Tout appartient à la génialissime J.K. Rowling
Prologue.
Cela faisait peut-être deux minutes, deux heures, plusieurs jours qu'il était allongé face contre terre sur le carrelage froid et dur de sa salle de bain, ses habits maintenant humides.
Le sommeil ne lui avait pas été accordé et il restait à l'état de veille, regardant toute sa vie se rejouer comme un mauvais film devant ses orbites mornes.
Cela n'était pas la première fois qu'il ressentait le besoin de se vider l'esprit dans cette salle blanche et impersonnelle, se demandant à cet instant pourquoi il choisissait encore la salle d'eau exiguë de ses anciens appartements alors que la demeure entière lui appartenait à présent…
Il se souvint alors avec peine du premier moment de véritable détresse qui l'avait conduit exactement à la même place, face contre terre, à même le sol, dans cette même pièce.
-Il paraît que votre famille accueille un heureux événement cette semaine… Le mariage très attendu de votre cousine, Nymphadora Tonks et de Rémus Lupin, le loup-garou. Siffla Voldemort.
Les rires fusèrent dans la pièce sombre, des rires qui ne faisaient aucun doute sur leur objectif : l'humiliation des Malfoy et de Bellatrix, qui jura. Cette femme n'était plus sa cousine, ne l'avais d'ailleurs jamais été, ce n'était qu'une traître à son sang…
Drago Malfoy frémit sous l'insulte qui ne lui était pas adressée. Il trembla encore plus fort sur sa chaise, depuis la mort de Dumbeldore, il avait été habitué à ce que ces mots soient pour lui… Oui, il avait failli, il n'avait pas su tuer l'illustre sorcier… C'était Rogue qui avait dû le faire.
Il voulut lever les yeux afin d'effacer les souvenirs de ces derniers jours. Mauvaise idée.
Cette pièce, aussi désagréable soit-elle, avait bercé son enfance, la table sur laquelle les nombreux Mangemorts présents s'accoudaient avait accueilli des innombrables soupers depuis sa naissance, mais rien ne l'avait préparé à ça…
Le corps suspendu dans les airs, comme si ses pieds étaient retenus par des cordes invisibles, reprit conscience. Il ne pouvait déjà pas supporter l'idée qu'une personne tourne inlassablement sur elle-même, tel un carrousel sinistre, mais croiser le regard de celle-ci était tout bonnement inadmissible.
Il lut dans les yeux de cette femme une telle détresse, une telle incompréhension qu'il faillit tourner de l'œil… C'était son expression, son regard. Comme s'il avait croisé ses yeux froids dans la glace. Regarder Charity Burbage tournoyer au plafond de sa salle à manger, c'était admettre sa faiblesse, ses doutes, admettre que sa place n'était pas ici. Hors il ne pouvait pas ce le permettre, ce le permettre c'était…
-Avada kedavra !
Le corps sans vie da l'ancien professeur s'écroula avec fracas sur la table qui s'effondra. Drago tomba en arrière avec sa chaise, il n'eut pas le temps de fermer les yeux qu'il voyait le corps sinueux de Nagini s'avancer vers sa proie…
Le charognard planta ses dents envenimées dans la chair encore chaude, ses écailles se teintant peu à peu de rouge…
Oui, admettre que, malgré la marque cuisante sur son bras gauche, il ne se sentait pas membre des rangs de Lord Voldemort, c'était la mort sans délai.
Alors, il attendit. Attendit pendant ce qui lui parut les plus longues minutes de sa vie, jusqu'à ce que cette réunion funeste se termine. Il se faufila alors jusqu'à ses appartements observa ses mains couvertes de sang. Couvertes de sang.
L'expression le fit frémir et il se précipita dans sa salle de bain, allumant le jet d'eau bouillant de la douche. Il ne prit pas le temps de se changer, ses vêtements lui collant à la peau, il se soumit à la chaleur apaisante, puis glissa peu à peu contre la paroi. Ses cheveux et ses vêtements trempés, de l'eau dégoulinant sur sa figure, il se permit alors une lâcheté qu'il détestait.
Il pleura.
Il laissa les larmes rouler sur ses joues blanches, l'eau salée se mêlant à l'eau douce, chaque perle de tristesse lançant un appel à l'aide anonyme. Peu à peu les sanglots le secouèrent jusqu'à devenir un tremblement incontrôlable.
Il avait froid. Il était gelé jusqu'aux os malgré la cascade brûlante qui l'engloutissait…
Cela faisait longtemps maintenant, mais le souvenir était toujours aussi frais dans sa mémoire.
Il se releva avec peine et laissa tomber ses vêtements. Frigorifié et nu, il retourna dans sa chambre et enfila un caleçon. Il rampa ensuite en dessous de son lit et délogea une latte du luxueux plancher. Rien n'était visible dans le petit gouffre ainsi formé, mais la baguette en main, il murmura : « Accio coffre ». Une boîte finement ciselée haute d'à peine quelques centimètres et large comme un parchemin glissa alors dans sa main et il sortit de dessous son lit. Il ouvrit l'étui et en sortit quelques tissus flasques. La boîte semblait sans fond.
Drago regarda avec un humour noir ce qu'il avait sorti de l'écrin. Il avait enfin osé ouvrir sa cachette, sa boîte de Pandore, ce à quoi il se raccrochait quand tout allait mal.
Il n'avait eu le courage de ne l'ouvrir que maintenant, alors que le danger était passé. Il fallait se rendre à l'évidence : il était un lâche.
Il enfila le jean noir et la chemise blanche et ajouta par dessus un fin pull noir et une veste de la même couleur. Ses chaussures les plus confortables enfilées, il se regarda avec dégoût dans le miroir, il détestait ces attributs moldus. Saisissant un sac jeté sans y prendre garde dans un coin, il descendit les escaliers lentement, ses pas résonnants dans la maison vide de manière étrange.
Il prit ce qu'il restait de nourriture dans la cuisine – c'est-à-dire pas grand-chose – et alla chercher dans l'entrepôt son Nimbus 2001, tout autre transport lui semblant insupportable.
Il soupira, appliqua divers sorts de camouflage et sortit par la fenêtre de sa chambre. Il faisait nuit noire et le silence était pesant au manoir Malfoy. Tremblant de peur, il franchit la barrière qui séparait sa demeure du monde extérieur et fonça comme un forcené. Il s'interdit le moindre regard en arrière et vola jusqu'à en perdre la raison, ne rageant qu'occasionnellement contre son idiotie : il avait oublié d'appliquer un sort d'imperméabilité à son balai et il pleuvait des cordes.
Plongeant son regard sur l'horizon qui profilait devant lui, il accéléra encore. Échappant aux griffes d'un ennemi invisible.