Résumé de l'histoire jusqu'ici :

Suite aux machinations d'Albus, Harry se retrouve coincé au square Grimaud avec Severus Snape. Ils soignent en secret Lucius Malefoy, qui a été torturé lors de la Bataille Finale dans des circonstances mystérieuses. Il a apparemment sorti Sirius Black du voile. Ce dernier est retenu en otage dans la Forêt Interdite, sûrement sur l'ordre d'Albus.

La famille Malefoy a disparu, tout comme Remus, qui a décidé de pourchasser les Mangemorts encore en liberté, le Ministère préférant déclarer qu'il les a tous capturés ou tués.

Harry sort doucement de sa dépression et commence à prendre soin de lui avec l'aide de Dobby et Winky. Mais le monde sorcier a à nouveau tourné le dos au jeune homme. Le Ministère réclame tout le crédit de la défaite de Voldemort et tente de faire passer Harry pour le nouveau Mage Noir pour pouvoir persécuter tranquillement les sorciers sombres, les serpentards et les créatures magiques en général.

Au début de l'histoire, quelques mois après la Bataille Finale, Harry sort enfin de chez lui, découvre que Lucius a sauvé Sirius et se fait kidnapper par un étrange et ancien Elfe de Maison, aidé de Fawkes. Suivant les ordres de la «Maîtresse», ils effectuent sur lui un rituel d'Ancienne Magie aux conséquences inconnues.

Plusieurs semaines après la rentrée, alors que la relation entre Severus et Harry s'approfondit doucement à leur insu, Remus fait son apparition et attaque verbalement Harry, fou de douleur à l'idée que Sirius est mort. Il renouvelle son attaque quelques jours plus tard, en s'excusant cette fois, ayant constaté que Sirius est bien vivant et réveillé. Ce qui n'empêche pas Severus, Winky et Dobby de se venger du loup-garou.


RAPPEL :

Chapitre 15 : L'éveil de la Belle-au-Bois-Dormant

Fermant son esprit, Harry se concentra sur le présent pour tailler dans les rangs des attaquants et rejoindre son ami, Severus comme un prédateur furieux à son côté. Lame, sort, potions et poings leur taillèrent un chemin rapidement dans les rangs extérieurs des assaillants qui avaient acculés Draco et Narcissa contre un des murs du Manoir. Ils profitèrent sans vergogne de l'effet de surprise, préférant l'efficacité aux scrupules.

Les assaillants n'en avaient manifestement eu aucun. Pourquoi eux ?

Leur présence affola les attaquants et redonna courage à Draco et Narcissa.

Un cri de triomphe ou d'horreur échappa au jeune Serpentard lorsque le dernier assaillant, en tombant, réussi à atteindre Narcissa, qui s'écroula aussitôt sous le sort inconnu.

Profitant de ce bref répit, Harry et Severus abolirent les cadavres et empoignèrent rapidement les Malefoy, disparaissant à nouveau dans un brasier éphémère.

Dans les jardins parfaits du Manoir Malefoy, une petite brise agita tendrement les roses qui fleurissaient en dépit du calendrier, répandant leur parfum délicat aux alentours.

La nuit était calme, la maison, silencieuse.

Nulle trace de la bataille furieuse qui venait de s'y produire.


Chapitre 16 : Tragédies


Le retour dans la Maison des Lochs fut au moins aussi chaotique que leur départ l'avait été. Harry sentait ses mains trembler sous l'effet combiné de l'excitation, de la terreur, d'une avalanche d'informations, de confusion, de joie.

Le corps qu'il tenait dans ses bras ne bougeait plus. Il ne distinguait que la blondeur pâle d'une chevelure qui pouvait appartenir à n'importe lequel des deux Malefoy qu'ils venaient de sauver.

Mais les avaient-ils réellement sauvés ?

Du sang tâchait la blondeur qui chatouillait son menton. Il peinait à maintenir vertical le corps abandonné dans ses bras. L'épaisseur de ses tenues de protection l'empêchait de sentir si le cœur sous ses mains battait encore.


Calme. Calme. Calme. Ce n'est pas le moment de paniquer. Paniquer ne sert à rien. Pense à la seconde suivante. Réagit !

Severus sur ses talons, le jeune sorcier se dirigea rapidement vers les chambres d'amis du rez de chaussée qui ne devaient contenir que le mobilier le plus basique mais être impeccablement propres. Si Harry connaissait ses elfes, l'un d'eux était en train de veiller sur Lucius et le second avait préparé la chambre pour recevoir deux blessés.


Lucius ! Lucius est réveillé ! Mais l'est-il encore ?

Harry chassa avec effort les pensées qui tourbillonnaient dans sa tête. Constatant distraitement que les elfes avaient effectivement anticipé leurs besoins, Harry déposa avec précaution le corps qu'il tenait sur le lit. Dobby avait allumé le feu dans la cheminée. Les lits étaient fait de frais. L'elfe les attendait en se tordant les mains d'inquiétude à côté de bassines d'eau tiède et de linge propre.

Se reculant quelque peu, il se défit rapidement de sa robe protectrice et de ses gants. Lançant un sort de nettoyage machinal sur sa tenue et ses mains, il se pencha sur son patient.


C'était Draco.

Draco, mince et quelque peu décharné, les muscles plus secs que dans son souvenirs et les traits du visage plus acérés.

Draco, inconscient ou mort, les yeux fermés, du sang sur le visage, sur le bras droit, sur le ventre, la jambe gauche entortillée dans une attelle de fortune.

Les mains de Harry tremblaient sur la carotide de son ami et pendant un instant qui paru infini, il n'arriva pas à trouver de pouls sous ses doigts.


Quand, il le sentit enfin, fragile et faible, doux comme les battements d'ailes d'un oiseaux en cage, Harry s'illumina de l'intérieur, inondé de soulagement à l'idée qu'il n'était pas trop tard pour son ami, qu'il ne le perdrait pas ce soir.

Tout à sa joie, il se tourna vers le lit voisin, avec la ferme intention de rassurer Severus sur l'état de son filleul.

Ce qu'il lu sur le visage granitique et figé du Maître des Potions banni la joie de son esprit aussi efficacement que leurs sorts avaient fait disparaître les cadavres il y a quelques minutes.

Quelques heures.

Quelques jours.

Quelques éternités.


Narcissa n'avait pas eu la chance de son fils.


La gorge du jeune sorcier se serra comme sous l'emprise d'une main d'acier. Pendant un moment, aucune bouffée d'air ne sembla arriver jusqu'à ses poumons.

Draco venait de perdre sa mère.

Lucius venait de perdre sa femme.

Severus avait perdue une rare amie.

Draco avait besoin d'eux.

Cette pensée le traversa comme un météore.

Dans un effort surhumain, il se reprit suffisamment pour murmurer d'une voix brisée, à peine un murmure, en vérité.

«Sev...Severus. Draco est viv... Il est vivant. Il est blessé, Severus. Il a besoin de nous.»

Mécaniquement, sans aucune de la grâce fluide et dangereuse qui le caractérisait, le Maître des Potions se dirigea vers le lit de son filleul.

Le cœur de Harry se brisa un peu plus à cette vue.


Il aida Severus en silence, nettoyant la peau de Draco avec délicatesse, accomplissant les mouvements à présents familiers pour enfiler à un corps inconscient des vêtements propres.

Draco avait la jambe gauche brisée en trois endroits. Il avait aggravé ses fractures en continuant à l'utiliser. Son poignet droit était foulé et son biceps droit portait de profondes entailles. Miraculeusement, aucune d'entre elles ne s'était infecté, pas plus que la coupure qui divisait sa pommette droite en deux. Il était magiquement et physiquement épuisé. Il souffrait de déshydratation.

Qu'avait-il donc vécu pour se forcer à marcher sur une jambe cassée ? Pour négliger tous ses besoins les plus élémentaires ?

Il allait dormir une dizaine d'heures, se réveiller affamé, dévorer et se rendormir à nouveau.

Severus prévoyait une guérison complète.

Il le lui annonça d'un ton polaire, ses mots précis et tranchants comme du cristal. Et tout aussi cassants.

Harry le laissa partir.

Quelqu'un devait brasser des potions de nutrition et d'hydratation pour Draco après tout. Et Severus avait besoin de l'environnement rassurant et réconfortant du laboratoire de potion.

Sans parler de la solitude.

Il aurait aimé pouvoir le réconforter, mais une vie d'habitude ne se combattait pas en quelques semaines. Il trouverait un moyen détourné de témoigner son soutien à Severus. C'est ce qui semblait être le plus efficace.


Resté seul au chevet de son ami, Harry lutta un instant contre l'étourdissement et appela doucement Dobby prêt de lui.

Ils ne pouvaient pas laisser Draco seul. Et quelqu'un devait s'occuper de Narcissa.

Dobby fut donc envoyé relever Winky au chevet de Lucius pendant que le Sauveur du Monde Magique s'attaquait à la toilette mortuaire de la mère d'un de ses meilleurs amis.

Comme souvent, des pensées étranges traversaient l'esprit du jeune sorcier.

Si on m'avait dit un jour que je verrai chacun des membres de la famille Malefoy nus et que je leur ferai leur toilette... Etrange, elle n'a pas l'air d'avoir souffert autant que Draco de la faim. Que s'est-il donc passé ?

Il acheva sa tâche morbide et recouvrit respectueusement Narcissa d'un drap.

Un POP! discret l'informa que Dobby avait fini la tâche qu'il lui avait confié. L'elfe tenait dans ses bras une robe d'un bleu-vert profond, aux manches largement évasées, qui semblaient bordées d'une dentelle écumeuse.

Dobby claqua des doigts et Narcissa prit tout à coup l'apparence inhumaine d'un esprit des eaux.

Un mélange de l'enchanteresse Circée (qui transformait les hommes en cochons) et d'une sirène (qui les transformaient en dîner), pensa Harry. Belle et mortelle. Une Black jusqu'au bout.

Le jeune sorcier envoya ensuite l'elfe se coucher. Il s'affaira un long moment dans la chambre de Draco, avant de partir pensivement en direction des serres.

Le jardin d'hiver conviendrait sans doute, marmonna-t-il distraitement.


Vers quatre heures et demie du matin, Harry pénétra à nouveau dans la maison. Passant devant la chambre de Draci, il jeta un coup d'œil inquiet à l'intérieur, et trouva celui-ci calme et profondément endormi. Severus occupait un fauteuil confortable à son chevet et avait, lui aussi, succombé au sommeil, serrant la main de Draco entre les siennes.

Il s'est fait vraiment beaucoup de souci pour lui. Je suis content que nous l'ayons récupéré en relative bonne santé.

Winky était sans doute passé faire un tour dans la chambre de Draco et avait ajouté à ses modifications. Elle avait gardé le thème des dragons et avait brodé autour des images japonisantes qu'il avait transfigurées rapidement pour les murs. Le sol était à présent carrelé de céramique vert d'eau qui formaient des motifs géométriques compliqués parsemés ici et là de tapis rond et doux de toutes les couleurs où divers dragons chassaient leurs queues à travers des paysages fantastiques. Le lit avait été élargi et des couvertures ajoutées dans les mêmes tons et motifs que les tapis. Les fresques murales se mélangeaient aux tapisseries et aux tableaux de dragons, certains moldus, d'autres sorciers, d'autres encore des reproductions de dessins des magizoologues.

Harry était trop fatigué pour réellement détailler la pièce. Il en sorti uniquement avec la conviction inébranlable que Winky était un fantastique don du ciel. Il ensorcela deux ou trois douces couvertures vertes ornées de dragons à l'air particulièrement féroces et vindicatifs qui allèrent sagement s'enrouler autour de la forme penchée du Maître des Potions et acheva sa bonne action en transfigurant son fauteuil en une chaise longue. Il vérifia que la perfusion magique de potion plantée dans le bras de Draco contenait encore assez de liquide pour les dix prochaines heures et referma la porte enfin en silence.


Grimpant péniblement les marches de l'escalier qui menait aux chambres, Harry frotta machinalement sa main qui le lançait depuis des heures pour une raison étrange. Et découvrit aussitôt pourquoi quand ses doigts rencontrèrent le métal toujours brûlant de son bracelet Veille-Bébé.

Lucius était toujours aussi agité et inquiet, apparemment.

Résigné, le Sauveur du Monde Magique prit la direction de la chambre du Lord. Celui-ci semblait dormir. Tranquillement, le jeune homme, ranima le feu d'un sort et vérifia rapidement que Lucius ne s'était pas blessé après qu'ils soient partis secourir Narcissa et Draco. Tirant son sofa près du lit de l'aristocrate, Harry se pelotonna sous le plaid et, laissant sa tête lourde reposer sur l'accoudoir, commença à fredonner à mi-voix une chanson douce et calme, jusqu'à ce que la chaleur autour de son poignet diminue enfin à un niveau tolérable indiquant que Lucius avait glissé dans un sommeil sans rêves.


Lorsque, le lendemain matin, Severus pénétra, silencieux comme une ombre, dans la chambre de Lucius, il découvrit avec surprise que le Sauveur du Monde Magique s'était accordé une nuit blanche. Sa voix enrouée continuait à humer inlassablement une douce mélodie. Ses cheveux hirsutes défiaient la pesanteur à la manière des meilleurs surréalistes. Il était emmitouflé dans un plaid, roulé en boule sur le sofa aux couleurs gryffondoriennes qu'il avait absolument tenu à installer à côté du lit de Lucius, un énorme grimoire sur les genoux. Ses yeux verts se plissaient douloureusement sous l'effet conjugué de l'épuisement et du trouble qui le hantaient.

Il n'avait visiblement pas chômé cette nuit-là. Severus avait trouvé Narcissa avant Harry. Il n'avait put s'empêcher d'être touché par le soin que le jeune homme avait mis à lui aménager un lieu de recueillement pour les traditionnels dix jours de veillée avant la cérémonie d'enterrement. Elle reposait sereinement au milieu des fleurs colorées du jardin d'hiver, parée de sa robe préférée rendue scintillante par l'intensité des magies qui tourbillonnaient autour de son corps pour le préserver et le protéger.

Désormais, rien ne toucherait plus Narcissa.

Entre le mausolée de Lady Malefoy, le ré-aménagement complet de la chambre de Draco suivant ses goûts délicats et la petite montagne de talismans irradiant littéralement de sorts de protection qui gisaient sur la table de travail qui jouxtait le sofa, Severus soupçonnait le jeune cornichon d'avoir razzié son stock de potions énergisantes sur-puissantes pour se maintenir éveillé.


Un tintement argentin le tira de ses ruminations de plus en plus colériques. Il leva les yeux juste à temps pour apercevoir le droit poignet du jeune sorcier, dégagé momentanément par le mouvement de son bras pour tourner une page de son pavé. Le Maître des Potions ne put retenir une exclamation doucereusement venimeuse.

«Monsieur Potter ! Expliquez moi je vous prie, comment votre poignet a atteint ce degré de suppuration et l'excellente raison pour laquelle vous n'y avez pas remédié!»

Sa voix véhémente et sifflante lui rappela les sifflements de Nagini avant l'attaque.

Le jeune crétin ne pouvait-il donc pas prendre soin de lui ? Il suffisait de le quitter des yeux quelques heures pour qu'il se mutile ! Comme s'ils n'avaient pas déjà assez de soucis avec Lucius, Draco et les stupidités sans noms que leur concoctaient régulièrement le monde magique !

La réponse de Harry, murmurée d'une voix rauque, coupa net son monologue intérieur.

«Vous dormiez. Vous sembliez épuisé. Et je ne peux me soigner convenablement à l'aide de ma seule main gauche. J'ajouterai que vous avez besoin de tout votre sommeil pour affronter Poudlard et vos élèves sans attirer l'attention d'Albus.»

Soupirant désespérément, le Directeur de Serpentard entreprit de panser les blessures du morveux qui s'était infiltré si profondément et furtivement à l'intérieur de ses défenses qu'il ne s'en était rendu compte que bien trop tard. Severus commanda à mi-voix un petit déjeuner gargantuesque qu'il força le gamin à partager avec lui avant son retour au château pendant que celui-ci lui relatait sa nuit.

La dureté de la voix colérique du Maître des Potions contredisait la douceur avec laquelle les doigts agiles faisaient pénétrer l'onguent anti-brûlures autour du poignet blessé, évitant avec habileté les bracelets Veille-Bébé qui avaient fait des petits. Il réprima à grand peine un sourire sardonique en apprenant que le fin bijoux en argent représentant un naga qui se mordait la queue était son propre bracelet Veille-Bébé (Vous êtes les plus exposé d'entre nous tous, avec votre position à Poudlard, Severus. Ne grognez pas.) et le dragon chinois aux écailles alternant l'or et l'argent enroulé plusieurs fois autour du poignet jeune homme était relié à Draco.

Il profita évidemment de l'occasion qui se présentait, en bon Serpentard, pour faire avaler à un Harry encore un peu dans le vague des potions de nutrition surpuissantes et longue action ainsi que sa nouvelle recette de potion Ouvre-Appétit.

«Puis je connaître la raison pour laquelle vous n'avez pas jugé bon de prendre du repos tant que vous le pouviez ? Vous allez être coincé entre deux Malefoy convalescents et inquiets pour leur famille et ce n'est pas une position qui s'affronte sans de considérables réserves de patience et une grande acuité intellectuelle. À vous voir papillonner des yeux comme un hiboux, je doute que vous soyez à la hauteur !»

«J'étais sur le point de me coucher, quand le bracelet de Lucius m'a rappelé à son bon souvenir et j'ai été incapable de m'assoupir une fois allongé. Et puis, il fallait bien que je m'informe sur les coutumes funéraires sorcières ! Je ne voudrai pas manquer de respect à la famille Malefoy en négligeant un détail crucial... Et en voyant Lucius, je me suis rappelé que c'est à lui que nous devons la vie de Draco. C'est inacceptable ! S'il avait été plus mal en point, il aurait pu se blesser gravement ou simplement être trop faible pour nous avertir. Qu'aurions nous fait, alors ? Les médaillons nous permettrons au moins de pouvoir réagir. Ils sont enchantés pour offrir une certaine protection et avertir le maître médaillon que je porte en cas d'attaque par un élément extérieur. Nous connaîtrons instantanément le nom de la personne en danger et l'endroit où elle se trouve. Il suffira d'activer les MirorCom pour nous éviter de nous précipiter en aveugle comme nous avons dû le faire pour Draco et Narcissa...»


Le réveil, pour Lucius, fut pénible et douloureux.

Il eut la sensation de devoir gravir, nu, un flanc de montagne escarpé et couvert de buissons épineux. Il avait vaguement conscience de ne plus être dans les entrailles du Département des Mystères et il y avait un souvenir confus d'une peur étouffante, d'une inquiétude qui avait saisi tout son être dans un étaux de flamme suffocantes, mais quoi que ce soit, c'était fini à présent.

Son corps était entouré de doux tissus, soutenu par un matelas qui berçait imperceptiblement ses membres. Il se sentait bien. Il n'avait mal nulle part.

Raisonnablement rassuré sur sa situation actuelle, Lucius ouvrit les yeux lentement.


La redécouverte des couleurs fut relativement douloureuse.

Le monde était trop intense pour la plupart de ses sens, à l'exception du toucher. Il en inclut qu'il avait été inconscient un certain temps et que les personnes qu'il entendait vaguement discuter à voix basse à proximité de l'endroit d'où il reposait devaient l'avoir touché régulièrement pour une raison ou une autre. Il essaya de se limiter aux conclusions logiques et de ne pas se laisser emporter par les possibilités infinies que lui fournissait sont imagination.

Narcissa a toujours dit que je me perdrais dans les méandres du rêve si elle m'y autorisait.

Procédant avec méthode, le Lord Malefoy laissa un temps d'adaptation à son ouïe avant de rouvrir les yeux.

Sa seconde tentative fut plus probante.

Il se trouvait dans une chambre à coucher (la sienne apparemment, puisqu'il occupait le lit seul) comme il n'en avait jamais vu. Il approuvait le luxueux confort dont la pièce était pourvue et s'accorda quelques instants pour vérifier qu'il se trouvait bien dans un intérieur. Il se promit de consacrer ultérieurement quelques heures à explorer convenablement les aménagements de la chambre et... était-ce une terrasse ?

Mais la curiosité et l'instinct de conservation l'emportèrent rapidement et le sorcier se tourna très lentement vers les voix qu'il percevait à sa droite.

Qui étaient ces sorciers ?

Lucius aurait aimé pouvoir être rassuré quant à leurs intentions. Le soin apporté à la pièce où il se trouvait et l'absence de douleur étaient prometteurs, mais il avait passé suffisamment de temps à proximité de Voldemort pour savoir que toutes les tortures ne se déroulaient pas dans des donjons humides aux ambiances glauques. Bellatrix et lui avaient des ressources de subtiles cruautés absolument insoupçonnés.

Les sorciers déjeunaient. Le plus jeune avait l'air de sortir d'une nuit blanche. Ses cheveux noirs ébouriffés caressaient ses omoplates et offraient un contraste saisissant avec sa peau dorée et sa tenue de cuir d'un vert vénéneux.

Il n'avait encore jamais vu de Dragon de cette couleur particulière. Il était pourtout persuadé que Draco leur avait infligé des leçons sur toutes les espèces de dragons vivantes ou pas, réelles ou imaginaires, à Narcissa et à lui.

Un énorme volume sorcier cachait le bas de son corps et des bracelets précieux tintinnabulaient autour de son poignet droit.

Deux possibilités : ou ce sorcier est particulièrement vain, ou ces bracelets sont spéciaux pour qu'il les garde par-dessus un bandage aussi récent. Je me demande laquelle est vraie.

Il pouvait distinguer un anneau à sa main gauche.

Un Lord donc. Comme c'était étrange. Il pensait connaître tous les Lords du Monde Sorcier Européen et une bonne partie des plus importants Lords américains, mais cet homme lui était inconnu et son apparence ne lui donnait aucune information. Si ce n'est qu'il avait apparemment participé à une bataille très récemment.

L'homme auquel il parlait était grand. Il portait un ensemble sorcier traditionnel couleur aubergine qui faisaient ressortir la blancheur de sa peau et l'ébène de sa chevelure soyeuse qui cascadait sagement autour de ses épaules. Les manches ajustées de sa tuniques révélaient une musculature bien dessinée. Le pantalon noir enfoncé dans des bottes souples de la même couleur rendait le même service à des jambes d'une longueur interminable. L'homme avait une grâce dangereuse qui lui rappelait quelqu'un, de même que sa voix de basse parfaitement modulée et ses longs doigts gracieux qui étaient à présent délicatement posés sur l'épaule du plus jeune. Le lord inconnu se faisait gentiment pousser hors de la pièce par son compagnon.

Un amant peut-être ?

Un mouvement de tête qui appuyait manifestement un ordre lui permit de détailler les traits du visage.

Il connaissait ce nez, ces pommettes, ce menton volontaire, cette bouche fine et ces yeux ! Ces deux grands puits insondables en forme d'amandes, il les connaissaient aussi bien que les siens !

Un coup d'œil rapide à la main gauche, toujours posée sur l'épaule de l'autre sorcier, lui permis à présent de distinguer le sceau du patriarche de la famille Prince.

Severus !

Les émotions tourbillonnaient trop rapidement dans son esprit pour qu'il puisse s'en saisir. Fermant les yeux pour tenter d'ordonner ses pensées et de maîtriser sa confusion, Lucius entendit une porte se clore doucement sur sa droite et le POP! annonçant l'arrivée d'un elfe de maison.

On ne le laissait pas seul.

Mais Severus était là. Tant que Severus serait là, Lucius ne craignait rien.

Le lord Malefoy emporta cette conviction (et ses nombreuses questions) dans son sommeil.


Son second réveil fut un miroir presque parfait du premier : son esprit émergea rapidement, arraché aux limbes du sommeil par le bruit caractéristique du transplanage d'un elfe qui disparaissait et le son d'une porte que l'on ouvrait avec précaution. Il se sentait beaucoup plus alerte et à même de gérer tout ce que Severus pourrait lui révéler.

A sa grande déception, ce ne fut pas son vieil ami, tout disposé à satisfaire sa curiosité qui se présenta devant lui, mais le mystérieux jeune sorcier avec lequel le Maître des Potions était si familier. Celui-ci avait manifestement fait un brin de toilette, peut-être même une petite sieste. Il avait l'air plus reposé et son apparence était, à première vue, celle, nette et imposante qui convenait à un Lord.

Le jeune homme fit quelques pas en direction du lit et le dévisagea machinalement. Lucius supposait qu'il avait effectué ces gestes un grand nombre de fois auparavant. Mais lorsque le sorcier s'arrêta brusquement, visiblement saisi par la surprise, il se fit la remarque que le voir réveillé était un événement que l'on attendait plus.

Le choc de son hôte lui permit cependant de le détailler avec attention. Il comprenait ce qui avait pu séduire Séverus en lui.

Le sorcier qui lui faisait face n'était pas très grand, mais la puissance et la vitalité incroyable qui se dégageaient de sa magie laissaient aisément oublier sa petite taille. Mince, le corps délié mais tonique d'un sportif (un danseur ou un guerrier), mis en valeur par les épaisseurs superposées de son habit sorcier très peu conventionnel, mais seyant et confortable : un pantalon brun-rouge ajusté enfoncé dans des bottes montantes de cuir fauve. Une tunique brodée au col et aux poignets de ses manches évasées, taillée dans un tissu étrange qui semblait capturer toutes les nuances de vert possibles et imaginables, recouvrait un col roulé près du corps qui recouvraient les bras pratiquement jusqu'aux paumes. L'ensemble était recouvert d'une épaisse robe de sorcier sans manche, largement ouverte au torse et sur les jambes, dont le velours vert sombre était rehaussé de broderies métalliques diverses aux bordures. La robe était fermée par une large ceinture de tissu qui soulignait la finesse de la taille de ses plis mordorés.

Le sorcier semblait avoir capturé toutes les couleurs de la forêt dans les nuances changeantes de ses vêtements. Chaque mouvement, de son corps et de la lumière, révélaient de nouveaux détails. Lucius se demanda pensivement si le sorcier était aussi impressionnant que ses vêtements le laissaient supposer. On pouvait lire beaucoup dans le costume des hommes et les sorciers ne dérogeaient pas à la règle. Cette habitude de Lucius lui avait rendu service bien des fois lors de sa carrière politique.

Ce sorcier était-il pragmatique, original, respectueux des traditions sans avoir peur de les bouleverser pour n'en garder que le cœur, subtil et changeant ? Si c'était le cas, il s'expliquait mieux l'attachement de Severus. Lui-même n'aurait sans doute pas pu résister une telle gemme.

Il laissa son regard errer lentement vers le visage du sorcier. Une bouche charnue, des traits fins, un menton de renard, des pommettes qui mettaient en valeur des yeux de chat d'un vert qui rendait ses robes ternes tant la magie y luisait, des cheveux fous qui tombaient librement sur ses épaules, retenus seulement par deux mèches nouées derrière sa tête dans le style ancien des Pater Familias et un front balayé par des mèches rebelles, d'un noir de jais...qui ne cachaient pas vraiment une cicatrice célèbre en forme d'éclair !

«Potter...?»


Harry avait suivi les conseils de Severus. Il était propre, habillé de frais, reposé (il soupçonnait Winky de lui avoir donné un petit coup de pouce magique...) et prêt à s'attaquer aux défis de la journée. Dobby avait livré les amulettes protectrices ainsi que les lettres expliquant brièvement ce qui s'était passé la nuit dernière aux cohortes potteriennes et à ses parrains. Entrant doucement dans la chambre de Lucius, il jeta un bref coup d'œil vers le lit, par pure habitude.

Voyons, il devait s'occuper du repas de midi et des soins de Lucius, passer vérifier que la perfusion de Draco n'était pas vide et lui repasser une couche d'onguent contre les bleus. Il faudrait brasser des potions de soins pour la salle de bain du jeune Malefoy, vérifier que personne n'avait tenté de s'introduire dans le Manoir, demander à Severus s'il avait une idée de la façon dont il avait transporté quatre personnes à travers deux séries de protections magiques spécifiquement conçues pour rendre une telle chose impossible, vérifier que les protections autour de la Maison des Lochs n'étaient pas endommagées et que leur efficacité était réelle...

...Lucius était réveillé ! Il avait les yeux ouvert !

Le choc figea Harry dans sa contemplation. Il n'avait jamais vu les yeux gris argent du Lord d'aussi près. Son visage était incroyablement mobile et ses yeux le disséquaient allègrement. Harry sentit un frisson remonter le long de sa colonne sous le poids presque palpable de ce regard. L'aristocrate était appuyé contre ses oreillers, détendu. Les couvertures dissimulaient ses jambes musclées, nues sous les draps. Son torse était couvert d'une création de Winky : un kimono de soie court qui ne couvrait le corps que jusqu'en haut des cuisses. Parfait pour assurer la dignité du malade tout en facilitant les soins aux membres blessés. Winky n'en était évidemment pas resté là. La soie d'un bleu profond rappelait la couleur de l'océan au soleil et était peinte de motifs argentés et noirs représentant des sakura fleuris. L'échancrure du kimono laissait apercevoir les délectables clavicules ainsi que le début de ses muscles pectoraux. La soie épousait les contours de son corps.

Harry avait le souffle coupé.

C'était une chose d'admirer une statue dans toute sa perfection physique. C'en était une autre de la découvrir faite de chair et de sang, animé par un esprit aiguisé, des pensées, des sentiments... en un mot : vivante !

Au-delà du choc et de l'admiration, la joie et la tristesse se mêlaient dans un ensemble doux-amer.

Lucius était enfin réveillé. Ils avaient retrouvé Draco. D'un autre côté, Narcissa était morte et l'aristocrate allait découvrir qu'il avait dormi plusieurs mois et qu'il allait devoir lutter pour retrouver l'usage de ses jambes.

Une exclamation choquée en provenance du lit arracha Harry à sa contemplation.

Il ne m'avait pas reconnu...?


«Je dois vous remercier de ce que vous avez fait pour mon parrain. Quelles que soient vos raisons, vous avez toute ma gratitude.»

L'aristocrate inclina brièvement sa tête en réponse, mais n'offrit aucune explication.

Je ne me souvenais pas que sa voix ai été si mélodieuse. Quoique ce n'est pas comme s'il m'avait fréquemment accordé l'honneur de sa conversation.

Je me demande ce qui se passe en ce moment dans son esprit.

La remarque, comme un écho, résonna dans les pensées des deux hommes. Harry raidit son corps et son esprit, se préparant à relater à Lucius tout ce qui s'était produit depuis le début de son coma. Préférant garder les mauvaises nouvelles pour la fin, il appela Winky.

Laissons Lucius découvrir les merveilles du plateau repas qui vous empêche de bouger les jambes avant de lui annoncer qu'il ne peux plus les bouger, de toute façon.


«Nous allons déjeuner ensemble, si vous le voulez bien, ce qui me permettra de vous mettre au courant des évènements depuis la Bataille Finale.»

Devant le second acquiescement silencieux de Lucius, Harry laissa sa magie manipuler délicatement l'aristocrate, ses couvertures et ses oreillers pour les arranger en position assise dans le lit. Lui-même s'installa confortablement dans un fauteuil et transfigura le plateau repas apporté par Winky en table.

«Vous ne vous êtes pas alimenté naturellement depuis plusieurs mois, aussi je crains que votre régime ne comporte beaucoup d'aliments liquide dans un futur proche. N'hésitez pas à m'indiquer vos préférences, si vous en avez. Tout a commencé lorsqu'Albus...»

Le repas se déroula calmement. La voix du jeune sorcier résonnait doucement dans la chambre, s'accordant des pauses régulières qui permettaient à l'aristocrate de digérer l'avalanche de nouvelles déversées sur lui par le sauveur du Monde Magique et à ce dernier de se restaurer.

Lucius ne disaient rien, conservant ses questions pour une fois prochaine.

Il avait besoin de s'accorder le temps de la réflexion et il préférait avoir l'ensemble des informations à sa disposition pour cela.

Il était donc très attentif, chose aisément perçue par Harry qui aurait pu jurer qu'un regard humain ne pouvait pas être si intense, lui qui était pourtant accoutumé aux mimiques de Severus.

Le langage corporel et les autres informations qu'il pu tirer de son environnement étaient presque aussi intéressantes que les évènements dont le jeune homme lui parlait.

La chambre avait été préparée avec soin, respect pour ses sensibilités serpentardes et un certain pied de nez aux conventions.

Le jeune homme en face de lui avait une maîtrise impressionnante de sa magie : il la maniait avec précision et précaution et disposait d'une puissance magique sans commune mesure avec celle dont il se souvenait.

Que s'était-il donc passé lors de la dernière Bataille ? Quoique ce fût, le jeune homme avait eu du mal à s'en remettre. Lucius n'avait pas manqué de remarquer les potions que Severus avaient brassé pour lord Potter. Il reconnaissait les fioles caractéristiques du Maître des Potions.

Le Lord face à lui trait également les informations qu'il lui distribuaient : tout ce qui était jugé intéressant pour lui (l'état du monde magique, les nouvelles de Severus, de son fils et des amis de celui-ci) était détaillé. En revanche, le jeune homme ne soufflait pas un mot des épreuves personnelles qu'il avait traversées et avait résumé fort concisement la Dernière Bataille : «Nous avons gagné.»

C'était un peu léger, tout de même.

Lucius étoffait à une vitesse inquiétante la liste mentale des questions à poser de toute urgence à Severus.


Le repas pris fin avant que le récit puisse réellement être achevé. Harry devait encore informer Lucius qu'il était veuf, que son fils se remettait de ses blessures au rez-de-chaussée de la Maison des Lochs et que ses jambes étaient momentanément hors d'usage.

Autant commencer par le début, se dit Harry, il faut que je lui fasse son massage de toute façon.

«Vous êtes presque totalement remis des sévices que vous avez subis dans le Département des Mystères.»

Le sourcil impérial que Lucius leva à cet instant informa Harry qu'il avait parfaitement saisi la nuance, merci bien et qu'il était curieux d'entendre la suite, s'il pouvait se dépêcher un brin ?

«En revanche, votre coma nous a empêché de traiter vos jambes. Severus ne pourra mettre au point un traitement efficace que si vous êtes capable de lui fournir les détails qui lui manquent. Pour l'instant vous ne pouvez pas les bouger de vous-même. Mais Severus est persuadé que vous retrouverez toutes vos facultés. Ce sera sans doute long et pénible, mais vous ferez un rétablissement complet. Je vais vous masser, comme je le fais trois fois par jour et je voudrai que vous vous concentriez sur vos jambes, pour me dire si vous sentez mes mains ou si certains endroits sont douloureux.»

Lucius avait pâli imperceptiblement à l'annonce de sa paralysie et son visage avait aussitôt adopté le masque du lord Malefoy : l'expression hautaine et impassible qu'il offrait d'ordinaire au reste du monde. Il avait fermé les yeux un instant sous le poids de l'accablement. Mais son regard, quelques secondes après, n'affichait qu'une détermination inébranlable.


Harry l'avait précautionneusement lévité sur la table de massage, sur le ventre. S'emparant des onguents appropriés, le jeune homme avait ôté ses bottes et sa robe de sorcier, remontant les manches de son col-roulé. Grimpant sur la table de massage dans un froissement discret de tissu, il avait réchauffé l'onguent quelques secondes entre ses doigts avant de débuter à rouler les muscles du mollet gauche sous ses doigts, accroupi à califourchon au-dessus des cuisses musclées du patriarche des Malefoy.

Distraitement, il enchanta un parchemin pour enregistrer tout ce que dirait Lucius.

«N'hésitez pas à me faire vos remarques. Le parchemin les enregistrera automatiquement pour Severus.»

Intérieurement, Harry tentait désespérément de ne pas penser au massage du soir.

Le massage intégral du soir. Celui qui suivait le bain et qui durait une bonne heure. Il aurait bien laissé un répit à Lucius, surtout avec les nouvelles qu'il devait encore lui annoncer, mais toute interruption des traitements pouvait remettre en question la guérison finale, ce que le jeune homme avait juré d'accomplir. Il faudrait juste qu'il soit très professionnel. Pas question donc d'admirer la musculature puissante qu'il manipulait ou de tenter de compter les nuances de gris dans les yeux de Lucius.


Après ce qui sembla être une éternité, la torture s'arrêta. Les sensations dans mes jambes flirtaient constamment avec la limite de la douleur et s'apparentaient à un cas extrême de fourmis dans les jambes, comme le formulait un jeune Draco qu'on avait forcé à resté assis trop longtemps à son goût.

La seconde partie du massage avait consisté en une autre forme de torture. Lucius avait pu admirer le corps de son hôte se balançant rythmiquement au dessus de ses membres inférieurs.

Il lui tournait le dos et lui offrait un point de vue incomparable sur une chute de reins, ma foi, délicieuse. Au fur et à mesure de la progression du jeune sorcier vers le haut de ses cuisses, Lucius s'était forcé à contempler le plafond, plutôt que les fesses rondes qui venaient de lui prouver que sa paralysie ne s'étendait pas à ses hanches.

S'il n'avait pas promis à Narcissa de ne jamais prendre d'amant sans lui en parler et obtenir son approbation auparavant, il se serait probablement laissé allé à tester les eaux avec le jeune Lord Potter.

Déraillant ses pensées vers sa femme et son fils, Lucius fouilla sa magie à la recherche du lien particulier que les Patriarches de sa Famille formaient toujours avec ceux qu'ils aimaient, leurs enfants et conjoints, à travers les Magies Familiales. Il trouva Severus aisément. Mais, il avait beau chercher le lien qui l'avait lié à sa meilleure amie pendant plusieurs dizaines d'années était introuvable.

Il perçut confusément la magie du jeune Potter qui l'entourait et le remettait délicatement au lit, comme un invalide, pensa-t-il amèrement. Perdu dans sa panique, son contrôle sur sa magie s'affaiblit et il ne parvenait plus à rien sentir, ni Severus, ni Narcissa, ni Draco.

D'une voix basse rendue coupante par la panique et la peur, l'aristocrate se tourna vers son garde-malade.

«Et Narcissa ?...Draco ?»

Sa voix se brisa presque lorsqu'il vit l'ombre qui tomba sur le visage du jeune sorcier à la mention du nom de son épouse.


Elle était morte ! Morte !

Il en était sûr.

Ce ne pouvait être que ça.

Quand ?

Comment ?

Ce n'était pas possible !

Pourquoi ne l'avait-il pas senti à temps ?

Il dû faire preuve d'un effort surhumain pour contraindre ses lèvres à former le nom de son fils.

Mais il fut immédiatement rassuré.

«Draco est ici. Il va bien. Il dort toujours, mais il guérit. Il n'y aura pas de problème.»


Harry ne savait plus que faire, que dire pour aider Lucius.

Traite-le comme tu aurai traité Severus avant qu'il ne s'installe définitivement dans la Demeure des Black. Respect de lui-même et de son intimité et surtout, ne pas suggérer qu'il a des émotions que l'on pourrai associer à un Poufsouffle ou à un Gryffondor.

«Je peux vous amener à Draco, si vous souhaitez le voir... Narcissa est également ici... Severus reviendra ce soir.»

Devant le visage de pierre qui lui faisait face, Harry battit en retraite.

Lucius ne se laisserait pas aller devant lui. De son point de vue, ils étaient presque des inconnus. Des alliés de circonstances, au mieux.

Son cœur se serra à cette réalisation, mais il se reprit rapidement.

Le mieux pour l'aristocrate serait de le laisser en paix, seul, mais sans l'abandonner.

Et puis, il fallait qu'il aille s'occuper de Draco.

Sa décision prise, le jeune homme posa délicatement deux boîtes ouvragées qui contenaient chacune une baguette sur le bord du lit, à portée de main de Lucius.

«Je reste à portée de voix, si je peux vous être utile, n'hésitez pas.»

Détournant les yeux, Harry sortit calmement de la chambre, laissant Lord Malefoy en tête-à-tête avec sa baguette et celle de son épouse. Il n'avait pas fait trois pas dans le couloir qu'une complainte mélancolique s'échappait de ses lèvres, presque à son insu.

Oh ! Après tout, j'ai bien décidé de ne pas l'abandonner complètement, n'est-ce-pas?


Enfin seul, dans son lit aux draps de soie, Lord Malefoy se laissa aller à son chagrin.


Dans la chambre de Draco, au chevet du blessé endormi, Harry laissait couler les larmes que Lucius était pour l'instant incapable de verser.