AN: Merci pour tous les commentaires d'encouragements. Sorry Benitsuki Tora, je comprends que tout ne soit pas très clair pour le moment. Mais je pense qu'au fur et à mesure les choses se mettront en place. Que puis-je dire en résumé? Karakura est voué à extinction sous ordre de sa majesté, le roi des Esprits. Aizen Sousuke remplace Masahiro à la tête de la division. Souviens-toi la division zéro, je l'ai présenté dans le Printemps des peuples. Les shinigamis se sont retirés de KaraKura. Il y a aussi un groupuscule terroriste dirigé par Shion, la soeur de Reisan, qui veut la libération de leur roi. Donc oui, il y a en fait deux royaumes. Qui sont les bons? Qui sont les méchants? C'est à vous de voir. Je sais que les informations arrivent au compte-goutte. J'ai l'impression de ne pas pouvoir faire autrement sinon je devrais recommencer toute ma mise en scène. Il va falloir construire vos théories, me posez des questions précises, car je ne vais rien révéler du plot. Cette fois, l'intrigue ne vous sera pas servie sur un plateau comme dans le Printemps des peuples. Si je suis mon plan, pas mal de choses devrait finalement prendre sens vers la fin de la première partie. Si j'ai un conseil à donner, c'est avoir une vision globale d'une histoire c'est très bien, mais examiner les motivations de chaque personnage. C'est encore mieux.

13- Living. Dead. Nothing. Inside.


Ulquiorra Schiffer

Quatrième Espada des armées d'Aizen

Colocataire d'Orihime Inoue.

La fusion imminente du Néant avec la matière avait donné un résultat plus improbable qu'une fission nucléaire.


Ulquiorra Schiffer se savait condamner. Il se souvenait avoir tendu la main vers le Cœur et avoir su ce qui l' attendait. Il était à l'agonie. Le contrôle, il l'avait perdu juste en effleurant les lèvres d'une simple mortelle. Le contrôle, il l'avait perdu en goûtant à son âme. Le comble, il avait poussé le vice en emportant un bout de son âme fragile avec lui. Il pouvait le sentir palpiter là au fond de lui, bouillonnant.

Un corps étranger... Une contagion qui sommeille... Dans son Hueco Mundo... L'âme ardente d'Orihime Inoue brûlait...

Pour un autre... Se pâmait présentement pour un autre...

Une perle de sueur glissa le long de sa nuque. Le soleil lécha avidement la peau presque blafarde de son gigai. Plusieurs plaques rouges se formèrent sur le visage et à la base de la nuque d'Ulquiorra Schiffer. Il ne pouvait presque plus se contenir dans son « linceul d'hormones ». Il sentait céder une à une les barrières kido subtilement glissé dans son gigai par Urahara Kisuke pour restreindre ses pouvoirs dans le monde des vivants.

Ulquiorra ne quitta pas des yeux la danse aérienne de la main gauche d'Orihime. Il regarda cette main effleurer le torse de Kurosaki puis se poser plus fermement sur son avant-bras. Il connaissait les faits. Il n'y avait pas si longtemps, il s'était servi de ces mêmes faits pour lui poser un ultimatum et la faire prisonnière. Son amour pour Kurosaki Ichigo avait servi ses desseins les plus sombres. Orihime Inoue aimait Kurosaki Ichigo. L'amour n'était plus un concept abstrait pour lui. Il avait pris des formes, des couleurs et des motifs et le visage de Orihime Inoue. La haine non plus ne lui était plus étranger. Le Néant absorbait la Matière.

Aujourd'hui...

Détruit. Dévore. Anéantit. Protège.

La faute venait en grande partie de cette idiote. Il avait perdu la raison quand elle lui avait offert son âme sur un plateau. Avec quelle insouciance s'était-elle offerte ? Son audace n'avait pas eu de limites dans cette maudite chambre à coucher. Elle avait toujours été si insoumise. Il l'avait remarqué pour la première fois au Hueco Mundo. Elle n'avait pas hésité à lui tenir tête. Elle n'avait pas hésité à aller à contre-sens du courant, faire exactement l'opposé de ce que l'on attendait d'elle. Il avait voulu qu'elle désespère et dépérisse, elle n'avait jamais été aussi sûre d'elle qu'à ce moment-là. Aizen et lui-même avait voulu l'isoler et en faire une paria. Les choses étaient loin de s'être passé comme prévu. Elle le défiait aujourd'hui de toute son âme... avec sa petite âme insignifiante... S'offrir ainsi, cela revenait à agiter un morceau de viande devant un prédateur. C'était exactement la même chose.

Il ne se tenait qu'à quelques centimètres d'elle et pourtant, il était insatisfait. Il en voulait plus. Il voulait se consumer en elle. Il voulait l'avaler tout entière. Il voulait ne faire plus qu'un. Il n'y avait rien que Kurosaki Ichigo puisse faire de toute manière. Il écraserait sa trachée du pouce et le réduirait au silence. Non...Il le forcerait à regarder...Il n'aurait fait qu'une bouchée d'elle. Ils n'auraient fait plus qu'un. Elle aurait comblé le vide en lui. Impossible. L'idée même le répugnait autant qu'elle le fascinait. Combler le néant. La manière dont le soleil caressait sa peau rosée sous les bretelles de sa robe d'été, le vent qui jouait dans ses cheveux roux, son buste mis à nu par son décolleté, là où palpitait son cœur, là où il avait plongé sa main pour trouver son âme, le siège de son âme, son « Hueco centro », là où il les avait lié l'un à l'autre pour la vie. Il remarqua les regards appuyés d'Ichigo sur son bustier. Il pouvait sentir le désir de Kurosaki Ichigo de là où il se tenait et cela le rendait...

Furieux.

La bête trottait en cercle comme un prédateur dans sa cage. Elle ne peut pas nous quitter. Le néant se consume pour elle. Elle est nôtre. Elle doit être prévenue. Nous n'accepterons rien de moins que sa reddition totale. Pas de négociation. Elle n'est que de la nourriture. Raisonna Ulquiorra. Une partie de lui refusait catégoriquement qu'Orihime Inoue obtienne une place significative dans son Hueco Centro, son cercle de priorités. Elle n'était que de la nourriture à Hollows. Insignifiant. Insuffisant. Inutile. Détruit. Dévore. Ichigo Kurosaki n'est pas une menace car je décide qui est une menace ou pas. Pas de négociation. Nous avons gagné. Nous avons détruit Kurosaki à ses yeux. Nous l'avons « marqué ». Elle nous « aime ». Nous l'avons fait à notre image. Elle est plus qu'un fraccion... Plus qu'une proie... Elle est notre... Silence ! Détruit. Dévore. Anéantit. Protège.

Ulquiorra écarquilla les yeux.

Il se concentra doucement et même dans le gigai, il pouvait le voir clairement, l'empreinte noirâtre de Murcielago sur le cœur... sur l'âme flamboyante d'Orihime Inoue. Et pendant un moment, cela sembla lui suffirent...

Les petits doigts frêles d'Orihime se promenèrent sur les biceps du rouquin. Il ne bougea pas d'un millimètre tel une tour de garde. Détruit. Dévore. Anéantit. Protège. Il ferma les poings dans la poche de son pantalon, surveillant le moindre battement de cil d'Ichigo Kurosaki.Silence Murcielago !Détruit. Dévore. Anéantit. Protège. Je t'annihilerais si tu dis un mot de plus. Ridicule. Ridicule.

Il prit une profonde inspiration. Il devait se défaire de ses émotions fugaces... Il devait se défaire de l'inutile. Il devait se défaire de tout ce qui encombrait le néant. Tous ses sentiments, seulement destinées à le remplir, à les encombrer... Tout ce qui prêtait à la confusion... Toutes ses choses qui rendaient le hollow ivre de désir. Et puis la salvation vint enfin...

Des Cieux...

Le changement dans l'air fut subtil mais net. Le sol vibra imperceptiblement. Il n'avait pas besoin de lever la tête vers le ciel pour voir le danger arriver. Il n'avait pas besoin de lever les yeux pour le quantifier. Détruit. Dévore. Anéantit. Protège. Orihime tapota l'épaule d'Ichigo une dernière fois avant de reculer vers lui. Elle lâcha prise. Les nuages s'amoncelèrent dans le grand ciel bleu.

L'espada vit le rouquin se précipiter vers Orihime. Avec aisance, il tendit le bras, encercla la taille de la jeune femme. De manière possessive, il souleva Orihime sans peine et la propulsa dans les airs dans le même élan. Il se tourna vers Ichigo, le visage toujours aussi neutre. Une première explosion souffla tous les pavillons résidentiels derrière eux. Pendant quelques secondes, ses cheveux noirs, balloté par le vent et la poussière, il donna ses instructions à Ichigo Kurosaki. Il était mort. S'il arrivait quelques choses à cette idiote, il n'y aurait aucun endroit sur terre où Kurosaki Ichigo pourrait se cacher. Il l'éliminerait lui et sa famille à commencer par la shinigami Kuchiki Rukia.
La Shinigami. L'idée même... Le cœur d'une Shinigami aussi pur...S'il arrivait quelques choses à Inoue Orihime... Au « Hueco Centro » d'Inoue Orihime... À leurs « Hueco Centro »... avant que lui, Ulquiorra, n'ait pu former sa propre résolution par rapport à la relation qu'il entretenait avec l'humaine, Ichigo Kurosaki le regretterait amèrement.

Une lueur sombre passa dans son regard émeraude. Ulquiorra libéra son reiatsu et dans un éclair aveuglant, son gigai parti en fumée.

Animés par de multiples tourbillons de vents contraires, ses cheveux noirs drues et rebelles retombèrent sur ses épaules. Il ne restait rien de son masque d'os. Sa tenue sombre contrastait avec le blanc de son Hierro sous la lumière du jour. Elle semblait totalement de circonstance. Le même regard émeraude souligné de larmes imaginaires fixa avec la même mélancolie, le ciel endeuillé.

L'impact entre lui et Kensei Mugumura fut d'une puissance phénoménale. Il l'avait reconnu immédiatement. Kensei Mugumura, ancien capitaine de la neuvième division du Gotei 13, soixante-quinzième sujet des tests d'hollowfication d'Aizen, membre des vizards...

Il faisait partie selon Urahara Kisuke des portées disparus lors du massacre du Hangar. Pendant une seconde, le temps sembla rester figé et Ulquiorra tourna la tête en direction d'Orihime. Cette brève hésitation suffît amplement à décider de l'issue de la bataille à l'avance. Il chuta vers le sol aussi vite qu'il était monté dans les airs, sa chute, d'une violence telle qu'elle emporta avec lui tous les arbres rescapés du parc. Une coulée de bile noire entacha ses lèvres et il mit un temps à comprendre que la sensation chaude sur son ventre était due à l'entaille d'un sabre. Son hierro, sa plus grande fierté, avait été si facilement pénétré. Cela lui donna tout de suite une idée de la puissance de son ennemi. Foutue contagion ! C'était décidé ! Quand tout ceci sera terminé, il se débarrassera lui-même d'Orihime Inoue.

- Ulquiorra ! Ulquiorra ! On doit l'aider !

Les cris de la jeune femme devinrent de plus en plus distants. Il entendit le vrombissement de la moto de Kurosaki Ichigo. Kensei Mugumura se posa lestement sur le sol.

- Tu ferais mieux de rester couché, Espada. Je n'en ai pas du tout après toi. Mais je n'hésiterais pas à t'anéantir si tu te mets en travers de mon chemin.

Ulquiorra se redressa calmement. Il suivit le regard de Kensei alors que la moto d'Ichigo faisait le tour du parc. Kensei disparut de son champ de vision. Mais l'espada fut tout aussi rapide et coupa la retraite de son adversaire, écrasant sa carotide de la tranche de la main. Il eut un instant de surprise. Cela avait bien stoppé Kensei dans son élan, mais cela ne l'avait pas fait bouger d'un millimètre. Il attrapa le poing d'Ulquiorra et lui donna deux coups de pieds au plexus. Ulquiorra tenta de l'empaler avec Luz de Luna. Mais Kensei esquiva agilement la javeline d'énergie et lui donna un brutal coup de tête en échange. Ulquiorra fit un bond en arrière, le front ouvert. Kensei disparut à nouveau. L'espada tenta de le prendre de vitesse en usant le sonido. Mais peine perdu, il était à contrepied à nouveau et le pied sur son torse, et la main sur sa nuque, Kensei l'envoya à nouveau au tapis. Sonido ? Kensei Mugumura usait du sonido.

- Reste à ta place, Hollow. Reste couché, je te dis.

Si Ulquiorra Schiffer était resté couché, ce n'était pas en signe de soumission. La plaie à sa nuque saignait à profusion, l'espada était secouée de spasmes de toutes parts. Posant un pied sur son visage, Kensei se pencha vers lui avec un sourire.

Une succession d'images passèrent devant les yeux d'Ulquiorra Schiffer, son combat contre Ichigo Kurosaki, la transformation de ce dernier en un intraitable Monstre...Hollow... Vasto Lorde... la Mort enfin... Et la main tendue vers le cœur... Ses dernières pensées avant annihilation lui revinrent en mémoire.

Kurosaki Ichigo ? Kurosaki...Ichigo... Maître... Vasto Lorde... Seigneur... Soumission...Défaite...Destruction...Le cœur...

Il écarta les paupières avec horreur. Ses souvenirs se dissipèrent soudain pour le ramener à la brutale réalité.

- Et bien ? C'est qu'il en redemande ? Dis-moi, qui essayes-tu de protéger ? Kurosaki ou la jolie rousse ?

Ulquiorra tenta de se dégager sans succès. Kensei et lui échangèrent un regard emprunt d'hostilité.

- J'ai touché une corde sensible ?

- Ri...

- Pardon ?

- Ri...dicule. Rétorqua Ulquiorra, laissant échapper un grondement sourd.

Ses griffes creusèrent le sol à mesure qu'il se sentait envahir par la frustration. À cette allure, il n'avait aucune chance de « protéger » Orihime... Aucune chance de la « tuer »... Aucune chance de les massacrer tous un par un... jusqu'à ce que ne subsiste que le Néant. À cette allure, ils ne seraient tous les deux bientôt plus de ce monde. Que de contradiction ! Tant de contradictions ! Il n'avait pas la moindre chance. Il n'était pas le même qu'il y a dix ans. Après avoir croisé Ichigo Kurosaki, on pouvait dire que son existence avait changé. De nouvelles données s'étaient ajoutées. En résumé, Ulquiorra Schiffer était tombé bas.

Il chercha Orihime dans la ville. Elle était au-dessus du périphérique.

Elle était encore trop proche pour qu'il tente d'utiliser la seconde étape de sa résurrection. De plus, Ulquiorra n'avait pas utilisé la seconde étape de sa résurrection depuis ce fameux jour au Hueco Mundo. Il ne l'avait même jamais essayé dans le monde des vivants. Il n'avait pas assez d'élément d'analyse pour précisément évaluer les potentiels dégâts et dommage infligés à la ville. Il ne pouvait pas prendre un tel risque. Non, il fallait se battre avec les armes en sa possession.

Avec une grimace, il activa la régénération de ses cellules. Cela stoppa immédiatement le saignement de la blessure sur sa nuque. Surpris, Mugumura recula.

Ulquiorra en profita pour retrouver l'usage de ses jambes. Mugumura esquissa un sourire cruel.

- Écoute Hollow, je suis de ton côté. Tu es différent. Je peux le voir. Maintenant les hollows jouent avec la nourriture. Je peux comprendre. Elle est tentante la rouquine.

Ulquiorra fronça les sourcils.

- Tu es malade, hollow. Mais la bonne nouvelle est que cette contagion est naturelle.

- Malade ?

Le visage de Kensei ferma les yeux.

- Tu es sérieusement atteint si tu penses que tu as un avenir avec la petite humaine dans le monde tel qu'il est à l'heure actuelle ! Jamais ils ne t'accepteront ici ! S'il savait que tu étais là, les shinigamis n'hésiteraient pas à vous traquer, tous les deux... Votre petite famille...

Ulquiorra baissa les yeux, pensif. Votre famille... Je voudrais fonder une famille avec toi.

- De toute manière, ce petit lopin de terre et ses habitants sont vouées à disparaître prochainement. Alors pour le happy-ending, on repassera ! Alors que moi, je suis pour les happy-ending !

- Tu veux détruire Karakura, Vizard.

- Moi, non, je suis un humble pacifiste. J'ai changé moi aussi. J'ai évolué. Je veux la paix dans le monde et l'harmonie entre tous les esprits voyons. Je vais te raconter une petite histoire qui a changé ma vie. Il était une fois, il y a très longtemps, vivait un bon roi, généreux, et philantrope, le Roi des Hollows. Le véritable roi des Hollows! Shinkoshokūo, le roi Rouge. Dans son royaume, il encourageait chaque créature, chacun de ses sujets, à se nourrir, à survivre, et à procréer. Il n'y avait aucune frontière entre le monde des vivants et son royaume. Les hollows allaient et venaient en paix. Les créatures comme toi étaient respecté et vénéré à juste titre. Le royaume était une vaste jungle prolifique d'une beauté phénoménale... Mais un jour, le roi des Shinigamis... Tu en as sans doute entendu parler...Ce fantôche... Ce lâche...Ce monstre est venu avec son armée pour dérober nos terres. Il a fait couler le sang de Shinkoshokūo par jalousie et esprit de revanche et a réduit des créatures comme toi en esclavage. Il s'est rendu coupable de milles crimes et autres atrocités. Nous sommes les gentils dans l'histoire.

La queue d'Ulquiorra fouetta l'air. Il était peu convaincu. Kensei hocha les épaules avec un effrayant sourire.

- Il est clair pour moi que c'est un problème de politique, voilà tout. Non, mais suis mon raisonnement, Cuatro, tu es sans doute d'accord pour dire qu'il y a un sérieux problème de gouvernance au sommet si les shinigami ont le droit d'enfanter des hybrides humains et si les hollows eux n'ont même pas le droit d'existence ! Pourquoi Kurosaki Ichigo aurait droit à la fille à la fin de l'histoire quand toi tu resteras sans rien !

Son visage toujours aussi anémique, Ulquiorra pencha la tête sur le côté.

- Les Shadowhunter dont je fais partie ont pour seul mission et objectifs de rendre à Shinkoshokūo son dû. Notre mission est de retrouver notre roi et notre terre. Une terre où les hollows vivent en être libre. Je veux juste la tête de Kurosaki sur une pique, ce n'est pas grand-chose. Quand dis-tu ? Tu me laisse passer et...j'enterre la hache de guerre.

Ulquiorra ne baissa pas sa garde. Orihime était avec Kurosaki. Cela avait le mérite de régler très vite la question. Il ne bougea pas d'un millimètre.

- Je vois que ma petite histoire ne t'a pas ému et que tu refuses d'entendre raison. Tant pis, hollow, si je dois arracher les rotules qui te permettent de te dresser avec tant de complaisance devant moi l'une après l'autre, pour retrouver mon roi, je m'exécuterais sans hésiter. Et si je dois aspirer la vie de ta rouquine pour y arriver... Qu'il en soit ainsi !

Il se dématérialisa et Ulquiorra s'envola vers le ciel. Quand Kensei fit mine de le rattraper, il changea de direction, disparu, usa du sonido, et changea à nouveau de direction. Il frappa son adversaire d'une patte griffu et cette fois, il eut la satisfaction de le voir reculer. Il frappa encore, multiplia les coups de poings et redoubla de vitesse. Kensei recula dans le ciel avant de fuir vers le sol. Ulquiorra le suivit aussitôt. Une nouvelle collision fit grésiller l'air et les deux monstres s'empoignèrent violemment dans leur chute. La tête en bas, Kensei esquissa un sourire tout en maintenant Ulquiorra. Il ouvrit la bouche préparant une boule de Cero d'une puissance frôlant l'absurde. Ulquiorra tenta de se libérer. Mais c'était bien trop tard, Kensei ne lâcha pas prise. Ulquiorra fut atteint à bout portant.

L'explosion ébranla pendant plusieurs secondes la ville. Kensei s'étonna de voir qu'Ulquiorra ait réussi à garder son corps intègre après cette attaque. Sa chute sembla durer des heures. Il avait évité l'annihilation complète de peu en contrant avec son Cero Oscuras. Cela avait juste permis de sauver sa tête et gagner du temps, son système de régénération avait fait le reste. À quelques centimètres du sol, il déploya ses ailes et stoppa sa chute.

- Tu es toujours hollow. Murmura l'ancien Espada.

- Nous sommes bien plus. N'as-tu rien écouté de mon discours, les Shadow Hunters sont placé tout en haut dans la chaîne alimentaire. Laisse-moi te faire une démonstration.

Ulquiorra prit son élan pour repartir, se matérialisa derrière Kensei et enfonça vicieusement son poing dans la poitrine de son ennemi. Il disparût dans un nuage de fumée sous le regard surpris de l'Espada avant de se matérialiser à nouveau, emprisonnant la nuque d'Ulquiorra dans une griffe. Ulquiorra écarquilla les yeux. Une sensation désagréable de chaleur enveloppa son Hueco Centro. Il baissa les yeux. Kensei esquissa un rictus diabolique avant de lâcher son Cero à bout portant.

Isshin poussa un soupir et écrasa sa dernière cigarette dans le cendrier posé sur le muret dans son jardin. Une brique branlante retomba sur le sol avec fracas. Le père d'Ichigo contempla les ruines de sa maison avec un regard détaché. La jambe de son gigai dépassait sous un bloc de béton de plusieurs tonnes. Il ne lui avait fallu que quelques secondes pour comprendre...

- Ikumi...

La brunette ramassa une barre de fer.

- Je sais... C'est l'apocalypse et quelques parts, c'est ta responsabilité. Tu fais une de ses têtes, voyons !

Isshin se tourna vers sa compagne avec un sourire. Elle portait à bout de bras, Kaoru, encore sonné par l'explosion de la maison.

- Je ne me sens pas...morte. Je ne me sens pas. On n'est pas... C'est...normal ? C'est... C'est toujours comme ça ? C'est peut-être comme ça au début, hein ? J'ai l'impression que c'est ce que tu vas me répondre. Kaoru, réveille-toi mon amour.

Il se tourna vers elle.

- Tout ira bien, n'est-ce pas ? J'avais envie de déménager de toute manière. Sans vouloir vexer Masaki, on était un peu à l'étroit dans cette maison.

Il tira sur la cigarette à nouveau.

- Isshin ! Dis quelques choses !

Le père d'Ichigo ne répondit rien.

- Je t'en prie...

- Kaoru et toi, vous allez commencer à vous sentir mal dans quelques minutes. Chaque secondes qui passe, la pression spirituelle dans l'air multiplie par mille. Dans quelques instants, l'air sera irrespirable pour vous et la gravité insupportable... Petit à petit... Vous ne sentirez rien...

- Mais je suis morte...On est déjà mort... La Soul...Society... Nous allons aller...

- Je n'y arrive pas...Je n'arrive pas à ouvrir une porte. Je n'arrive pas à utiliser Engetsu.

- Qu'est-ce que ça veut dire ?

Elle se mit à tousser.

- Kaoru, réveille-toi ! Qu'est-ce que tu veux dire ?

- Je ne peux pas vous exorciser et...

- Comment ça ? Comment ça ? Attends une seconde ! Je suis déjà morte... Je ne risque plus rien. On ne risque plus rien. J'ai déjà perdu la vie. J'ai déjà perdu le plus important. On va à la Soul Society et je retrouve mon ex avec un peu de chance et... et ton ex aussi...enfin ta femme... Masaki...Isshin ! Bouge-toi ! Fais quelques choses !

- Elle n'est pas là-haut...

- Mais c'était le plan ! Une superbe orgie...de confiseries et nos familles réunies... Oh mon dieu ! Les enfants et... Ichigo et les filles ! Oh Seigneur ! Ils ne sont pas rentré à la maison et...

- ...Je ne pouvais plus l'envoyer nulle part. Je ne l'ai pas dit à Ichigo. Il serrait sa petite main si fort et elle était déjà si loin. Je ne pouvais pas expliquer à mon petit garçon... ma propre impuissance.

- Isshin...

- Je savais que cela allait arriver. Je savais qu'un jour je tiendrais sa main ou elle tiendrait la mienne...Mais c'est arrivé si vite. Je ne pensais pas que cela arriverait si vite après avoir passé une éternité à la chercher. C'est arrivé si vite et je n'étais même pas là pour serrer sa main dans la mienne.

Silence.

- Isshin...Est-ce... Est-ce que tu peux me tenir la main ?

Isshin écrasa sa cigarette et tendit la main vers elle. Ikumi émit un petit rire nerveux.

- Isshin...Ne fais pas cette tête. Retrouve tes enfants ! D'accord ? C'est aussi bien ! Tout va bien ! Kaoru et moi, on va très bien ! On est bien ! Ça va aller !

- Ikumi...

- Je sais...Moi aussi... Je détestais...l'odeur de ton après-rasage...

Ce n'était pas exactement ce qu'il allait dire. Il la regarda, le regard luisant.

- Ikumi...

- Je sais...ce que tu vas dire... c'était bien le temps que ça a duré, ok ? C'était bien.

Il hocha la tête.

- Je... je t'aime aussi... Très fort ! Et si tu n'étais pas aussi mal rasé, tu aurais été mon plus grand amour, Isshin Kurosaki.

Il secoua la tête doucement.

- Ce n'est pas vraiment mon nom, Ikumi.

- Je sais bien... Tiens, tu pourrais enfin me dire ton vrai nom ? Tu me dois bien ça !

- Tu vas rire ma poupée...

- Fais-moi rire. Tu as toujours été doué pour me faire rire !

- Ishiroakamemon Kato...Shiba.

- C'est... très...

Elle ne put réprimer plus longtemps un éclat de rire.

- Très noble... Très vieux crouton...Cela te ressemble je dois dire. Ha !Ha !Ha !

- I...Je suis désolé, Ikumi. Pardonne-moi.

- Mais non, grand benêt ! Tu avais raison...Cela ne fait pas mal du tout... Retrouve vite les filles et embrasse-les fort pour moi...Ne les lâche pas. Ne baisse pas les bras... Elles ont besoin de toi. Ichigo a besoin de toi. Isshin...Merci de m'avoir fait rire.

Isshin hocha la tête et ferma les yeux. Il y eut un nouveau silence. Lorsqu'il ouvrit les yeux, les âmes d'Ikumi et Kaoru avaient disparu. Là où il s'était tenu quelques secondes auparavant des particules de reishi flottaient vers le ciel. Il soupira. Yomi, qu'avait-il fait ?

Pour toutes réponses, une nouvelle explosion ne tarda pas à secouer la ville.

Les ailes déchiquetées, Ulquiorra s'écrasa à nouveau au sol. Le Shadow Hunter se dissipa dans un nuage de brume noire pour réapparaitre au-dessus de l'espada blessé. Ulquiorra n'esquiva pas les coups de poings en rafale de Kensei. Un nouveau cratère se forma sous lui.

Kensei ramassa un grand rocher doucement. Avec un brin d'élan, il relâcha le rocher violemment sur le visage de l'Espada.

Vaincu, Ulquiorra Schiffer agonisa en silence.

- Alors tu es encore moins bavard que d'habitude, Espada ?

Défiguré, il lui manquait un œil et son visage avait perdu de sa symétrie. Ulquiorra tenta d'activer la régénération de ses cellules, mais il réalisa bien vite qu'elle serait de toute manière trop lente pour éviter l'inéluctable désagrégement de son âme. Il voulait se souvenir de la main tendue. Il voulait se souvenir de sa première mort car elle avait été là. Il n'avait pas été seul. Inconsciemment, un bras meurtri chercha à tendre la main vers elle.

Avec un sourire, Kensei s'éloigna de son œuvre. Oui, il semblerait qu'Ulquiorra Schiffer avait eu son compte.

Les battements du Cœur résonnaient autour de lui de plus en plus loin jusqu'à n'être plus que des murmures précipités. Plusieurs sillons de bile noire se formèrent sous le rocher à mesure qu'il se vidait de son sang. Ulquiorra ne vit pas toutes les images de sa vie défiler devant lui. Non, il ne se souvenait pas du temps où il errait sans but dans le désert. Non, il se souvint seulement de sa vie avec elle, au temps des couleurs et des motifs, des larmes et des éclats de rire, Orihime lui tendant une glace avant de lui prendre la main, Orihime attrapant le tuyau d'arrosage tandis qu'Ulquiorra étendait leur première lessive sur la ligne extérieur au lendemain de leur emménagement dans le pavillon...

Les larmes d'Orihime Inoue...

Les rires d'Orihime Inoue...

Elle lui avait offert son âme.

La saveur d'Orihime Inoue...

Les battements du Cœur...

Les cris lointains du Cœur...

La force du Cœur...

La chaleur du Cœur...

Son Hueco Centro...

Orihime Inoue...

...

Protège.

Hueco Centro.

Protège.

Hueco Centro.

Protège. Détruit. Dévore. Anéantit.

La bile noire colora les pupilles de l'espada rapidement. L'air ondula autour de lui. Son reiatsu, ce qui restait de sa pression spirituelle, s'éleva dans l'air comme les flammes invisibles de brasier.

Murcielago, cette créature qui avait tant erré dans le désert avant sa rencontre avec Aizen, se redressa soudain de toute sa longueur, moitié Humanoïde, moitié Hollow. Le Shadow Hunter se retourna doucement, une expression d'horreur sur le visage.

- Ulquiorra Schiffer.

Murcielago poussa un rugissement qui fractura un peu plus l'atmosphère autour de lui.

- Non, un Vasto Lorde...

Murcielago ouvrit la gueule doucement et aspira toute vie, toute particule d'âmes à des kilomètres à la ronde. Quand il referma la gueule, sa régénération était complète et il considéra le Shadow Hunter avec un regard dénué d'humanité. Kensei n'eut aucun de mal à comprendre que cette fois, il ne pourrait nullement tenter de négocier la reddition d'Ulquiorra Schiffer. Murcielago, son nouvel opposant, avait et c'était le moins que l'on puisse dire, un cercle de priorité extrêmement restreint.

Protège Hueco Centro.

Détruit.

Dévore.

Anéantit.


Karin Kurosaki

Fille de Masaki et Isshin Kurosaki

Sœur de Yuzu et Ichigo Kurosaki

Shinigami Suppléant

Étudiante

Mourir était la dernière chose qu'elle avait prévu de faire ce jour-là... De ce fait, n'était pas bien préparé à la tâche. Comme beaucoup de gens, il semblerait.

L'odeur de soufre la poursuivit. Tout autour de la jeune femme, des cris de panique. Les étudiants couraient dans toutes les directions pour sauver leur vie. Il en venait de partout. Prendre n'importe quelle direction revenait à remonter un flux à contrecourant. Toutes les routes ne menaient qu'à un seul chemin et ce chemin c'était bien la mort. La vie s'éteignait tout autour de Yuzu et Karin, les corps incinérés par les flammes galopant sur le bitume. Le sol vibra sous l'impact d'une autre bombe. Ce fut le tour du clocher de l'université de s'effondrer. Une autre gigantesque boule de feu se dirigea droit vers elle engloutissant tout sur son passage. Sans réfléchir, Karin attrapa Yuzu par la main et se précipita avec elle vers les portes de la faculté. La sortie en vue, les deux sœurs slalomèrent dans la foule.

- Karin !

- Cours, Yuzu, ne t'arrête pas !

Un groupe d'étudiants trébucha non loin avant d'être emportée par la chute d'une rangée d'arbres. Karin serra la main de sa sœur et accéléra l'allure. Elles y étaient presque... Si elles arrivaient à atteindre les grilles... Karin leva les yeux vers le ciel et laissa échapper un cri. C'était étrange comme elle avait poussé ce cri hystérique à ce moment précis. Mais le danger ne lui avait jamais paru si réel. La peur avait crispé les muscles autour de son cœur. Karin avait poussé un soupir rauque quand une nouvelle boule flamboyante coupa cruellement leur retraite. Un à un, les bâtiments de la faculté des sciences humaines furent soufflée par de nouvelles explosions. Les grilles en fer forgée de l'université plièrent sous le poids des flammes. La cour centrale de l'université vibra sous la déflagration. Karin sentit Yuzu lâcher prise. Une autre détonation balaya une nouvelle fois tout sur son passage. Un souffle d'air chaud brut lécha avidement son cou et avec un cri, Karin se retourna pour serrer sa sœur dans ses bras. Elle voulait protéger Yuzu des flammes... Avec tout ce qu'il lui restait de courage, elle couvrit le corps de Yuzu du sien. Ce n'était sans doute pas un sacrifice suffisant. Le brasier engloutît tout sur son passage.

Karin Kurosaki se sentit mourir littéralement.

Protéger.

Elle sentit le corps de Yuzu vibrer contre le sien dans un gémissement silencieux. Serrée contre sa jumelle, leurs respirations saccadés à l'unisson,Karin se sentit mourir. Son sang bouillonnait sous sa peau léchée par les flammes. Le monoxyde de carbone, cette vapeur ardente envahit ses poumons. Ses mains s'agrippèrent désespérément à la nuque de sa jeune sœur.

Yuzu partit la première.

Comment pouvait-elle dans ce brasier et dans un état de semi-conscience entendre le dernier battement de cœur de sa jumelle ? Elle n'aurait jamais pu l'expliquer à qui que ce soit. Yuzu était juste parti la première. Elle s'était alors raidi à son tour. Elle n'avait pas eu assez de force pour émettre un son tandis que sa chair tombait en lambeaux. Une larme avait séché à mi-chemin sur sa joue.

Les flammes dansaient toujours devant ses yeux. Les pupilles fixe, elle vit l'orange et le jaune s'entrelacer et onduler. Elle distingua vaguement le spectre d'une femme à la chevelure flamboyante. Les mots moururent au bout de ses lèvres paisiblement.

Ce n'était pas exactement la fin qu'elle avait envisagé même dans ses pires cauchemars. Elle avait eu des aspirations, d'abord disposée à pratiquer la médecine comme la tradition familiale, depuis quelques mois elle considérait sérieusement changer de voie. Mais aujourd'hui son destin lui échappait. Les doigts de Yuzu frémirent dans sa main. Tout du moins, elle eut cette impression. Leur destinée leur échappait. Quelqu'un d'autres étaient au commande. Quelqu'un qui se foutait royalement qu'elle était censé être jeune et avoir la vie devant elle ?

Une jolie femme dansait dans les flammes.

Un visage aux traits machiavélique aux cheveux couleur miel se pencha au-dessus de ce qui ressemblait à un bain d'oiseaux en or.

Karin eut un nouveau sursaut de lucidité. Ce n'était pas censé se passer comme ça. Elle se mêlait de ses affaires. Elle ne faisait pas de problèmes. Elle n'avait pas d'ennemi du moins pas comme Ichigo. Bien sûr, ces trois dernières années, elle avait botté quelques derrières hollow. Mais vraiment, ils étaient si cons et demeurés que c'était faire preuve de charité que d'abréger leur courte existence. Cela ne pouvait pas expliquer pourquoi son monde était en train d'imploser. Elle ne s'était jamais considérée comme une Shinigami. Elle avait bien pris garde de ne marcher sur aucune plates-bandes.

Son visage brûlé au troisième degré, la jeune femme inspira profondément puis relâcha tout l'air dans ses poumons. L'odeur était insupportable. Mais il n'était absolument pas question qu'elle se couche là sans rien dire. Si l'univers avait envie de lui en mettre une dans le dos, elle avait au moins son mot à dire.

Elle avait son mot à dire.

Elle lutta pour garder les paupières ouvertes. Finalement, elle ouvrit les yeux sur un monde totalement différent

Comme une grille 3D sur un vieil écran d'Amstrad, elle pouvait voir le moindre pixel, le moindre nucléus, le moindre atome. Les nuages s'écartèrent pour dévoiler des étoiles comme des diamants. Des centaines de pentagrammes et autres signes cabalistiques étaient éclairés en relief par ses spots lumineux. Elle leva la tête. Un triangle lumineux clignota devant elle avant de former un sceau plus élaboré, chaque sceau s'insérant dans un autre comme les engrenages d'une machine.

La petite brune sentit la soie caresser ses bras. Tour à tour, soulevé et encerclé par les rubans blancs. Elle effleura du bout des doigts l'un des nombreux fils du destin qui entourait son poignet droit. Elle eut une vision de Ritto, blessé quelques parts. Elle baissa les yeux vers son poignet gauche. Ce ruban-là, elle avait oublié à qui il appartenait. Peut-être qu'il ne menait plus nulle part.

Elle tourna la tête vers la gauche. Ichigo... Son frère n'était pas loin. Cela voulait-il dire qu'il se tenait comme elle aux frontières de la mort ?

- C'est beau, n'est-ce pas ?

Karin tourna la tête vers Yuzu. Elle dévisagea sa jumelle de la tête au pied dans son kimono d'apparat blanc perle. Le contraste entre l'étoffe précieuse et le coton blanc peu sophistiqué de son propre yukata était des plus cinglants. Son port altier, Yuzu ressemblait à une véritable princesse. Yuzu ne quitta pas l'horizon du regard.

- Tu le vois, n'est-ce pas ? Tu vois le palais ? Il est exactement comme dans mes rêves ? Tu peux le voir, n'est-ce pas ?

Karin secoua la tête doucement. Non, elle ne pouvait pas voir le palais. Il n'y avait que des étoiles autour d'elle et le vaste ciel noir comme un tapis de velours. Yuzu fit quelques pas en avant. Karin eut un frisson. Les rubans, animés par des rafales de vents puissantes, l'assaillirent de toutes parts. Elle lâcha la main de sa jumelle pour se protéger le visage.

- Oh ! C'est drôle ! Je peux le voir si clairement aujourd'hui. Je vois même ses grilles.

- Non, je ne vois rien. Il y a tous ses rubans de merde !

Karin pencha la tête sur les côtés et laissa échapper un grognement agacé. Un ruban noir enlaça le cou de la benjamine de la famille doucement. Karin resta figée. Elle tendit la main vers Yuzu.

- Yuz...

- Quels rubans, Karin-chan ?

Elle fit un nouveau pas en avant. Karin la perdit de vue pendant l'espace d'une seconde. Ce fut un temps largement suffisant pour que la peur se cristallise dans son cœur.

- Rien...Il faut partir... Il ne faut pas rester ici. Il faut rentrer.

- Mais je suis bien ici... Ichi-nii et papa pourraient nous rejoindre...

- Yuzu ? Que dis-tu ? Reviens-ici ! Reviens vite !

- Tu crois qu'il y a quelqu'un qui habite le palais ? Tu crois que Maman est au palais ?

- Non, elle n'y est pas ! Arrête avec ton foutu palais ?! Il n'y a rien ! Je ne vois rien ! Attrape ma main !

- Oh ! Je vois quelqu'un ? Il y a des enfants dans le jardin...

Karin tourna la tête pour éviter les rubans de soie.

- Yuzu ? Il ne faut pas...rester...là... Yuzu ? Yuzu ?

Silence. Elle scruta ses alentours, la gorge serrée.

- Yuzu ! Où es-tu ? Papa ! Ichigo ! Il y a quelqu'un ?!

Les doutes recommencèrent à l'envahir. Karin chercha à remplir ses poumons d'air sans succès.

- À l'aide !

Les flammes... La femme aux cheveux flamboyant ondula devant elle comme une chimère. Karin se sentit chuter sans pouvoir se raccrocher à quoi que ce soit. L'adrénaline coursait dans ses veines.

Le temps resta figé. Elle voulait le voir s'étirer tant qu'elle put. Elle voulait reprendre son souffle. Elle avait son nom sur le bout des lèvres, ses lèvres noircie sous la caresse des flammes. Yuzu! Yuzu ! Rendez-moi ma sœur ! Yuzu, reviens ! Ses mots, elle n'arrivait pas à les sortir. Son corps restait figé comme la pierre. Elle était prisonnière de son carcan de chair carbonisé. Mais elle n'avait pas mal. Elle était anesthésiée par la douleur de ne plus sentir sa jumelle à ses côtés. Karin n'avait jamais été sans Yuzu. Yuzu n'avait jamais été sans Karin. Papa ! À l'aide !

Karin sentit à nouveau son âme s'échapper de son propre corps. Elle commençait à prendre son envol avant de retomber dans son carcan de cendre comme attacher à la terre par un boulet. Est-ce que c'était ça mourir ? Elle était soudain si fatigué.

Tout devint noir.

Combien de temps avait-elle dormi ? Quand Karin ouvrit les yeux à nouveau, le quartier général Shinigami brûlait devant elle. Un nuage de débris s'élevait vers le ciel. Karin fixa le ruban rouge à son poignet droit. Le ruban courrait sur le sol pour s'arrêter sous une énorme dalle de béton. Ritto ?

Le ruban vira graduellement au noir. Karin laissa les larmes obscurcirent son visage. Pitié ! Stop ! Je veux que ça s'arrête !

En un clin d'œil, elle était à nouveau prisonnière de son corps. Les flammes dansaient devant elle. Le spectre semblait la narguer.

Tout devint noir.

Karin fit un nouveau bond dans l'espace. Elle se retrouva en face de la clinique...en face de sa maison détruite... de son quartier qui n'était plus qu'un vaste champ de ruine.

- Karin ?! Où est Yuzu ?

Son cœur fit un bond dans sa poitrine en se retournant.

- Papa ? Papa ? C'est toi ?

- Qui veux-tu que ce soit, Karin-chan ?

Au diable les surnoms ridicules, Karin voulait juste sauter dans ses bras. Mais elle ne bougea pas d'un millimètre.

- Je ne sais plus... Je ne sais pas ce qui...Yuzu était près de moi et puis après je ne sais plus... Qu'est-ce que c'est? C'est quoi cette uniforme ?

Son père revêtait un uniforme shinigami comme Ichigo.

- Ah ! Ca ! C'est une longue histoire, ma chérie !

Il se massa le front ensanglanté avant de la regarder dans les yeux. Il ignora la déception dans ses yeux. Mais son expression s'assombrit soudain. Isshin venait de remarquer à son tour son yukata blanc.

- Où est... Yuzu ? Tu n'es pas vraiment ici... Karin-chan.

Isshin serra la mâchoire.

- Elle était avec moi... On discutait... Elle était et puis... Je sais plus... Je l'ai protégé papa. Je lui tenais la main très fort. Bredouilla Karin.

Elle lui montra tremblante la main qui avait lâché Yuzu. Isshin se retourna brusquement, la main sur son visage pour étouffer un sanglot.

- Papa ?

- Tout va bien. Ca va aller. C'est... Tout va très bien se passer.

- Qu'est-ce que ça veut dire ? Pour Yuzu, je suis désolé. Je voulais la retenir...

- C'est pas grave, mon cœur.

- Je t'en prie papa, regarde-moi. J'ai pe...peur...

Karin se mordit aussitôt les lèvres car jamais, elle n'avait prononcé de telles paroles même quand, petite fille, son cœur s'emballait sur la balançoire quand Yuzu la poussait vers le ciel. Isshin lui fit face aussitôt, le regard luisant. Il esquissa un sourire et lui fit un clin d'œil.

- Ca va aller, ma Karin ! Tu n'es pas du genre à te laisser abattre, non ! Ça s'est rien pour ma Karin ! Tu es bien plus forte que ça !

- Mais...

Isshin fit un pas vers sa cadette avant de se pencher et de vomir tout ce qu'il avait dans les tripes.

- Papa !

Aucun son ne sortit. Karin ouvrit la bouche à nouveau, à court d'oxygène. Elle mit sa main sur son cœur.

- Est-ce... que je suis morte ?

La pression décupla dans l'air. Isshin se redressa tant bien que mal et secoua la tête sans conviction. Le visage pâle, il tenta de reprendre son souffle. Le vieux shinigami venait de réaliser que la pression spirituelle asphyxiante dans l'air provenait bien de sa fille. Il inspira profondément.

- Pa...pa ? Papa ? J'ai peur... Qu'est-ce qui se passe ?

- Ne bouge pas, ma chérie. Je vais venir te chercher. Karin, ne t'en fais pas, tout va s'arranger. Papa va tout arranger. Ca va aller.

Il ponctua ses mots d'un ricanement niais dont il avait le secret. Le sol trembla. Le visage d'Isshin s'assombrit à nouveau. Que faire ? Que faire en l'absence de Masaki ?

Une ombre passa devant Karin. Le sol se fractura profondément à ses pieds et un nouveau cratère se forma sous l'impact du quatrième Espada. Elle regarda dans le trou. Une immense chauve-souris hollow retrouvait sa forme initiale. Ses habits malmenés dans son combat, ses cheveux noirs dissimulant son visage, Ulquiorra Schiffer gisait face contre terre. Elle se tourna vers la menace.

- Tu es sûre que tu peux lui faire ce genre de promesse ? Demanda Kensei Mugumura tout essuyant une coulée de sang sur sa joue d'un revers de coude.

- Que vois-je ? Encore un Kurosaki ? Mais cette mission est trop simple.

Isshin disparut en un shunpo. Avant que Karin n'ait compris ce qui lui arrivait, Isshin lui donna un coup de coude dans l'estomac.

Karin sursauta en se réveillant à nouveau prisonnière de sa carapace de suie. C'était quoi ça ? Elle éclata en sanglot. Il fallait que ça s'arrête. Yuzu n'était plus là. Il fallait que ça s'arrête. Pitié ! Je vous en supplie. Laissez-moi sortir !

- Veux-tu que je te sauve, princesse ? Demanda une voix masculine.

Les cris de Karin restèrent prisonniers de sa gorge. Elle chercha la source.

- Bon, pas de réponse. Je vais donc passer mon chemin.

À l'aide ! Pitié ! S'il vous plait ! Aidez-moi !

- Désolé, c'était une offre à durée limitée.

Non ! Me laissez pas ici !

- Je plaisante.

D'un coup d'un seul, elle sentit la froideur du métal alors qu'il transperça son cœur. Karin en eut le souffle coupé. Elle sentit son enveloppe corporelle encore liée à celle de Yuzu se désintégrer et c'est avec aisance que son âme se détacha du matériel et se défit de la gravité. Elle flotta légèrement avant de poser le pied par terre. Sa chaîne du destin se brisa enfin. Elle prit une profonde inspiration en signe de soulagement et tenta de reprendre son souffle.

Il monta en elle. Elle le sentit monter en elle. Ses pupilles se colorèrent comme l'encre de chine. Sa pression spirituelle comme le plus violent des geysers jaillit verticalement. Une tornade prit racine autour d'elle dans un périmètre de 500 mètres. Elle avala arbres, branches, pans de murs et bancs et les broya en son sein comme une morbide centrifugeuse. De la ville que Karin-chan avait connu, il ne restait plus grand choses, un simple théâtre de scènex de désolation, d'explosions et de chaos. Elle aspira les flammes et éteignit les brasiers. Elle rentra en collision avec un mur invisible. Elle eut comme un frisson en sentant la présence de son sauveur.

- Tu dois l'appeler, princesse ! Sinon, il ne se calmera pas.

De quoi parlait-il ? De son zanpakutō ? Elle écarta les bras et laissa son reiatsu dégouliner hors d'elle comme un robinet ouvert. Elle sentit la froideur d'un katana caresser sa nuque.

- Tu dois l'appeler maintenant. Ouais, c'est définitivement le moment où jamais. Ouais je n'ai pas envie que l'ennemi nous repère. Je n'ai nulle envie de te faire du mal. Mais je n'hésiterais pas à me débarrasser de toi... si tu me ralentis. J'ai été claire ?

- Yuzu... gémit-elle. Yuz...

- Elle est déjà partie... Tu es seule. Tu ne peux compter que sur toi-même. Ce sont les bases, princesse !Les putains de base ! Ils vous a rien appris à toi et ton frère, cet enfoiré qui vous sert de père ! Appelle-le...

- Qui ?

- Qui à ton avis ?

- Chino... Chinokonatsu... Je ne connais que son nom et le nom d'une technique... C'est tout. Je vous jure.

Il ne se passa rien.

- Je sais plus... Yuzu...Elle était là et...

Les larmes barbouillèrent ses joues.

- Tuez-moi, tu n'as même pas les bases ! Je veux faire une bonne action et l'univers m'encule en retour ! Typique ! Tu me ralentis, gamine. Je veux bien rester aimable. Mais je te préviens je ne me traine jamais des boulets ! Ferme-les yeux ! Commande-lui !

- Mais...

- Ai confiance, cela va te venir naturellement !

- Euh...je... Kūkan... o magete to Ishi… Chinokonatsu[1].

Son poing se referma sur son zanpakutō. Une dernière décharge de reiatsu sortit de la jeune femme, écartant les nuages, ébranlant les ruines autour d'elle. Puis l'air arrêta graduellement de grésiller. Karin inspira et expira profondément, le visage en sueur. Si elle connaissait le nom de son zanpakutō, elle n'avait jamais réussi à clairement libérer le potentiel de son zanpakutō. Elle pouvait le sentir vibrer dans sa main joyeusement. C'était facile à distinguer, c'était un sentiment qui lui était si étranger à cet instant. Le nuage de poussière se dissipa peu à peu dévoilant la silhouette de l'homme.

- Balaize ! Pas trop mal pour une première fois, je suppose ! Tu peux marcher ?

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Elle hocha la tête faiblement. La jeune femme fit quelques pas sur le sol aride et marcha droit vers l'homme encore dissimulé derrière un rideau de poussière. Elle tendit la main vers lui et agrippa ses habits. Avant qu'il n'ait pu émettre une objection, elle se blottit contre lui et éclata en sanglot. Après quelques secondes, une grande main se referma sur le sommet de son crâne et ébouriffa ses cheveux noirs.

- Petite fille, si j'étais toi je réserverais mes larmes pour plus tard.

Ses mots ne firent rien pour l'apaiser. Les sanglots redoublèrent de plus belle résonnant dans ce champ de ruine. Alors, son sauveur fit une exception à la règle juste pour elle. Il l'étreignit avec force.


[1] Bend Space and will - Distends l'espace et le temps