser plus, il annonçait son jeu, et il pouvait voir le visage des joueurs se décomposer.

Et il adorait ça.

-C'est une très bonne soirée Allen, fit remarquer Tyki, les mains pleines de billets. Tu t'es surpassé aujourd'hui.

-Non pas vraiment, répondit Allen. C'est surtout que comme on est en début de mois, les gens dépensent plus aux jeux.

Tyki acquiesça. Il alla ranger les billets dans le coffre fort du casino et retourna vers son petit prodige.

-Bon et bien bonne nuit...

-Au revoir monsieur !

Allen se précipita dehors. Si il adorait jouer au poker, il aimait moins le fait de devoir le faire pour vivre, et encore moins l'atmosphère embrumée du casino.

Il avisa une supérette encore ouvert et y acheta de quoi manger pour ce soir et le lendemain matin. Puis il rentra chez lui.

Arrivé devant la porte, il glissa une grosse liasse de billet dans sa poche. Puis il déverrouilla l'entrée et se rendit directement dans le salon. Son tuteur s'y trouvait toujours mais il dormait. Et les femmes étaient parties.

Allen posa une partie de l'argent qu'il avait gagné sur la table à l'attention du l'ivrogne qui lui servait de tuteur et alla se préparer de quoi manger.

Tout en faisant chauffer de l'eau, il se demanda vaguement pourquoi il faisait tout ça pour lui. Alors que lui ne faisait rien. C'était à cause de son tuteur qu'il vivaient dans un taudis, alors que l'argent qu'il ramenait avait largement de quoi leur payer un appartement et un confort de vie normal. Mais voilà, Marian Cross buvait et son alcoolisme engloutissait les sommes astronomiques que Allen passait ses soirées à gagner. Le peu que le garçon gardait servait à payer la nourriture et le loyer. Et à se payer des vêtements quand il arrivait à en économiser un peu.

Allen avala rapidement son repas mais il avait encore faim. Tant pis, il avait sommeil et voulait se laver. Il avait transpiré au casino où il faisait toujours très chaud.

Il jeta sa vaisselle dans l'évier et alla dans la salle de bain. Arrivé là, il enleva son sweet qui dévoila une multitude de petite lacération sur son bras gauche, à tel point que celui-ci en paraissait rouge et monstrueux.

Allen passa nerveusement ses doigts dessus et alluma la douche. L'eau chaude lui picota le bras, là où les blessures étaient encore fraîches.

Simplement habillé d'une serviette et encombré de ses vêtements, il se rendit dans sa chambre, la seule pièce propre de l'appartement. Il s'allongea sur son lit et balança ses vêtements au hasard. Il les rangerait plus tard.

Il se relava et, appuyé sur un coude, il attrapa une petite lame qui traînait sur sa table de chevet. Puis il la posa sur la chair de son poignet gauche, encore vierge de blessure. Et il appuya.

Le sang rouge vif suinta immédiatement et coula sur son poignet, formant un bracelet sanglant. La douleur qu'il ressentit lui fit grincer les dents, mais l'immense sensation de soulagement qui suivit, quand les endorphines firent effet, le fit sourire.

Puis posa la lame sur la table de chevet et il s'endormit ainsi, comme tous les soirs.

-Dépêches toi, on va être en retard !

Kanda grogna. Il n'avait aucune envie de se lever de si bon matin. Mais son tuteur ne voulait pas lui laisser le choix. Surtout aujourd'hui.

Allen se laissa aller sur sa table, juste devant la porte. Comme ça, il pouvait partir le pus vite possible.

Les autres l'ignoraient, comme d'habitude, mais il s'en fichait royalement.

Le professeur entra dans la classe , ce qui était rare, car il était souvent en retard d'habitude. Or, la sonnerie n'avait pas encore retentit. Et en plus, il était suivi du directeur !

Komui Lee, le proviseur, s'éclaircit la gorge.

-Silence s'il vous plaît. Aujourd'hui est un jour spécial car nous recevons un nouvel élève qui nous vient du Japon. Il n'est pas habitué au système scolaire anglais, alors je vous demanderait d'être accueillant avec lui. C'est bien compris ?

Un grand murmure d'assentiment retentit. Komui acquiesça.

-Bien. Tu peux entrer.

Le silence était presque palpable tandis que la porte s'ouvrit. Le nouvel élève entra. Et toute la classe, Allen exclu, éclata de rire.

-Non mais vous avez vu ses cheveux !? S'exclama un des élèves, hilare.

-On dirait une fille ! Hurla un autre.

Komui tenta de faire régner l'ordre mais n'y parvint pas. Ce fut le nouvel élève qui le fit. Il attrapa les moqueurs par le col et grogna avec un fort accent japonais.

-Ferme la, où je te coupe en deux. Et c'est pareil pour tout le monde ici !

Puis il retourna devant le tableau.

-Je m'appelle Kanda.

Allen resta la bouche ouverte.