Bonjour à tous, ici Sorcikator. Je republie ici Sacrifiés, l'histoire Hunger Games que j'avais publié avec WoR sur son propre compte. Malheureusement, comme vous l'avez peut-être déjà appris, WoR ne se sent plus capable de continuer l'histoire. Je me suis donc donner pour objectif de poursuivre le récit jusqu'à sa toute fin. Déjà, j'annonce que je ne toucherai pas au personnage de Nyx Sommerhearst; il s'agit de la création de WoR, et bien que Nyx ait été la favorite de plus d'un, je ne m'autoriserai pas à l'utiliser. Nous serons donc exclusivement du point de vue de Malek Roxen, et je tâcherai d'être à la hauteur de tous et de toutes. Pour les nouveaux qui ne comprennent pas ce que je dis, cette histoire prend place durant la première Expiation des Hunger Games, d'abord débuté en collaboration avec mon amie WoR, mais que je poursuivrai seul. Il va sans dire que
Une juste punition
Palais présidentiel du Capitole, 25 ans auparavant.
Les gens rassemblés dans la salle de réunion richement décorée arboraient tous une mine sombre. Chacun de ces gens était un membre haut placé du gouvernement, les seuls qui avaient un véritable pouvoir sur Panem. Cette position était normalement un honneur, mais aujourd'hui, elle devenait un fardeau.
Ce n'est pas comme s'il n'y avait pas de raison de se réjouir. La sanglante rébellion des districts avait finalement été écrasée, et les troupes du gouvernement se déployaient en ce moment même afin d'étouffer les dernières poches de résistance. Sans parler de l'impressionnante armada d'hovercrafts qui filait, tous camouflages abaissés, vers le cœur de cette révolte stupéfiante : le district Treize. D'après les ordres qu'ils avaient reçus, les officiers chargés de cette mission ne devaient plus rien laisser de viable au Treize.
Amber Dawn n'avait aucune raison de douter que ce serait le cas. Malgré son jeune âge, elle était l'une des femmes les plus influentes du Capitole. Fière d'un diplôme en psychologie de l'université du Capitole et désormais ministre du contrôle et de la propagande, elle avait mérité d'entrer dans les secrets des dieux. Après tout, une femme qui avait pour ambition pas moins que le siège présidentiel se devait d'être forte. Forte et impitoyable.
Cette rébellion avait toutefois enseigné une chose au gouvernement. On ne pouvait plus se fier aux districts. Si on leur en laissait la chance, ils se révolteraient à nouveau dès qu'une occasion de ralliement se présenterait. Ce jour ne devait jamais arriver. C'était le but de cette réunion, d'ailleurs. Trouver un moyen de s'assurer la soumission de la population des districts.
Le vieux président Marakath prit la parole le premier.
-Merci d'avoir répondu si vite à ma convocation, dit-il d'une voix qui trahissait la fatigue. Ce que nous nous apprêtons à discuter ici déterminera l'avenir de tout Panem.
-Les rebelles sont vaincus, leurs forces en déroute et le Treize ne sera bientôt que des ruines, souleva un diplomate intrigué. Je ne vois pas où est le problème.
-Rien ne sera plus jamais pareil, Dolovan, le réprimanda Marakath. Si les districts ont prouvé être capables de se rebeller une fois, ils seront capables de recommencer. Avec ou sans l'aide du Treize.
Amber plissa les yeux en dévisageant Dolovan. Elle n'avait jamais supporté ce pleurnichard à la vision trop restreinte. Il était incapable de voir plus loin que le bout de son nez, et c'était une chose qu'elle trouvait plus qu'agaçante.
-Il nous faut donc, continua le président, trouver une nouvelle solution pour museler définitivement les éventuels rebelles. Des suggestions ?
-Nous avons bien capturé la plupart des commandants rebelles des districts ? demanda Vallas, ministre de la Défense. Pour moi, une exécution publique de tous ses chefs tuera ce qui reste de la rébellion.
-Sauf votre respect, intervint Amber, certaine que son heure était venue, je dois vous contredire là-dessus.
Les regards se tournèrent tous vers elle, l'air intrigué. Visiblement, ce militaire obtus n'avait pas été le seul à penser qu'une simple exécution des dirigeants de la rébellion serait suffisante. C'est pourquoi elle se leva de son siège et prépara l'exposée qu'elle avait préparée toute la nuit.
Elle expliqua les conditions de vie des districts. Les lourdes taxes, les prix de plus en plus exorbitants des denrées de base, des heures de travail trop nombreuses. Des mois avant le déclenchement de la rébellion, le peuple devenait mécontent, et les manifestations de colère ainsi que les actes de vandalisme se multipliaient à un rythme alarmant. Le Capitole avait tenté la méthode douce pour commencer, en offrant des avantages de travail tel que le dimanche congé et les primes pour les familles nombreuses. Dans un contexte où la démographie humaine était dangereusement basse, cela semblait légitime.
Cela ne leur avait pas suffi, oh non. Toutes les propagandes du monde n'auraient su combler l'écrasante différence entre le mode de vie facile du Capitole et la misère crasse des districts. Le prédécesseur d'Amber à ce poste avait surestimé l'efficacité de ses spots de propagande qui affirmaient que « tout allait bien ».
Lorsqu'il est devenu évident que les mécontents s'organisaient dangereusement bien, il avait encore été trop mou pour intervenir convenablement. Il s'était contenté de suggérer des flagellations publiques plus fréquentes, de resserrer l'étau sur les districts. La tension ne fut qu'accrue. Puis, vint le massacre du district Neuf. Des forces de sécurité ouvrirent le feu à balles réelles sur des agriculteurs désarmé, ne laissant aucun survivant. Encore aujourd'hui, la ministre était encore soufflée par un tel gâchis. Des morts ne produisent pas de ressources. Mais ils peuvent devenir des martyrs.
Et c'est ce qui arriva. Les treize districts se soulevèrent, et c'est seulement maintenant, six mois plus tard, que le Capitole avait réussi à reprendre les choses en main. Toutefois, ils ne pourraient pas nécessairement compter, à l'avenir, sur les montagnes Rocheuses qui encerclaient la cité pour se protéger. Une autre rébellion pourrait détruire tout ce que le Capitole avait mis des générations à construire.
-Nous savons tout ça, s'irrita Dolovan. Des erreurs ont été commises, et les coupables punis en conséquence. Nous ne referons pas les mêmes…
-Erreur ! coupa sèchement Amber avec un calme désarmant. Vous êtes en train de faire exactement les mêmes. Vanter la destruction du Treize et condamner à mort les dirigeants rebelles seront efficaces un temps pour effrayer la populace, mais éventuellement, leur colère reviendra, plus forte que jamais. Nos exemples d'aujourd'hui deviendront les martyrs de demain.
-Et je suppose que vous avez mieux à proposer ?
Oh que oui, elle avait mieux à proposer. C'était si génial, si délicieusement horrible qu'elle en avait des frissons. Mais encore fallait-il convaincre cette bande d'incapables vieillissants de la suivre jusqu'au bout.
-Qui d'entre vous se rappelle l'origine du nom de notre nation ? dit-elle en gardant le contrôle sur ses émotions.
-Panem, répondit le président Marakath. Dans l'antique langue latine, cela veut dire «pain». Les fondateurs de Panem désiraient une nation prospère sur les cendres de l'ancienne civilisation.
-Dans l'ancien Empire romain, il existait une phrase qui désignait bien leur puissance. Panem et circenses. Du pain et des jeux. Grâce à cette formule, le tout-puissant empire de Rome a perduré durant près d'un millénaire.
-C'est ça votre solution miracle ? s'étonna Vallas. Des jeux ? Vous voulez distraire les districts pour leur faire oublier leur misère ? Vous êtes folle!
-Croyez-moi, ces Jeux que je vous propose sont très…spéciaux. Mon équipe de conseillers et moi avons travaillé là-dessus pendant presque quarante-huit heures.
Elle dévoila donc son plan devant l'assemblée, guettant la moindre réaction à mesure qu'elle parlait. Cela n'allait pas plaire à tout le monde.
Plutôt que d'exécuter les chefs rebelles, elle suggérait de les renvoyer chez eux et de prendre, à la place, deux enfants par districts, un garçon et une fille. Ensuite de quoi, ces enfants seraient envoyés dans une arène construite à cet effet et auraient pour obligation de s'entretuer les uns les autres en direct, jusqu'à ce qu'il n'en reste qu'un. Ce vainqueur serait ensuite renvoyé chez lui, et sa famille ne manquerait plus jamais de rien.
Quelques diplomates étouffèrent des exclamations d'horreur. Mais beaucoup, nota-t-elle avec satisfaction, continuaient de l'écouter avec grand intérêt. Lorsqu'Amber croisa le regard du président, ce dernier hocha la tête et lui enjoignit de continuer.
L'idée était de ne pas s'arrêter à un seul événement punitif. Pour que l'effet démoralisant se poursuive, il faudrait répéter les Jeux tous les ans, à chaque fois avec de nouveaux enfants et une nouvelle arène. Non seulement ils terroriseraient les districts en leur prenant leurs bambins, mais en plus, faire circuler des spots de propagande suffisamment bien tournés pourrait convaincre une part importante de la population qu'elle était elle-même responsable de cette horreur. Car c'était la rébellion qui forçait le Capitole à prendre des mesures disciplinaires.
Peut-être même que ces Jeux de la mort deviendraient un événement attendu sur Panem. Les Romains d'autrefois avaient soif de leurs combats de gladiateurs. Amber insista sur le fait qu'il fallait jouer la carte du spectacle, s'attirer un public. Et faire briller l'espoir que gagner apportera des bienfaits à la famille et au district entier. Les détails restaient à examiner.
-Bien, annonça le président à la fin de l'exposé de la ministre Dawn. Considérant qu'il s'agit d'une décision cruciale, il va nous falloir une majorité de cinq votes.
-Je refuse d'être associé à cette barbarie ! clama fortement Dolovan en défiant les autres du regard. De quel droit entraînerions-nous la mort d'enfants innocents ? Je vote contre.
-Je suis…pour, annonça Vallas, surprenant même Amber. La peur; voilà ce qui affaiblira les dissidents. Nous leur montrerons que nous n'avons pas peur d'agir.
-Malgré tout le respect que je dois à la ministre Dawn, enchaîna une autre diplomate, je rejette sans compromis son projet insensé !
-J'approuve cette idée, au contraire, continua le ministre de la Culture. Nous pourrions faire de cet événement le plus populaire des ondes !
Ainsi continuèrent les votes. Lorsque la quinzaine de personnes eut fini de donner son opinion, il devint évident que le camp des opposants aux Jeux souffrait d'une minorité écrasante. Amber se permit un sourire victorieux.
-Qu'il en soit ainsi, hocha Marakath de la tête. Nous recevons dans deux jours les maires des douze derniers districts, afin d'officiellement signer le traité de Trahison. Ils devront soit accepter nos conditions…soit subir le même sort que le Treize.
La majorité des districts aura vu passer les hovercrafts dans leurs cieux, et lorsque la nouvelle de l'annihilation du district Treize, tous s'empresseront de signer un cessez-le-feu. Qu'importe le prix à payer. Amber Dawn comptait justement là-dessus.
-Toutefois, termina le président, j'aimerais savoir si vous avez trouvé un nom pour vos Jeux. Il en faut un, n'est-ce pas ?
-Bien sûr, monsieur. Si vous prenez la peine de lire le dossier que je vous ai remis…
Le regard du président parcourut le dossier brun qu'on avait déposé devant lui, puis s'illumina en lisant les lettres rouges. Puis, il annonça d'une voix grave et presque cérémonieuse :
-Très bientôt, messieurs, dames, nous assisterons à la toute première présentation des HUNGER GAMES. Puissent-ils nous apporter la paix.
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Palais présidentiel du Capitole, temps présent
La présidente Dawn – comme elle aime son nouveau titre ! – caresse la petite boîte usée par le temps du bout des doigts. Vingt-cinq ans ont déjà passé depuis cette réunion déterminante où le sort des districts a été scellé. Elle se souvient comme si c'était hier du premier jour des Hunger Games, qu'elle supervisa elle-même en tant que Haute-Juge, un rôle créé spécifiquement pour ce divertissement.
Elle s'assied lentement dans son élégant fauteuil de cuir et ferme les yeux. Le jour est venu d'ouvrir de révéler la première édition spéciale Expiation des Jeux. Elle regrette presque de ne plus être Haute-Juge, mais elle n'abandonnerait son titre de Présidente pour rien au monde, maintenant qu'elle l'a enfin reçu.
On cogne à sa porte et elle se redresse, lissant ses cheveux.
– Entrez, dit-elle d'une voix calme.
Sa secrétaire passe timidement la tête dans l'encadrement.
– Présidente Dawn, dit-elle d'une petite voix.
– Qu'y a-t-il ?
– Vous passez aux ondes dans quelques minutes.
Amber Dawn soupire et se lève lentement. Elle attrape la boîte et suit sa secrétaire. Elles traversent les dédales de couloirs pour finalement arriver au plateau de tournage, qui grouille de techniciens affairés. Calmement, elle se place devant les caméras. Ce message serait passé sous les yeux des districts, juste avant ce qu'ils croiraient être une Moisson bien banale. Elle fait son habituel sourire chaleureux.
–Bonjour à vous, peuples de Panem ! Comme la plupart d'entre vous le savent, nous célébrons aujourd'hui le vingt-cinquième anniversaire des Hunger Games et de la victoire des rebelles durant les jours sombres. À cette occasion, les créateurs des Jeux avaient prévu un petit quelque chose pour marquer l'événement; l'édition spéciale d'Expiation !
Elle reprend sa respiration et capte du regard le metteur en scène qui soulève ses deux pouces en hochant la tête. Encouragée, La présidente poursuit :
-Vous vous demandez sans doute de quoi il s'agit. J'ai donc ici une petite boîte avec plusieurs enveloppes. Chacune d'elle correspond à une Expiation future; et chaque Expiation propose une…«entorse» aux règlements habituels. Cette particularité aura une symbolique bien précise afin de rappeler pourquoi les Jeux existent. Mais ne perdons plus de temps, d'accord ?
Elle ouvre lentement la boîte et en sort un petit papier légèrement jauni. Le dépliant lentement, elle y reconnait sa propre écriture. Cela fait bien longtemps qu'elle n'a pas vu le contenu de cette boîte, mais elle se souvient de chaque mot, chaque phrase. Elle lève les yeux, et sans même lire le papier, récite la phrase d'une voix douce, mais finale :
-Pour la toute première Expiation, la population adulte des districts devra elle-même choisir les tributs qui les représentera dans l'arène. Afin qu'elle se rappelle que c'est par son ardeur à verser le sang que celui de ses propres enfants doit être versé.
Que les Jeux… commencent.