Disclaimer : la plupart des persos sont à Jk Rowlings (gloire à elle), mis à part deux trois persos qui devraient apparaitre ici et là.

Couple : HPDM (what else ?), HGRW

Warning : Un peu de gore ici et là, mais normalement rien de très fréquent (je reste un bisounours avant tout)

Pour qui : Pour SeanConneraille, lune de mes nuits et sauveuse de ma conjugaison. Pour Artoung, soleil de mes jours et source de motivation sans failles. Coupines exatraodinaires. Je vous nem.

Note : Ahem. Il est possible que j'ai quelques mois de retard, mais pour ma défense je ne m'attendais pas à ce que recommencer à écrire soit si dur (sérieusement, c'est une torture). Je ne sais pas s'il restera grand monde pour lire ce chapitre 2, mais à ceux ayant patienté j'espère qu'il ne vous décevra pas :D Je voudrais aussi tous vous remercier, pour tous les MPs de soutien et les reviews que j'ai reçus ces derniers mois. Vous êtes fantastiques ! Un remerciement tout spécial pour Pitchoune NausS, et ses reviews de la mort qui m'ont vraiment aidé dans mes moments de doute 3

« Plus contagieuse que la peste, la peur se communique en un clin d'oeil. »

Nikolaï Gogol La Faim du tigre (1966), Barjavel

Chapitre 2

Durant les trois mois que j'ai passés à essayer de survivre lors de l'Infection, j'ai eu l'honneur de rencontrer et le malheur de perdre de nombreuses personnes. Ce livre existe avant tout pour honorer leurs mémoires et toutes les façons dont ils m'ont sauvé, jour après jour.

Cependant, en plus d'un ensemble de souvenirs personnels, cet ouvrage a aussi pour but de rectifier un oubli trop souvent retrouvé dans nos manuels d'Histoire sorcière moderne. Nos historiens, bien que de bonne volonté, s'empressent de faire retomber le blâme sur les moldus, dénonçant la folie des grandeurs de leur science et son manque de contrôle. Ils en oublient trop facilement que le comportement de notre société a été le principal responsable de l'ampleur d'une tragédie qui aurait pu être contenue.

Pour les jeunes connaissant l'Angleterre actuelle, il peut être difficile d'imaginer que les années précédent l'Infection étaient des années glorieuses pour la sorcellerie anglaise. Nous étions les héritiers de deux guerres, et, malgré le poids écrasant du deuil, nous éprouvions tous en secret cette fierté des victimes sorties victorieuses d'un combat semblant perdu d'avance.

C'est malheureusement cette arrogance qui a été la cause de notre perte.

La culture moldue de cette génération avait à l'époque un goût prononcé pour toutes sortes de scenarii catastrophes. A cette époque, la « télévision » moldue était inondée de « films » de fin du monde : volcans, aliens, zombies ou monstres en tous genres. Cette omniprésence a permis à un grand nombre de moldus d'intégrer des réflexes de base, qu'ils en soient conscients ou non. Des réflexes parfois basiques, comme « Ne cherchez pas à vous approcher de ce qui cherche à vous dévorer » ou « si vos ennemis se basent principalement sur leur ouïe, évitez de faire du bruit ». D'autres, moins intuitifs mais tout aussi essentiels comme « les monstres ne sont pas toujours ceux que l'on croit ».

Les sorciers, au contraire, vivaient dans une période où la magie était souveraine, et peu d'entre eux furent capables d'appréhender qu'elle soit devenue un handicap fatal en l'espace de quelques heures.

Au final, quand les moldus se sont ajustés de leur mieux à une vie cachés dans l'ombre, se nourrissant de cannettes froides et faisant profil bas, les sorciers se sont fait dévorer aux quatre coins de l'Angleterre pour avoir essayé d'éclairer leurs abris d'un lumos.

Ce livre n'a d'aucune façon vocation à dépeindre mes contemporains comme des lâches ou des imbéciles. J'ai le plus grand respect pour les victimes de cette tragédie, et je reste persuadé que notre génération a compté un nombre incroyable de petits et grands héros sorciers.

Mais après des années d'une guerre magique, d'une guerre « propre », où la mort était silencieuse et accompagnée d'un simple flash émeraude, nous n'étions tout simplement pas capables d'envisager un combat avec du sang séché sous nos ongles, dans les entrailles, les os éclatés et un air à l'arrière-goût de métal.

La majorité des mathématiciens estiment désormais qu'il aura fallu neuf jours pour que quatre-vingt pour cent de notre génération ne vienne grossir les rangs des infectés. Le même pourcentage de moldus n'aura été atteint qu'après un mois, et n'aurait probablement jamais été atteint si le début de l'infection n'avait pas été aussi massif.

Alors avant d'apprendre à vos enfants la morale à tirer des erreurs du passé, n'oubliez pas d'être juste dans la répartition des fautes.

Car si les moldus ont bien commis l'erreur terrible de créer le virus à détruire le monde, les sorciers ont commis celle fatale de le sous-estimer. »

Préface de Survie, de Théobald Sangboat

ooOOoo

Derrière les rideaux du square Grimmaurd, la lumière fade progressivement au fur et à mesure de l'avancée de la journée, annonçant l'arrivée de la pluie. Aucun de ses habitants actuels n'y porte cependant la moindre attention, désensibilisés depuis leur enfance aux caprices du climat anglais.

Si les premières minutes suivant la découverte du message de Poudlard s'étaient réduites à un bourdonnement d'activités sans but, Hermione avait rapidement reprit les choses en mains avec la rigueur d'un chef militaire et un sourire soulagé.

Hermione règne pour le moment sur le premier étage, le vieux plancher grinçant sous ses pas affairés. Dans la cuisine, Harry rit doucement en jetant des coups d'œil furtifs au plafond, imaginant son amie créant des piles sans fin de vieux livres poussiéreux. Hermione, avec pour mission de sauver sa bibliothèque, se révélera sans aucun doute être la première personne capable de faire déborder un sac sans fond.

Harry s'est vu offrir la mission simple mais essentielle de trier les provisions du manoir. Ils emporteront tout ce qui pourra s'avérer utile pour Poudlard ou impérissable. La table déborde déjà d'épices en tous genres, de riz et de céréales, et de conserves moldues. Du bout des doigts, il joue avec une tablette de chocolat qu'il dépose sans hésiter sur la table. La tâche n'est pas des plus passionnantes, mais elle le distrait efficacement du brouillard d'angoisse qui le poursuit depuis des heures.

Harry s'apprête à vider l'un des derniers placards quand Malfoy entre dans la cuisine dans un tourbillon théâtral de cape. Il scanne la pièce du bout des yeux, sans daigner adresser un mot à Harry qui cache son sourire amusé dans le placard le plus proche.

Le regarde du blond s'éclaire subitement et il s'empare de l'une des vieilles poêles en fonte, héritage de la grand-mère d'Hermione. Harry croit reconnaître la poêle que Ron considère comme son ennemi numéro un et qu'il refuse catégoriquement d'approcher depuis un matin de juin, où un petit déjeuner à la moldue s'était terminé aux urgences de Sainte-Mangouste pour deux os du pied brisés et une brûlure au premier degré remontant jusqu'à mi-mollet. Malfoy semble beaucoup plus appréciateur du poids et de la balance du vieil objet si Harry en croit la façon dont il la fait siffler dans les airs avec un sourire satisfait. Le maintien de sa colonne vertébrale, le placement de ses jambes et l'angle parfait de son coude dénoncent le sang pur entrainé aux duels de démonstration, rendant le tableau d'autant plus hilarant. Harry se force à s'arracher du spectacle, sachant qu'un fou rire gâcherait toute la bonne volonté du Serpentard. Hermione l'a chargé de collecter des objets pouvant servir à se défendre s'ils devaient entrer de nouveau en contact avec des personnes contaminées. Malfoy prend apparemment son rôle très au sérieux.

« On a un problème ! » Annonce la voix de Ron depuis le salon.

« Décidément, rien n'échappe à Weasley » Commente Malfoy, levant les yeux au ciel.

Harry laisse échapper un rictus amusé avant de suivre la voix de son meilleur ami. Hermione descend l'escalier rapidement, ses pieds nus silencieux sur les marches et le front plissé par l'inquiétude.

« Ron ? » Le relance-t-elle immédiatement en les rejoignant, alertée.

Le ton angoissé de sa voix combiné au visage grave de Ron douche immédiatement l'étincelle d'amusement de Harry. Il s'arrête net, Malfoy rebondissant légèrement contre son dos avec un grommellement.

« Les balais ne volent pas » Explique Ron, sa peau pâlissant sous ses tâches de rousseur et l'air défait.

« Weasley, qu'est-ce que tu as fait à nos moyens de transport ? » Accuse aussitôt Malfoy, outré, par dessus l'épaule de Harry.

Du coin de l'œil Harry le surprend en train de brandir une passoire et il retient de justesse un éclat de rire hystérique. L'accumulation commence doucement mais surement à frayer ses nerfs.

« Je ne leur ai rien fait Malfoy. Ils ne volent juste pas » Répète –t-il d'une voix atone, visiblement trop secoué pour s'offenser.

« Le sortilège de confinement » Conclut finalement Hermione, pinçant l'arrête de son nez avec un air douloureux.

« Même les balais ? » S'étonne Harry.

« C'est l'un des sorts les plus complexes jamais créé Harry. La dernière fois qu'il a été utilisé dans l'Histoire, il a fallu plus de trente mages de haut niveau pour le tresser tout autour de l'Europe. Et son seul but est d'empêcher toute fuite vers l'extérieur. Crois-moi, avec tant d'années pour perfectionner les différents sorts le composant, le filet qu'ils ont dû projeter sur l'Angleterre doit être complément hermétique. Aucun moyen de transport permettant de sortir du territoire ne doit être opérationnel » Elle s'interrompt une seconde, hésitant à continuer. Quand elle reprend, sa voix est plus douce, désolée. « Si mes soupçons sont justes, les sorciers n'ont pas été les seuls affectés. Tous les moyens de transport moldus ont du s'arrêter au moment exact où le sort a été jeté. »

Harry la dévisage, horrifié. Les conséquences probables se heurtent dans sa tête et l'émotion lui serre la gorge.

« Mais… Les gens ont forcément essayé de fuir vers l'étranger avec leurs familles. Sans avion ou bateaux, ils se sont juste retrouvés coincés à la merci de l'infection » Il respire profondément, luttant contre les images que le regard triste d'Hermione conjure. « Comment peuvent-ils faire ça ? Pourquoi n'ont-ils pas essayé de nous aider ? »

« La catastrophe a dû être trop rapide. Et tu as bien vu l'efficacité de la magie sur eux… Même s'ils ont envoyé leurs troupes d'élite, elles ont sûrement été décimées. Sans possibilité de lutter, la seule solution est la même que pour une jambe gangrenée : l'amputation »

« Et les orteils de la jambe de cette délicieuse métaphore leur en sont tellement reconnaissants » Fait remarquer Malfoy, la voix dégoulinante de sarcasme.

Hermione secoue la tête mais ne répond pas. L'opinion de Malfoy est visiblement partagée par toutes les personnes présentes.

« Donc il nous reste quoi… marcher jusqu'en Ecosse ? » Demande finalement Harry après une minute de silence.

« Le plan s'annonce de moins en moins plaisant » Constate Ron sombrement.

« Nous pouvons tenter d'appeler le magicobus, mais j'ai assez peu d'espoir » Admet Hermione « Et si le sort de confinement est aussi précis que je le crains, les voitures moldues peuvent être tout aussi inutiles que nos balais »

« De toute façon, je ne pense pas que l'un d'entre nous soit capable de forcer une voiture. Sans compter que le seul à savoir vaguement conduire est Ron, et la dernière fois qu'il a touché un volant nous avons fini dans le Saule Cogneur » Fait remarquer Harry. Hermione incline la tête, concédant le point. Ron ouvre la bouche, vexé, mais ne trouve visiblement pas la motivation de se lancer dans une justification détaillée.

« Je tiens à dire que mes chaussures ne sont pas faites pour marcher. Encore moins un petit millier de kilomètres à travers la campagne » Malfoy jette un regard douloureux à ses chaussures en peau de dragon, innocemment rangées dans l'entrée.

« D'après la carte, il s'agit plutôt de 900km » Le corrige Hermione.

« Au temps pour moi. C'est beaucoup mieux » Ironise le blond avec un petit geste nonchalant de la main tenant la passoire. Hermione laisse échapper un sourire en coin, amusée malgré elle par les simagrées du sang pur.

« Je disais donc, 900km. En balais nous n'en aurions que pour un jour et demi. Dans le pire des cas, si nous ne pouvons pas trouver de moyen de transport nous devrions en avoir pour un mois, plus ou moins, en gardant un rythme raisonnable de marche » Calcule-t-elle distraitement.

Malfoy s'étranglant sur un couinement horrifié reflète assez justement l'état d'esprit de Harry. Un silence affligé s'installe.

« Ceci dit, juste pour voir Malfoy camper, est-ce que ça ne vaut pas le coup ? » Commente finalement Ron, l'air sérieux mais le regard espiègle. Harry et Hermione échangent un regard et un sourire affectueux.

Malfoy se hérisse comme un chat mouillé, plissant les yeux et fronçant le nez devant l'affront.

« Ton impatience à partager une tente avec moi pendant un mois me touche et m'horrifie Weasley » Réplique-t-il sèchement. Sa voix est cependant dépourvue du tranchant qu'ils connaissent si bien, caractéristique familière du Malfoy cherchant à humilier. Harry n'est pas étonné que Malfoy lui même soit conscient que Ron tente simplement de désamorcer une situation s'enlisant de plus en plus dans le tragique.

« Si nous devons marcher, beaucoup de choses vont devoir changer dans notre façon de nous organiser » Réfléchit Hermione à voix haute.

« Nous n'allons pas pouvoir prendre le sac sans fond » Réalise soudain Harry. Ils se tournent vers lui, avec différents degrés de curiosité « La base du plan était d'être hors de leur portée dans les airs, donc toute trace de magie était de toute façon sans importance particulière. Mais si nous devons nous déplacer discrètement, nous ne pourrons pas emporter un seul objet ensorcelé. De très nombreuses créatures magiques sont capables de traquer leur aura. Si je me fie à notre chance jusque là, je dirais que les probabilités sont contre nous » Développe-t-il devant leur silence confus.

Hermione se contente de répondre par un hochement de tête chagriné, mais Malfoy lui lance un regard suspicieux. Harry lève les yeux au ciel.

« Je suis un Auror, Malfoy, et je n'ai pas été engagé pour mes beaux yeux. Il m'est arrivé d'apprendre une chose ou deux » Grince-t-il.

« Pas uniquement en tout cas » Rectifie Ron avec un demi sourire. Il recule d'un pas en levant les mains au ciel devant le regard venimeux de son meilleur ami « Je ne fais que répéter ce que la gente féminine du Ministère murmure régulièrement. Et Kevin du secrétariat. Et Jones de l'équipe neuf. Et… »

Il finit par s'interrompre avec un couinement après que Harry lui ait planté son coude entre les côtes. Un instant la situation menace de dégénérer, sous l'œil affligé de Malfoy. La voix pensive et sérieuse de Hermione, ayant ignoré leurs enfantillages avec une facilité née de l'habitude, coupe court au débat.

« Je pense que Harry a raison. Il va falloir que nous nous débrouillions pour emporter le strict minimum, et uniquement des choses inertes magiquement parlant. Ne pas attirer l'attention sera notre but principal. »

« Nos baguettes ? » Demande aussitôt Malfoy à voix basse, effleurant du bout des doigts l'étui accroché à sa taille pour se réconforter.

Les quelques secondes précédant la réponse d'Hermione s'étirent comme une petite éternité.

« Les baguettes ne devraient pas les faire réagir. Elles ne présentent pas de magie intrinsèque, elles ne sont que des vecteurs pour la magie des sorciers. Entre les mains d'un moldu elles ne sont que des bouts de bois. Et d'après ce que nous avons vu au Ministère, il suffit d'arrêter de lancer des sorts pour qu'ils se désintéressent. Nous ne pourrons sûrement pas les utiliser, mais nous pouvons les emmener avec nous.»

Ils laissent échapper un soupir soulagé de façon presque synchronisée.

Hermione claque des mains, l'expression soudain déterminée.

« Il va falloir que nous revoyions complètement notre organisation. Nous devons être prêt à partir demain matin à l'aube au plus tard. Le temps joue contre nous. »

ooOOoo

Dans le hall d'entrée, ils se tiennent côte à côte en silence. La tension est presque palpable, paraissant tournoyer avec la poussière du tapis dans la lumière de la porte vitrée. Le cerveau de Harry semble enregistrer chaque miette d'information et l'amplifier de façon disproportionnée. Le froissement du tissu de la robe hors de prix de Malfoy frottant contre son épaule et la façon dont sa main dérive inconsciemment vers l'étui de sa baguette. La respiration profonde d'Hermione et ses paupières fermées durant de trop longues secondes. Les doigts de Ron enroulés sur la poignée de la porte, peau claire et ongles rongés contre la teinte dorée et patinée par l'usage du métal.

Ils ont tous conscience que, une fois les défenses du manoir passées, toute idée de sécurité disparaitra pour un temps indéterminé. Le corps de Harry semble se révolter contre l'idée même, ses muscles tétanisés et ses côtes se resserrant contre ses poumons comme si son torse était coincé dans un étau.

La logique voudrait que son adolescence l'ait armé pour affronter ce genre de situation. La réalité est malheureusement bien différente. Dans un recoin de son cerveau, Harry avait toujours considéré qu'ils avaient payé leur dette d'horreurs et que le reste de leurs vies serait par conséquent paisible et ordinaire. Le soulagement d'un homme ayant été frappé par la foudre et persuadé de n'avoir aucune possibilité de se faire électrocuter à nouveau.

Devoir replonger volontairement dans l'enfer de l'incertitude constante, de la peur rôdant derrière la toile d'une tente, le rend nauséeux et il monopolise toute sa volonté pour s'empêcher de proposer qu'ils restent terrés dans le manoir le plus longtemps possible, économisant les provisions et espérant que quelqu'un d'autre ne vienne les sauver pour une fois.

La main fine de Hermione se glisse délicatement dans la sienne. Leurs doigts s'entremêlent et la brune serre de toutes ses forces. Le métal de son alliance parait glacé contre la peau de Harry. La sensation est familière, rassurante, et il sent la panique relâcher progressivement son emprise. Il la remercie d'un simple sourire, crispé et tordu, qu'elle lui renvoie avec un peu plus de réussite.

La porte d'entrée s'ouvre avec un grincement, sans plus d'avertissement.

La lumière grisâtre baigne aussitôt le petit couloir et Ron s'avance, précautionneux. Le calme résigné qui engloutit Harry est un soulagement.

Il n'y a plus de choix maintenant. La seule solution est d'avancer.

oo

L'adrénaline due à sa crise de terreur courant toujours dans ses veines, Harry ne peut s'empêcher de trouver la sortie à l'extérieur du manoir plutôt décevante.

Il s'attendait à tout un panel de tableaux, allant des cadavres dans la rue aux immeubles en feu. La réalité se révèle nettement plus terne. La rue est totalement vide, sans trace d'un seul humain en vue, mort ou non. Absolument rien ne semble indiquer un quelconque danger autour d'eux, Londres se dévoilant d'un calme paresseux, sous un ciel grisâtre.

Chaque seconde qui passe renforce pourtant le sentiment de malaise de Harry, se vissant inexorablement entre ses côtes et gênant sa respiration.

« Le silence… » Murmure Malfoy près de lui et il reconnaît immédiatement la source de sa paranoïa.

Pas un bruit de moteur, pas un bruit de pas ou d'éclat de voix. La cacophonie constante de Londres, toile de fond sonore de leur jeunesse, a purement et simplement disparu. Il lui suffit d'en prendre conscience pour que le silence ne se mette à bourdonner dans ses oreilles, insistant et comme doté d'une vie propre.

Sous ce nouvel angle, la rue tranquille avec ses hautes façades, sa lumière terne et son calme irréel prend soudain des airs d'immense église. Des airs d'enterrement et de deuil.

Il se frotte la nuque distraitement, tentant de se débarrasser du frisson d'angoisse qui hérisse sa peau. Après de longues secondes à respirer profondément et à essayer de décrisper ses épaules, Harry décide de se faire violence et descend rejoindre Ron au bas des marches.

« Donc… le Nord de la ville ? » Vérifie-t-il inutilement, cherchant simplement à se rassurer avec le son de sa propre voix.

Hermione hoche la tête, les rejoignant en même temps que Malfoy avec un air sombre.

Ils se mettent en route sans un mot de plus.

La première demi-heure de leur voyage se révèle rapidement un exercice de sang froid. La ville en elle-même n'a pas tellement changé, rendant l'expérience complètement glaçante. Pas de trace d'incendies ou de cadavres sur les trottoirs. L'odeur même des rues est restée la même, celle de la fumée des voitures moldues mélangée à une fragrance plus métallique caractéristique des grandes villes. Seuls les objets sont les témoins d'une vie gelée instantanément.

Ici et là, des vitrines brisées et des boutiques au rideau fermé précipitamment. Sur la route, les véhicules moldus s'alignent anarchiquement, leurs propriétaires ayant essayé de s'escalader les uns les autres dans leur précipitation avant de les abandonner sur place. Au pied de l'une des tables en terrasse, un muffin est écrasé pitoyablement au sol, à moitié dévoré. Une tasse de café est restée parfaitement intacte, cuillère encore plongée dans le liquide refroidissant. Un peu plus loin un escarpin beige est resté piégé par une grille d'aération au sol. Sur le mur jaunâtre en face, deux empreintes ensanglantées, dessinant le contour flou de mains de tailles différentes.

Londres s'est transformée en ville fantôme, et Draco lutte contre l'envie d'avancer en fixant le sol pour ne plus voir tous ces indices discrets dessinant au fur et à mesure une situation de plus en plus tragique.

Leur petit groupe avance précautionneusement au milieu de ce décor figé, s'attendant à voir surgir quelqu'un de chaque porte ou de chaque allée sombre. Les mouvements fluides des Gryffondors malgré leur vigilance visible et leurs muscles visiblement prêts à réagir à la moindre menace lui fait ravaler un commentaire jaloux. Ils savent visiblement comment se déplacer sur un champ de bataille, et Draco se sent gauche et nerveux en comparaison. Le grincement presque imperceptible de ses chaussures de luxe paraît résonner entre les murs et lui donne envie de hurler de frustration.

« Où sont-ils ? Ils étaient censés être des milliers… » Siffle-t-il finalement à voix basse, ses doigts se crispant et décrispant sur le manche de sa poêle.

« Tu as raison Malfoy, attire le mauvais œil sur nous. Toute cette situation est bien trop simple pour que nous ayons la chance de notre côté en plus, il ne faut pas exagérer » Murmure Weasley avec un regard acide.

« Square Grimmaurd se situe dans le nord de Londres, nous sommes plus près de la périphérie que du centre » Les interrompt immédiatement Granger, la voix basse mais possédant ce ton professoral que Draco commence à reconnaître comme précédant l'arrivée d'informations précieuses. La facette je-sais-tout de Granger est bien plus attachante quand Draco se noie dans les questions sans réponses. « D'après ce que nous savons, il est probable qu'ils aient été attirés vers les zones de haute densité magique ou humaine. Le Chemin de Traverse est une cible évidente, tout comme Sainte-Mangouste. Tous les hôpitaux moldus doivent être des zones hautement contaminées, les blessés y étant rapatriés et contaminant toutes les personnes présentes. Enfin, les gares, aéroports et ports ont dû attirer les foules et donc une grande partie des contaminés. »

Granger ne prend même pas la peine de se retourner ou de ralentir, continuant d'observer les ruelles d'un regard suspicieux.

« Ou les immeubles autour de nous en grouillent et nous allons avoir une très mauvaise surprise sous peu » Propose placidement Potter depuis l'arrière de la file.

Granger hausse les épaules, signalant son ignorance, et le silence retombe, le sujet apparemment clos. Draco tente de contrôler sa furieuse envie de passer sa frustration sur Potter.

« Deux solutions à partir d'ici. Le trajet le plus évident et le plus court nous permettrait de sortir rapidement de Londres mais nous serons forcés de passer près du campus et d'un hôpital. L'autre solution nous fait faire un léger détour, en passant par Carlthorpe, mais dans des quartiers beaucoup moins peuplés. » Résume Granger vingt minutes plus tard, luttant légèrement pour maintenir une carte de Londres déployée contre la façade d'un immeuble. Un peu plus haut, un trou noirci entouré d'une corolle de peinture arraché ressemble affreusement à un impact d'une balle moldue. Draco se force à se concentrer sur l'impressionnant code couleur de Granger, dessinant des dizaines d'itinéraires différents serpentant à travers toute la Bretagne.

Il observe, surpris, Potter et Granger se tourner distraitement vers Weasley. Ce dernier examine une seconde la carte, les sourcils froncés, avant de secouer la tête.

« Je n'ai qu'une envie, mettre le plus de distance possible entre nous et Londres le plus rapidement possible, mais le détour est plus judicieux » Soupire-t-il, résigné, en se frottant le front du dos de la main. Granger hoche la tête avant de replier la carte rapidement, la replaçant avec soin dans le sac à dos effiloché qu'elle porte sur son dos.

Potter, sur leur gauche, intercepte l'expression vaguement étonnée de Draco.

« Les gens ont souvent tendance à sous-estimer Ron, mais il n'y a pas meilleur en stratégie. Premier apprenti Auror à faire un sans faute à son examen d'entrée en logique appliquée. Nous avons appris depuis longtemps à nous fier à ses décisions » Explique-t-il à voix basse.

Draco s'apprête à faire un commentaire moqueur quand un bruit sourd les fait tous sursauter.

« Qu'est-ce que c'était que ça ? » Gronde Potter, pivotant sur ses talons en scannant les alentours.

Comme en réponse à sa question, le son se répète immédiatement, une, deux, cinq fois, s'amplifiant rapidement. Malgré le battement affolé de son pouls, Draco pense reconnaître des coups portés sur une surface métallique et son regard se dirige vers le véhicule le plus imposant sur l'asphalte.

« L'ambulance » Indique Hermione au même moment.

En effet, encastrée dans l'un des lampadaires du trottoir d'en face, l'énorme ambulance moldue jaune fluo se démarque presque vulgairement dans l'atmosphère grisâtre. Les portes arrière, endommagées et pliées vers l'intérieur, sont condamnées par un lourd engin à deux roues à l'avant entièrement tordu par le choc. La scène est la définition même d'une collision brutale.

Draco s'extirpe de ses réflexions uniquement pour voir les trois Gryffondors se diriger vers le lieu de l'accident d'une démarche décidée. Il laisse échapper un petit mouvement de bras paniqué et impuissant.

« Est-ce que je peux savoir où vous allez comme ça ? » Demande-t-il d'une voix coupante, menaçant de déraper d'une octave. Courant à moitié, il parvient à attraper grossièrement Weasley par le dos de sa robe, l'empêchant physiquement de s'emparer de l'obstacle bloquant les portes. Ayant apparemment entendu la voix de Draco, les coups reprennent de plus belle, frénétiques. De si près, Draco peut désormais affirmer que le son correspond à des poings battant contre la porte en métal. La déduction ne le rassure en rien.

« Quelqu'un a besoin d'aide ! » S'offusque Weasley, lui retournant un regard immense et offusqué. Il se contorsionne pour se dégager, n'essayant cependant pas de faire usage de sa force.

« Et comment en êtes vous arrivés à cette certitude ? » Grince-t-il entre ses dents, refusant de relâcher sa prise.

« Quelqu'un est coincé Malfoy. Tu ne l'entends pas taper ? » Explique-t-il précautionneusement, jetant un regard vaguement inquiet vers ses amis. Comme si la personne présentant un comportement perturbant à l'instant même était Draco.

L'envie d'assommer Weasley d'un coup de poêle est brusquement tellement forte qu'elle en est presque physique.

« Quelque chose tape à la porte. Alors que nous sommes dans une ville ou apparemment plusieurs milliers de nos concitoyens veulent nous dévorer. Je réitère donc ma question : comment es-tu sûr que ce qui est dans cette ambulance a besoin de notre aide ? Et pas seulement d'un encas ? » Sa voix est lente, venimeuse.

Le silence bourdonne dans le groupe, la tension suffocante.

« A. L'aide. » Articule exagérément une voix masculine étouffée depuis l'arrière de l'ambulance. Si la situation ne s'apprêtait pas à tourner en tragédie à court terme, Draco aurait pris le temps d'admirer le talent avec lequel un ton de voix aussi neutre avait été imbibé d'autant de sarcasme.

Devant lui, Potter et Weasley indiquent la porte d'un même geste triomphant de la main. Draco soupire bruyamment et s'accorde une seconde pour se frotter les yeux du bout des doigts.

« D'accord. Je vous l'accorde. Ça parle. Ça peut toujours nous dévorer. Je vote mauvaise idée. »

Son dernier espoir réside dans l'idée de s'exprimer avec des simples et courtes pour aider les Gryffondors à comprendre la simplicité de la logique.

« Mais c'est une ambulance Malfoy ! Il pourrait être blessé ! » Commence à s'agacer Weasley. Tant de candeur chez ces Gryffondors, Draco ne sait s'il doit l'admirer ou en être écœuré. Leurs cœurs de guimauve risquant de lui couter la vie sous peu, il se sent beaucoup moins charitable et tend vers l'écœurement.

« Et même s'il est blessé ? Est-ce que l'un d'entre vous est secrètement un médicomage ? Qu'est-ce que nous allons pouvoir bien faire pour lui ? » S'obstine-t-il, jetant un coup d'œil en biais à Granger. Il ne serait pas étonné d'apprendre qu'elle a passé un diplôme de médicomage par correspondance sur son temps libre.

« Nous pourrions le poser en passant devant un hôpital ? » Propose distraitement Potter, occupé à analyser la façon dont les pans de métal se sont imbriqués les uns dans les autres. Il loupe le regard profondément consterné de Draco.

« Hôpital. Ces mêmes hôpitaux que Granger a suggéré remplis de personnes infectées ? Que nous avons choisi volontairement d'éviter i peine trois minutes ? » Il se tait de longues secondes, laissant tout le poids de son atterrement se faire sentir. « Mauvaise idée. Que dis-je. Atroce idée. Non. Stop. Non. »

Potter et Weasley se contentent de lever les yeux au ciel. Weasley lui échappe brusquement à l'aide d'un mouvement gracieux que Draco n'a pas le temps de comprendre, mélange sinueux entre une pirouette et un pas de danse. Il se débarrasse de son tisonnier en le déposant au sol, près de la tringle à rideaux choisie par Potter. Après un échange silencieux tout à base de haussements de sourcils et de coups d'œil appuyés, ils prennent naturellement une place des deux côtés de la carcasse du deux roues. Leurs mains se referment sur l'avant difforme et, quelque secondes plus tard, l'engin se déplace lourdement mais docilement, dans un crissement assourdissant de métal contre métal.

Weasley recule d'un pas, récupérant leurs armes à l'aveugle et se plaçant face à porte. Potter l'observe et attend son hochement de tête pour sauter sur le marchepied.

« Quoi que vous soyez, sachez que si vous vous sentez une quelconque envie d'homicide, nous avons un avocat armé jusqu'aux dents avec une poêle et nous n'hésiterons pas à nous en servir » Prévient Potter d'une voix plus moqueuse que réellement menaçante, renvoyant à Draco un regard criant « Satisfait ? ».

Malfoy rétracte tout ce qu'il a pu penser de la voix de l'ambulance. Face à Potter, elle n'est qu'un challenger dans la catégorie sarcasme. Draco soupèse en silence l'idée de lancer sa poêle à Potter malgré l'inconvénient de se retrouver ensuite désarmé face à un danger inconnu. Le risque semble justifié.

Ses pulsions de violence sont effacées par le gémissement torturé de gonds désaxés quand Potter s'arcboute de toutes ses forces pour séparer les pans torturés de tôle jaune vive. La porte se débloque brusquement, allant claquer contre les flancs du véhicule dans un bruit de fin du monde. Potter saute du marchepied sans se déséquilibrer et se rétablit gracieusement sur le bitume. Durant une seconde, Draco le hait de nouveau de toutes ses forces. Il recule prudemment, récupérant son arme des mains de Weasley à l'aveugle.

Les secondes suivantes s'étirent comme de la mélasse, la silhouette immense d'un homme chauve, aux traits bruts et à la peau sombre se dessine par l'ouverture de l'ambulance. Son uniforme froissé semble contenir avec difficulté des bras possédant une masse musculaire à peu près équivalente à celle contenue dans tout le corps de Weasley.

Les Gryffondors et leurs brillantes idées.

« Vous qui insistiez tellement pour le libérer, je vous laisse le privilège s'il est infecté. Ne me remerciez pas » Murmure Draco du coin des lèvres, sans détacher un instant ses yeux de la silhouette s'extirpant du véhicule en vacillant. L'homme les dévisage, clignant des yeux plusieurs fois pour se réhabituer à la luminosité extérieure avant de leur tendre un sourire timide. Il lève lentement les mains au ciel, les épaules basses. L'image est étrangement comique, faisant penser à un ours qui tenterait de toutes ses forces de prouver qu'il est inoffensif. Vaguement amusant, tout en restant terrifiant.

« Je m'appelle Geralt Sene. Merci beaucoup pour votre aide » Se présente-t-il paisiblement, prenant visiblement garde de conserver une attitude la moins menaçante possible. Draco ne doute pas un instant que l'homme ne fait ça que pour préserver leur ego. Arme contondante ou non, ils n'ont littéralement aucune chance de se défendre contre ce genre de force de la nature. Même armé de sa baguette, Draco ne l'engagerait pas en combat rapproché. Et il l'attaquerait probablement de dos. Dans son sommeil.

« Enchantée Geralt, je m'appelle Hermione. Voici Ron, Harry et Draco » Répond aussitôt Granger avec diplomatie. Draco remarque qu'elle n'en desserre pas moins sa prise sur le vieux parapluie en titane, cadeau d'anniversaire de l'excentrique Arthur Weasley.

L'homme hoche la tête et le silence retombe, tous se dévisageant sans un mot.

« Je vais donc poser les questions qui s'imposent » Soupire Potter «Etes-vous conscient de ce qu'il se passe ? Et est-ce qu'un individu quelconque vous aurait mordu dans ces dernières heures ? Vous sentez vous une envie même passagère de violence ? Mis à part envers Draco évidemment, c'est un effet qu'il provoque même chez les gens totalement sains. »

Draco lui lance un regard torve que Potter ignore royalement.

« J'étais seul dans l'ambulance quand l'accident a eu lieu. Nous avons été rappelés par la clinique, pour nous alerter de l'explosion du nombre d'appels d'urgence et aller aider les hôpitaux publics. Nous avons pris un croisement et l'instant d'après quelque chose nous a percutés à pleine vitesse. Je n'ai pas réussi à dégager les portes de l'intérieur. J'ai pu régler ma radio pour capter les fréquences d'urgence, et surveiller les alentours par la fenêtre. Avant votre arrivée, cela faisait des heures que je n'avais plus vu quelqu'un passer, qu'il soit sain ou…infecté » Explique-t-il d'une voix placide.

« Il y avait une fenêtre » Répète Draco, inspirant profondément pour conjurer plus de patience. Il se décale de deux pas et s'aperçoit qu'effectivement, une petite fenêtre se découpe sur le flanc du véhicule. La vitre est brisée, comme si quelqu'un avait tenté de l'utiliser pour s'échapper. Considérant la taille de l'ouverture et la largeur d'épaules du dénommé Geralt, Draco n'est pas étonné par l'échec de ce plan.

« Nous ne sommes pas des experts en structure de véhicules moldus » Répond seulement Potter avec un haussement d'épaules, conservant un sourire rassurant pour le nouvel arrivant.

« Si vous aviez pris ne serait-ce que dix secondes pour analyser la situation plutôt que de foncer têtes baissées, nous aurions peut-être eu une plus grande probabilité de l'apercevoir » Contrecarre Draco, irrité. Pouvoir exorciser les sentiments d'impuissance et d'horreur qui lui collent à la peau depuis des jours dans l'une de leurs familières joutes d'insultes lui paraît terriblement séduisante à l'instant.

Granger l'en empêche en posant simplement sa main sur son avant-bras, le contact léger et furtif mais apaisant.

« Nous ne pouvons pas rester sur place trop longtemps. Il faut que nous sortions de Londres avant la tombée de la nuit. Geralt, avez-vous quelque part où aller ? » Demande-t-elle simplement.

L'homme réfléchit quelques secondes avant de secouer la tête, l'air peiné.

« Vous pouvez me tutoyer » Sourit-il prudemment.

Granger lui retourne une version plus chaleureuse de son sourire, imitée par son mari. Potter se contente de l'observer avec curiosité.

« Le conducteur de l'ambulance ? » Laisse-t-il échapper, grimaçant presque immédiatement devant la stupidité de sa question. Si la personne n'a pas tenté d'ouvrir les portes de l'ambulance pour sauver son collègue, les pronostics s'annoncent plus que pessimistes.

Le visage de Geralt se tord douloureusement pendant une seconde avant de reprendre avec difficulté son expression stoïque.

« Conductrice » Le corrige-t-il d'une voix étonnement douce pour sa stature imposante. « Abby. Je n'ai pas pu voir grand chose, la fenêtre ne me permettait pas un immense champ de vision. Tout ce que je sais c'est que trois personnes se sont approchées en trébuchant de l'avant de l'ambulance et que, quelques minutes plus tard, quatre en sont reparties. Elle ne s'est jamais retournée. Abby se serait retournée. »

Potter ne répond pas, se contentant de hocher la tête lentement, son entière attitude exprimant la compassion. Weasley serre les poings, et Draco ne saurait dire s'il lutte contre un souvenir personnel ou contre l'envie de serrer dans ses bras la montagne humaine pour la réconforter. Draco ne connaît pas assez bien Weasley pour conclure, mais son intuition le fait pencher vers la seconde solution.

Durant une seconde, un bourgeon de protestation lui vient à l'esprit l'idée d'adopter sans autre question un parfait inconnu, d'apporter plus de possibilités de tensions dans un groupe déjà instable le sentiment que plus ils seront nombreux, plus ils feront une cible visible pour le danger grouillant dans la ville.

Il se secoue discrètement, cherchant à se débarrasser physiquement de l'idée. Les Gryffondors sont visiblement déjà énamourés du moldu, et ils sont viscéralement incapables d'abandonner qui que ce soit derrière. Draco se souvient du trio faisant demi-tour en balai dans la Salle sur Demande en flammes pour les sauver d'un sort de magie noire dont ils étaient eux-mêmes responsables.

Résigné, il se force à voir le bon côté des choses. Le moldu sera sûrement utile dans un voyage où la magie est totalement prohibée. Travaillant dans le domaine médical, ses connaissances peuvent s'avérer utiles, même s'il doute qu'il ne soit l'équivalent moldu réel d'un médicomage. Enfin, il semble capable de dévisser la tête d'un être humain à mains nues avec la facilité d'un homme ouvrant un pot d'encre.

« Si nous discutions en chemin ? » Propose-t-il finalement, donnant son accord implicite. Granger et Weasley se détournent légèrement, semblant vouloir dissimuler leurs airs amusés.

Potter ne se donne pas cette peine et se rapproche franchement de Draco, sa main se posant sur son épaule et serrant légèrement, reconnaissante. Il ne sourit pas ouvertement mais ses yeux pétillent derrière les lunettes fines.

« Laissez-moi juste récupérer tout ce qui pourrait nous servir dans l'ambulance. Les quelques médicaments que nous avons ici pourront nous être utiles, ainsi que les couvertures de survie. »

Geralt se glisse de nouveau dans le véhicule, les jantes endommagées grinçant sous le changement de poids.

« Je vais t'aider » Répond simplement Potter, relâchant sa prise sur Draco et suivant le nouveau membre de leur groupe.

Draco ferme les yeux et laisse échapper un soupir. La sensation d'impuissance l'étranglant depuis son réveil après le gala du Ministère s'attenue doucement devant la satisfaction d'avoir pris la bonne décision.

Au creux de son épaule, la chaleur de la paume de Potter semble persister, comme marquée au fer rouge à travers le tissu de sa robe.

Note de fin : Voila, la suite au prochain épisode (avant décembre je l'espère… motivée !). Merci à tout ceux qui prennent la patience de me suivre et de m'encourager 3