Bon bah les copains, v'là le dernier chapitre. Désolé du retard, c'est vrai que ça a pris pas mal de temps, mais bon la rentrée en seconde, les cours de chinois, mater les fesses des gars qui jouent au foot...Ouais, j'ai une vie de fou. Allez, see you later les cocos!


Chroniques à quatre pieds - 3

Vous ai-je affolés par ma précédente conclusion ? Vous n'avez rien à craindre d'une vieille chose comme moi. J'ai fait mon temps, et parfois, je me plais à me dire que le plus grand vient à la fin. Les chaises meurent, je vous ai déjà parlé de ça. Ne vous fourvoyez pas, ce n'est pas une morbide obsession de ma part, je me rends simplement à l'évidence. Enfin, vous n'êtes pas là pour écouter les palabres stupides d'une carcasse à bout de souffle. Vous êtes là pour elle.

Mon capitaine, mon amour.

Mon capitaine, ses amours.

Le suivant n'est pas comme les autres. Malsain, mauvais, peut être est-ce ainsi que vous le ressentirez . C'est elle qui fuit, lui qui la suit. Oh vous la connaissez celle-là. Je ne vous apprendrais rien de nouveau, je le sais. Mais, chez vous, on ressasse la nouvelle, on l'interprète, et surtout, on donne son avis. Qu'il est bon d'avoir un avis sur tout, cette petite sensation de supériorité qui vient vous titiller plaisamment. Je ne suis pas sûre d'être capable de restituer correctement ce que vous, vous n'hésiteriez pas à commenter avec entrain. Quelques gènes me manquent, sûrement.

Je l'avais déjà entendue parler de lui. À chaque fois qu'elle disait son nom, on aurait cru qu'elle allait s'arracher la bouche, dégoûtée par le simple fait d'avoir parlé de lui. Elle ne pouvait pas s'empêcher de le trouver terriblement antipathique, c'était comme ça. Pourtant, il ressemblait à ce qu'elle considérait comme un pirate, un vrai, un dur, un couillu (n'y voyez pas de grossièreté de ma part, je ne fais que répéter ses propos).

Peut être était-ce sa trahison envers son capitaine qui l'avait rebutée. Et inconsciemment, elle avait peur d'abriter un judas dans la coque du bateau. Elle était sur les nerfs, scrutait les moindres faits et gestes. Ça en serait devenu invivable si seulement ça avait duré bien longtemps. Vous ne pouvez l'entendre, bien évidemment mais à ce moment du récit, j'ai les jointures qui craquent, car je n'ai pas de gorge qui pourrait se serrer. Toujours, quand je raconte mon histoire, repenser à son déclin me brise.

La fatale journée est venue tout doucement, sans que personne n'y fasse attention, s'installant dans un coin et appréciant le spectacle.

Une agitation sourde est apparue et, crescendo, a fini chaos. Puis le noir. J'ai entendu une dernière fois mon capitaine hurler, et moi, je ne pouvais rien faire. Rien, pas même lui rendre son cri. Je l'aimais et à notre séparation, elle ne le savait toujours pas. Je l'aimais plus que « Bel-ami », plus que Dièz, plus que Teach. Je l'aimais mieux que n'auraient put le faire tous les hommes de ce monde. Je l'aimais, je n'étais qu'une chaise éperdue d'amour, je l'aurais servie assidûment jusqu'à la fin. Malheureusement, la fin est venue trop tôt. Je l'aimais et je crois bien que je l'aime encore, comme un crabe qui ne voudrait pas me lâcher. Je ne peux pas m'en débarrasser, il me tuera.

Mon capitaine, mon amour.

Des hommes habillés en bleu et blanc, un fusil à la main, ont retourné de fond en comble le navire. J'ai été balancée, rouée de coups par ces rangées de bottes qui ne semblaient jamais finir. Mais ce n'est rien, je ne vaux plus guère sur le marché. D'un geste malhabile, on m'a fait basculer dans la mer. Les eaux sombres se sont refermées sur moi et je chuchote mon histoire au creux des vagues en regardant mon vernis s'écailler, mes membres se faner. J'espère juste qu'elle est toujours vivante, et court toujours après son règne. Qu'elle courre, elle qui le peut.


Elle le hait, elle voudrait s'échapper mais elle a les mains liées. Elle voudrait hurler sa rage, son désespoir d'être femme. Malheureuse destinée.

Elle se racle la gorge et lui crache au visage. Qu'il crève.


Fin.