Surprise ! Me revoilà avec une nouvelle histoire qui ne contiendra que huit ou dix chapitres. C'est une pré-série où Sam à 17 ans et Dean 21 ans.

Attention, dans cette fiction le langage peut parfois choquer les oreilles sensibles. Le sujet abordé (l'usage de produits illicites) peut également heurter la sensibilité de certains…

Bien évidemment rien de m'appartient et c'est bien dommage…

Voilà c'est dit ! Alors maintenant bonne lecture…

Je te l'avais bien dit !

Chapitre 1

Quand on mène la vie qu'on a pas choisi, quand on vous dicte ce que vous devez faire, quand vous n'avez pas la possibilité d'en parler à quelqu'un d'autre que la famille qu'on ne supporte plus, on a deux fois plus de chances d'être tenté par l'envie de faire le contraire de ce que l'on vous demande, de faire l'interdit.

- Tu ne dois pas boire ! Je vais me soûler comme un ivrogne.

- Fils, tu dois m'obéir ! Vas te faire foutre.

- Tu rentres à l'heure sinon tu auras affaire à moi ! Demain, je fugue une semaine entière.

- Sam, tu m'écoutes ? T'es bien présent là ? Nan papa, je ne t'écoute pas, parce que je suis dans une bulle artificielle qui me permet de me sentir enfin vivant, de supporter ta présence en face de moi et de ne pas être ce petit soldat obéissant que tu souhaites voir !

- Hey Sam ?! S'impatiente Dean en me secouant par l'épaule. Aller bouge ton cul ! Papa nous a demandé de le rejoindre tout de suite ! Papa ! Papapapapapaaa.Oui chef Bien chef Connard

- Laisse-moi deux minutes et j'arrive… Je marmonne, légèrement euphorique, tout en ayant l'impression d'être sur un petit nuage. Tout semble lisse et beau. Je sais qu'intérieurement il y a un vide abyssal que je ne peux combler mais aujourd'hui, étrangement, je me sens léger.

Je me lève, prends mon sac, mon ordinateur portable et pars à la suite de mon aîné qui semble se déplacer aussi vite que la lumière.

J'admire mon frère. Il a une capacité pour encaisser toutes les remarques de mon père sans broncher et sans lui répondre que j'en reste scotché. Parfois, je vois ses lèvres trembler, je pense qu'il va enfin dire ce qu'il pense réellement, mais il les pince et respire fort par le nez. Il se maîtrise, me regarde souvent dans ces moments là et je pense qu'il puise en moi toute l'énergie qu'il lui faut pour rester calme. Il est fort mon frère pour supporter un père qui part pendant des jours et qui revient uniquement pour nous donner des ordres.

- Tiens, mets ça dans le coffre ! Me demande Dean en me lançant par surprise un sac qui contient notre linge sale.

Je le réceptionne de justesse et me dirige vers l'arrière de la voiture pour y engouffrer l'affreux parquetage lorsque je vois mon reflet sur le coffre arrière de la Chevrolet lustrée avec amour par mon frangin.

J'ai l'air difforme avec ma tignasse minuscule, mes yeux et mon nez énormes et le menton qui fuit comme une virgule.

J'éclate de rire.

Tout seul comme un con.

Dean se retourne et me regarde comme si j'étais un gosse de dix ans puis soupire d'impatience.

- Bon t'arrête là maintenant parce qu'on va prendre du retard !

Je referme le coffre assez fort pour le faire rager et m'engouffre à côté de lui dans l'Impala comme si je me jetais dans un fauteuil après une longue journée de marche.

- En route pour cinq heures de conduite non stop ! T'as vidangé ? Me questionne t-il.

Toujours aussi prévoyant Dean.

Je ne souris que d'un seul côté et le vois mettre sa cassette préférée d'AC/DC dans le vieux lecteur pourri encastré dans sa bagnole qui résiste contre vents et marées à tous les rembobinages et les changements de face depuis la préhistoire.

Pendant une heure je laisse mon regard absorber involontairement, comme une éponge, le paysage monotone d'une route en ligne droite sans fin. Mon esprit vagabonde sans but. Je refuse de réfléchir et j'y parviens assez facilement, abruti par le cocktail pharmaceutique que je me suis concocté avant de partir et par une demie somnolence artificielle qui me berce en même temps que la musique.

Si Dean savait ça il me tuerait, puis il me réanimerait pour me tuer de nouveau. Je sais que c'est interdit, que ce n'est pas vraiment moi qui ais fait ça, mais je ne sais plus comment faire pour m'évader de cette vie de merde que j'exècre. Et rassures toi Dean, jamais je ne prendrais de trucs énigmatiques proposés par un Don, un Bob ou un Dick Noooon, j'ai fait moi-même ma petite mixture qui a l'air d'être tout aussi efficace

- Ca va Sammy ?

La question de mon grand frère me fait sursauter, comme si je ratais une marche dans mon sommeil. Je me frotte les yeux tout en ayant l'impression d'être à côté de mes pompes, épuisé.

Non je ne vais pas bien, j'ai l'impression que tout mon corps hurle, qu'il étouffe et qu'à tout moment il cherche à éclater.

- Mouai… Je marmonne un chapelet de son qui ne veut rien dire et fixe de nouveau la route qui défile en face de moi.

- T'es sûre ? Insiste t-il. Parce que ça fait un moment que j'ai l'impression que tout te passe par dessus la tête ?

Touché !

- Tu nous fais quoi là ? Reprend-t-il. T'es pas concentré quand on chasse. Tu prends des risques stupides et surtout t'as l'air dans avoir rien à foutre…

Je le regarde avec mes yeux de cocker triste pour qu'il arrête de me faire chier avec ses questions, glisse ensuite mon regard vers la route et soupire pour mettre un terme à la conversation.

Je sais qu'il s'inquiète pour moi, d'ailleurs il doit être le seul sur cette putain de terre, mais j'ai maintenant juste envie qu'on me laisse tranquille dans ma petite bulle d'oxygène, mon monde éphémère de tranquillité. Qu'on me laisse vivre mes dix-sept ans comme un jeune de mon âge. Les études, les filles, et la fête qui se traduisent pour moi par « mission t-o-t-a-l-e-m-e-n-t impossible ».

Je m'imagine très bien dire à John en sortant d'un match de Rugby « Papa j'ai couché avec une fille de mon âge et je l'ai mis enceinte ! T'es bientôt grand-père » Je crois qu'il aurait une attaque et que je me retrouverais marié dans l'heure les bras attachés dans le dos et la tête enfoncée dans le bénitier…

- Tu souris encore comme un idiot Sammy ! Remarque Dean… Qu'est-ce qui se passe dans ta tête hein ?

- Je pense à papa, si je lui dis que j'ai mis une fille enceinte !

Dean sursaute et perd quelques secondes le contrôle de sa voiture puis me regarde franchement inquiet.

- Tu déconnes là ?! Dit-il sur le ton de l'humour mais je vois passer devant ses yeux une grosse incertitude.

Je souffle en levant les épaules.

- Comment tu peux croire un truc aussi con Dean ?!

Maintenant il a l'air furax et le silence reprend le dessus dans l'habitacle, durant cent-vingt-sept kilomètres exactement, quatre-vingt-dix minutes sans prononcer un mot.

Dean, imperturbable, fixe la route en suivant à bonne distance le 4x4 noir de notre père tandis que je reste toujours tassé inconfortablement dans mon siège dans une pesante léthargie.

Dean me fixe aussi discrètement, son cerveau doit carburer autant que sa bagnole à se demander pourquoi je reste aussi silencieux moi qui suis d'habitude si bavard. J'ai un peu pitié de lui, mais en même temps je lui en veux de prendre toujours la défense de papa.

John a dit chasse, John a dit creuse, John a dit brûle, repose-toi

Perdu, j'ai pas dit John !

Me voilà encore en train de rire. Dean va vraiment me prendre pour un taré et va avoir des soupçons si je continue comme ça ! Surtout qu'il mouronne déjà dans son coin et marmonne sans s'en rendre compte les paroles de la chanson que nous écoutons pour la vingtième fois consécutive.

Je lui en veux aussi parce qu'il gâche sa vie en suivant les pas de notre père dans sa quête de vengeance.

Contrairement à l'idée qu'on s'en fait, mon frère est, à vingt-et-un ans, vraiment un type intelligent et plein de finesse. Il a aussi un charme indéniable auprès des filles qui me donne l'air d'un plouc à côté de lui. Pourtant, quand je vois ce qu'il est en train de faire de son existence j'ai envie de lui foutre mon poing dans la gueule.

Réagis bordel avant qu'il ne soit trop tard ! Avant que tu ne finisses comme papa, aveuglé par son travail jusqu'à y laisser son âme.

Dean a également un humour unique. Personne ne lui arrive à la cheville et il possède un sens de l'auto dérision qui fait qu'on ne peut s'empêcher de l'aimer totalement.

Mais tout ça est étouffé par les ordres perpétuels de notre grand John Winchester.

Et voilà maintenant que j'ai un mal de tête qui pointe le bout de son nez. C'est toujours pareil ! Après avoir réussi à me détacher de tout, il arrive, précurseur d'un dur retour à la réalité, avec son lot de remises en questions, de malaises et d'inconfort.

Je grogne, m'agite dans mon siège et frotte mon front en remontant mes cheveux qui prennent un malin plaisir à retomber toujours devant les yeux.

- T'as des vers au cul ou quoi ? Me lâche Dean poétiquement.

- Va te faire foutre…

- Waouh ! Souffle Dean.

Il s'apprête à me dire quelque chose… et puis se tait, comme d'habitude.

- S'cuse moi. Lui dis-je un peu honteux.

Je baisse la tête et essaye d'avoir une pensée cohérente mais je n'y arrive pas et capitule. Dean ne m'a rien fait, il s'inquiète évidemment. Je ferais pareil si j'étais à sa place, il est plus qu'un frère pour moi, mais il n'est pas ma mère ni mon père, il est autre chose, un peu entre les deux, un troisième parent ou plutôt la seule constante sur laquelle je peux compter.

Je me gratte le dos de la main nerveusement sans m'en rendre compte et laisse les pulsations de mon mal de tête envahirent mon crâne.

Poum poum

- Sam ? Qu'est… fais… ien ?

Poum.. Poum.. Poum

Je vois un flash blanc devant les yeux qui prend des couleurs arc-en-ciel, c'est beau, mais je n'en profite pas car la douleur c'est confortablement installée en me faisant bien comprendre qu'elle n'a pas envie d'y être délogée.

J'attrape mon visage entre les mains et n'arrive pas à comprendre ce que me dit mon frère. Je le regarde avec des yeux ronds. Je ne savais pas qu'il parlait le yaourt couramment !

Je jette un œil vers la route et mon cœur a un raté lorsque je vois une femme en chemise de nuit tachée de sang qui s'y tient au beau milieu.

- Attention Dean !

Je crie et me saisis du volant, le tourne pour éviter la femme que je sais être ma mère et lutte avec Dean pour garder la maîtrise du véhicule.

- Mais qu'est-ce que tu fous Sammy ? Hurle-t-il en essayant de virer le volant dans l'autre sens et ralentir pour échapper au fossé abrupt qui longe la route.

Pourtant tout s'accélère, la tête me tourne, je me sens paniquer et en même temps je suis super fatigué, les muscles de mon corps se contractent involontairement alors que mon frère me lance rageusement un coup de poing dans la figure pour que je lâche prise et pour qu'il puisse reprendre le contrôle de sa voiture.

Poum. Poum. Poum. Poum.

Je ferme les yeux lorsque la voiture entre en contact avec la femme dans un bruit sourd mais très net.

On vient de percuter maman !

Je m'affole complètement terrorisé. Si bien que je ne vois pas Dean freiner comme un malade. Les pneus crissent et patinent sur l'asphalte. Il quitte cependant la route et plonge dans le fossé puis s'approche dangereusement de la forêt avoisinante à une vitesse folle.

Ma mère ?!

Poum Poum Poum Poum.

Cela ne peut pas être possible !

Et dans la confusion dans laquelle je me trouve, mon cerveau en vrac prend tout de même conscience que j'hallucine. Ma mère est morte depuis longtemps. Trop longtemps pour avoir des souvenirs d'elle à part quelques photographies jaunies montrées à la va-vite par mon père.

Du sang coule de mon nez et pourtant nous n'avons encore rien heurté. Mon frère à une de ses droites ! Je ne prends pas le temps de l'essuyer, car je suis trop proche de la nausée. Je regarde mon frère slalomer comme il peut, fonçant en chute libre dans les buissons pour nous ralentir. A chaque fois que l'Impala en percute un, nous ralentissons un peu plus.

Les lumières devant mes yeux clignotent comme un sapin de noël et je manque de souffle. Je n'arrive plus à respirer ni à contrôler mes mouvements puis soudain, comme au ralenti, tout devient blanc, je soupire soulagé et ensuite…

Plus rien.

Je n'entends pas Dean crier mon prénom. Je ne le vois pas percuter le tronc d'arbre immense qui nous projette contre la paroi en verre comme de vulgaires pantins.

Je ne vois pas non plus sa tête rencontrer violemment le volant lui entaillant profondément le front, projetant immédiatement une giclée de sang sur le compteur kilométrique.

Non, je ne vois rien

Rien de tout cela.

A suivre…