Chap. 10

La peur.

Ce sentiment puissant qui vous fait pousser des ailes presque aussi rapidement que l'amour.

Les terminaisons nerveuses de Sanji en étaient saturées en cet instant. Elle le paralysait, et malgré sa lucidité, il ne pouvait pas bouger. En même temps, être dans le viseur d'un fusil d'assaut n'offrait pas beaucoup d'options. Avoir un lycan à peine transformé dans son dos non plus d'ailleurs.

Dans l'encadrement de la porte, Smoker exultait, tirant sur son sempiternel cigare une longue bouffée de tabac, la fumée voleta dans la pièce. Il savourait le moment, une flamme cruel dans le regard, jouissant de la situation, le canon de son artillerie baissé, par excès de zèle sans doute.

Babines retroussées, oreilles aplaties sur le crâne, le loup-garou gardait ses prunelles dorées fixées sur l'intrus malgré la nausée qui persistait dans sa chair nouvellement formée. La sensation de son nouveau corps lui faisait toujours une impression étrange, comme s'il se voyait à l'intérieur et de l'extérieur, comme si sa conscience n'était pas encore fixée en son corps, comme avant de se réveiller. L'appropriation de sa nouvelle anatomie, plus grande, plus puissante, plus instinctive, le fit puissamment frissonner. Il ressentait chaque muscle, quasiment chaque nerf, chaque inspiration. La peur du vampire avait un goût exquis sur sa langue, il aurait voulu la décupler. L'odeur du cigare, et de la suffisance de Smoker le révulsait au-delà du possible.

Ils étaient dans la merde : aussi vite qu'ils pourraient bouger, ils n'échapperaient pas à la salve de balle en argent qui leur effleurerait la gueule. Et il doutait en être capable pour le moment. Pourquoi Smoker ? Il était chasseur, dans le même camp… Pourquoi ?

Sanji trouva la force de se redresser, lentement, très lentement, se retrouvant entre l'importun et le lycan.

_ T'sais que t'es très demandé, la tête blonde ? 1 000 000$ mort ou vif, ça fait peur, argua sur un ton faussement apeuré le nouvel arrivant. J'te d'manderais bien c'que t'as foutue pour en arriver là mais j'en ai rien à foutre, j'vais te buter, le loup avec et le tour s'ra joué.

La tension monta d'un cran dans la pièce. Les muscles du vampire se tendirent d'appréhension, son regard aux pupilles extra dilatées s'égara une seconde en direction du loup, derrière lui …

Puis les bougies s'étinrent, plongeant la pièce dans un noir complet.

Vif comme l'éclair, Sanji esquiva une salve de tir rageuse par une vrille acrobatique sur le côté, Zoro s'élança de l'autre, ses pupilles lupine temporairement aveuglé par le flash des tirs, qui s'arrêtèrent bientôt net.

Un chassé direct à la tempe, de la part du vampire, avait aplatie Smoker au sol, l'envoyant au pays des licornes roses et des papillons arc-en-ciel.

Le blond leva les yeux sur le loup-garou, à quelque mètre de lui, mesurant désormais deux têtes et demie de plus. Il sentait sa chaleur et sa puissance, comme des ondes se répandant sur sa peau. Les yeux d'or brillaient dans la pénombre, dans lequel le vampire retrouva le mordant du chasseur. Il posa sa main sur la poitrine face à lui, chaude, à la fourrure douce, à la carcasse vibrante sous les assauts du palpitant agité. Puissante et monstrueuse.

_ Mon amant est un loup-garou… lâcha-t-il dans un souffle, prenant pleinement conscience de ce que cela signifiait, avant d'étreindre l'opulente fourrure.

La peur, il aurait dû la ressentir auprès de lui, de ce monstre de conte qui dévore des enfants et ravage des villages, créateur de légendes plus horribles les unes que les autres. Mais rien. Juste de la compassion. Un vampire compatissant, quelle blague. Et pourtant… Cette masse, imposante, effrayante, ne lui inspirait que sécurité…

Il se détacha soudainement du loup, évitant la trajectoire d'une lampe-torche, se plaquant au mur.

Le loup se fondit dans la noirceur de la pièce, aussi silencieux qu'une ombre.

_ Patron ?! Vous êtes là ?

Des pas se rapprochèrent, hésitant. Quatre hommes venaient voire ce qu'il advenait des monstres.

Sanji inspira lentement par réflexe et laissa aller sa tête contre le mur. Zoro mettait sa vie en jeu pour assurer sa protection très souvent ces derniers temps, il fallait inverser la tendance.

Il ferma les yeux, un fin sourire sadique s'étala sur son visage et d'un élan, il se retrouva face au premier homme dans le couloir.

Le faisceau de la lampe-torche ne passa qu'une fois sur sa chevelure blonde, avant qu'un hurlement ne s'élève et ne s'arrête net, dans un affreux bruit de gorge arraché.

Des tirs de balles tentèrent de stopper le fléau meurtrier, sans aucuns résultats probant.

Une danse macabre s'engagea. Ses canines se plongèrent dans les gorges de ses partenaires avec délectations, ses mèches blondes effleurant leurs peaux frémissantes, savourant la terreur qui se répandait dans leurs sang, aspirant leur essence jusqu'à la dernière goutte, usant de ces cadavres tout chauds comme boucliers, évitant ainsi les balles.

L'hémoglobine se répandit dans ses veines, lui faisant retrouver un peu « d'humanité organique », ses pupilles dilatées, ses joues se colorèrent. Sa conscience des choses se fit encore plus aiguë et perçante. Il n'avait pas vraiment eut le loisir de découvrir ses nouvelles capacités, et celles-ci le grisaient.

Quand les balles s'arrêtèrent et que la dernière victime s'affala comme une marionnette dont on aurait coupé les fils, il déglutit, tanguant légèrement, le souffle court, les lèvres entre ouvertes recouvertes de sang.

Il se lécha sensuellement les lèvres puis suça ses doigts, avant de baisser les yeux sur sa sous-pull gris et son jean noir couvert de sang. Il soupira.

_ Le pressing ne voudra jamais m'arranger ça …

Un reniflement le fit se retourner et sursauter. L'immense loup-garou noir se tenait à quelque centimètre de lui, son regard d'or aux prunelles écarquillées le transperça. Il déglutit à nouveau, ses muscles se contractant involontairement.

Le long museau se rapprocha lentement de son visage, sa langue rose darda entre ses babines et lécha le sang qui maculait les joues du blond avec un calme étonnant pour une bête aussi sanguinaire. Sanji en oublia de respirer, bien que cela n'ait pas une grande influence sur son système vital. Il s'effaça pour le laisser passer, frissonnant à son passage, la puissance qui émanait de la bête lui dressa les poils sur la nuque. Le loup disparut dans le couloir, sa fourrure le rendant invisible.

Sanji resta un moment sans bouger avant de le suivre, se doutant que là dehors, d'autres réserves de sang-chaud attendaient inconsciemment leur heure.

Son monde n'était plus qu'odeurs et sensations. Il pressentait les êtres hors de la cache, attendant près de leurs 4x4, que le chef revienne, armes à feu au poing. L'excitation se répandit sous la fourrure, courant dans les muscles, avivant les nerfs. Lui et sa Bête fusionnaient, ne faisant qu'un.

Son besoin de violence grimpait au fur et à mesure qu'il sentait la tension des hommes à l'extérieur, et celle dans son dos, émanant de ce vampire blond à la joue si douce et aux lèvres si délicieuse. Sous son aspect lupin, l'envie de le marquer comme sien ne fit que s'accroitre, révélant définitivement son attachement. Tu es à moi. Il se promit de le faire sien, une fois ces emmerdeurs éliminés.

Le couloir en ligne droite prit bientôt fin, baigné dans la lumière de l'astre nocturne, éclairant la forêt comme en plein jour. Zoro accéléra soudainement le pas, désirant ardemment se baigner dans la lumière de sa malédiction. Il n'en eut cependant pas le loisir…

Trois seconde seulement après qu'il ait pointé le bout de son museau au clair de lune, un gars près d'une voiture remarqua sa présence et poussa un beuglement d'alarme. Le loup grogna en montrant les dents, se préparant à en faire de la chapelure, quand le cri s'arrêta, étranglé dans la gorge de son propriétaire, les doigts pâles et rougie de sang du blond enserrant son cou.

_ Chuut… ils mourront de toute façon, lui chuchota-t-il avant de plonger ses crocs violement dans sa jugulaire, lui arrachant la peau et les muscles sans vraiment prendre le temps de se nourrir.

Cet élan de violence calculé paru d'un érotique aux yeux du Lycan…

L'adrénaline enfla dans ses canaux sanguins ; la violence, le sang, l'éclat de la lune et le caractère vénérien du blond lui montèrent à la tête.

Inspirant à fond l'air nocturne, il contourna le 4x4, observant les six hommes encore vivants.

Alors qu'il échangeait un regard avec le vampire, posté de l'autre côté, histoire de partager, un nuage passa, rendant à la nuit son caractère obscur. Sanji eut un sourire en coin : la chasse était ouverte.

D'un même élan, ils se projetèrent sur les hommes présents, plongeant leurs crocs respectifs dans ces chairs chaudes, arrachant, déchiquetant, laissant libre cours aux instincts les plus bestiaux de leurs êtres, ne se souciant plus de moral, de compassion et d'empathie.

Le nuage s'en alla, la lumière lunaire bagna la scène sanglante. L'union sauvage de ces deux êtres anormaux tira des hurlements étranglés aux moins aguerris des chasseurs présents. Les autres, le moment de terreur canalisé, reprirent leur esprit et épaulèrent leurs armes, tirant sur Zoro, masse plus imposante et lente, le vampire n'étant qu'une ombre fugace.

Une balle d'argent l'atteint à l'épaule, juste sous la clavicule droite, alors qu'il achevait un homme tétanisé, ses crocs profondément enfoncé dans sa chair, son sang dégoulinant de ses babines rougies. La douleur se diffusa soudainement dans son être, pareil un feu d'artifice de souffrance. Il lâcha immédiatement sa proie et tourna sa gueule plissé de rage vers l'auteur du tir, qui ré appuya sur la détente. L'esquive lui évita d'être atteint au cœur, ce fut son autre épaule qui fut touchée. Deuxième explosion de douleur. Sa vue se troubla légèrement, il se soutint au véhicule avant de s'élancer sur son agresseur, désirant neutraliser la menace.

Alors même que le tireur visait de nouveau, il se vit soustrait d'une partie de son corps : sa main tomba, ses doigts enserrant toujours l'arme, son moignon giclant abondamment. Il y porta la main, abasourdis, sa blessure le piquant et l'élançant brusquement. La lumière de la lune lui fut alors cachée par la carrure du loup-garou, debout sur ses pattes arrière.

Ce fut la dernière vision qu'il emporta dans l'Autre Monde.

Une autre balle transperça sa chair, ressortant de l'autre côté, entre ses cotes flottantes.

Il se soutint à l'un des 4x4, sa respiration haletante se fit peu à peu sifflante. Sa vue se troubla de plus belle, les sons lui parvenaient de loin, comme étouffé par du coton… Trop exposé… Sa puissance était également sa faiblesse ; sa musculature le rendait plus facile à toucher. Un grondement profond s'éleva de sa gorge, il arracha la portière avant du véhicule et l'envoya rageusement sur le deuxième tireur, qui fut découpé net au niveau de la taille, ses viscères s'éparpillant hors de son corps alors qu'il n'avait pas encore atteint le sol.

L'ombre blonde manipula ses proies, faisant dévier leur tir pour qu'ils se tuent mutuellement, ne prenant plus la peine de plonger ses canines dans leur derme, déjà gavé de sang.

Il n'en restait plus qu'un, yeux écarquillés et pupilles extra-dilatées, les doigts soudés à son arme sans plus pouvoir l'utilisé, le dos plaqué à la Jeep la plus éloigné du massacre.

Le vampire se plaça calmement devant lui, suivit de peu par le loup-garou, qui cacha de nouveau l'éclat de l'astre lunaire.

L'odeur du sang de Zoro attira l'attention de Sanji, dont les yeux s'ouvrirent d'effroi en découvrant le sang poissant abondamment la fourrure noir. Il déglutit et posa ses longs doigts froids près de la plaie de son épaule droite, se retrouvant sous le regard d'or voilé du loup, qui émit un léger grognement, avant de reporter son attention sur le jeune homme tétanisé.

_ Efface-lui la mémoire, apaise-le et dit lui de prendre la voiture pour partir.

Sa voix, sortie de cette gorge lupine, était devenue plus profonde et rocailleuse, plus habituée à hurler et grogner qu'à parler. Le blond hésita une seconde, avant de s'accroupir et d'accrocher le regard terrorisé. Il se concentra un moment, puis lui passa les ordres. Le fusil d'assaut tomba de ses mains, qui se mirent à chercher les clés de la Jeep.

Zoro s'éloigna en titubant, les résidus d'argent dans ses veines le torturaient toujours. Sa main griffue et ensanglantée dérapa quand il voulut se tenir au capot d'un des véhicules, et si ce n'était Sanji qui le rattrapa de justesse, il se serait lamentablement écrasé au sol.

_ Zoro ! Que… qu'est-ce que je peux faire pour t'aider ? Y a-t-il quelque chose qui puisse te soigner ? Demanda-t-il précipitamment en l'allongeant sur le dos, examinant ses blessures, écartant avec une délicatesse de chirurgien la fourrure engluée de sang. Le lycan grogna au contact.

_ De … L'aconit… Il y en a ... Dans le bunker… un tube blanc… l'étagère… 'Ttention Smoker…

_ Tube blanc étagère, ok. Tu ne meurs pas, je reviens.

En moins de deux respirations laborieuses, Sanji était de retour au côté d'un Zoro agonisant, masse gémissante et sifflante étendue sur une herbe maculé d'hémoglobine.

_ J'en fais quoi ?

_ Les plaies…

Il dévissa le bouchon avec les dents et mit une noix de pâte translucide sur ses doigts, qu'il étala avec précaution. Avant de lui appliquer et se doutant que ce ne serait pas indolore, il prit le bras d'un des cadavres à proximité et lui coinça entre les crocs, pour éviter qu'il ne se morde la langue.

A peine ut-il mit en contact le gel frais et la peau brûlante qu'il entendit l'os craqué brutalement entre les dents acérés du lycan, ses muscles tendu par la douleur. Il inspira bruyamment et continua, faisant taire la panique pour lui parler doucement, exprimant tout ce qui lui venait à l'esprit, comme il le lui avait demander avant qu'il ne se transforme… ce qu'il n'avait pas fait d'ailleurs, trop impressionné pour ne serait-ce qu'exhaler un murmure.

_ C'est super impressionnant et dégeulasse à voir une transformation, lâcha-t-il dans un souffle, s'efforçant à calmer sa voix, la rendant la plus apaisante possible… Je suis presque déçu, je m'attendais à une fourrure verte… déclara-t-il avec un minuscule sourire en coin, ce qui lui valut un regard foudroyant de la part du lycan, qui grogna de plus belle quand un autre impact de balle fut soigné. Une belle fourrure vert feuille, histoire de passer inaperçu dans la forêt… oh ça va, je plaisante, tes poils pubiens sont noirs, je m'en doutais un peu. Ça ne sert à rien de me fusiller du regard, ça ne changera rien.

Zoro grogna à nouveau, mâchonnant et malmenant le membre entre ses mâchoires, ses pupilles d'or posées sur un Sanji s'affairant à le soigner. La douleur vive laissait peu à peu place à l'engourdissement, les vertus de l'aconit se répandant rapidement dans son organisme, aidé par la lumière de la lune. Quand le blond eut fini d'appliquer la crème, il se redressa lentement, ses chairs se reformant, profitant un instant de la position assise, crachant dans un coin le membre déformé et brisé. Les genoux baignant dans le sang et les doigts dégoulinant de la même substance, Sanji le scrutait, anxieux quant à son état ; il avait entendu que les lycans avaient un système immunitaire plus développé que la plus part des espèces vivantes connue. Celui-ci le regarda en coin un instant avant de se relever complètement, s'aidant du parechocs pour ne pas tituber.

_ Je t'en foutrais des fourrures vertes.

Le vampire ne put s'empêcher d'échapper un léger pouffement, soulagé de le voir remis aussi vite.

_ Ça aurait été raccord, avoue-le.

_ La ferme.

OoOoO

La tête de Smoker heurta méchamment le mur du bunker, le plâtre se fissurant sous l'impact, du sang le maculant légèrement. Maintenu à une bonne vingtaine de centimètre du sol par les mains griffues à la poigne d'acier de Zoro, le fumeur de cigare grogna sa douleur, toujours groggy par le coup de pied du vampire.

Le museau noir retroussé sur les babines et les crocs acérés à quelque centimètre de son nez ne le firent pas ciller, il y avait déjà été confronté.

Sanji avait allumé de nouvelles bougies pour permettre à leur otage de les voir. Il se rapprocha du loup. Zoro resserra sa prise autour de la gorge de Smoker.

_ Qui t'as envoyé ?! Pourquoi tu nous chasse ?! Le contrat a été rompu, tu ne devrais plus… Tu fais le doublon dans une autre agence, espèce d'enfoiré !?

_ T'es pas à la hauteur pour me faire cracher le morceau, sale clébard, ricana le grisonnant, un sourire suffisant accroché aux lèvres. J'ai connu pire.

Les griffes se plantèrent dans sa gorge, le sang commença à couler. Le blond posa sa main sur l'avant-bras bouillant et doux, sans réussir à attirer l'attention du lycan.

_ T'es sûr ? Gronda-t-il de sa voix gutturale et caverneuse, plissant les paupières. Ça m'étonnerait qu'avec les nerfs à vifs tu continues à te vanter.

_ Fait c' que tu veux, je ne dirais rien.

Alors que Zoro allait mettre en application sa menace, la pression du vampire se resserra délicatement pour attirer son attention.

_ Qui te demande de parler ? Je n'ai qu'à te mordre pour savoir qui est ton commanditaire.

Le fumeur de cigare exhala un ricanement dubitatif, tandis que Zoro le regarda brièvement en coin.

_ Ah ouais ? J'demande à voir blondinette.

Sanji ne se le fit pas dire deux fois. Il planta brutalement ses crocs dans le bras du traître-chasseur, aspirant son essence de vie, le laissant exsangue. Quand Sanji se redressa, la pression du loup se desserra, l'homme tomba net. Le blond gémit et ferma les yeux, semblant traiter les informations qu'il recevait.

_ Tu peux faire ça ? Le questionna le méthamorphe, intrigué.

Le vampire eut un petit sourire ensanglanté.

_ J'ai découvert ta lycanthropie en goûtant ton sang, rappels-toi.

Le regard doré s'accrocha à celui d'un ciel d'été. Quelques jours à peine et pourtant, ils semblaient avoir duré des mois… Cette impression de complémentarité entre eux deux le laissait perplexe sans qu'il ne s'y attarde vraiment. Âme sœur peut-être, bien qu'un peu trop romantique pour leur situation, surtout que présentement rassasié et quasi remis de ses blessures, sa puissance sexuelle ne demandait qu'à s'exprimer pleinement. Vouloir baiser frénétiquement sa princesse n'était pas forcément à l'ordre du jour de tous les princes charmants. Un prince loup-garou, que c'est original !

_ Qu'est-ce que ça t'apprends ?

Sanji cligna des yeux et secoua la tête, traitant les informations.

_ Il a baisé sauvagement une de ses subordonnées avant de venir… C'est une autre agence qui lui a ouvert le contrat, déposé par l'un des aspirants au rang de Maitre de la Ville… Un ami de Perona. Il n'était pas censé le savoir, il écoutait aux portes. Il faudrait donc aller voir ce vampire et … demander à ce que le contrat soit levé.

Zoro ricana.

_ Oui et les convertir à l'hémoglobine de synthèse aussi pendant qu'on y est. Demander ne servira à rien, il faudrait le forcer, trouver un moyen de pression… Je peux toujours le menacer de le mordre mais ça n'aurait pas d'effet s'il est entouré…

Il se tut, analysant en silence la situation. Une autre agence était sur le coup, d'où les tueurs du supermarché sans doute. Bah oui, autant faire d'une pierre deux coups : buter un loup et un vampire fait toujours bien sur le C.V. Il s'occuperait du cas de Smoker plus tard, Mihwak s'en chargerait. Là, il devait trouver un moyen pour convaincre le commanditaire de l'assassinat d'enlever le contrat, ce qui n'était pas chose aisé, à moins de le coincer au saut du cercueil… Bonne idée.

Du coin de l'œil, il vit le blond le fixer par en dessous tout en se mordillant la lèvre inférieure. Il ne l'avait pas vu faire souvent mais il avait compris que lorsque c'était le cas, ce jeune vampire faisait face à ses envies en ébullition et ne tardait jamais à lui faire des avances. Mais là…

_ Sanji, tu veux bien t'occuper des corps, il faudrait les enterrer un peu plus loin au Nord du bunker. S'il te plait.

_ Tu ne m'aide pas ?

_ Je … vais me transformer à nouveau…

Le blond cligna des paupières.

_ Tu n'as pas besoin de moi ?

Le lycan plongea ses iris dorés dans le regard du blond.

_ Redevenir humain est tout aussi douloureux, mais moins déroutant. Je m'en sortirais.

_ … Bien.

Il l'observa encore un instant, avant de trainer Smoker, de prendre la pelle posée près de l'embrasure et de sortir. L'air nocturne l'engloutit dès qu'il mit le nez dehors, contemplant le carnage. Véhicule cabossés et membres éparpillés…

La prise de conscience de sa nouvelle nature le frappa si brusquement qu'il chancela, se rattrapant de justesse au capot d'une voiture. Il était désormais, et irrévocablement, un cadavre ambulant, forcé à boire du sang pour survivre éternellement… ça ne l'avait pas autant atteint les jours précédents, les nouvelles capacités qu'il se découvrait compensait la perte du soleil.

Là, il voyait sa puissance destructrice, sauvage et bestiale.

Et ça lui fit peur… L'envie de se fourrer dans les bras de Zoro le pris à la gorge, comme un enfant effrayé se réveillant d'un cauchemar chercherait des bras puissant et rassurant.

Il leva les yeux vers la lune pâle, se rendant compte de sa réaction puérile, lui qui au-paravent ne se laissait dicter les choses par personne, ou presque. Ce chasseur était devenu une drogue dure, à laquelle il n'était pas sûr de vouloir se sevrer…

Inspirant à fond pour calmer le sentiment de panique qui s'était insinué sous sa peau, il alla accomplir sa tâche mortuaire.

OoOoO

Quand il revint dans l'antre chaud et sec du bunker, il découvrit Zoro, étalé sur les couvertures, la peau luisante de sueur, en train de se redresser sur les coudes. L'air était saturé par l'odeur des protéines animales qu'il avait secrétées durant sa transformation. En quelque enjambées, Sanji le rejoins, à genoux sur les couvertures, déglutissant. Timidement malgré toutes les attentions qu'ils avaient pu se prodiguer mutuellement, il déposa ses doigts frais sur l'épaule bouillante, remontant délicatement dans ses cheveux verts perlés de sueur, savourant le contact de sa peau humaine du bout des doigts.

Zoro frissonna à son touché, tournant la tête dans sa direction, les yeux encore embués par les douleurs précédentes. Les impacts de balles avaient déjà bien cicatrisées sur son derme. Il inspira fébrilement et se laissa aller contre le blond, son front contre ses clavicules et le col de son sous-pull fin maculé de sang, profitant largement des caresses, se détendant au touché. Il ferma les yeux, inspirant à plein poumons le parfum léger et élégant du vampire, sans aucune trace de sueur, ses hormones de sudation étant mortes. Les doigts froids parcourant son cuir chevelu le firent frémir, les vagues de bien-être descendant le long de sa colonne vertébrale, se propageant sous sa peau et trouvant un agréable refuge dans son entre-jambe.

Quand l'autre main rejoint la première dans ses cheveux, il étouffa très mal un grognement de plaisir, relevant la tête. Un instant, son regard se fondit dans celui d'un bleu toujours aussi hypnotique, et incroyablement sensuel. Comment ce blond arrivait-il à être aussi désirable alors qu'il était couvert de sang, qu'ils venaient de libérer cinq âmes et que les emmerdes lui collaient au train… ? C'était inné sans doute. Là, il s'en foutait pas mal, il le voulait. Pour lui seul.

Le temps d'un souffle, le sien se mêla à celui de Sanji avant que leurs lèvres se rejoignent et qu'il ne mordille délicatement sa chair, dévorant sa bouche lentement, savourant le goût métallique du sang encore présent sur ses lèvres. Il darda sa langue, jouant savamment de celle-ci, descendant sur le cou pâle, le poussant doucement à s'allonger sur les fourrures, se glissant tel un prédateur sur son corps.

Un gémissement s'échappa de la gorge du vampire, s'évanouissant dans l'air. Il ferma les yeux un instant, savourant la chaleur naissante que lui prodiguaient les caresses du lycan. Ses doigts toujours perdu dans ses cheveux, son massage crânien se fit plus discontinu, plus évasif en fonction des baisers de Zoro. Cet homme le chamboulait dès qu'ils entraient en contact physique, immanquablement. Ces paumes larges et chaudes lui faisaient un bien fou, se glissant sous ses vêtements, les repoussant pour en avoir plus ; ces lèvres, n'en parlons pas. Charnues, pleines et avides, elles parcouraient les chemins de son être, retrouvant avec aisance ses parcelles les plus sensibles.

Gêné par le vêtement, Zoro retira le sous-pull avec une douceur pour le moins nouvelle, comparée aux précédents arrachages de chemises. Il épousa les formes de ce corps pâle, pressant le sien à nouveau, glissant contre son derme pour lui prodiguer sa chaleur, leurs mamelons respectifs s'effleurant, faisant gémir le blond tandis que le chasseur mordilla de nouveau sa lèvre inférieur, avant de demander l'accès à sa bouche, sa langue désirant faire danser sa jumelle. Sa main gauche remonta le long de sa côte, le faisant frémir, cherchant ses doigts qu'il lia, pressant sa main dans la sienne, l'embrassant plus intensément.

_ C'est la pleine lune qui te rend si tendre ? demanda dans un souffle le vampire, essayant de le taquiner, sa voix et son expression trahissant honteusement son excitation.

Zoro sourit en coin, plongeant son regard ténébreux dans le sien.

_ Va savoir… Murmura-t-il de sa voix profonde et chaude tout en caressant les lèvres rougies et humides du blond avec son pouce.

Sanji tressaillit. Bien que sans incidence, sa respiration accéléra par réflexe. Il se mordit la lèvre, fixant celle du lycan avec envie. Insidieusement, il roula des hanches contre les siennes, frottant son membre dressé et prisonnier contre celui libre de son amant. De sa main disponible, il l'attira à lui, l'embrassant avec passion, lui offrant sa bouche, sa peau, son corps tout entier. Il le désirait au plus profond de son être, à heurter sa prostate.

Le chasseur sourit dans l'échange et profita yeux mi-clos de son expression. Il répondit à ses mouvements, imposant son rythme, lent et intense, désirant le voir réclamer et supplier pour qu'il aille plus loin, pour qu'il fasse plus. Ses mouvements se firent courts, comme s'il voulait le pénétrer à travers les vêtements. Qui devenaient très gênants d'ailleurs.

Il se redressa, déliant mains et lèvres pour s'occuper du jean seyant du vampire, lui retirant avec tout autant de douceur, bien qu'un peu plus vite. Sa Bête désirait ardemment s'accouplé au blond. Il la réfréna tant bien que mal jusqu'à ce que son cerveau analyse. Sanji se tenait sous lui, nu et pâle, mamelons et sexe dressés, les lèvres rouges, gonflées et humides, le regard embué par un désir largement affiché et le corps offert, prêt à assouvir ses moindres désirs…

Il ne prit plus la peine de lutter. Ses pupilles d'ébènes changèrent pour un mordoré profond alors qu'il se glissa de nouveau contre Sanji, qui passa une main sur sa nuque, l'autre sur son dos, l'attirant au plus près.

Le lycan mit en contact leurs sexes durs et tremblant d'envie, les frottant l'un à l'autre dans de délicieux mouvement de bassin, ses pendants d'oreilles chantant doucement à chaque mouvement. Il lui embrassa les lèvres, les joues, la gorge, la mordillant délicatement, marquant sa chair. Après un dernier frotti-frotta lascif, il se redressa, observant avec satisfaction le blond geindre de frustration, les joues rougies par le plaisir.

_ Zoro, qu'est-ce que tu fais ? Murmura Sanji d'une voix gémissante, tendant les bras vers lui pour qu'il revienne lui prodiguer ses attentions et sa chaleur.

_ Je te contemple… On t'a déjà dit que la luxure t'allait bien ? Répondit-il de sa voix riche et chaude avant de lui prendre une main et de lui embrasser la paume.

Le vampire plissa les yeux et rougies un peu plus, grommelant une réponse incompréhensible, qui fit rire le lycan. Zoro l'attira à lui, pressant son torse puissant contre le sien, enfouissant son visage contre la peau laiteuse et douce de son cou.

_ T'es magnifique…

Sanji sentit son cœur faire un bond dans sa poitrine. Il ferma les yeux un instant, essayant de comprendre malgré l'assaut du plaisir pourquoi son palpitant venait de réagir comme cela. Pour que ce compliment l'atteigne à ce point, serait-il amoureux… du méthamorphe ? … Non …

Celui-ci leva les yeux vers lui, perdant son regard dans les iris bleu hypnotiques et perdu, avant de poser ses lèvres sur les siennes, happant doucement sa lèvre inférieur. Il descendit un bras le long de sa colonne vertébrale, laissant courir ses doigts sur sa peau tiède, s'arrêtant à la naissance de ses fesses. Il y laissa glisser ses ongles, se délectant des gémissements que cela créait. Il lui mordilla la peau du cou, testant les limites du vampire.

Quand le blond n'en finit plus de se tortiller sur lui, geignant d'impatience, il lui demanda au creux de l'oreille de se préparer pour le recevoir.

Après un court instant d'hésitation, Sanji s'exécuta, aventurant des doigts tremblants jusqu'à son intimité frémissante, qu'il pénétra doucement, sous le regard observateur du tueur à gages. Qui ne put rester inactif très longtemps. Ce corps sensuel appelait à la caresse. Ses lèvres reprirent du service, savourant ses clavicules tandis que sa main droite parcouru les chemins de son torse, jusqu'à atteindre son sexe, qu'il empoigna fermement. Le vampire gémit de plus belle.

_ C'est la première fois que tu … J'aime quand tu prends mon sexe entre tes doigts…

Le verdoyant eut un sourire en coin et lui embrassa le creux du cou. Les allés et venue de la large paume tannée furent ferme, variant les allures pour mieux le faire réagir, l'aidant au mieux à se détendre.

Le blond voyait quelques étoiles, ainsi traité par son amant. Ses doigts ne furent plus suffisant, il les retira, plongeant son regard enfiévrée dans celui mordoré et tout aussi excité. Posant ses mains sur ses pectoraux, il le poussa délicatement pour qu'il s'allonge, frottant ses hanches contre les siennes, appréciant grandement le contact de leurs chair sensible, avant de se surélever, de saisir le sexe de Zoro et de s'empaler dessus, lentement, contrairement à la première fois.

Le regard qu'eut le lycan à l'égard du vampire n'avait rien à envier à celui de Khal Drogo pour sa Khaleesi. Tout aussi possessif, excité et excitant. Il se mordit la lèvre inférieur, apposant ses mains sur ses hanches fines, accompagnant ses mouvements hératiques. Il le dévorait des yeux, imprimant son expression lascive et impudique dans sa mémoire. Il s'humidifia la lèvre, remuant imperceptiblement les hanches avant de lui donner un coup plus puissant, s'enorgueillissant du hoquet de surprise mêlé de plaisir qui échappa la gorge de Sanji. Un léger sourire sadique orna ses lèvres quand il recommença, le prenant au dépourvue, s'infiltrant dans sa chair plus profondément.

Le blond allait et venait, perdu dans les volutes du plaisir, bouche entre-ouverte sur un souffle qui ne lui servait plus, mains posées sur les puissants avant-bras du lycan. Il se resserra sur le sexe de Zoro, l'avalant au plus profond de son être, se déhanchant lascivement, hoquetant à chaque coup de reins plus puissants.

Désirant plus de contrôle, le chasseur retourna la situation, plaquant le vampire aux fourrures, lui soulevant les jambes, et le pilonna intensément, s'abreuvant de ses cris si impudiques. Il se démena, leurs chairs claquant. Le posséder était toujours aussi bon, aussi jouissif. Il le dévora des yeux, se perdant sur ses courbes… et vint sans pouvoir le contrôler, souillant le corps du blond, qui macula quant à lui leurs deux ventres dans un cri, qui mourut contre les lèvres de Zoro.

Il l'embrassa délicatement, avant de se laisser tomber sur le côté, exténué. Vidé. Cette nuit l'avait vidé. Il respira amplement tandis que Sanji se tourna vers lui, incapable de faire plus de mouvements. Zoro s'étala sur lui, l'emprisonnant sous son poids, respirant à plein nez l'odeur du vampire.

_ T'aimes ça quand j'te masturbe ? demanda-t-il dans un murmure, un sourire taquin dans la voix.

_ Tais-toi et dors, répliqua Sanji sur le même ton et volume de voix.

A suivre…