Leurs respirations saccadées cassaient le silence de la pièce et de la nuit. Harry prit possession des lèvres du blond qui laissait ses mains caresser l'entièreté de son corps. Un gémissement s'échappa, vite étouffé par un baiser abrupte mais adroit du blond l'emmenant encore plus dans les brumes du plaisir.

- Ok, ok... chuchota le brun, reprenant sa respiration et s'éloignant de Draco. On va s'arrêter là pour aujourd'hui, je crois.

Le blond grogna enserrant un peu plus le jeune homme brun dans ses bras.

- Potter, la frustration ne me rend pas plus agréable tu sais ?

Harry ricana en se laissant rouler sur le lit, à côté du blond. Draco était rarement agréable depuis qu'ils habitaient chez les Weasley. Cela faisait quelques jours maintenant qu'ils étaient logés chez Bill et Fleur. C'était des hôtes très agréables et avenants mais on sentait qu'ils étaient perpétuellement tendus face à une éventuelle attaque ou autre. Ils passaient peu de temps avec eux. Pour le moment, Harry avait beaucoup trop de choses à penser pour essayer de paraître poli.

Hermione et lui tentaient de trouver un moyen de rompre le lien de Draco avec Voldemort, de briser le sortilège de la marque. Pour le moment, le Seigneur des Ténèbres s'était montré relativement clément et ne l'avait plus activée. Cependant, il ne fallait pas se reposer sur cette générosité et profiter de ce temps béni pour aider Draco.

A côté, Hermione tentait de lui apprendre les bases de l'Occlumencie et la Légimencie. Harry n'était pas un élève très doué pour cet exercice, il fallait l'admettre. Pourtant, l'envie était présente. Il souhaitait à terme contrôler ses « absences » et peut-être pouvoir s'introduire dans l'esprit de Voldemort quand il le voulait et non sous l'effet d'une émotion violente. C'était actuellement sa seule idée pour trouver les horcruxes. Pour les détruire, après avoir mis Hermione dans la confidence, l'idée du Feudeymon semblait être pour le moment la plus réalisable mais... où effectuer un tel sortilège tout en étant discret ? La jeune femme avait fait des recherches sur la coupe et le diadème, en lui montrant des photos. Harry essayait de s'imprégner de ces images pour pouvoir les projeter dans un futur proche, s'il retombait brutalement dans l'esprit du Seigneur des Ténèbres.

Se tournant vers Draco, il se rendit compte que le blond s'était rapidement endormi. Son regard se posa ensuite sur la table de chevet, à ses côtés. A l'intérieur, Harry avait caché le journal. Ce journal si mystérieux qui accaparait le reste de ses pensées depuis sa première utilisation. Il ne put s'empêcher de le sortir pour regarder inlassablement les feuilles vierges de toute écriture, cachant les nombreuses conversations qu'il avait avec Tom Jédusor. Il fallait qu'il lui parle.

Bonsoir, Tom.

Harry. Tu es bien tardif. As-tu réfléchi à notre discussion de tout à l'heure ?

A part son prénom et le fait qu'il était étudiant à Poudlard, Harry ne savait rien de ce Tom, ni même des propriétés magiques du journal. Etait-ce une sorte de journal intime capable de répondre à nos questions les plus profondes, nous aider au quotidien ? En appréhendant le caractère cynique et sombre du garçon dans le journal, Harry resta sceptique.

Oui, écrit-il laconiquement.

Il faut que tu te dévoiles. Cacher cette partie de toi ne fera pas quelqu'un de meilleur, bien au contraire.

Tom était un bon interlocuteur. Il savait amener sur les sujets qu'il souhaitait, savait comment faire pour que les gens se confient à lui et leur révèlent leur plus grand secret. Harry, méfiant, n'avait pas pu s'empêcher de lui dévoiler ce qu'il cachait au fond de lui : cette voix qui le hantait, qui lui disait de tuer... De la tuer ?

Je l'ai bien compris, Tom. La voix n'est pas une menace, juste une part de moi à accepter.

Bon garçon, s'afficha temporairement sur la page blanche.

Parler lui faisait du bien. Tom le comprenait. Il savait ce que Harry ressentait sauf que ce dernier ne semblait éprouver aucun mal à montrer cette part sombre de lui-même. Le brun n'avait pas les mêmes facilités. Comment faire quand il venait de débarquer dans un monde où les ténèbres sont synonymes de chaos et de meurtres ? Comment faire pour s'accepter alors qu'il était censé être celui qui devait les sauver de ces mêmes ténèbres ?

Souvent, Harry pensait que la folie le guettait. Cependant, il n'était pas stupide. Cette voix était apparue peu après sa première rencontre avec Draco, même un peu avant. Tout ceci était en lien avec la magie... et Tom pouvait l'aider. Il laissait sous-entendre que quelque chose à Poudlard pouvait l'aider à résoudre son mal... Qu'il savait d'où provenait la voix...

Je trouve que tu es fort absent. Que fais-tu de tes journées ? S'enquit le journal.

Je cherche à détruire quelque chose. Des artefacts magiques important mais dangereux.

Parfois, il pensait que ce n'était pas raisonnable de se confier à ce journal, de tout lui dire. Peut-être que cela venait du camp opposé ? Pouvait-on communiquer par journal interposé en temps réel ? C'était possible dans le monde moldu... alors pourquoi pas ici ? Cependant, l'attraction d'Harry était si forte qu'il ne pouvait résister au fait de tout lui dire, de tout lui révéler. Il n'arrivait pas à mentir.

Des artefacts magiques... Dis-moi en plus.

Je ne pense pas que ce soit une bonne idée.

Enfin, Harry. Je ne suis pas réel. Tout ce que tu écris ne peut sortir de ce journal. Tout disparaît. Et tant que tu m'as en ta possession, je ne risque pas de dévoiler tes petits secrets de Gryffondor.

Tom était un Serpentard. Harry en était persuadé. Il avait certaines expressions de Draco. Il savait qu'il avait été étudiant à Poudlard. Mais comment un étudiant de Poudlard peut se retrouver avec un esprit dans un journal ? Le brun était véritablement perplexe face à ce livre mystérieux. Mais après tout, peut-être que Tom pouvait l'aider...

Ce sont des objets qui gardent un morceau d'âme en eux et qui permettent à la personne qui l'a créé d'être immortel.

Tom mit un certain temps à répondre, surprenant Harry. Il était le plus vif des deux et le brun pensait que l'ennui n'était pas sans faute.

Des horcruxes.

Oui. Il ne fut même pas surpris que le jeune homme connaisse ce terme. Il semblait tourné vers les arts sombres.

Pourquoi les détruire ? Ce ne sont pas tes affaires.

La réponse semblait sèche et froide.

La vie n'est pas un jeu. Cette personne a déclenché une guerre dans notre monde. C'est le seul moyen de l'abattre.

Le pouvoir n'a pas de limite, parfois. Tu devrais comprendre cet homme qui a surpassé tous les autres pour se donner les moyens de réussir.

La phrase lui sembla incongrue, presque déplacée. Que voulait dire Tom ? Agacé, Harry décida de couper court à la conversation.

Bonne nuit, Tom.


- Tes barrières sont trop faibles, Harry, répéta Hermione pour la énième fois. Tu ne dois pas juste te contenter d'ériger un mur. C'est trop lisse, trop facile. Il y aura toujours une brèche et sur un mur uniforme, c'est du pain béni pour ton adversaire. Surtout Tu-Sais-Qui.

Harry soupira longuement. Ils avaient repris leur entrainement depuis une bonne heure. Après s'être entrainé en duel avec Draco, Hermione s'amusait maintenant à attaquer son esprit.

- Je te le répète, je pense que Rogue est plus à même à t'aider que moi.

Sans répondre, le brun reprit sa concentration. Il inspira longuement avant de créer de nouvelles barrières. Un mur était trop simple, trop fragile mais son esprit ne voyait pas comment il pouvait ordonner autrement ses souvenirs. Devait-il seulement les ordonner ? Créer des boites les unes après les autres ? Vides ou pas ? Une idée germa dans l'esprit du brun.

Des milliers de boîtes apparurent dans son esprit. Un à un, il envoya les souvenirs de manière un peu arbitraire, du moins pour les moins importants. Soucieux de son passé, il décida de protéger un peu plus les souvenirs liés aux Dursley en l'envoyant dans la pénombre de son esprit. La boîte était toujours là mais plus discrète. Il créa aussi des leurres. Une boîte dans une boîte dans une boîte... Telles des poupées russes, elles étaient destinées à faire perdre du temps, à penser qu'elles avaient de l'importance. Il ne savait pas si ça allait réellement fonctionner. Après tout, un hasard et son attaquant pouvait tomber sur un souvenir important... Finalement, il construit une pièce pour contenir toutes ces boites. Les murs de cette pièce étaient dotées de tableaux plus ou moins petits. Une multitude, peut-être une centaine. Derrière chacun des tableaux, il imagina un coffre fort, un code différent et un souvenir à l'intérieur.

Au final, la pièce semblait un réel foutoir. Il ne se voyait pas ranger parfaitement son esprit, juste l'ordonner un peu pour compliquer la tache de son assaillant. En ouvrant finalement les yeux, Hermione n'était plus là. Draco avait pris sa place, assis de manière nonchalante, le regardant avec envie. Harry rougit légèrement.

- On fait son timide, Potter ?

Ce dernier lui jeta un regard noir. Depuis quelques jours, la pression s'était relâchée. Ils se sentaient moins en danger. Leur esprit restait toujours vigilant, sursautant au moindre bruit ou mouvement suspect. Cependant, maintenant qu'ils avaient un but, c'était plus facile. De fait, leur relation avait pu avancer... Physiquement avancer. Ils n'étaient pas novices mais ils avaient l'impression de tout redécouvrir pour la première fois. C'était différent. Leurs sentiments étaient exacerbés par la peur de mourir, la peur de la guerre. Draco était terrifié par son propre corps et cette marque qui pouvait le faire souffrir à tout moment. Harry était terrorisé par son propre esprit et ce qu'il lui intimait de faire. Se plonger à corps perdu dans du plaisir sans se prendre la tête était leur manière à eux de survivre à tout ça. Ils n'avaient pas encore été jusqu'au bout et Harry était certain que cela ne viendrait pas avant la fin de la guerre. Etrangement, son côté romantique voulait que cette première fois ne soit pas un coup à la va-vite, dans un endroit qui n'était pas chez eux. Il voulait que ce moment soit mémorable.

- Granger est partie faire quelques recherches sur je-ne-sais-quel-sujet. Je vais finir ton entrainement pour la journée, Potter. Mais avant...

Draco se balança sur sa chaise de manière précaire, lançant un regard particulier que Harry ne sut interpréter. De la colère ? De la méfiance ?

- Si tu penses que je ne sais pas que tu traficotes quelque chose derrière mon dos, tu as tort, commença-t-il de manière doucereuse. Je te connais depuis plus longtemps que ces bouseux idéalistes. Et surtout, je connais particulièrement bien Dumbledore.

- Je-

Le blond se leva brusquement de sa chaise, la faisant tomber en arrière avant de prendre Harry par le col de sa chemise et permettre à leur visage de se faire face.

- Tais-toi, Potter ! Ragea-t-il. Je déteste qu'on me mette à l'écart et si tu penses faire ça pour me protéger – par Merlin, dis-moi que ce n'est pas cette raison – tu es l'homme le plus stupide que je n'ai jamais rencontré !

Il lâcha Harry pour relever la manche de sa chemise.

- Cette chose ne me rend pas faible. C'est un problème, je ne le nie pas. Mais ton lien avec le Seigneur des Ténèbres est aussi un problème. Est-ce que j'en fais tout un foin ? Je ne pense pas. Alors, j'espère que tu as une bonne raison de me faire des cachotteries, termina-t-il froidement

Etonné, le brun ne sut que dire. Il savait pertinemment que Draco allait remarquer quelque chose, il était loin d'être stupide. Mais au point de s'énerver comme ça...

- Puis-je avoir le droit de parole, monsieur ? Ironisa Harry en fusillant le blond du regard qui observait ses ongles avec arrogance.

- Certainement, Potter.

- Effectivement, je te cache des choses. Je ne suis pas naïf au point de penser que tu ne remarquerais pas que quelque chose se trame derrière ton dos. Mais ce n'est pas de mon fait. Cela m'emmerde clairement de ne pas te le dire mais...

- Dumbledore, coupa Draco subitement. Il ne me fait pas confiance.

- Non, répondit le brun. Enfin, je ne pense pas que ce soit la raison qui le pousse à t'écarter de l'Ordre. Il sait que tu es inoffensif et que tu veux me protéger. En vérité, je suis presque persuadé qu'il essaye de t'éloigner de moi. Diviser pour mieux régner, tu saisis l'idée ?

Draco resta silencieux pendant quelques instants, dardant son regard clair sur Harry, qui ne lâchait pas, ne se soumettait pas. L'un comme l'autre se provoquaient, cherchaient des réponses.

- Si tu comprends son intention, pourquoi acceptes-tu de ne pas me dévoiler ces secrets ? Même Hermione est au courant.

Le ton était désintéressé mais Harry pouvait sentir qu'il était blessé du manque de confiance de son compagnon.

- A part Hermione, Dumbledore et moi, personne n'est au courant de quoique ce soit. Ce n'est pas quelque chose que je peux prendre à la légère, Draco, soupira le jeune homme. Sincèrement, ça me frustre de ne rien pouvoir te dire car je suis persuadé que tu seras une très bonne aide pour Hermione. Quant à moi, j'ai l'impression d'être particulièrement inutile car je ne connais assez le monde magique pour l'aider minutieusement. Sache juste que...

Harry hésita. Il pouvait au moins dire quelques informations. Cela ne pouvait pas nuire à son objectif.

- … On cherche des objets et comment les détruire. Cela peut aider à mettre un terme à la guerre. C'est tout ce que je peux te dire. Mais... ne doute jamais de la confiance que j'ai en toi.

Draco acquiesça, satisfait. Il reprit sa place sur sa chaise après l'avoir remise correctement, se pencha vers le brun et lui prit soudainement l'arrière de la nuque pour le ramener jusqu'à lui dans un baiser enflammé. Harry haleta en sentant les mains de Draco le rapprocher de lui, descendant doucement vers le bas de ses reins pour le faire monter à califourchon sur ses cuisses. Le baiser était possessif. Bien qu'en-dessous, Draco dominait l'échange. Une de ses mains tenait solidement sa hanche pour qu'il reste en place tandis que l'autre était placée derrière la nuque pour mieux maîtriser le baiser. Harry tenta de rapprocher leur bassin, de créer une friction pour plus de sensation mais Draco arrêta d'un seul coup tout geste.

Reculant pour mieux reprendre son souffle, le brun lui lança un regard interrogateur. Les lèvres du blond, rouges et gonflées, s'étiraient en un petit sourire narquois. Draco plongea sa tête dans le cou de son compagnon, lui posant quelques baisers. Un murmure s'éleva à l'oreille d'Harry, le faisant frisonner.

- L'entrainement avant tout, Potter.

Draco fit descendre le brun de ses cuisses qui se remit de manière automatique sur sa chaise, jetant un regard estomaqué à son amant. Il se vengerait, foi de Potter. Le blond ne prit pas plus en considération son trouble et sa frustration.

- Je sais que Granger a essayé la légimencie sur toi mais, bien que ce soit une sorcière très intelligente, ce n'est pas sa spécialité. Mon père me fait pratiquer la magie de l'esprit depuis mon entrée à Poudlard. C'est difficile d'appréhender cet art en seulement quelques jours ou même quelques semaines, commença le blond. As-tu refait tes boucliers ?

- Oui, je... je pense avoir trouvé un moyen de protéger mes souvenirs. Du moins, les plus importants.

- Bien.

Draco reprit le visage de Harry entre ses mains. Ce face à face troublait Harry, toujours pas autant concentré qu'il devrait l'être à cause des événements juste avant. Il vit le regard du blond se froncer et quelque chose rentrer dans son esprit. Harry hoqueta sous la violence de l'intrusion. Cela n'avait rien à voir avec la manière de faire d'Hermione. Il eut à peine le temps d'ériger son mur – qu'il voulait quand même garder, toujours pour ralentir – que le blond était déjà en train de tenter de le briser.

Draco, quant à lui, ne se préoccupait peu de la façon dont il malmenait l'esprit d'Harry. C'était un entrainement. Le jeune homme devait se rendre compte de la réalité de l'exercice, de la violence et de la douleur que pouvaient avoir un tel geste. Il atterrit dans une pièce sombre. Le premier obstacle était un mur opaque. Draco soupira d'agacement en voyant les nombreuses failles. Il n'eut pas besoin de beaucoup de force pour briser ce mur : un petit geste de la main, un peu de concentration et le prochain obstacle s'ouvrait face à lui. Pour le moment, Harry était relativement calme et ne cherchait pas à l'expulser, ou plutôt était encore trop sonné par la violence de l'intrusion pour reprendre confiance.

C'était une pièce dotée de nombreuses boites et de tableaux sur les murs. Tout était en fouilli. Draco prit une première boite au hasard et plongea dans le premier souvenir.

Il tomba dans un endroit qui lui était familier. La cabane dans la forêt de Privet Drive. Harry était allongé dans un sofa, les yeux fermés de contentement sous les caresses d'une jeune fille, certainement une amie moldue.

- Charline, tu as des doigts de fée ! Soupira le brun.

- Je sais, Harry, répondit-elle avec un petit rire.

Draco savait que ce souvenir était inutile. Pourtant, il ne pouvait s'empêcher d'observer Harry. Il était serein, calme, apaisé. Il avait une vie relativement normale, n'était pas en danger. Parfois, le serpentard ne pouvait s'empêcher de culpabiliser pour ce qu'il avait apporté dans la vie d'Harry.

Cependant, il ne s'attarda pas plus et s'attaqua à une autre boite. Il devait se dépêcher. Harry commençait à rependre du poil de la bête et tentait désespéremment de le faire sortir de son esprit. Hermione lui avait dit que c'était la faiblesse du brun. Il pouvait protéger son esprit autant qu'il le souhaitait, gagner du temps... Il devait avant tout, protéger tous ses souvenirs et le faire sortir au plus vite. A ce que Draco constatait, c'était loin d'être gagné. Il sentait néanmoins une certaine pression autour de lui. Sans attendre, il ouvrit la boite... qui contenait une autre boite. Draco fronça les sourcils. Bonne tactique mais trop évidente. Il devinait qu'elle était vide. Il la jeta et était prêt à en prendre une autre quand un murmure l'interpella.

Tuer...

Draco regarda rapidement autour de lui, cherchant l'origine du murmure. Il se sentait en danger. Il avait la sensation que ce murmure résonnait à la fois de nul part et ailleurs.

Tuer... Je...

Draco se retourna brusquement, ayant presque l'impression de sentir un souffle derrière lui. Il frisonna. Qu'est-ce que c'était que ça ? Une stratégie de Harry pour protéger ses souvenirs ? Non, fit-il en secouant la tête, ce n'était pas son genre...

Sur ses gardes, il ne put empêcher la pression sur son corps augmenter subitement avant de se sentir attrapé et éjecté de la pièce avec une certaine violence. Le souffle court, il retrouva sa place sur la chaise face à Harry. Sa tête tournait un peu et il ouvrit difficilement les yeux à cause de la lumière. Il entendait la respiration erratique du brun. En le regardant, il était effectivement devenu rouge et suait à grosses gouttes. Draco brisa le silence.

- Ta stratégie n'est pas mauvaise. Même plutôt bonne. Mais tu dois être plus réactif et empêcher l'adversaire de briser même ce mur. Pitoyable ce mur, d'ailleurs, ajouta-t-il.

- Merci, répondit Harry. Ta manière de faire est radicalement différente de celle d'Hermione.

Et celle du Seigneur des Ténèbres est pire. Elle est même extrêmement douloureuse. Et encore... j'ai pris mon temps... je n'ai pas fouillé activement dans tes souvenirs.

- Tu n'aurais rien trouvé d'intéressant, rétorqua le brun.

- Oui, j'ai bien compris que les plus précieux étaient derrière les tableaux, ricana Draco. C'est évident mais intelligent. Renforce ton mur quand même.

Harry acquiesça, encore un peu sonné. Il était loin d'être prêt pour affronter le Seigneur des Ténèbres. Il devait s'entrainer plus.

- Reposons-nous. Même si je commence à en avoir assez d'être enfermé dans cette baraque, souffla le blond.

Il se posa dans le lit, invitant Harry à faire de même. Tous deux étaient sous tension. Draco ne savait pas comment aborder le sujet de la voix qu'il avait entendue à Harry. Ce dernier ne savait pas comment agir, non plus. Draco venait de découvrir quelque chose qui ne lui plaisait pas. Ce côté sombre... Ce côté sombre que Tom lui demandait d'accepter. Il ferma les yeux, sa tête calée dans le cou du blond et finit par s'endormir.


Un mal de tête vrillait douloureusement son crâne au point qu'il pensait avoir une absence d'un moment à l'autre. La sieste de la journée ne l'avait pas du tout aidé. Il se sentait même encore plus épuisé. Pourtant, cela ne semblait être qu'une migraine, une douloureuse migraine mais une douleur normale, pas liée à la magie. Du moins, il l'espérait.

Dumbledore était passé plus tôt pour s'enquérir de ses avancées. Elles étaient maigres, voir inexistantes et Harry avait senti l'agacement du directeur. Il avait retenu sa rage. Seul moyen de relâcher sa colère, c'était l'écriture. Il se déchaina sans vergogne sur Dumbledore dans le journal de Tom qui sembla grandement amusé.

Dumbledore n'est qu'un vieux fou.

Il est surtout manipulateur. Il me prend pour acquis dans son camp. Je déteste ses manipulations.

Harry... Tu détestes plus que ses manipulations. Tu le détestes lui. L'homme. N'est-il pas celui qui t'a laissé pourrir dans une famille moldue infâme pendant dix-huit ans ?

Le corps d'Harry se tendit en lisant les lignes qui disparaissaient lentement. Oh que oui, il détestait l'homme. La colère atténuée se raviva de plus belle. Il avait souffert pendant de longues années, attendant désespéremment quelqu'un pour le sortir de ce placard à balais.

Donne-lui toute ta haine. Il la mérite. Cette voix que tu entends... Ne la refoule pas ou elle te dominera un jour ou autre. C'est ta haine. Utilise-là pour prendre le dessus.

L'écriture fine et élégante de Tom continuait de défiler sous ses yeux. Quand une phrase disparaissait, une autre prenait place.

Non seulement il pensait pouvoir t'utiliser comme une vulgaire arme dans cette guerre, comme un objet, mais il veut aussi que tu réussisses là où il a échoué... pour ensuite acquérir tous les mérites. Je le connais, Harry. Il te veut sous sa coupe, il veut ta puissance. Mais toi... toi, mon enfant... tu es plus puissant que lui. Tu es capable de le battre, n'est-ce pas ?

Incapable de bouger tant il tremblait, Harry entendait les mots résonner dans sa tête.

Réponds.

L'ordre était implacable et comme un automate, il prit sa plume pour écrire.

Oui. Je peux le battre.

Ce n'est pas avec si peu de volonté que tu y arriveras. Est-ce que tu es un lâche, Harry ? Est-ce que tu vas le laisser te manipuler, t'utiliser comme un vulgaire sang-de-bourbe ?

« Tue-le... »

Non. Il ne me manipulera pas. Non, je ne serai pas son jouet.

C'est cela, Harry. Tu es fort.

« Tue-le... Vas-y... »

La voix prenait de plus en plus d'ampleur dans sa tête. Elle lui répétait encore et encore les mêmes mots. N'avait-elle pas raison ? Mais cette voix... Elle était lui. C'était sa propre voix qui souhaitait faire ça. Tuer Dumbledore. L'idée était si tentante. Personne n'avait compris ce qu'il avait vécu, ce qu'il avait du abandonner pour venir dans le monde magique. Personne ne comprenait. A qui la faute ? Dumbledore, bien sûr. Harry regarda fixement sa baguette posée sur le bureau à côté du pot d'encre. Si belle, si puissante... N'était-elle pas l'arme parfaite ? Il n'avait qu'à prononcer un sortilège, deux petits mots et une lumière verte viendrait accomplir sa vengeance. Vengeance, c'était un si beau mot... Il agrippa avec force sa baguette. Elle l'avait choisie parce qu'il était puissant. Plus que Dumbledore, ce vieux fou faible et usé. Ce serait si facile...

Harry ?

Ce qu'il se passa ensuite, Harry ne l'expliqua pas. Pris d'une rage incessante, poussé par le journal et cette voix intérieure, sa baguette se leva d'elle même en direction de la personne entrant dans la pièce. Les deux mots fatidiques effleurèrent son esprit, sa langue prêt à se mouvoir pour les prononcer et enfin, le soulager de cette rancoeur... Cependant, face au visage éberlué et presque effrayé de son amant, le brun tenta de se reprendre, de calmer ses tremblements... Il murmura, choqué.

Oh mon dieu, Draco... Oh putain j'ai failli te tuer... Je comprends pas ce qu'il m'arrive... Draco, geignit-il en s'effondrant sur le sol, soudainement vide de toutes forces.

Il sentait une pression se libérer, une charge sur son psychique disparaître. Il sentit d'un seul coup tous les effets de l'adrénaline disparaître : il était en sueur, tremblotant. Le froid l'envahit d'un coup vite effacé par la présence de Draco qui l'entoura de ses bras.

Harry, regarde-moi. Harry ! Ordonna le blond.

Le brun leva son regard vers son amant.

Ne laisse pas ta rager te contrôler. Tu ne dois écouter que toi et seulement toi ! Cette rage n'est pas toi.

Progressivement, les caresses de Draco l'apaisèrent. Il se détendit, arrêtant les tremblements. Seul reste de l'événement : une fatigue lourde, incompréhensible. Que venait-il de se passer ? Harry était sous le choc.

Son regard se tourna vers le journal, trônant toujours sur le bureau, ouvert. Il comprit alors que ce journal était loin d'être un objet inoffensif.