Partie 1
« L'Amour a ses raisons que la raison ignore. »
P.O.V. Harry
_Bonjour! Claironnais-je avec un grand sourire.
_Bonjour..., fut la réponse morne et froide que j'eue en retour.
Comme à son habitude, l'homme qui vient d'entrer ère entre les différentes étagères, caressant de ses longs doigts pâles les reliures des livres avant d'en choisir un et de s'installer près de la fenêtre pour lire paisiblement.
Cet homme, cela fait six mois qu'il vient ici, chaque jour. De 18h30 à 21h00, il lit sans s'arrêter, oubliant ma présence, me remarquant à peine.
Je m'appelle Harry Potter et j'ai 25 ans. Je tiens une librairie située dans un quartier sombre et peu fréquenté qui ne me rapporte pas beaucoup. La nuit, je travaille dans un restaurant de luxe qui, lui, marche plutôt bien et grâce auquel j'ai plutôt un bon salaire. Malgré ça, je n'ai jamais voulu me séparer de ma librairie. Elle appartenait à mes parents qui adoraient les livres. Ils sont morts quand je n'étais encore qu'un enfant, mais je me souviendrais toujours de l'odeur de poussière qui se dégageait des vieux parchemins défraichis où de la sensation du papier rêche qui glissait sous mes doigts. Quand ils sont morts, j'ai été vivre chez mes parrains, Sirius et Remus. La boutique fut mise à l'abandon et fut oubliée.
J'ai fait des études de littérature, puis, une fois mon bac en poche, j'ai décidé de m'y installer. Depuis, mon existence est tranquille. Trop tranquille à vrai dire. Ma seule distraction c'est le dîner traditionnel de mes parrains le dimanche et...Lui.
Lui, c'est cet homme qui vient tous les jours dans ma boutique. Lui, c'est cet homme magnifique dont je ne peux détacher mon regard. Oui, je sais. Tomber amoureux d'un homme c'est assez déstabilisant. Certains trouveraient ça dégoûtant, mais moi qui ai été élevé par des homosexuels, cela ne me fait ni chaud ni froid. Sauf que j'ignore si cet inconnu l'est aussi.
Et puis, de toute façon, même si il l'était, il ne tomberait jamais amoureux de moi. Je suis si discret que j'en suis presque invisible. Et je ne suis pas vraiment ce que l'on peut appeler un top model. Je suis petit, maigre, avec des habits aussi larges que des sacs poubelles, une coiffure proche de celle d'un nid de corneilles, de petites lunettes rondes posées sur le bout de mon nez retroussé et, le pire, c'est que je suis d'une timidité maladive. En bref, je suis tout le contraire de cet étranger.
Le décrire ? C'est assez difficile. En un mot il est...parfait. Grand. Fin mais musclé. Le port toujours droit, des manières délicates et aristocratiques. Il a des cheveux si blonds, qu'ils en deviennent blancs au soleil. Courts à la nuque, il avait une frange indisciplinée qui barrait son regard et un anneau d'argent à l'oreille droite. Son visage est anguleux, le menton pointu, le nez est droit et long. Mais ce que j'aime le plus chez lui, ce sont ses yeux. Des prunelles aussi froides et acérées que la glace qui vous transperce de leur intensité. Je ne sais toujours pas s'ils sont gris ou bleus, je n'ose pas vérifier. Mais je sais que, quand il me regarde, mon cœur bat avec une force que je n'aurais jamais soupçonnée et qu'une étrange chaleur m'envahit. Oui je sais, ça fait fleur bleue, hein ? Mais...pourtant...
Il ne m'a jamais adressé la parole. Sauf pour dire bonjour et au revoir bien sûr. Et encore...Je lui suis totalement indifférent. Et, je l'avoue, ça me rend malade. Comment ai-je pu tomber amoureux de lui ? Je ne le connais même pas. Je ne sais même pas qui il est, ce qu'il fait, ce qu'il aime...Alors pourquoi ? Pourquoi est-ce que je ressens ça ?
_Excusez-moi.
Je sursaute violement en entendant cette voix grave et lève soudainement la tête, un air un peu ahuri sur le visage. Il est là, en face de moi.
Gris… Ses yeux sont gris.
_O-oui..?, bégayais-je.
_Ça serait pour acheter un de vos livres. Mais, il est assez haut et il n'y a pas d'échelle.
_Oh ! bien sûr...je...je reviens tout de suite...
Arrête ça, c'est stupide ! Ce n'est pas parce qu'il te parle qu'il est amoureux ! Il veut juste acheter un livre !
Je porte l'échelle jusqu'à une étagère qu'il m'indique et je grimpe lentement.
_Lequel est celui que vous voulez ?
_ « Le jour » de Jenny Wales.
Oh...Je ne pensais pas qu'il lisait ce genre de choses. Des romans d'amour, lui ? Je me penche vers la droite et attrape délicatement le livre. C'est à ce moment que...
_Vous êtes libre ce soir ? Me demanda-t-il brusquement.
_QUOI?!Hurlais-je.
Je me tourne violement mais mon pied glisse et je me sens tomber dans le vide. Terrifié, je ferme les yeux, sentant un cri se perdre dans ma gorge. Mais, contre toute attente, j'atterris contre quelque chose de chaud et de doux. Tremblant, j'ouvre doucement les yeux et me fige soudainement.
Oh non...C'est mauvais...Très mauvais...
Lui m'a rattrapé. Un bras autour de mes épaules, l'autre sous mes genoux, il plonge son regard troublant dans le mien, troublé.
_Est-ce que ça va? S'enquit-il.
AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAA Ahhhhhhhhh ! Ce n'est pas permis de dire ça avec un regard pareil !
_Ou-oui...Vous...Vous pouvez me lâcher maintenant...
Il me fixe bizarrement avant de me poser lentement sur le sol. Dansant d'un pied à l'autre, le rouge aux joues, je lui tends son livre, tête baissée.
Il me donne l'argent et se détourne vers la sortie. Mais avant de sortir, il s'arrête et se tourne à demi vers moi.
_Au fait...Comment vous appelez-vous ?
_Euh...hum...Pou...pourquoi vous voulez savoir ça ?
_Je ne sais pas, me répondit-il.
_Ah...Eh bien...c'est...Harry Potter...
_Harry Potter, hein? répéta-t-il. Cela me dit quelque chose.
_Mon père...était...romancier...C'est sûrement pour ça...
J'ai oublié de vous dire une petite chose. Je suis moi aussi écrivain. Sirius dirige une maison d'édition alors ça a été assez simple. Mais, apparemment, le livre n'a pas eu un franc succès. A vrai dire, c'est à peine si on le regardait.
_Mm...Peut-être..., marmonna l'inconnu avant de s'en aller.
Resté seul, j'ai commencé à ranger des livres, la tête ailleurs. Jusqu'à ce qu'une pensée me traverse subitement l'esprit.
Pourquoi je ne lui ai pas demandé son nom ?
IDIOOOOOOOOOOTTTTTT !
Cela fait une semaine qu'il n'est pas venu.
Une semaine…
Sept jours…
168 heures, plus exactement.
Et je n'en peux plus. J'ai bien essayé d'ignorer ce poids dans ma poitrine qu'avait provoquée son absence. J'ai vraiment tout essayé. Mais...mais...Je ne peux pas.
Aujourd'hui, on est dimanche. C'est le jour où je vais manger chez mes parrains. Et, pour une fois, je n'en ai pas envie. Je claque ma main sur ce fichu réveil et pose mon bras sur mon visage, l'envie de me rendormir est assez tentante mais Sirius ne me le pardonnerais pas.
Pourquoi dois-je aimer ce type ? Je ne sais rien de lui, sauf qu'il est beau, froid. Qu'il lit des livres d'amour, qu'il est assez aisé, et qu'il n'a pas l'air de m'apprécier.
…
Qu'il a des cheveux superbes, des yeux sublimes, une bouche fine mais tellement sensuelle !
AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHHHHHHHH HHH ! Ma vie est fichue ! Je ne devrais pas penser cela, je ne devrais pas penser à lui de cette manière…
Alors...Pourquoi ? Merlin, qu'est-ce que j'ai fait au nom du ciel pour mériter ça ? Pourquoi me faire l'aimer alors que cet amour est impossible ? Dites-moi...
Un soupir las franchit mes lèvres et je me lève pour avaler vite fait un jus d'orange avant d'aller me doucher. Je n'ai vraiment aucune envie d'aller voir Sirius et Remus. Je veux juste être seul, mais ça, il ne le comprendrait pas. J'ai toujours été un garçon plein de vie, qui dit oui à tout et n'importe quoi, qui rit pour un rien et qui sourit au monde. Mais là, je...je n'en ai plus la force. J'ai l'impression d'être complétement amorphe, comme si tout autour de moi était devenu gris et noir. Je veux simplement...revoir son visage...
Sentant les larmes me venir aux yeux, je coupe brusquement l'eau et me sèche vigoureusement. Il faut que je fasse un effort de beauté aujourd'hui. Sirius m'a dit qu'il avait invité certains de ses collègues de travail à son barbecue, il faut que je fasse bonne impression.
J'enfile mon boxer avant de mettre un pantalon noir que Remus m'a offert à Noël et qui me moule un peu trop je dois dire. Torse nu, je me brosse les dents avant de coiffer mes cheveux avec du gel ce qui leur donne toujours un air de sac de nœud mais un peu plus ordonné. Je mets ensuite des lentilles de contact puisque je n'utilise mes lunettes que lorsque je travaille à la librairie et me vêt d'un tee short noir qui colle au corps avec un veston vert en velours au-dessus pour mettre une touche de couleur. Voilà, je suis prêt.
Je prends l'ascenseur pour descendre au garage qui se trouve au sous-sol et me dirige d'un pas tranquille jusqu'à ma moto. Après avoir mis mon manteau de cuir, mes gants et mon casque, j'enfourche mon petit bijou et roule à toute allure vers la campagne londonienne. Mes parrains habitent dans une grande maison assez tranquille où ils vivent merveilleusement bien en compagnie de leur fils de trois ans, Gabriel. Ils ont adoptés Gabriel alors qu'il n'était qu'un nourisson. Sa mère refusait de s'en occuper et les médecins ont dû le garder en attendant que les services sociaux s'en occupent. Remus qui est pédiatre a tout de suite craqué pour ce petit bout de choux à l'époque. Il s'en occupait tous les jours. Sirius finit par venir le rejoindre puisqu'il travaillait dans le service des urgences juste à côté et décida de lancer une procédure pour adopter Gabriel. Cela prit un an. Mais ils finirent par ramener Gaby avec eux, un sourire heureux aux lèvres. Moi-même, j'aime beaucoup Gabriel. Quoi de plus normal puisque je suis son parrain ? De plus, j'adore m'occuper des enfants. Remus doit y être pour quelque chose.
Ca y est. La maison se dessine au loin. C'était une demeure assez ancienne datant du 18ème siècle mais assez jolie. Les murs blancs contrastaient avec le rouge des roses qui s'y agrippaient. Il y avait une grande cour en gravier devant pour se garer et un immense terrain derrière. D'ailleurs, je constate que beaucoup de voitures de luxe stationnent déjà.
Je descends de ma Honda Shadow avec nonchalance et retire mon casque avec soulagement. Un sourire naquit sur mes lèvres lorsque je vois mes parrains sortir de la maison, Gabriel courant vers moi avec ses petites jambes.
Il est vraiment trop chou!
_'Ry ! crie-t-il en me sautant dans les bras.
Riant aux éclats, je le fais tourner dans les airs et le serre contre moi, respirant avec délice l'odeur de ses courts cheveux blonds vénitiens. Il lève ses grands yeux bleus vers moi, souriant de toutes ses petites quenottes. Je m'avance vers le perron, le petit dans les bras et le pose par terre pour embrasser mes parrains sur les joues.
_Ça fait plaisir de te revoir, dit Remus en m'étreignant comme une mère.
_Mus, on s'est vu la semaine dernière..., répondis-je avec un faux air blasé.
Je secoue la tête en souriant. De vrais grands enfants ces deux-là…Finalement, peut-être ai-je bien fait de venir. Les voir me remontera un peu la morale.
_Il y a du monde à ce que je vois.
_C'est juste quelques collègues de travail, répondit Sirius évasivement. Tu n'as pas à t'inquiéter.
J'acquiesce et entre à l'intérieur. Pourvu que j'arrive à l'oublier le temps d'un après-midi…
*O*O*O*
Le lendemain, je suis de retour à la librairie. Et je ne suis pas le seul. Il est revenu. Il attend, adossé à la porte close, la tête levée vers le ciel. A mon arrivée, il tourne la tête et se redresse.
_Bon-bonjour…, murmurais-je.
_Bonjour.
_Vous attendez depuis longtemps ?
_Une heure.
_Oh…désolé je…comme vous êtes mon seul client et que vous n'êtes pas venu depuis plusieurs jours je pensais…
_Tu as compté ? m'interrompit-il.
_Quoi ?, soufflais-je en croyant avoir mal entendu.
_Tu as compté le nombre de jour pendant lesquels j'étais absent ?me redemande-t-il, ses longues mèches voilant son regard.
_Je…je…Pourquoi me demandez-vous cela ?
Il ne répond rien. Il ne me regarde même pas. Mais, aussi rapide que l'éclair, il me plaque contre le mur où il était adossé il y a quelques secondes. J'émis un léger gémissement de douleur lorsque mon crâne entra en contact avec les pierres, mais cette souffrance s'envola sous la surprise du geste de l'inconnu. Que lui arrivait-il ?
_Hum….Est-ce que…tout va bien ?m'enquis-je en le voyant trembler.
Je vois ses mâchoires se serrer, et sa jolie bouche devint une ligne mince tant ses lèvres sont pincées. Il a l'air en colère, perdu…
_Non…Rien ne va…, dit-il. Tu m'exaspères…
Hein ?
_Pardon ?, répondis-je d'un air sidéré. Mais…je…
_TAIS-TOI !
Je lui obéis tant je suis sidéré. Pourquoi m'agresse-t-il soudain ? L'ai-je contrarié ? Ais-je fais quelque chose de mal ?
_Que vous ais-je donc fais ? L'interrogeais-je.
_Tu m'as…tu m'as ensorcelé…, souffle-t-il.
_Qu'…Quoi ? Je…je ne comprends pas….
Il lève ses yeux emplis de fureur vers moi et son souffle saccadé effleure mon visage. Son haleine sent le whisky à plein nez.
_Ecoutez, vous êtes complétement saoul. Je crois qu'il vaudrait que vous rentriez chez vous.
_Je ne veux pas…
_Ce n'est pas raisonnable. Vous tenez à peine debout. Où habitez-vous ?
_Cela ne vous regarde pas…
Je fronce les sourcils, mécontent. Bon sang ! Ce qu'il peut être désagréable.
_Cela me regarde du moment que vous êtes bourré devant MA librairie, que vous ME cognez contre le mur, et que vous ME dites des choses incohérentes ! Alors maintenant vous allez me donner votre adresse et je vais vous raccompagner chez vous que vous le vouliez ou non ! Est-ce clair ?!
Ses yeux s'agrandissent tandis que les miens se plissent dangereusement
.
_Tu as du caractère…, murmure-t-il d'un air ahuri.
Je rougis mais garde un visage coléreux.
_Alors cette adresse ?
*O*O*O*
Je le raccompagnais donc chez ses parents. Ils habitaient, tout comme Sirius, dans un petit village des alentours, près de Londres. Drago Malfoy, car il m'avait enfin dit son nom, n'avait jamais fait de moto. Il s'accrocha à moi durant tout le voyage de peur de tomber, et je savourais la saveur de ses longs bras musclés autour de ma taille mince. Drago habitait dans un immense domaine caché par des murs plus hauts que des sapins au milieu d'une forêt plutôt jolie mais effrayante la nuit tombée. A mon arrivée au grand portail de fer forgé, je dus appuyer sur une sonnette. Après plusieurs sonneries, une voix grave et érayée répondit :
_Oui ?
_Euh…Bonjour, je m'appelle Harry Potter et je ramène Drago Malfoy chez lui, il est plutôt en mauvais état.
_Drago ? Qu'a-t-il fait ?
_Il est ivre et n'a pas l'air bien du tout, dis-je tout en fixant le beau blond qui avait recouvert sa bouche d'une main, le teint verdâtre témoignant de la nausée qui l'habitait.
_Entrez.
Le portail s'ouvrit et je pus enfin redémarrer sur des chapeaux de roues, inquiet pour mon passager inattendu. Je me garais devant l'énorme manoir et aidait le blond à descendre. Celui-ci, à bout de force et malade, vacilla et serait tombé si je ne l'avais pas retenu. Une porte s'ouvrit, nous éclairant, et une jeune femme en robe de chambre courut vers nous.
_Drago ! S'exclama-t-elle. Est-ce que ça va mon chéri ?
D'un signe de tête, Drago fit comprendre à la femme que non, cela n'allait pas du tout. Elle était vraiment belle et je devinais que c'était sa mère. Ses cheveux, eux aussi blonds, étaient plus foncés que ceux de son fils et tombaient en longues boucles sur ses reins. Ses yeux, contrairement à Drago, étaient aussi bleus qu'un ciel d'été et non gris. Elle avait la même bouche ourlée et les mêmes pommettes saillantes, cependant.
Un homme vint la rejoindre, grand et imposant, les traits sculptés comme dans du marbre, ses longs cheveux blancs défaits et le regard dur. Il était le portrait craché de Drago mais en plus vieux et en plus sévère. Malgré son visage impénétrable, je discernais dans son regard une réelle inquiétude pour son fils.
_Nous vous remercions de l'avoir amené. C'est la première fois qu'il revient dans cet état, je ne sais vraiment pas ce qui lui a pris, s'excusa la jeune femme.
_Ce n'est rien. Il n'avait pas l'air en état de rentrer seul et je m'en serais voulu toute ma vie s'il lui était arrivé quelque chose.
_C'était tout de même très gentil. Chéri, veux-tu l'emmener se coucher ? demanda-t-elle à son époux. Il est épuisé.
_Bien sûr.
L'homme s'approcha et essaya d'emmener Drago. Seulement, ses mains refusaient de se détacher de mon tee-shirt.
_Reste…, chuchota-t-il.
Surpris, je le fixais, le cœur battant. On se calme, on se calme….
_Désolé, mais…, bégayais-je. Je…ne peux pas…On se reverra à la librairie ?
_D'accord…
C'est moi ou…il a l'air…Déçu ?!
_C'est étrange, pensa à voix haute la mère du blond une fois celui-ci partit.
_Qu'est-ce qui est étrange ?
_Eh bien…Drago a toujours été un garçon insociable et très méfiant envers les autres. Il n'accorde sa confiance qu'à très peu de personne et méprise les gens. Cependant, c'est la première fois qu'il est aussi ouvert envers un étranger. Vous êtes particulier….
_Ah…
Que voulez-vous que je réponde à cela ? J'ai une furieuse envie de m'enfuir à toutes jambes de peur que l'espoir que je sens au fond de mon cœur s'évanouisse subitement.
_Puis-je vous demander une faveur ? demanda alors la mère de Drago en m'inspectant de ses grands yeux bleus.
_Euh…Oui…Bien sûr.
Je sens que je vais le regretter….
_Voudriez-vous passer la journée au manoir ? Je sûre que Drago en sera ravi. S'il-vous plait….Il est si rare qu'il s'entende bien avec quelqu'un.
Oh non…non, non, non, non, non, NON ! Mauvaise idée, très mauvaise idée ! A quoi pense cette femme bon sang ! Drago ravi ? Il me déteste…Bien s'entendre avec moi ? Il m'a juste plaqué contre un mur et agressé sans aucune raison, mais oui, à part ça on s'entend très bien !
_D'accord.
QUOI ? Mais qu'est-ce que j'ai dit, moi ? Harry James Potter tu es vraiment un imbécile !
L'épouse Malfoy eut un sourire rayonnant et me dit d'aller chercher des affaires chez moi pour la nuit. Je lui obéis, un peu perdu. Mes pensées se tournent exclusivement vers Drago pendant que je fais mon sac. Comment allait-il réagir ? Comment moi, allais-je réagir lorsqu'il me cracherait sa haine ou son indifférence à la figure ? Saurais-je me relever de cette chute soudaine qu'est le retour à la réalité ? Je me complais dans des rêves puérils qui n'ont ni queue ni tête, et je finis toujours par m'effondrer lamentablement. Que dois-je faire pour qu'il m'aime enfin ? Que dois-je changer ?
Seigneur…Je suis vraiment amoureux, n'est-ce pas ?
O*O*O*O
Comme promis, je suis retourné chez les Malfoy une demi-heure plus tard. Narcissa, la mère de Drago, m'avait accueilli avec chaleur. Lucius se contenta de me fixer, avec cet air d'inspecter le moindre de mes faits et gestes. Quant à Drago, il avait retrouvé cet air impassible malgré sa pâleur et ses yeux rougis par l'alcool. Tremblant et mal-à-l'aise, je le suivis lorsque Narcissa lui ordonna de me montrer la chambre que j'occuperais pour la nuit. J'escaladais l'immense escalier de marbre blanc tout en trébuchant de temps en temps, mes yeux étant obnubilés par les peintures se trouvant au plafond. Un lustre de cristal énorme pendait au-dessus de nos têtes et la lumière des chandelles le faisait étinceler de mille feux. Mes yeux se reposèrent sur l'objet de mes songes : Drago. Je dardais un regard embué sur le dos large et moulé par son pull-over beige, tout en me demandant ce que cela faisait d'être dans ses bras. On devait assurément s'y sentir bien. Il avait de longues et grandes mains qui avaient l'air chaudes et agréables. Son torse m'arrivait au nez, j'aurais pu m'y appuyer sans problème.
…
OH NON !VOILA QUE CA RECOMENCE ! Sirius, prépares-moi une chambre à l'asile, j'arrive !
C'est alors que mon visage entra en contact avec une surface dure et douce, me faisant reculer en tenant mon nez endolori. Perdu dans mes pensées, je n'avais pas remarqué que Drago s'était arrêté devant une porte en bois sombre.
_Hey ! Qu'est-ce qui t'arrive ? demanda le dit Drago avec sa bonne humeur habituelle.
_Excuse-moi, je n'ai pas remarqué que tu n'avançais plus.
_Hm.
Quelle éloquence…
_Voilà ta chambre, m'indique-t-il en ouvrant la porte.
_Wow…
C'est tout ce que je suis capable de dire. La « chambre » était en réalité un véritable appartement. Lorsque l'on entre, on tombe sur un petit salon décoré avec luxe et soin. Les murs et le sol blancs contrastaient avec le canapé d'angle en velours noir et la table basse en bois d'ébène surmontée d'un plateau de verre. Sur cette table basse était posé un vase de cristal rempli de roses au jaune éclatant. Le tapis persan, noir également, se trouvait face à une cheminée en marbre immaculé décorée de plusieurs bibelots de grande valeur. Sur le mur du fond se trouvait une vitre gigantesque qui en mangeait presque toute la surface. La vue était imprenable. Elle donnait sur des jardins magnifiquement entretenus, emplis de plantes, de fleurs, et d'arbres de toutes variétés. De là où je me trouve, je peux même voir un petit ruisseau qui coupait le jardin en son milieu pour se plonger dans un lac où un pont en bois permettait de traverser l'étendue d'eau.
A ma gauche, il y a une porte. J'entre, Drago sur les talons. Et une fois de plus, je suis ébloui par la beauté de l'endroit. Le mur de gauche est occupé entièrement par une armoire en bois foncé, laquée aux portes par du beige, donnant un aspect lisse et brillant comme un miroir. Une autre vitre se trouvait là, menant à un balcon qui donnait encore une fois sur les jardins. Accoudé à celle-ci, un lit où l'on aurait pu faire dormir trois personnes. Il était assez simple, tout en bois, de la même teinte que l'armoire. A ses côtés se trouvaient deux tables de nuit. Au lieu d'être chaque côté du lit, elles étaient l'une à côté de l'autre. Sur l'une, une lampe de chevet et sur l'autre un cadre vide avec un cendrier propre. Sur le mur de droite, il y avait deux commodes du même style que l'armoire. Pour combler le vide qui se trouvait de ce côté, des vases ovales contenant des orchidées blanches tachetées de rose avaient étés posés dessus ainsi qu'un journal ouvert datant d'un mois. Le sol couleur d'albâtre et scintillant de mille feux était recouvert d'un tapis beige qui se situait au pied de lit. C'était une chambre où l'on ne pouvait qu'être bien. Une chambre que n'importe qui souhaiterait partager avec l'élu de son cœur.
Ma main s'avança d'elle-même vers les draps opalins que je caressais, songeant avec amertume qu'il n'y avait aucun espoir pour que Drago et moi puissions un jour dormir à deux dans ce lit.
_Est-ce que ça va ?
Une longue main brûlante s'abattit sur mon épaule, me faisant me retourner. Avec déception, je constatais que les yeux de Drago étaient vides de toute inquiétude ou de chaleur. Je le savais. C'était une mauvaise idée. Caché derrière le comptoir de ma librairie, je pouvais me laisser envahir par des fantasmes puérils sans danger de craindre pour mon cœur. Mais, ici, dans ce manoir, en compagnie de cet homme indifférent à mes sentiments, je risquais d'y perdre toute ma vie.
Mon âme…
Mon cœur…
Ma raison…
Il ne fallait pas qu'il le sache. Si je devais sortir de sa vie avec le cœur brisé, autant profiter du temps qu'il me donne. Une nuit. C'est tout ce que le destin a voulu m'accorder ? Très bien. Je m'en contenterais.
Un sourire aux lèvres, je rassurais Drago et me dégageais de sa prise. Son toucher me faisait mal suite aux pensées précédentes qui m'avaient assaillie. Je repris contenance en pénétrant dans la salle de bain. Comme le reste de la suite, elle était des plus magiques. La baignoire prenait presque toute la place. Implantée dans le sol, elle était recouverte d'or et d'ivoire. Elle avait à peu près la taille d'un lit deux places et sur les rebords étaient gravés un serpent auréolé de lys. Un lavabo surmonté d'un miroir baroque au milieu d'étagères où étaient entreposées toutes sortes de parfums, de shampoing ou de gel douche et autres soins de beauté complétaient ce coin de paradis qui m'était réservé. Une autre porte menait à des toilettes et je me demandais à combien devait s'élever la fortune des Malfoy.
Un peu déboussolé par tout ce luxe, j'allais dans la chambre afin de me rendre au balcon pour prendre un bol d'air revigorant. En voyant toutes ces richesses, je me suis dit que Drago et moi étions très différents. Sous tous les points. Que cela soit le physique, le caractère, la position sociale et financière, je ne l'égalerais jamais. Je ne pourrais jamais devenir son égal. Je suis laid, insignifiant, stupide. Je représente tout ce qu'il déteste. A quoi bon m'acharner ?
_Bon sang !
Cette exclamation exaspérée me fit sursauter et revenir à la dure réalité. Drago me regardait, le visage crispé par la colère. Ses yeux étaient tellement remplis de fureur que je reculai, le cœur serré.
_Qu'est-ce qui se passe avec toi ?! Se mit-il à hurler. Depuis que tu es entré dans cette foutue chambre tu sembles complétement ailleurs !
_M-mais…mais non, je…
_Oh arrête ! Me coupa-t-il. C'est tout juste si tu ne vas pas fondre en larmes ! D'abord tu n'arrêtes pas de m'espionner à la librairie, ensuite tu me raccompagnes au manoir, puis tu acceptes de dormir chez moi ! Mais qu'est-ce que j'ai fait pour que tu me colles comme ça, hein ?!
Ne…
_Arrêtes…, soufflais-je.
_Tu veux de l'argent, c'est ça ? Vas-y dis-moi combien ! Tant que je peux être débarrassé de toi !
Ne dis pas…
_Arrêtes, je t'en prie….
_Ou alors tu es l'un de ces politiciens qui court après mon père juste pour le faire tomber, pas vrai ? Espèce de salop ! Tu me dégoûtes !
NE DIS PAS DES CHOSES AUSSI BLESSANTES !
_ARRETE !
Drago se tait tout de suite, bouche-bée. J'aurais ri si je ne me sentais pas aussi humilié et désespéré.
_Tu n'as pas à me juger ! Hurlais-je. Pour qui te prends-tu donc ?! Je ne suis pas ton esclave ni ton chien ! Je suis un homme comme toi et j'ai droit au respect ! Tu veux savoir pourquoi je suis là ? Tu veux savoir pourquoi je te regarde ? Bien, je vais te le dire ! Je suis tombé amoureux de toi ! Dès la minute où tu es entré dans ma librairie je n'ai pu que te dévorer des yeux. Mais nous sommes deux hommes, et deux hommes ne peuvent pas être ensemble ! C'est du moins ce que j'ai pensé au début. Mais tu es revenu et à chaque fois mes sentiments pour toi grandissaient. Alors je ne les ai plus cachés, espérant peut-être que tu te rendes compte de mon déni. Mais…tu étais si impénétrable, si dur et froid que…que tu n'as rien vu. Et entrant dans cette maison, j'ai compris que tout nous opposait. C'est pourquoi…c'est pourquoi…
Les sanglots brisèrent ma voix et je ne pus continuer. A genoux, la main sur la bouche pour étouffer mes pleurs, je n'osais pas croiser le regard de Drago. Cela arriva pourtant lorsque des mots plus cruels encore que ces précédentes paroles franchirent sa bouche.
_Pars. Pars loin de moi…
_Drago, le suppliais-je. Je t'en prie, ne fais pas ça. Je t'en supplie…
Oh oui, je devais avoir l'air ridicule, là, à ses pieds, mes mains accrochées à son pantalon en pleurant éperdument. Mais je n'avais pas la force de faire autre chose. Ses mots acérés comme des couteaux se plantaient un à un dans mon cœur, provoquant une douleur si aigüe que je ne pouvais rien faire d'autre à part me trainer devant lui comme un chien soumis.
_Va-t'en et ne m'approche plus jamais. Si je te vois dans mon chemin ne serais-ce qu'une seule fois, j'appelle la police.
C'est sur ces dernières phrases que Drago s'en alla, me laissant effondrer sur le bord du balcon. Je pensais être préparé à son rejet. Je pensais m'en aller paisiblement, un peu soulagé que cette histoire soit terminée. Suis-je naïf à ce point ? Je finis par me relever et à vaciller jusqu'à la porte d'entrée. J'enfilais mon manteau de cuir comme un automate, ne sachant plus vraiment comment réagir à tout cela. Les larmes firent place à une apathie stupéfiante qui me laissait pantois et sans aucune énergie. Au moment où j'ouvrai la porte, Narcissa arriva en courant vers moi.
_Harry, que s'est-il passé ? Mon fils est fou de rage contre vous.
Un sourire amer apparut sur mes lèvres.
_Dites à votre fils que j'en suis navré et que tout cela n'avait aucun sens. Je suis le seul fautif dans cette histoire. Merci de m'avoir invité mais je vais rentrer. J'ai eu tort d'accepter cette faveur Mrs Malfoy. Mes respects à votre époux. Adieu.
Je sortis au dehors, la nuit était tombée et avec elle, une pluie torrentielle. Décidé à ne pas rester une minute de plus dans cette maison, j'enfourchais ma moto et partais sur les chapeaux de roue, comme un voleur. Mais de nous deux, je savais que le voleur était Drago. Car malgré ma rage, ma peine et ma souffrance, je constatais avec consternation que je l'aimais toujours autant.
Il avait gardé mon cœur en otage…