Auteur : Snegurochka Lee
Traductrice : Lynaëlle
Note de la traductrice : Bonjour tout le monde ! Quel retard sur la publication de ce chapitre, je suis impardonnable... j'ai été terrassée par une mauvaise grippe, je n'avais plus la force de faire quoi que ce soit. Je déteste les maux de l'hiver... Bon, en tout cas, j'espère que vous, vous êtes en forme et que ce chapitre vous plaira ! C'est donc l'avant-dernier et on y découvre le Noël futur. Bonne lecture !
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Sottise ! (Un Chant de Noël)
Cinquième partie
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L'instant d'après, ils se retrouvèrent devant une petite maison enneigée. Il ne la reconnut pas. Nichée sur les rives neigeuses, elle semblait être seule responsable de l'obscurité de la nuit. Le voisin le plus proche se trouvait à des kilomètres de là. Une faible lumière se distinguait dans la pièce principale et quelques maigres volutes de fumée s'échappaient de la cheminée.
Drago ne posa aucune question au fantôme. Il se contenta de le suivre dans le chemin et à travers la porte. Une fois à l'intérieur, il reconnut enfin le cottage de sa tante. Il n'était donc jamais venu chez elle en hiver ? L'endroit lui paraissait tellement maussade…
Dans le salon se tenait une version plus feutrée de la fête de Noël à laquelle il avait assisté chez les Weasley. Il aperçut Granger et son mari près de la porte de la cuisine et Mrs Weasley en train de s'essuyer les mains sur son tablier. Les enfants jouaient en silence dans un coin de la pièce, alors qu'il les avait vus galoper en tout sens l'autre soir. Assise dans un fauteuil, Johnson tenait une tasse de café à la main et observait les enfants d'un air triste.
Drago finit par apercevoir sa mère et sa tante, sur le canapé. Elles se tenaient la main. Le visage grave, sa mère parlait à Andromeda, qui n'ouvrait pas la bouche. Cette dernière se contentait d'acquiescer d'un signe de tête, l'air absent.
— Je sais, Cissy, finit-il par l'entendre murmurer. J'essaie de me montrer forte. Et Harry est formidable, même si je sais à quel point ça le touche. Il pense qu'il aurait dû en faire plus, mais… qu'aurions-nous pu faire d'autre ?
L'estomac de Drago se retourna. Paniqué, il chercha Potter des yeux.
— Fantôme, gémit-il, dites-moi que ce n'est pas…
La porte de la cuisine s'ouvrit avec force et Potter apparut alors. Son pull et son jean noirs juraient avec sa peau pâle. Il n'avait pas pour habitude de porter du noir. Drago ne le quitta pas des yeux. Le brun lança un sourire forcé à tout le monde.
— Le dessert est servi, déclara-t-il à voix basse en désignant la cuisine d'une main. Joyeux Noël, tout le monde.
Derrière lui, de petites assiettes à dessert arrivèrent en flottant dans les airs et se dirigèrent vers chacune des personnes présentes. Potter se saisit de la dernière.
— Et joyeux Noël à toi aussi, Teddy, murmura-t-il si doucement que personne n'entendit à part Drago.
Les yeux brillants de larmes retenues, Potter attrapa sa cuillère d'une main tremblante et mangea un bout de son dessert.
La gorge de Drago se serra. Dans les assiettes se trouvait une glace aux couleurs de l'arc-en-ciel.
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— S'il vous plaît, supplia Drago d'une voix brisée tandis que la scène s'évaporait. Ce n'est pas supportable.
Il s'efforça de respirer lentement, mais le fantôme ne lui laissa pas le temps de se calmer. Le brouillard qui les entourait se dissipa et ils atterrirent dans une nouvelle pièce, très différente de la dernière.
La grande cuisine de Potter.
Ce dernier, l'allure négligée, était assis à une table d'époque en chêne, une tasse de café à ses côtés. Les doux rayons du soleil matinal filtraient à travers la fenêtre. Lorsque le brun tourna la tête, les bras lui en tombèrent. Ses cheveux noirs, aussi indisciplinés qu'adorables, affichaient des mèches grises aux tempes.
Prenant une gorgée de café, Potter lisait avec attention le journal, les sourcils froncés. Les coins froissés lui frôlèrent les doigts lorsque l'une des deux pages s'affaissa. Potter ne sembla pas s'en rendre compte. Il s'était figé, les yeux fixés sur l'article qu'il lisait.
— Aaah, je savais bien que je te trouverai là, déclara une voix basse encore endormie.
Potter releva la tête, l'air… coupable ?
— Hé.
Drago se tendit. Il se moquait de ce Hé toutes les semaines. Malgré son appréhension, il s'obligea à se retourner.
Charlie Weasley entrait d'un pas tranquille dans la cuisine, torse nu, le jean sur les hanches. Ses bras et son torse puissants exposés à la vue de tous. Il arborait davantage de rides sur le visage que Potter. Elles se plissèrent quand il sourit, comme si elles étaient issues d'une longue exposition au soleil et non du fardeau du monde. Ses biceps, ses omoplates et son torse exhibaient plusieurs tatouages. Il déposa une main sur l'épaule de Potter et se pencha pour l'embrasser.
Alors que Potter se dépêchait de replier le journal, Drago aperçut l'éclat d'une alliance à son doigt.
Il parcourut la pièce des yeux, paniqué. C'était bien l'appartement de Potter, mais il remarqua des différences. Une sculpture en bois représentant un dragon au-dessus du réfrigérateur. Une bouteille de whisky sur le plan de travail, dont Potter n'aurait jamais bu une goutte. Des photos de Weasley accompagné d'autres hommes, tous aussi grands et aussi tatoués, les bras glissés autour des épaules, des sourires ridicules placardés sur les visages avec, en fond, des flammes qui léchaient le ciel.
— Non, gémit-il. Non, non, non. Sortez-moi de ce cauchemar, exigea-t-il.
— Tout va bien ? demanda Weasley.
Il se dirigea vers le réfrigérateur, en sortit une grande bouteille de jus de fruits et en but une longue gorgée.
— Bien sûr.
L'exemple parfait d'un mensonge éhonté… Mais Weasley n'insista pas. Ou ne le remarqua pas. Il sortit à pas lents de la cuisine, la bouteille à la main, et Potter poussa un soupir.
Il rouvrit le journal à l'une des pages du milieu, en lançant de temps à autre un coup œil à la porte. Il fixa la page si longtemps que son café se refroidit, la fumée cessant de s'échapper de la tasse. Une douleur sourde monta lentement en Drago alors qu'il se rapprochait.
— Qu'est-ce que c'est ? murmura-t-il.
Il ne savait pas très bien lui-même s'il s'adressait au fantôme derrière lui ou à Potter. Le fantôme ne l'arrêta pas. Drago se glissa alors sur la chaise qui faisait face à Potter. Tendant le cou, il aperçut sa photographie dans le journal. Il semblait avoir le même âge que Potter et souriait d'un air triomphal. Cela faisait froid dans le dos.
— Fantôme, chuchota-t-il, ne me dites pas que je suis mort. Tout sauf ça…
Il lut le gros titre et ne sut s'il devait se montrer soulagé ou perturbé par l'humeur de Potter.
L'HÉRITIER MALEFOY A ENFIN CONVAINCU LA BULGARIE ET A UNI LES FINANCES DU MONDE SORCIER DANS TOUTE L'EUROPE
Ce n'était pas une si mauvaise nouvelle que ça… Les doigts de Potter dessinèrent la mâchoire de Drago sur la photo. Le blond sentit son cœur sombrer.
D'un geste instinctif, Drago posa les mains sur la table et les glissa jusqu'à celles de Potter, s'arrêtant à quelques centimètres seulement. Il chercha son regard, troublé par la douleur qu'il y vit. Il était responsable de tout ça. Par peur d'admettre ses sentiments, il avait traité Potter avec brutalité. Le brun avait dorénavant fait sa vie sans lui. C'était… c'était bien, non ?
Ce n'était pas uniquement le fait de le savoir avec un autre homme. L'expression du visage de Potter le bouleversait. Il se demanda à quoi ressemblait la vie de cet homme sur la photo. C'est toi, se dit-il, et tu n'as pas changé d'un iota ta façon de vivre par rapport à aujourd'hui. Rogue l'avait prévenu : voilà donc le chemin qu'il empruntait. Il pouvait réussir sa vie professionnelle. Il pouvait obtenir des choses. Mais rien de plus.
Potter finit par immobiliser sa main.
— Est-ce que tu es heureux, au moins ? murmura-t-il à la photo.
Ce n'était en rien une accusation. Aucune amertume ne perçait dans cette question tout à fait sincère.
Drago essaya de lui toucher la main, mais n'y parvint pas sous sa forme fantôme.
— Non, répondit-il dans un chuchotement en baissant le regard.
Cette constatation lui fit l'effet d'une gifle et il dut prendre une profonde inspiration pour se calmer.
— Et toi ? ajouta-t-il.
Potter ne répondit pas, bien sûr, mais il tripota son alliance pendant un moment avant de la retirer complètement et de la déposer sur la table, loin du journal. Il fixait encore la photo de Drago alors que celui-ci était emmené ailleurs par le fantôme.
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Le brouillard les enveloppait à nouveau, avec persistance. Drago cligna des yeux à plusieurs reprises, histoire d'assimiler ce qu'il venait de voir. Incertain, il se tenait aux côtés du fantôme sans mot dire, perdu dans une sensation d'immobilité et de suspension du temps. Il leva une main à sa bouche en fixant le vide grisâtre.
Le fantôme se balança à côté de lui et Drago finit par lui jeter un coup d'œil.
— Dites-moi ce que je dois faire, murmura-t-il.
En réponse, le fantôme avança en le traînant avec lui.
— Dites-moi ce que je dois faire, bordel ! s'écria-t-il.
Toujours aucune réponse. Une nouvelle scène se forma devant lui. Drago entoura sa poitrine de ses bras en respirant profondément. Il s'efforçait de trouver le courage de faire face à ce qui allait suivre. Il regarda autour de lui avec appréhension. Ils étaient dans une boutique qui semblait paisible. La porte s'ouvrit, faisant sonner la petite clochette qui était suspendue au-dessus, et une femme vêtue pauvrement entra d'un pas traînant en s'agrippant à son petit sac.
— Bonjour, Angel, salua le commerçant en se redressant derrière son comptoir.
Il ne portait pas de robe, mais ses manches étaient relevées jusqu'aux coudes et ses brettelles relevaient son pantalon un peu trop haut sur son ventre.
— Bonjour, monsieur Knickle.
— Mes condoléances pour votre perte, ma chère. Vous recherchez toujours du travail ?
— Toujours. Vous savez comment c'est, de nos jours…
— L'une de mes belles-sœurs pourrait peut-être vous aider.
— Merci beaucoup, monsieur. Je vous ai apporté de nouveaux objets, aujourd'hui. Je pense que vous allez les aimer, ils sont très jolis.
— Voyons voir.
Elle ouvrit le sac et le vida sur le comptoir. Quelques objets imposants et une large quantité d'une étoffe délicate apparurent. Le commerçant fit glisser un bout de cette dernière entre ses doigts et siffla.
— De la soie ? demanda-t-il.
— Je pense. Qu'est-ce que vous en dites ?
Il tenta de se montrer peu intéressé.
— Peut-être. Qu'est-ce que vous avez d'autre ?
— Ça.
Elle farfouilla parmi les objets posés sur le comptoir et Drago tendit le cou. Elle désigna un petit porte-bouteilles en argent, dont les pieds avaient été sculptés pour imiter les griffes d'un animal. Il écarquilla les yeux. Elle montra ensuite un vase inimitable, en étain et en verre, de forme rectangulaire et évasée.
— Attendez une minute, commença Drago en tirant sur la manche du fantôme malgré la répulsion que ce geste lui inspirait.
Elle indiqua ensuite un coupe-papier doré, orné sur le manche de la lettre M.
La lettre des Malefoy !
— C'est à moi ! s'exclama Drago. Ces choses sont à moi ! Pourquoi cette femme les a-t-elle en sa possession ?
Le commerçant s'en léchait les babines mais s'efforçait de dissimuler son excitation.
— Des babioles sans réelle valeur, déclara-t-il en haussant les épaules. Je vous en donne trois Gallions pour l'ensemble du sac.
— Trois ! C'est fait en argent, ça, du vrai ! rétorqua-t-elle en mettant les mains sur les hanches. J'ai nettoyé sa maison pendant dix ans et, toutes les semaines, il me répétait encore et encore de ne pas égratigner son argenterie. C'était un homme sans cœur, et voilà ce qu'il advient aujourd'hui de ses précieux objets.
— Personne ne voudra les récupérer, vous en êtes sûre ?
Elle eut un rire sombre et exagéré.
— Lui ? Il n'a pas de famille. Ses parents sont morts depuis longtemps et il ne s'est jamais très bien entendu avec les gens. Et encore, je suis bien gentille en disant ça…
— D'accord, d'accord, répondit le commerçant en étudiant le vase. Je vous en donne quatre Gallions.
Elle avait l'air toujours aussi offensée.
— Vous n'avez même pas encore examiné ça, s'écria-t-elle en poussant l'étoffe vers lui.
— Non, non ! l'interrompit-il en posant une main sur l'étoffe. Vous allez la déchirer, avec le bois du comptoir.
Il ramassa l'ensemble de l'étoffe et la glissa délicatement par-dessus un bras, tout en tendant le tissu de l'autre main. Il scruta les coutures et Drago se rendit compte qu'il ne s'agissait pas d'un vêtement, mais d'un… drap. Le commerçant lança un petit sourire suffisant à la femme.
— Vous l'avez arraché directement du lit de ce pauvre homme ?
— Évidemment ! Il n'en a plus besoin, maintenant.
— Je parie que son corps reposait encore dessus quand vous l'avez retiré du matelas.
— Il y a peu de choses qui me choquent, vous savez, j'ai enterré quatre maris, rétorqua-t-elle en levant les yeux au ciel. C'était juste un matin comme un autre, sauf que cette fois, quand j'ai commencé à lancer mes sorts de nettoyage, il n'est pas sorti en trombe de sa chambre pour me disputer parce que je le réveillais. Quand j'ai frappé à sa porte pour récupérer mon chèque, il était allongé là, mort de chez mort. Je pense que ça remontait à quelques jours.
Le commerçant lâcha brutalement le drap en se reculant.
— Oh, ne vous inquiétez pas, rien de contagieux. C'était un vieil aigri.
— Très bien, dit-il en se grattant la barbe. Six Gallions, et pas un de plus.
Drago recula d'un pas en respirant profondément.
— D'accord, murmura-t-il au fantôme. D'accord.
Il se balançait d'avant en arrière, les bras serrés autour de sa poitrine.
— Est-ce que je peux changer le cours du futur ou tout est déjà foutu ?
Le fantôme se contenta de planer à ses côtés.
— Il faut que le futur change, insista-t-il.
Il se sentait mal. Sa solitude lui devenait insupportable
— Dites-moi que ce n'est pas trop tard !
Sur ces mots, l'imposant manteau à capuche que portait le fantôme s'effondra, entraînant l'esprit dans sa chute. La scène commença à virevolter et Drago se retrouva à nouveau emporter brusquement dans le brouillard, la présence magistrale du fantôme disparaissant à ses côtés. Son cœur se détendit lentement et il se sentit plus léger.
Il lui restait juste le temps qu'il fallait pour changer le cours du futur. Il en était certain.
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Il ouvrit les yeux.
Son premier réflexe fut d'écarter les paumes et de toucher ses draps.
— Mon lit, confirma-t-il. Mes draps. Oh doux Merlin, je ne suis pas mort.
Un éclat de rire hystérique lui échappa. Il s'assit en repoussant ses cheveux de ses yeux. Il était incapable de retenir son sourire benêt.
— Merci Rogue, soupira-t-il. Espèce de gros salopiot ! s'écria-t-il en riant. Je vais verser du champagne sur votre tombe aujourd'hui, vous m'entendez ? Vous aviez complètement raison. C'est bien ce que vous vouliez m'entendre dire ?
Attendez… Aujourd'hui, on était quel jour ? Avait-il manqué Noël ? Il saisit sa baguette et lança un sort Tempus.
— La veille de Noël ! s'exclama-t-il en jetant un œil à l'horloge. Dix-huit heures. Parfait.
Il n'avait pas raté le repas de Noël. Et maintenant, que faire ? Il s'empara d'une plume et d'un morceau de parchemin et écrivit à la hâte une lettre à l'intention de Gringotts afin d'offrir une somme généreuse à la fondation de Lovegood et de Chang. Il l'attacha à son hibou, qui s'envola sur-le-champ. Pas la peine de tenter le destin en se montrant radin avec tous ces satanés fantômes autour…
En réalité, il cherchait seulement à gagner du temps.
Il prit une profonde inspiration et, sans avoir la moindre idée de ce qu'il allait bien pouvoir dire, il jeta une poignée de poudre de Cheminette dans le foyer de sa cheminée en indiquant l'adresse de Harry. Il atterrit en trébuchant un instant plus tard et découvrit le brun devant le miroir du salon en train de redresser son col, comme s'il s'apprêtait à sortir. Il ne portait pas de robe – il ne se rendait donc pas à une réception organisée par le Ministère – mais sa chemise boutonnée était repassée et son jean propre. Bon sang, il sentait incroyablement bon. Tout juste sorti de la douche, ses cheveux humides bouclaient encore légèrement aux oreilles.
Il avait une bouteille de vin sous le bras – la fameuse bouteille de vin, remarqua Drago – mais il se dépêcha de la déposer sur une petite table et de se mettre devant pour empêcher le blond de la voir. Il fixait ce dernier en clignant des yeux.
— Malefoy ?
Drago hésita, complètement hypnotisé par son regard. Il ne savait même pas quoi dire, donc il fit ce qu'il avait l'habitude de faire, c'est-à-dire qu'il traversa le salon à grandes enjambées en direction de Harry, qui recula contre le mur. Drago le coinça avec son corps, prêt à l'embrasser jusqu'à plus soif. Et Harry le laissait faire, la bouche ouverte avec ahurissement. Drago se ressaisit.
— Non, attends. Si je fais ça, ça va se terminer en partie de jambes en l'air, et tu crois déjà que tout ce que je veux de toi, c'est ton corps, commença-t-il, la tête baissée vers le sol.
Il essayait de trouver quoi faire et quoi dire. Brusquement, il releva la tête.
— C'est ce que tu penses ? Bien sûr que c'est ce que tu penses, reprit-il en se mettant à faire les cent pas. Bordel ! Comment j'ai pu te laisser croire ça ? Pourquoi tu m'as cru ? Non, ne réponds pas à cette question. Et, maintenant, c'est trop tard ! Tu es marié à Weasley, tandis que moi je suis un vieux schnoque que tout le monde déteste, et Teddy…
— Teddy ? Qu'est-ce qu'il a ? demanda Harry, paniqué.
— Non, rien, répondit-il en levant la main. Il va bien. On va s'assurer qu'il aille bien.
Une expression étrange traversa le visage de Harry.
— On… d'accord. Revenons sur le fait que je suis marié à un Weasley, dit-il lentement en lui lançant un regard méfiant. Tu te sens bien ? Et…
Il plissa les yeux.
— C'est mon tee-shirt, ça, non ?
Drago arrêta de marcher. Il baissa le regard et tritura le bas du tee-shirt de la main.
— Oh. Euh… j'étais pressé. Tu… tu l'as laissé chez moi un soir.
L'expression de Harry changea.
— Et tu… le portes ? demanda-t-il doucement.
L'espoir qui perçait dans la voix du brun le fit trembler. Il lui lança un sourire timide en baissant la tête.
— Ça m'arrive, des fois. Pour dormir.
Les lèvres de Harry s'entrouvrirent.
— Je… écoute, reprit Drago. Soyons clairs : tu n'es pas marié à un Weasley ?
Harry écarquilla les yeux, un petit sourire aux lèvres.
— Euh, non. À aucun d'entre eux.
— Tu aimerais ?
— Drago ! Où est-ce que tu as été pêcher ça ? demanda-t-il en redressant les épaules. Si tu es de mauvaise humeur à cause d'hier soir, je suis désolé, mais c'est ce que je ressens. Maintenant, c'est le réveillon de Noël aujourd'hui et j'étais censé me rendre chez Ron et Hermione il y a déjà vingt minutes de ça. Si rien n'a changé depuis hier, alors j'ai bien peur de devoir te demander de partir.
Son sourire évanoui depuis bien longtemps, Harry regardait Drago avec une expression triste.
— Mais tout a changé ! Et tu n'es pas marié, merci Merlin ! s'écria-t-il avant de pointer un doigt sur lui. Je jure devant Merlin que je lui arracherai ses coucougnettes si je le surprends à simplement te regarder.
— Mais qui ça ?!
— On s'en fout. On s'en fout, parce que tu n'es pas marié à lui. Tu es encore… tu es là, Potter. Harry, se reprit-il. Est-ce que tu… ? Enfin, est-ce que je peux… ?
Harry tendit le bras et lui caressa les bras pour l'apaiser.
— Calme-toi, murmura-t-il doucement. Qu'est-ce que tu essaies de me dire ?
— Est-ce que tu accepterais… commença Drago avant de s'interrompre.
Il déglutit. C'était de la pure folie. Mais il n'arrivait pas à se sortir l'idée de la tête.
— … de dîner avec moi ? finit-il.
Harry cligna des yeux.
— Maintenant ?
— Et bien oui, répondit Drago en jetant un œil par-dessus son épaule. Tu as une cuisine, je crois, non ?
— … oui, j'ai une cuisine. Mais c'est le réveillon de Noël et je suis déjà en retard.
— C'est vrai, bien sûr. Désolé.
Drago se mordilla la lèvre. Il s'apprêtait à repartir lorsque Harry lui attrapa le bras.
— Drago, bon sang, déclara-t-il en se passant une main dans les cheveux. Ne te fous pas de moi, d'accord ? Qu'est-ce que tu fais ici, au juste ? Dis-moi la vérité.
Comment le formuler avec des mots ? Drago fit alors la seule chose qui lui vint à l'esprit. Il ne voulait pas envoyer le mauvais message, à savoir que seule une relation purement sexuelle avec Harry l'intéressait, mais s'il parvenait à s'y prendre suffisamment bien, peut-être réussirait-il à faire passer le bon message. Timidement, il tendit la main et, de son pouce, caressa la joue de Harry puis descendit jusqu'à sa mâchoire. Il l'attira à lui. Cela n'avait strictement rien à voir avec la façon dont il avait l'habitude de l'embrasser. Harry sembla comprendre (du moins, il ne le repoussa pas).
Quand ses lèvres touchèrent les siennes, il ressentit une petite étincelle. Sa main trembla contre le visage de Harry et, distraitement, il attrapa la chemise du brun de son autre main. Il fit son possible pour que ce baiser reste soft. Il se révéla en tout cas lent et doux. Harry entrouvrit légèrement les lèvres, juste assez pour que Drago puisse suçoter sa lèvre inférieure. Celui-ci finit par s'écarter.
— Je suis là parce que je ne veux pas te perdre, murmura-t-il contre ses lèvres. Il n'y a pas que du sexe entre nous. Mais je…
Il posa son front contre celui du brun, toujours aussi étonné que ce dernier ne l'ait pas déjà mis à la porte.
— Il faut que tu m'aides, là. Je ne sais pas comment on fait.
— Oh, souffla Harry en déposant une main sur la mâchoire de Drago. Tu… D'accord.
Il prit le contrôle du baiser et l'approfondit tout en maintenant une certaine langueur. Il entrouvrit les lèvres et Drago sentit sa langue titiller doucement la sienne avec un amour qu'il n'avait encore jamais eu l'occasion d'expérimenter. Ils haletaient. Le baiser s'enflamma lorsque Harry le fit reculer jusqu'à ce que son dos soit acculé au mur. Son corps se colla contre le sien et ses profonds gémissements eurent un effet immédiat sur Drago. Celui-ci laissa les doigts de Harry se glisser sous son tee-shirt, au creux de ses reins, pour jouer avec l'élastique de son pantalon de pyjama, avant qu'elles ne commencent à descendre plus bas.
— Le dîner, gémit Drago en le repoussant l'espace d'une seconde avant d'agripper ses épaules pour qu'il ne s'écarte pas complètement non plus. Un rendez-vous. Une discussion. Un vin dégueulasse. Du chocolat. Et ensuite ça. Peut-être. Tu sais que je peux faire plus qu'une simple partie de jambes en l'air.
Son visage se ferma en voyant l'expression de Harry.
— Tu le sais, n'est-ce pas ? insista-t-il.
Harry se mordilla la lèvre inférieure.
— Pas encore, répondit-il.
Drago sentit son cœur se serrer, mais il inspira profondément.
— Parce que je ne te l'ai pas encore démontré. Mais ça va changer. Et, crois-le ou non, je me débrouille en cuisine.
Harry soupira en lançant un coup d'œil à la cheminée.
— Je suis attendu chez Ron et Hermione, expliqua-t-il avec un regard d'excuse. Le réveillon, c'est une tradition. Noël, c'est toujours la folie quand on le fête au Terrier, alors la veille, on fête toujours le réveillon entre nous, histoire de…
Il s'interrompit en haussant les épaules.
— Oh. Très bien. Non, c'est… c'est important, répondit Drago.
Harry lui releva la tête avec l'index.
— Laisse-moi trois quarts d'heure, dit-il en l'embrassant légèrement. Commence à nous préparer quelque chose, monsieur le chef, et je le mangerai en revenant. Et on dînera ensemble. Sans s'embrasser.
— Oui, enfin… je ne voulais pas non plus dire aucun baiser.
Harry rit et se recula, regardant Drago avec une expression de pur bonheur sur le visage.
— Tu as voulu m'inviter à dîner, donc on dînera.
Il remit sa chemise en place. L'air perdu, il fit plusieurs allers-retours avant de prendre un cadeau qui reposait sur la table, puis d'attraper son écharpe, suspendue à un crochet. Il partit à grandes enjambées.
— La cheminée est de ce côté-ci, l'avertit Drago avec un petit sourire narquois en indiquant la direction de sa main.
Harry rougit.
— Je n'entends toujours aucune casserole sur le feu, rétorqua-t-il.
Devant la cheminée, la main renfermant de la poudre de Cheminette, il se retourna pour lancer un regard triste à Drago.
— Quand je vais revenir, tu ne seras plus là, en fait, n'est-ce pas ? demanda-t-il doucement.
— Si c'est le cas, c'est que j'ai fait cramé ton appartement et que j'ai été acheter des plats à emporter, répondit-il, le cœur serré.
C'était donc ce que Harry pensait de lui. Il l'avait bien cherché, en même temps. Espiègle, il ajouta :
— Tu vas les voir uniquement parce qu'il faut que tu demandes à tes amis quoi faire de moi, n'est-ce pas ?
Harry baissa la tête, les joues rouges.
— Évidemment.
Drago pointa un doigt vers lui.
— Trois quarts d'heure, pas une minute de plus.
Une fois Harry parti, Drago resta dans le salon soudain silencieux, à essayer de calmer les battements de son cœur. Il prit le temps de regarder autour de lui, ce qu'il n'avait encore jamais fait jusqu'à maintenant. La pièce était propre mais on voyait bien qu'elle était habitée : des magazines étaient étalés sur la table basse, un verre vide reposait sur une petite table et des clés ainsi que des pièces de monnaie étaient dispersées un peu partout. Tout ça était très… Harry. Ses yeux s'arrêtèrent sur la bouteille de vin. Harry avait semble-t-il voulu l'apporter à dîner chez ses amis.
Mais il avait renoncé.
S'accrochant à ce petit espoir, Drago se rendit à la cuisine.
Pas de sculpture de dragon. Pas de photos de Weasley ni de ses frères. Drago poussa un soupir de soulagement. Il embrassa la pièce du regard : il n'avait jamais passé beaucoup de temps dans la cuisine de Harry. C'était toutefois l'une des pièces qui en révélait le plus sur une personne. Il ouvrit le réfrigérateur et fut surpris de découvrir des asperges, des bières, plusieurs oranges (trop de pépins !), du lait entier, des œufs biologiques (vraiment ?), plusieurs bouteilles de sauces asiatiques et une grande bouteille de… Drago plissa les yeux… jus mangues/pêches. Beurk.
Il referma la porte et alla se laver les mains dans l'évier tout en réfléchissant à ce qu'il pourrait bien cuisiner. Sur le rebord de la fenêtre, au-dessus de l'évier, il aperçut des photographies encadrées qu'il n'avait encore jamais vues. La plupart représentait Weasley et Granger, mais il y en avait également une de Teddy. Ses lèvres s'entrouvrirent en voyant la dernière. Il la prit pour l'observer de plus près.
— Oh, souffla-t-il en dessinant les bords du cadre de son pouce.
C'était une photo d'eux deux au gala de Noël organisé par le Ministère, trois ans plus tôt. Ils se serraient la main et la seconde main de Harry reposait sur son bras alors qu'il se penchait vers lui pour lui glisser quelque chose à l'oreille. Ils n'avaient d'yeux que l'un pour l'autre. L'expression de leurs corps était tellement transparente que Drago se sentit rougir. Voilà ce à quoi tout le monde avait assisté ce soir-là ? Merlin. Granger avait dû les photographier. Ou peut-être Astoria… la traîtresse !
Et Potter l'avait fait encadrer pour l'exposer dans une pièce où il savait que Drago ne se rendrait jamais. Il devait la voir tous les matins, même après que Drago eut refusé de rester cette nuit-là. Il scruta ses propres traits de plus près sur la photo. Son visage était ouvert et son attention si concentrée sur Harry que tous ceux qui ont assisté à cette scène ont dû s'étonner d'apprendre qu'ils n'étaient pas déjà amants. Sa main tremblait légèrement lorsqu'il reposa la photo sur le rebord. Il resta là, à la regarder de loin pendant un long moment, perdu dans ses pensées.
— Hé.
La voix de Harry le surprit quelque peu. Et le réchauffa tout entier. Il se retourna.
— Tu as été rapide, murmura-t-il.
— Je leur ai dit que je ne pouvais pas rester, répondit-il en levant ce qu'il tenait dans les mains. Mais j'ai ramené de quoi manger. Non pas que je ne te crois pas capable de cuisiner, ajouta-t-il avec un petit sourire en coin en cherchant du regard ce qu'il avait préparé.
— Je sais cuisiner, insista Drago. J'ai juste été… distrait.
Harry jeta un coup d'œil aux photos derrière Drago.
— Ah. J'imagine que tu dois me trouver un peu bizarre, maintenant. C'est Hermione qui l'a prise, expliqua-t-il. Elle jouait avec son nouvel appareil photo. Elle n'avait pas eu l'intention de nous photographier, mais quand on a regardé toutes les photos qu'elle avait prises au cours de cette soirée-là, je la lui ai volée.
Drago s'approcha de lui et posa doucement les mains sur ses épaules.
— Pas forcément bizarre. Je l'aime bien, cette photo.
— Vraiment ?
— Mmm.
Il prit les assiettes des mains de Harry et les posa sur le plan de travail. En se tournant de nouveau vers lui, il tendit la main gauche.
— Potter, dit-il avec formalité.
Harry baissa les yeux sur sa main, l'air perdu, puis un grand sourire éclaira son visage.
— Malefoy.
Il lui serra la main. Drago se pencha, son autre main sur l'épaule de Harry, sa joue frôlant la sienne.
— On recommence à zéro ? murmura-t-il.
Harry respirait avec difficulté.
— Oui, répondit-il d'un ton hésitant. Écoute, est-ce que tu es sûr…
— Oui, déclara Drago.
Il n'avait jamais été aussi sûr de sa vie. Sa bouche se déplaça sur la mâchoire de Harry pour l'embrasser doucement et respirer son odeur.