Edward m'abandonnait de nouveau. C'était le coup de grâce. L'ultime. La première fois avait été dans la forêt à Forks. Mais ce coup-ci, j'étais loin de l'avoir vu venir.
Mes oreilles bourdonnaient encore. Ce doit être ça l'état de choc, pensais-je dans un éclair de lucidité. Aro avait quitté la pièce, à la fin de notre petite entrevue. J'étais seule désormais dans la pièce. J'avais l'impression de n'être qu'une âme, une pensée, un fantôme à la dérive. Tout ceci était définitivement trop bizarre pour être réel, non ? En partant, Aro avait demandé une dénommée Gianna. Peu après, une jeune femme avait pénétré dans la pièce, écoutant attentivement ce que le vampire lui communiquait :
_ Tu dois la ramener à la Chambre. Avant qu'elle ne défaille.
Gianna, fameuse élue pour me raccompagner à ma « Chambre », tourna son regard vers moi. Il me semblait l'avoir déjà vue. Je fronçais des sourcils, à la recherchant du souvenir auquel s'accrochait l'impression de déjà-vu. C'était la veille. Je me souvins que cette femme était derrière un comptoir lustré à l'accueil, occupé à son poste de secrétaire… La veille, c'est-à-dire la dernière fois où Edward se tenait encore à mes côtés.
Gianna s'approcha de moi. Un air de défi mélangé à du dédain se dessinait sur ses traits.
_ Comment te sens-tu ? me demanda-t-elle d'une voix étonnamment attentive.
Elle se mit à ma hauteur. J'allais lui répondre aussi posément que possible que tout allait très bien. Pourquoi ça n'irait-il pas ? Je m'aperçus dès lors que je tremblais. Que la pièce donnait l'impression de tourner et de devenir floue. Des sanglots incontrôlables montèrent de ma poitrine, sans que je ne puisse rien y faire. Ma lamentable condition de garde-manger pour les Volturi s'imposait à moi, face à Gianna, humaine elle aussi, mais qui, elle, avait fais le choix de rester ici.
Gianna n'hésita pas une seconde. Une gifle claqua dans l'air. Un coup net et violent. J'en eus le souffle coupé.
Les yeux écarquillés, je l'observais me contempler. Malgré ma joue était douloureuse, son regard vrillait le mien. Aucune de nous deux ne baissait les yeux. Elle hocha la tête et sans plus attendre me prit par le bras pour littéralement me soulever de terre. Conduite hors de la pièce comme une vieille poupée de chiffon qu'on traînait derrière soi, je passais sous l'arcade - la seule ouverture de la pièce, dont je me souvins être gardée par deux vampires. Pourtant un bruit mouillé sous ma chaussure me m'arrêta. Ce bruit me réveilla en quelque sorte. Un réveil. Je me rendis tout à coup compte de ce qui m'entourait.
Une scène d'horreur s'étalait sous mes yeux.
Une odeur sale flottait dans le couloir. L'odeur de la mort, du rat crevé, et du sang. De larges traînées de liquide rouge remontaient le long des murs. Il y avait du sang, partout, au sol, sur les murs et même jusqu'entre les reliefs du plafond. On pouvait voir de petites bulles se former à la surface du sang, prêtes à éclater. Un carnage avait eu lieu ici... Sur le mur en face de moi, il y avait des traces de doigts sur le plâtre. Dans ma tête, j'entendis soudain des hurlements de femmes, à l'agonie. Une explication à cette scène incompréhensible s'introduisait lentement dans mon esprit et ne voulait pas en sortir : les quatre femmes qui m'avaient accompagné jusqu'ici, avaient été sauvagement tuées. Tuées par les deux vampires qui montaient la garde à l'entrée de la pièce. Ma nuque me picota. Mais pourquoi était-ce arrivé, ici et maintenant d'autant plus ?... Comment avais-je pu ne rien entendre ? Je répondis à cette question en me disant que sans doute, avais-je été trop préoccupée par la conversation d'Aro, pour faire attention à quoique ce soit d'autre. Aro. Et lui, avait-il entendu ?
« ton sang provoque sur ton passage l'affolement de tous les vampires ».
Mes yeux s'agrandirent d'effroi.
Tu ne devrais pas te plaindre idiote, me réprimanda une voix insidieuse. Si Aro n'avait pas été là, dans cette pièce avec toi. C'aurait dû être toi qu'ils auraient bouffé.
Je vacillais sur mes jambes.
Je saisis l'horreur de la chose. Que c'était parce que j'étais dans la pièce juste à côté, que j'étais passée dessous cette même entrée, que les vampires s'étaient jetées sur elles. Leur soif avait été tellement forte qu'ils s'étaient jetés sur la premiere chose venue, les quatres femmes, pour étancher leur soif et, s'empêcher ainsi de pénétrer à l'intérieur de la pièce où j'étais. Ils avaient voulu mon sang. L'envie a été si forte qu'ils l'avaient faits malgré le fait que leur Maître était dans la pièce juste derrière.
Mon sang se glaça. Rien ne les avait arrêté, si ce n'est la présence d'Aro dans la même pièce que moi. Elles étaient innocentes j'avais été la cause de la tuerie.
Sur ma gauche, Gianna s'était arrêtée net et affichait un air passablement contrit en me regardant. Je fermais les yeux, tâchant de calmer ma respiration. Tout à coup, en travers de cette scène figée, je saisis un bruit sourd au loin et qui se propageait le long du couloir. Des raclements sur le plancher. Comme si on traînait une masse sur le sol. Des corps.
Je n'ai pas cherché plus loin.
_ Je rentre, lançais-je à la volée pour Gianna, le cœur battant à tout rompre.
Je m'élançais à toute vitesse dans le couloir. Malgré les floc, floc sous mes chaussures, je filais en direction de l'escalier souterrain. J'ai dévalé la volée de marches. Cours, me soufflais-je à moi-même. Derrière moi j'entendais des pas. Quelqu'un courait après moi. Je me tournais pour voir qui me poursuivait. C'était la secrétaire. Elle qui m'avait giflée, il y a quelques instants.
J'accélérais le pas.
_ Attends-moi ! s'écria-t-elle d'une voix hachée tandis qu'elle dévalait les marches juste après moi.
Qu'allait dire Charlie ?
Une question qui m'est arrivée en pleine face, une fois en bas des marches. Sans prévenir, je pensais à mon père. Ma disparition - comment allait-il réagir ? J'accélérais le pas.
Parvenue dans les couloirs souterrains à un croisement, je me retournais vers Gianna ne sachant pas où me diriger dans le labyrinthe.
_ Par-là, me dit-elle en m'indiquant le couloir devant moi.
Je reconnus le froid et les pierres des couloirs. Gianna, la respiration sifflante, s'arrêta soudain en plein milieu du couloir. Elle appuya sa main sur le mur, et le dos courbé elle essaya de reprendre son souffle. Juste à côté d'une porte blindée.
La porte en acier chromé était imposante, fermement refermée sur ses gonds. Gianna se redressa et composa rapidement un code sur un petit cadran composé de chiffres, incrusté dans la porte en métal.
_ Attention. Si je rate le code, la porte se ferme à tout jamais, plaisanta-t-elle en me regardant toute souriante.
Je n'ai pas ri.
Elle secoua la tête, faisant voltiger ses cheveux.
Elle introduit son index dans une petite cavité dans la porte que je n'avais pas vu. On entendit un cliquetis et je vis Gianna grimacer. Elle retira son doigt, où une perle de sang perlait au bout du doigt.
_ Ca vérifie si c'est du sang humain, expliqua-t-elle. Si la machine se rend compte que c'est un sang de vampire, la porte se bloque... Les vampires n'ont pas le droit de pénétrer à l'intérieur, ajouta-t-elle avec un clin d'oeil.
J'ai soupiré de soulagement alors que la porte s'ouvrait vers nous. Je m'engouffrais dans la Chambre sécurisée. Je n'eus pas le temps de contempler l'intérieur de ce que j'appellerai désormais ma « Chambre » et me retournais vers Gianna. Celle-ci se tenait dans l'embrasure de la porte blindée. Les pierres froides du couloir pouvaient être aperçues derrière elle.
_ Alice a demandé à te voir, annonça-t-elle l'air de rien.
Gianna me regardait toujours dans l'embrasure de la porte, semblant attendre une réaction de ma part. Puis ce fût une décharge électrique d'angoisse qui me ramena à la réalité. Alice, ici ? Que faisait-elle ici, parmi les Volturi ?
Puis les souvenirs de la veille me revinrent brusquement en mémoire. Lorsqu'Edward avait annoncé à Aro qu'il refusait de me transformer en vampire au nom de mon âme, préférant à cela me livrer en aux Volturi, Alice s'était de suite proposée pour rejoindre les Volturi - à la condition qu'elle puisse me voir autant de fois qu'elle le voudrait. *
J'en restai bouche bée. Comme je ne répondais toujours pas, Gianna leva les yeux au ciel.
_ Dois-je lui dire que tu veuilles bien la recevoir ?
Cette question me fit froncer les sourcils, comme la réponse était tellement évidente. C'est alors que mon cerveau m'intima de réfléchir un peu quant à l'absurdité de la question. Je compris que je n'étais pas obligé de les revoir. Les Cullen. Après tout, même Alice était partie avec eux peu après mon anniversaire raté. Je m'en rendais compte maintenant, les Cullen me jetaient et me reprenaient au gré de leurs envies. Que devais-je dire face à ça ? Est-ce qu'il ne vaudrait mieux pas couper les ponts ? Même dans un endroit aussi sinistre, où Alice aurait constitué mon seul espoir, je préférais arrêter de jouer au petit chien qui accourait à ses Maîtres dès qu'il était appelé.
_ Non ça ira, répondis-je à Gianna. Je préfère attendre un peu avant de revoir les Cullen.
J'aperçus les cheveux de Gianna disparaître derrière la porte en acier, puis sa tête réapparut soudain dans l'ombre.
_ Tu sais…, me murmura-t-elle sur le ton d'une confidence, mais elle parut se raviser au dernier moment et me regarda soudain d'un air de défi... L'infirmière passera dans la soirée pour la prise de sang, acheva-t-elle.
Son regard était désormais résolument fixé sur la moquette et, elle referma la lourde porte. Elle produisit un son étouffé. Les systèmes de sécurité se réenclenchèrent à l'intérieur de la porte dans un bruit de métal.
Je me détournais doucement de la porte d'acier, me tournant vers l'intérieur de mon nouvel habitat. Je vis un grand tableau de femmes travaillant dans des champs, qui décorait le mur blanc d'en face. Je pris une inspiration… Ici, c'était l'endroit qui m'étais offert, pour que j'y reste confinée. C'était le lieu auquel les vampires n'avaient pas accès - à l'intérieur même de leur nid. Un des lieux les plus sûr mais aussi l'un des plus loin sous terre. Bref, une parfaite condition carcérale. Mais je ne devais pas en sortir, au risque de provoquer une émeute, plusieurs carnages, et finalement de me faire tuer moi-même. Leur piège était parfait. J'en concluais qu'il fallait rester cachée, ici, jusqu'à temps que j'ai trouvé une faille dans leur système pour qu'enfin je puisse sortir et m'enfuir de cet endroit monstrueux.
OOOOOOoOOOOO
N'ayant pas d'autre choix, je m'enfonçais à l'intérieur de la chambre sécurisé. J'ai commencé à enchaîner les couloirs sans trop savoir comment. Je découvrais les lieux d'un œil passif, étant donné que je détestais cet endroit, où l'on me retenait enfermée. Mon regard s'est malgré tout attardé sur les objets de décoration qui semblaient venir des temps anciens. Tout était nouveau pour moi. Je découvrais des choses que je n'avais jamais vu. Le décor était composé de meubles de style victorien, de chandeliers en bronze accrochés aux murs, de vases en porcelaine posés sur de lourdes colonnes de pierre, et de miroirs brillants, et de coffrets en ivoire, et de tapis pourpres… Il me semblait être entrée dans une nouvelle dimension - où tout respirait la richesse et le luxe. Si on m'avait dit que l'on allait m'enfermer dans le sous-sol des Volturi, jamais je n'aurai imaginé que c'aurait été dans un endroit aussi beau... J'aurai plutôt imaginé une sorte de cave humide, avec des barreaux et de lourdes chaînes accrochées dans un des murs. Pour l'instant, tout avait l'air correct. A vrai dire, mon œil s'imprégnait littéralement du tableau surréaliste qui m'entourait.
Durant la visite des lieux, il m'arriva de voir sur les murs des peintures, mais jamais je n'aperçus de fenêtre dans l'appartement. Il n'y avait absolument aucune fenêtre. Pas même de rideau qui pourrait en dissimuler.
Rien que des murs nus et plein. C'est normal, puisque nous sommes sous terre, pensais-je, … je suis à plusieurs kilomètres de la surface. L'idée me laissait un goût âcre dans la bouche. J'étais coincée. Coupée du reste du monde. Un peu comme dans un cercueil. Et moi, j'attendais de succomber dans cette boîte noire, boîte juste un peu plus dorée que les autres.
Dans ma contemplation d'un des couloirs, je n'entendis pas des pas se rapprocher. Trop concentrée que j'étais sur les murs de ma prison.
Une ombre noire grossit sans bruit sur le mur devant moi. Je retins ma respiration. L'ombre s'immobilisait.
Je fis volte-face.
La silhouette d'une brune s'élevait au centre du couloir. Je la reconnus de suite, je l'avais déjà vu la veille dans l'appartement. Des vêtements sombres et l'air blasé, on aurait pu la prendre pour une droguée, mais il y avait dans sa posture une sorte de défi… La jeune fille respirait l'insolence et la provocation par tous les pores de sa peau. Ses yeux bleus, encadrés par des mèches noires, étaient braqués sur moi. Deux yeux glacials qui donnaient l'impression de vous transpercer d'un seul regard. En cet instant, ils me scrutaient. Rehaussé par ses sourcils fins et son teint bronzé, son regard bleu acier créait une impression de magnétisme hypnotique.
_ Tu en as pour longtemps à mater les murs ? demanda-t-elle.
Je fus prise de court. Prise en flagrant délit et, déstabilisée par son étrange regard, je ne sus pas quoi répondre.
_ Heu… non, fis-je rapidement.
Elle me jaugea du regard, me détaillant des pieds à la tête comme si je n'étais qu'un vulgaire insecte. J'étais comme littéralement passée aux rayons X. Ayant soudain l'impression de passer pour une attardée mentale, je décidais d'engager la conversation, afin de changer de sujet.
_ Bon. Qu'est-ce qu'on fait ?
Elle me fit un signe de tête et m'invita à la suivre. D'une démarche féline, elle partit vers le bout du couloir. Ses cheveux sombres balayaient ses épaules et l'éclairage du plafond les faisaient resplendir, plus chatoyants que jamais. Elle se déplaçait sans bruit, comme une ombre.
Je devais même me dépêcher pour ne pas me laisser distancer. Elle n'était pas très grande mais se déplaçait rapidement.
Nous traversâmes plusieurs couloirs avant que la jeune fille n'entre dans l'une des pièces, après avoir poussé la porte entrouverte. Lorsque je pénétrais à mon tour dans la pièce, je fus à nouveau éblouie par la beauté des lieux. Les yeux écarquillés devant un tel espace, je m'arrêtais net. Les couleurs orientales se superposaient avec le vert luxuriant des plantes. Sur de petites marches au milieu de la pièce, quelques bougies étaient allumées. Ces dernières dessinaient de jolies ombres sur le parquet d'un brun foncé.
Je secouais la tête, tentant de reprendre mes esprits : Je suis censée haïr cet endroit !
En rouvrant les yeux, je vis la fille brune que je venais de suivre jusqu'ici s'en aller du côté des canapés - et dont je ne savais toujours pas le nom.
_ BELLA ! s'écria tout à coup quelqu'un.
Surprise, je me tournais vers la provenance du cri. Pour apercevoir une furie aux cheveux blonds ébouriffés foncer droit sur moi. Deux yeux ambrés en gros plan.
Je me suis arrêtée surplace, interloquée. Redoutant le moment où elle atteindre da cible – moi, en l'occurrence.
Lorsqu'elle arriva devant moi, je fus néanmoins rassurée de la voir ralentir sa course. C'était Coleen, la jeune blonde qui, le matin même, m'avait aidé à me préparer pour le rdv avec Aro.
_ Ha…, soupira-t-elle. Enfin, tu es là.
Je lui souris timidement en espérant la rassurer. Je n'eus pas le temps de réagir, que soudain elle se jeta sur moi et me pris dans ses bras. Devant une telle démonstration d'affection aussi inattendue, je m'immobilisais. Sa crinière blonde me chatouillait le visage. Puis la jeune fille s'éloigna légèrement de moi, une expression inquiète sur le visage.
_ J'ai eu peur, murmura-t-elle. Quand tu es partie, j'ai entendu des cris dans le couloir, derrière la porte d'entrée... J'ai tambouriné sur la porte, mais personne n'a voulu me laisser sortir.
Heureusement que personne ne t'a laissé sortir, songeais-je avec un frisson.
_ Qu'est-ce qui s'est passé ? questionna Coleen.
Je baissais le regard et, je ne sais pourquoi, me mis à contempler les lignes formées par le bois du parquet.
_ Le rendez-vous avec Aro s'est bien passé, soupirais-je doucement. Bien que ce qu'il m'a dit fût loin de me rassurer. Mais c'est quand je suis sortie de son bureau que je me suis rendue compte que les quatre femmes censées me raccompagner jusqu'ici, avait été tuées. On a du demandé à la secrétaire de l'accueil de me ramener ici.
Coleen émit un hoquet, surprise. Et elle fronça les sourcils.
_ Enfin, t'es là maintenant, c'est le principal.
Un petit rire s'éleva depuis les canapés. La voix ironique de la fille au regard glacé se fit entendre.
_ Tu croyais quoi ? Qu'elle allait faire comme Jenna ? lança-t-elle.
Coleen considéra la brune froidement.
Jenna, Jenna… Ca me dit quelque chose. Ce prénom ne m'était pas inconnu. Pourtant, je n'arrivais pas à mettre un visage sur ce nom. Avant que Coleen n'ait pu répliquer, je m'adressais directement à la jeune fille aux airs narquois.
_ Qui est Jenna ? interrogeais-je.
La jeune brune leva son regard vers moi. Aucune émotion ne transparaissait sur son visage. Le temps semblait s'être suspendu. Un silence était brusquement tombé sur la pièce.
Etonnée, je me tournais vers Coleen en signe d'interrogation. Elle prit une inspiration.
_ Si tu veux vraiment savoir, il y a encore trois semaines, nous étions trois filles, ici, dans la Chambre. Moi, Sonya et Jenna…
Tandis que Coleen poursuivait son discours, j'apprenais enfin le prénom de la mystérieuse brune. Elle s'appelle Sonya. … Attendez, une troisième fille était ici il y a encore trois semaines ? Mais où est-elle maintenant ?
_ Ca faisait deux ans que Jenna était ici, chez les Volturi. Un jour, elle en a eu marre de rester enfermée. Alors, elle a essayé de s'enfuir. Mais elle n'a pas réussi, elle s'est faite rattraper. Ils ont sucé son sang jusqu'à ce qu'elle meurt. Voilà fin de l'histoire.
_ Ca c'est la version officielle ! répliqua la brune.
Coleen la fusilla du regard.
J'allais demander à Coleen si ce qu'elle venait de raconter était faux. La version officielle de l'histoire, avait dit Sonya, sous-entendant par-là que celle raconté par Coleen n'était pas vraie. Qu'était-il arrivé à Jenna ? Pourquoi vaudrait-il mieux mentir ce ce qui lui était arrivé? … Qu'est-ce qui vaudrait la peine d'être caché puisque ce scénario était déjà assez horrible comme ça ? J'avais envie de poser la question à la jeune blonde qui bizarrement évitait de croiser mon regard. Mais comme si elle avait lu dans mes pensées, Coleen tourna son regard vers moi. Ses yeux ambrés étaient implorants.
L'inquiétude ayant fait place à la curiosité, je n'insistais pas. Certaines révélations doivent surement restées cachées.
Préférant ne pas plomber l'ambiance définitivement, je pris Coleen par le bras et lançais d'un ton enjoué :
_ On mange quand ? Je commence à avoir faim.
Nous nous dirigeâmes vers le coin aux canapés. J'aperçus Sonya assise sur un des sofa, les jambes allongées sur une table basse.
Coleen alla s'asseoir en face d'elle, visiblement soulagée de pouvoir passer à un autre sujet.
_ C'est ça le principe, ici, confia Coleen. Une fois qu'on entre à la Chambre, on crève toujours la dalle.
Sonya approuva ces paroles, d'un air désespéré… A bien y réfléchir, il me semblait que cela faisait bien une journée entière que je n'avais rien avalé.
Je m'assis dans un fauteuil devant la table basse, autour de laquelle nous étions réunies. Une odeur d'encens flottait dans la pièce. Et les couleurs orientales de la pièce me relaxèrent. La voix excitée de Coleen m'interrompit dans mes pensées.
_ En tout cas, ils vont être fous les Volturi une fois que t'auras commencé le régime. Tu vas devenir une star !
Je la regardais comme si une deuxième tête avait subitement poussé sur son corps.
_ Quel régime ? demandais-je d'un ton alarmé.
_ Oh, c'est juste un régime nutritionnel, répondit-elle calmement. On établit pour toi une alimentation équilibrée, pour améliorer la qualité de ton sang. Ce sont des experts en nutrition au service des Volturi qui travaillent dessus, je crois. Pour te donner un exemple, tout ce qui contient des graisses végétales, tu peux y dire adieu. Je ne te parle même pas du coca. Tout est méticuleusement réglé sur ton organisme, pour que ton sang soit pur, au possible, le rendre meilleur en goût, si tu veux.
Je secouais la tête. Jusqu'où les vampires étaient-ils capable d'aller dans leur connerie ?
Je n'eus pas le temps de faire savoir mes protestations sur le sujet. Qu'une musique douce se mit soudain à résonner depuis le plafond.
Surprise, je regardais les deux jeunes filles en face de moi, en signe d'interrogation.
La voix de la jeune blonde aux yeux caramel résuma la situation à elle seule :
_ C'est l'heure de la prise de sang !
Nous sommes sorties de la pièce, Coleen en tête. Apparemment toutes les deux connaissaient très bien les lieux, mais moi j'étais absolument perdue. L'appartement était très grand, il y avait énormément de pièces.
Après avoir déambulé de corridor en vestibule, de séjour en salon, et de salles à manger en salles à digérer, nous parvînmes dans une plus petite pièce. La musique Fly me to the moon se poursuivait en fond sonore - comme un hypnotique guidant ses victimes vers le piège final. C'était une pièce aux murs blancs, avec une moquette couleur beige et quelques fauteuils tout aussi clair. Une odeur d'antiseptique régnait en maître dans la pièce. Une infirmière se tenait au fond de la pièce, près d'un chariot surlequel était disposé divers outils.
Sans avoir besoin de se concerter, Coleen et Sonya allèrent chacune s'assoir dans un des fauteuils. Ceux-ci ressemblaient au fauteuil du dentiste lorsque l'on passe sur la table d'opération. J'allais m'installer dans l'un des d'eux, à la droite de Coleen.
Tandis que l'infirmière avançait son chariot directement vers moi, je me rendis compte que de nous trois, j'étais la plus proche de l'infirmière. Zut ! pensais-je. L'infirmière avait ses cheveux attachés, son regard était sérieux, elle ne souriait pas. On aurait plutôt dit qu'être ici était pour elle une corvée. En ni une ni deux, l'infirmière me posa un garrot élastique autour du bras. Je tâchais de ne pas m'agiter sur le fauteuil. Mais l'angoisse s'était emparée de moi. Elle se pencha sur mon bras pour trouver une veine. Je refermais mon poing comme pour comprimer la panique dans mon poing. L'infirmière hocha la tête, apparemment fermer le poing faisait ressortir la veine. Je dois le faire sinon, je suis morte... On me tuera. Les vampires ne demanderont que ça. C'est le prix de ma vie... Et, toi, Edward je vais te faire payer.
Puis elle planta une aiguille dans le bras, au creux du coude.
Beaucoup plus tard dans la soirée…
A l'intérieur des hautes sphères de la demeure souterraine des Volturi, il y avait une pièce très haute de plafond et où la tapisserie était magnifique.
Aro s'y tenait, debout, un verre à la main.
Aro était en proie à une sorte de tension. Il mobilisait toute son énergie pour se retenir. Tout son calme. En effet, le patron des vampires luttait comme un dingue. Pas une seule fois, il n'avait ressenti une telle attraction, si forte. Un tel besoin. Irrépressible.
Il avança vers les grandes portes du salon, qu'il repoussa de sa main libre.
Au centre de la pièce, il y avait un canapé drapé de soie couleur noir. Le canapé faisait face à la cheminée. Le canapé tournait le dos à Aro. On ne pouvait pas distinguer qui y était installé. Seules quelques mèches sombres et cuivrées dépassaient du dossier du canapé.
Aro s'avança dans la pièce. Il contourna le canapé.
Aro contempla Edward affalé dans le canapé. Le jeune homme était à coupé le souffle.
Le regard d'Edward perdu dans les flammes de la cheminée, vint en un éclair se poser sur la main d'Aro. Ou plutôt le verre qu'Aro tenait à la main.
La respiration du jeune homme s'accéléra.
_ Oh, souffla Aro tentateur. C'est différent cette fois, tu ne peux plus y échapper. L'envie est devenue trop pressante.
Edward contracta ses muscles. Le regard fixé sur le verre qu'Aro tenait à la main.
_ Et quoi de plus normal après tant d'années, poursuivit Aro.
Il posa doucement le verre sur la table basse près du canapé, où Edward était allongé. Aro reposa son regard sur Edward. Ce dernier fixait douloureusement le verre, non loin de lui, empli d'un liquide rouge miroitant.
_ C'est la première dose de son sang, chuchota Aro. C'est aussi la seule, personne n'y a encore goûté.
Aro repartit de là où il venait. Ses capes noires trainaient à peine sur le sol. Le vampire contourna le canapé.
_ Courage, Edward.
Il posa une main réconfortante sur l'épaule du garçon. Puis Aro s'éloigna vers les portes entrouvertes. A peine les avait-il refermées, qu'Aro saisit le glissement d'un verre sur une table qu'on ramenait vers soi.
… Puis un bruit de succion, assoiffé.
Aro s'éloigna sans bruit, avec un sourire en coin.
Vous aimez, vous n'aimez pas ?
J'aimerais connaitre votre avis.
Tchüss.