Cette fiction reprend l'idée de base (et les premiers paragraphes) de l'excellente histoire de Sorcière Noire : Nos vies emmêlées.

Allez la lire ! Je vous la recommande. En la lisant, je n'ai pu m'empêcher d'imaginer une autre version et Sorcière Noire m'a aimablement donné l'autorisation de la continuer.

Bonne lecture !


Endless


Chapitre 1. Poudlard


L'école de sorcellerie Poudlard venait de rouvrir ses portes. D'après le directeur, Albus Dumbledore, ce n'était pas trop tôt, depuis six mois qu'elles étaient fermées ! Sans compter le temps qu'ils avaient mis à réparer certaines ailes du château qui s'étaient écroulées sous les coups de massue de certains géants un peu trop prompts à lancer leurs armes sur les murs pour les faire céder. L'école se languissait des élèves et Albus lui même aurait aimé un peu plus d'animation.

Pour dire la vérité, quatre mois avant la Dernière Bataille, les parents inquiets avaient gardé leurs progénitures chez eux. Devant leur refus et l'absence d'élève, le directeur s'était vu contraint de fermer le château, à sa grande tristesse et à celle d'Albus. Il n'avait pas été complètement déserté, puisqu'il avait servi de base aux opérations de l'Ordre du Phénix, mais Poudlard était avant tout une école et l'atmosphère du château était déprimante sans enfants.

L'homme assis derrière son bureau repensa à tout ce qui s'était passé ces derniers mois. Il se souvint avec précision du jour où messieurs Malfoy, Zabini, Nott, Crabbe, Goyle, et mademoiselle Parkinson avaient décidé de ne pas devenir mangemorts et s'étaient rangés derrière Harry. Leurs réunions dans la salle sur demande avec Ronald Weasley, Hermione Granger, Fred et George Weasley, Neville Longbottom et Luna Lovegood avaient été déterminantes. Sans eux, Voldemort serait toujours là. Albus Dumbledore soupira, le cœur lourd.

Quelle guerre que la leur, qui avait été remportée par des enfants. Les sorciers et sorcières du monde magiques avaient des comptes à rendre, et lui le premier.

Ils avaient obligés des enfants à se battre pour eux et, aussitôt la victoire gagnée dans le sang et les larmes, ils commettaient allègrement les erreurs qui avaient précipité le conflit avec Voldemort et avant lui, Grindelwald.

Le vieil homme se remémora aussi les recherches qu'il avait faites pour son propre compte pendant les longs mois où presque tous le croyaient mort dans la Section Interdite de la Bibliothèque de Poudlard.

C'était son plan, son mea culpa. Il devait sortir quelqu'un d'un piège infernal au ministère et il était quasiment sûr qu'il existait une solution et qu'elle se trouvait là. Quand il avait réalisé, trop tard, les erreurs qu'il avait fait avec Harry et le tort qu'il lui avait causé, il s'était juré de lui rendre tout ce qu'il lui avait enlevé : une famille aimante, le bonheur, un avenir, la liberté. Il avait aidé le jeune homme dans son combat et lui avait enseigné tout ce qu'il savait.

Il était fort. Du moins, sa magie l'était. Il avait survécu. Mais ensuite...

Secouant la tête, il se concentra sur des souvenirs plus réjouissants. Il s' évoqua avec quelle joie il avait trouvé ce vieux manuscrit qui lui avait indiqué comment fonctionnait l'arche de la mort qui résidait au Département des Mystères. Il se rappela qu'il en avait fait part à Lucius Malefoy et que celui-ci avait accepté de remplir cette mission pour l'Ordre du Phénix, sans prendre en compte les dangers que cela pouvait comporter, étant donné que Bellatrix le soupçonnait déjà d'espionner Voldemort pour le camp opposé.

Alors que tout le monde SAIT, par la barbe de Merlin, que les Malefoy et les Serpentard ne travaillent jamais pour personne d'autre que pour eux. Chose que je suis particulièrement bien placée pour savoir. Bellatrix avait vraiment un grain !

Il savait que le Serpentard ne refuserait pas pour une raison qu'eux seuls connaissaient. Il savait aussi que seul Malefoy ou Severus pouvaient réussir un tel exploit.

Personne d'autre dans l'Ordre du Phénix ne disposait à la fois de puissance nécessaire et d'une connaissance suffisante de la magie noire.

Mais c'était la guerre, et il avait besoin de son maître des potions.

De plus, l'aristocrate blond avait des raisons personnelles d'accepter. Ce qui, il faut bien l'avouer, tombait à pic pour moi !

Le blond n'avait besoin que de Bellatrix Lestrange pour réussir, et cette folle l'avait suivit ce soir-là, pensant qu'il ne s'en apercevrait pas. Ainsi, le jour même du combat singulier entre Harry Potter et Tom Jedusor, Lucius avait saisi l'opportunité qui se présentait à lui et avait conduit Bellatrix dans les bas fonds du Ministère.

Malheureusement cela ne s'était pas passé exactement comme je l'aurais voulu.

Décidément, je me fais vieux.

Il n'avait pas prévu que les sbires de Bellatrix seraient là et qu'ils tortureraient Lucius jusqu'à le laisser pour mort. Le Serpentard n'avait eu que le temps de sortir Sirius Black du voile avant de se faire attaquer. Ayant épuisé sa magie et ses forces, il avait été une proie facile pour les jeunes mangemorts trop heureux de torturer le bras droit félon du Lord Noir. Trop concentrés sur l'aristocrate, ils n'avaient heureusement pas remarqué le maraudeur inconscient allongé sur le sol.

Ce n'est pas parce que je suis un Serpentard que je n'ai aucune décence, par les couilles de Merlin ! Je ne tenais pas spécialement à la torture. Surtout que ça n'était pas utile pour le rituel.

Alors que la bataille venait de finir, alors que Harry venait de débarrasser le monde du fléau qu'avait été Tom Jédusor, le vieil homme, inquiet, accompagné de Sil' Gan, un elfe ami de Lucius Malefoy qui n'avait pas pris part à la bataille, de part sa nature, s'était hâté de transplaner pour le ministère. Ils avaient pu mettre hors d'état de nuire les mangemorts, et les envoyer derrière le voile pour s'en débarrasser une bonne fois pour toute.

Mais Albus savait qu'ils étaient arrivés trop tard. Lucius et Sirius étaient en vie mais le blond était dans un état catastrophique. Son état de faiblesse, ses blessures ainsi que l'important volume de magie noire résiduelle du rituel qui avait ramené Sirius auraient dû le tuer. Malgré les soins, il avait fallu attendre deux mois avant de voir s'il avait une chance de s'en sortir. Son état était toujours critique malgré le rituel de purification qui avait expulsé la majeure partie des malédictions et magies néfastes. Il avait été plongé dans un profond coma qui avait permis à sa magie de se reconstituer mais interdisait aussi tout sort de guérison depuis deux longs mois.

Deux mois pendant lesquels il s'était avéré que si beaucoup de mangemorts avaient été arrêtés et Voldemort tué, les ennuis étaient loin d'être fini. La société sorcière et le ministre à sa tête semblaient avoir été pris d'une folie meurtrière et xénophobe. Cornelius n'avait jamais été très efficace, et la seule fois où il décide de s'y mettre, il va probablement réussir là où Tom et Gellert ont échoué... Quelle ironie !

Le vieil homme soupira, bien décidé à ne pas laisser les enfants dont il avait la charge gérer cette crise-là. Il les protégerait, foi de Dumbledore! Malgré tout, il semblait que s'opposer au ministère était une autre paire de manche que de combattre Voldemort qui était puissant, certes, mais qui n'avait jamais été qu'un terroriste agissant dans l'ombre. Albus avait été mis en minorité au sein du Wizengamot, déchu de son titre de Chef Mungwup et confiné à Poudlard, sous surveillance du Ministre.

Lui et Sil' Gan avaient alors caché les deux hommes dans un cottage dissimulé dans la forêt interdite, bien à l'abri des fous furieux du ministère et avaient gardé le silence jusqu'à maintenant.

Sirius Black avait été maintenu dans un coma artificiel pour permettre à sa magie de revenir petit à petit, et aujourd'hui c'était chose faite. Le maraudeur avait retrouvé sa force magique et il était largement temps de le laisser sortir de son coma. Lucius était dans un état bien moins encourageant.

A vrai dire, il n'y avait guère de mieux depuis le soir où il l'avait trouvé presque mort dans la salle de l'Arche.

Ils allaient avoir besoin de soins constants, et Sil'Gan ne suffirait pas à la tâche. Albus savait que Draco Malefoy était in-joignable.

Hors du pays avec sa mère. En fuite, se cachant à la fois des Mangemorts et du Ministère.

Même si le manoir était incartable et protégé de tous, Draco & Narcissa n'avaient pas supporté d'y rester depuis la disparition de Lucius. Il savait également que Severus serait tout disposé à aider Lucius, son ancien amant, mais sa rancœur envers Sirius Black n'avait pas faibli, et il risquait de l'achever s'il le rendait responsable de l'état de délabrement de l'aristocrate.

Albus se frotta les mains.

Non, il ne pouvait pas confier ses malades à Severus. Il y avait quelqu'un qui avait, bien plus que lui, besoin d'un but.

Harry allait mal. Très mal depuis la dernière bataille. Il ne supportait pas d'avoir dû tuer. Il ne supportait pas les cris et le sang de ses souvenirs. Il ne supportait pas les attentes du monde sorcier et les espoirs qu'ils plaçaient sur ses épaules. Il ne supportait pas d'avoir dû tout sacrifier pour un monde qui avait ignoré et dénaturé tous ses efforts. Il ne supportait pas ce qu'on avait fait de lui : un héros, un guerrier, un bourreau.

S'il était encore un héros aux yeux de la majorité des Sorciers, ses amis étaient pour la plupart des hors-la-loi et le Ministère avait depuis peu repris ses efforts pour le discréditer, le présentant comme le prochain mage noir.

Sa magie avait beau être puissante, il y avait des limites à ce qu'un jeune homme peut endurer. Et sa magie si forte, si pure, si liée à ses sentiments le détruisait à petit feu.

Harry se faisait horreur, ce que la vie avait fait de lui le répugnait et sa magie réagissait à ses émotions. La rupture brutale du lien mental avec Voldemort n'avait pas vraiment arrangé les choses. Son équilibre psychique en avait pris un coup. Il avait pris l'habitude de se définir par opposition au mage noir, Albus le savait. Il savait également que le jeune homme n'avait jamais pensé survivre à la Bataille Finale. Il était même probablement persuadé qu'il n'aurait pas dû y survivre.

Il avait toujours été maigre, mais il ne se nourrissait plus depuis presque deux mois. Il était perdu dans un brouillard comateux la plupart du temps, sans compter les tentatives de suicide, heureusement enrayées par des visites surprises de ses amis. Ces heureuses coïncidences n'en étaient pas. Abus avait demandé à Dobby de veiller sur le jeune Sauveur et de prévenir quelqu'un si les choses tournaient mal. La magie de l'elfe le maintenait en vie, mais ce n'était pas une solution viable à long terme et Albus le savait..

Personne ne pouvait survivre indéfiniment avec des des Potions de gavage admisnitrées à son insu. Elles n'étaient pas adaptées à des gens actifs, en plus. C'était les mêmes potions qui maintenaient Lucius et Sirius en vie. Elles leur suffisaient juste, alors qu'ils étaient immobiles depuis des mois, prisonniers de leurs comas. Alors, Harry...

Rémus était loin, occupé à pourchasser les derniers Mangemorts et à se cacher du Ministère. Le reste de l'Ordre du Phénix avait soit disant prit des «vacances» et faisait la même chose. Il n'avait pas réussi à joindre l'avant-dernier Maraudeur lorsqu'il avait vu le désespoir de son jeune protégé. Les Weasley et Hermione s'étaient réfugiés en Égypte, chez Bill, loin de tout pour oublier la guerre (officiellement), à l'exception des Jumeaux qui avaient refusé de partir. Ils ne voulaient pas abandonner leur magasin, et surtout, ils tenaient à être là pour Harry.

Albus se leva et sourit. Il avait tout mis au point avec Sil'Gan pour sortir Harry de son abattement.

Il allait lui confier la responsabilité de Lucius Malefoy. Il faudra qu'il s'y consacre nuit et jour, il sera bien obligé de se secouer ! Sans compter que le retour de son bien-aimé Sirius lui redonnera sûrement le sourire...

Le directeur sortit de son bureau en fredonnant.

Oui, tout allait s'arranger pour Harry, il y veillerait! Maintenant, s'occuper de la rentrée et des bêtises du Ministre...

Et malgré ce programme chargé, Albus Dumbledore ne put s'empêcher de sautiller sur le chemin de la Grande Salle qui, bientôt, résonnerait à nouveau du brouhaha joyeux des élèves.


Severus Snape, ronchon (comme à son habitude à Poudlard), était déjà présent. En tant que Maître des Potions, il se devait de garnir le stock de l'infirmerie. Il aurait préféré éviter les misérables cornichons, mais, avec la nouvelle tendance du Ministère à envoyer à Azkaban tout ce qui n'était pas un sorcier lumineux de sang-pur pas trop puissant, il avait été fortement encouragé à rester sous la "surveillance" de Dumbledore, qu'il le veuille ou non. Bref, malgré la fin tant attendue de Voldemort, de la guerre et de ses devoirs d'espion, Severus Snape n'était pas heureux.

Oh, il avait enfin un peu de temps pour prendre soin de lui et poursuivre ses recherches en potion tranquillement.

Enfin, quand Albus ne le tarabustait pas pour une raison stupide quelconque dont il avait le secret.

D'ailleurs, la paix lui réussissait. Il avait pris du poids, étoffant sa grande silhouette sèche toute en muscles cordés. Il se sentait un peu mieux.

Si seulement il avait aussi pu échapper aux incompétents cornichons qui se faisaient passer pour des élèves !

Sa vie aurait alors atteint un niveau de perfection presque inégalée...

Ajoutant encore à son déplaisir, il y avait les exigences de madame Pomfrey, qui lui demandait toujours plus de potions rares et compliquées pour les mystérieux patients dont elle s'occupait, mais qu'elle lui avait interdit de voir sous un prétexte futile. Résultat, cela faisait presque un mois qu'il passait par toutes les potions de guérison du répertoire pour qu'elle les teste en attendant un hypothétique résultat, alors que cinq minutes d'examen et un malheureux sort de diagnostique lui auraient probablement permis de résoudre le problème en une demi-journée.

Oui, il était un génie. Non, il n'était pas exploitable et le dernier sorcier à avoir essayé de faire de lui son esclave avait été ratatiné il n'y a pas si longtemps! Quand la mégère qui hantait l'infirmerie allait-elle reprendre ses esprits ? Il était fatigué de payer le prix de son incompétence!

Non, Severus Snape n'était pas heureux. Et, quelque part, il était pratiquement sûr que tout ça, c'était de la faute de ce vieux fou de Dumbledore et de son chouchou de Potter.

Quoique, ça faisait des mois qu'il n'avait pas vu le petit morveux...il s'était peut-être passé quelque chose...Pourtant, il n'avait pas été gravement blessé lors de la bataille contre Voldemort. Ça n'empêchait pas la presse de soûler tout le monde de récits plus ou moins imaginaires sur sa vie, sa folie, sa grandeur, etc selon l'humeur du ministre, mais bon. Au moins, ça lui permettait de prendre un semblant de vacances.

Il fallait reconnaître que sa vie était beaucoup plus simple et beaucoup moins dangereuse depuis qu'il en était sorti. C'est vrai qu'il s'ennuyait un peu. Mais il ne regrettait pas, non ! Non ! Bien sûr que non ! C'est juste que Lucius avait disparu sensiblement en même temps et qu'il s'inquiétait. Il refusait de conclure à sa mort, mais depuis le temps...et Potter qui avait disparu aussi et que le Ministre décrivait comme le futur Mage Noir...même Albus ne lui en parlait plus, c'est pour dire! À part pour lui dire à quel point il s'inquiétait, mais bon, le vieux fou citronné s'inquiétait toujours. Ça devait être une sorte de déformation professionnelle. Il ne s'était jamais autant inquiété que dans les derniers mois de la guerre, alors qu'il avait été nommé Directeur de Poudlard par un Ministère aux mains des Mangemorts.

Quoiqu'il y avait les mystérieux malades de Poppy...Et Potter avait toujours eu un don pour se fourrer dans les ennuis et finir à la tendre merci de l'infirmière-dragon, particulièrement quand Albus était dans les parages, il faut bien le reconnaître...

Bah, ronchonna le Maître des Potions, je ne devrai pas y penser, je risque l'overdose de Potions calmantes. Moi qui pensait qu'avec la fin de la guerre, je pourrai réduire ma consommation personnelle...


Quelques jours plus tard, un jeune sorcier de 17 ans, tout juste majeur, accusant un poids de quarante deux kilos pour un petit mètre soixante cinq et un look très négligé maudissait les idées farfelues de son ancien Directeur. Celui-ci l'avait supplié jusqu'à ce qu'il cède et c'était la raison pour laquelle il profitait du soleil d'Août dans le parc de Privet Drive où il avait vu la forme animagus de Sirius pour la première fois.

Il attendait un contact qui voulait le voir à propos de deux soit-disant membres de l'Ordre disparus qu'il avait retrouvé. Harry ne s'était pas tenu au courant des mouvements de l'Ordre, ces dernier mois, mais il savait que quelques membres avaient été portés disparus dans les derniers mois de la guerre et juste après la Bataille Finale. Albus lui avait assuré que le contact était sérieux, qu'il ne voulait voir que lui, raison pour laquelle il ne s'en chargeait pas lui même et qu'il avait insisté pour qu'ils se rencontrent côté Moldu, plus sûr ces temps-ci. Albus avait aussi garanti qu'il n'aurait pas besoin d'avoir de contact avec les Dursley et qu'il s'était personnellement occupé de leur faire comprendre que ce qu'ils avaient fait était inacceptable, de toute façon.

Harry était toujours légèrement sceptique toutefois. Toute cette affaire puait la combine dumbledorienne à plein nez et la seule chose qui l'avait convaincu, c'était l'obstination du Directeur. Il voulait qu'on lui foute la paix et il savait qu'il ne l'aurait pas tant qu'Albus n'aurait pas eu ce qu'il voulait. Bon, il était curieux, c'est vrai. Mais depuis que sa foutu curiosité lui avait coûté Sirius, il avait appris à être prudent. Il n'était même pas allé voir en quoi consistait la punition des Dursley. C'était trop tard pour le sauver lui, de toute façon et il ne tenait pas plus que ça à les revoir.

Albus l'avait laissé sur ses mots cryptiques : "Une dernière chose, Harry, avant que je ne te laisse partir. Tu sais que je ne te l'aurai pas demandé si j'avais pu faire autrement. N'oublie pas cependant, les choses ne sont souvent pas telles qu'elles semblent être, particulièrement dans le monde magique, et les gens non plus d'ailleurs. Chacun a droit à une nouvelle chance."

Pour résumer, Harry avait un mauvais pressentiment. Il restait parce qu'il l'avait promis et parce qu'une chance, même infime, de pouvoir retrouver certains des membres perdus de l'Ordre devait être saisie, mais il avait le sentiment que le plan foireux d'Albus allait encore le faire souffrir, probablement "pour le bien de tous" ou autre raison du même acabit. Les derniers mots de Dumbledore auraient pu se référer à son propre cas, mais Harry était presque sûr que le Directeur de Poudlard ne s'était jamais excusé de sa vie, même indirectement.

Non, il devait penser à quelqu'un d'autre, malheureusement...

Le fait que la suite de la discussion ai porté sur Lucius Malefoy ne le réconfortait pas du tout....

Mais bon, Draco était devenu un ami très cher, alors, même s'il s'agissait de l'aristocrate frigide, méprisant et coincé qui lui servait de père, je ferais un effort. Non, je ne suis pas de mauvaise foi et oui, j'ai conscience que le Sang-pur mérite mon aide et mon respect pour le travail dangereux qu'il avait fourni pendant la guerre.

Il aurait mis sa disparition sur le compte d'un plan bien orchestré pour sauver sa peau en se faisant passer pour une victime de l'imperium du Mage noir si Draco et Narcissa avaient été au courant.

Mais il avait tout bonnement disparu et sa famille en souffrait. Hors s'il y avait une chose que Harry savait c'était que Lucius Malefoy ferait n'importe quoi pour sa famille.

D'ailleurs, ricana-t-il intérieurement, il avait déjà fait n'importe quoi pour sa famille. Devenir Mangemort, franchement ! Mais bon, personne n'est parfait, même pas les Malefoy et il s'était rattrapé depuis ! Hors sa disparition les laissait en danger : les Mangemorts restant savaient que les Malefoy avait trahi, la populace les pensaient fidèles au Lord Noir et leur meilleur refuge, le Manoir, ne valait rien tant que le chef de famille ne pourrait pas revenir le purifier et renouveler ses protections.

Draco l'avait scellé avant de partir, le rendant inaccessible pour tous, excepté son père et lui avait demandé d'ouvrir l'œil, au cas où il entendrait parler du patriarche.

Harry se renversa en arrière sur le banc, offrant le plus de peau possible aux rayons du soleil. Il secoua la tête pour tenter de s'éclaircir les idées. Il devrait cesser de ressasser l'issue de la bataille et réfléchir à ce qu'il allait faire maintenant. Il ne se sentait pas le courage d'affronter son avenir, même en pensée, mais il se sentait responsable des personnes qui avaient combattues à ses côtés et il savait qu'il ne pourrait pas les laisser se faire persécuter par le Ministère sans rien dire.

Albus avait été très vague lorsqu'il avait évoqué la situation actuelle, mais Harry avait appris à lire entre les lignes, depuis le temps. Il avait appris à développer tout un tas de dons variés et rares pour pouvoir rester en vie, ces dernières années.

Forcément ! entre Dumbledore et Voldemort... C'est un peu un synonyme de Charybde et Scylla...

Et les gros titres des quelques exemplaires de la Gazette du Sorcier qu'il avait retrouvé dans son salon avait été très parlants.

Il devrait trouver un moyen de régler leurs comptes aux préjugés stupides du Monde Magique, et ce, une bonne fois pour toute s'il voulait enfin avoir la paix. Oui, il était fatigué, c'est vrai, mais il pouvait probablement commencer à réfléchir à un plan pour aider au moins ses amis. S'il pouvait, par la même occasion, faire disparaître Harry Potter, Sauveur du monde sorcier, ce serait encore mieux! Quoi qu'il en soit, il devrait probablement commencer par faire son testament.

Harry ricana.

C'est cela, il passerait discrètement à Gringotts dès que tout le bazar d'Albus serait réglé.

Il n'y avait que le vieil homme pour passer outre à toutes ses demandes et se croire autorisé à le déranger n'importe quand ainsi. Harry espérait qu'il ne l'avait pas fait sortir pour rien ou il se ferait un plaisir de maudire tous ses bonbons au citron pour qu'ils aient le goût de choux pourris.

Ça, c'est une excellente idée, ricana Harry de nouveau. Je devrais le faire, de toute façon, rien que pour lui donner une leçon.

Il commençait à somnoler doucement, chauffé par le soleil comme il l'était. C'était une sensation agréable. Dire qu'il avait presque oublié ce à quoi ça pouvait ressembler jusqu'à maintenant...Dès qu'il rentrait, il commencerait à comploter...en attendant, il pouvait bien profiter du premier moment de presque-paix qu'il savourait depuis des années.

À peine quelques minutes plus tard, Harry sentit plus qu'il n'entendit un souffle de vent. Il pouvait percevoir une présence discrète qui s'approchait rapidement de lui. Il se redressa placidement sur son banc et dévisagea le nouveau venu. C'était manifestement un elfe. Cette démarche flottante, cette grâce qui les faisait glisser au-dessus du sol ne pouvait appartenir à aucune autre race.

Comment des membres de l'Ordre avait-ils pu atterrir chez un elfe ? Ceux-ci ne supportaient pas la violence et les combats et fuyaient donc généralement les hommes comme la peste.

Harry comprenait leur point de vue. Plus qu'il n'aurait voulu.

Arrivé à sa hauteur, l'elfe s'inclina devant lui et se présenta de sa voix carillonnante "Salutations. Je me nomme Sil'Gan."

Harry s'inclina à son tour gauchement et répondit d'une voix assez brusque "Harry Potter".

Il ne souhaitait pas particulièrement être agressif ou impoli mais l'elfe le rendant mal-à-l'aise avec sa beauté gracieuse et son aura de sérénité. Il semblait à Harry qu'il soulignait exactement, par sa simple présence, tout ce que lui-même n'était pas : Il était petit, maigrichon, ne possédait aucun attrait et n'était gracieux que sur un balais. Il était torturé là où l'autre n'était que calme et paix.

Bref, sa simple présence remuait le couteau dans la plaie.

Sil'Gan sembla comprendre toutefois, et ne se formalisa pas.

Qui sait, sans doute avait-il l'habitude de provoquer ce genre de réaction.

Il s'expliqua : "Laissez moi vous raconter mon histoire. Il y a deux mois, je suis tombé sur deux hommes très, très mal en point. L'un était plongé dans un profond coma et empestait le froid de la mort et le second usait ce qu'il restait de sa magie pour les faire léviter. Je ne sais pas dans quoi il avait trempé, mais il empestait la magie noire et avait manifestement été torturé. Il était à bout de force, et quand il m'a vu, il n'a eu que le temps de dire deux mots : votre nom. Il serrait ceci dans sa main."

L'elfe lui tendit le pendentif que chaque membre de l'Ordre recevait avant de partir en mission. Il était impossible d'ôter ce pendentif à son porteur contre son gré. Il devait le faire lui même ou en donner l'autorisation.

"Sont-ils en vie ? Pourquoi avoir attendu tout ce temps ?" questionna Harry frénétiquement.

Il oubliait ses convictions à propos des magouilles d'Albus, elles n'avaient aucune importance devant la possibilité de retrouver deux membres de l'Ordre en vie.

"Je les ai plongé dans un profond coma après les avoir purifié des influences néfastes qui leur collaient à la peau. Ils sont en vie, mais mal en point. Surtout le blond. Son ami brun se remet et c'est pour cela que je viens vous voir. Je peux enfin les quitter sans trop de risques. Je suis fatigué. Le brun va sûrement bientôt se réveiller et va avoir besoin de plus de soins et de potions. Je peux m'occuper de lui, mais je ne sais plus quoi faire pour son ami et j'ai peur de ne pouvoir l'aider."

"Je veux les voir!" asséna Harry. "Pouvez vous me conduire à eux ? Je pourrais sûrement leur trouver de l'aide."

"Je vais vous conduire à eux. Je vous préviens, j'ai demandé asile à Albus Dumbledore et je me suis réfugié profondément dans la Forêt Interdite. J'espère que ça ne vous fait pas peur."

Harry ricana pour toute réponse.

"Montrez moi le chemin. Ce n'est pas la première fois que je m'y rends, mais je ne connais pas la forêt aussi bien qu'Hagrid."

Harry attrapa le bras de l'elfe et transplana aussitôt devant les grilles de Poudlard. Sil'Gan, surpris, trébucha avant de se rendre compte où il avait atterri si brusquement. Les deux hommes commencèrent alors un long chemin à travers bois.


Une dizaine de minutes plus tard, leur destination se révéla enfin à eux sous la forme d'une clairière lumineuse abritant un cottage tout simple mais luisant de magie protectrice.

Au moins, l'elfe avait l'air de prendre à cœur la protection de ses charges.

"Allons-y" murmura Sil'Gan à Harry qui le suivit en silence, fébrile.

Qui allait-il retrouver derrière cette porte ? Qui avait été sauvé ? Dans quel état se trouvaient-ils ?

Ils pénétrèrent dans un vestibule un peu sombre, traversèrent un couloir ombragé avant de déboucher dans une chambre assez grande. Deux lits faisaient face à deux grandes fenêtres séparées par une cheminée.

Le regard d'Harry tomba tout de suite sur l'occupant du premier lit. Incrédule, il s'approcha doucement puis tituba jusqu'à son chevet. Se laissant tomber sur le matelas, il se pencha sur le visage émacié de son parrain. Il semblait être en mauvaise posture, mais Harry pouvait sentir son souffle sur ses joues. Sa vue se troubla et il enfouit son visage dans le cou de son Sirius.

VIVANT ! Il était vivant ! Il devait absolument prévenir Rémus, nettoyer Grimaud Place, vérifier que son pardon posthume était légal et effectif, avertir les Gobelins de Gringotts...il était vivant.

Harry sanglotait dans le cou de son père de substitution.

Quelques minutes plus tard, lorsqu'il se rappela de l'elfe qui l'avait conduit jusqu'à lui, il se retourna pour le remercier et lui demander des précisions et le trouva penché sur l'occupant du second lit. Curieux de voir qui avait sorti son parrain du voile, mais peu disposé à lâcher Sirius des yeux ou des mains de peur qu'il ne disparaisse à nouveau, il se leva et, serrant bien fort la main de son parrain dans la sienne, fit un unique pas vers le second malade. Quelle ne fut pas sa surprise de découvrir Lucius Malefoy. Un Lucius Malefoy fort amaigri et mal en point, mais les longs cheveux blonds platines ne pouvaient appartenir à personne d'autre.

Pourquoi Lucius aurait-il sorti Sirius du voile ? Les deux hommes se détestaient. Comment un paralysé avait-il pu, en ayant épuisé toute sa magie, trouver l'aide d'un elfe qui, d'ordinaire, fuyaient les humains pour les endroits boisés et déserts ? Comment Lucius pouvait-il être en mission pour l'Ordre sans que personne ne sache rien? A moins que Dumbledore n'ai menti...très probable. Mais à quoi jouait le vieux fou ? Que voulait-il encore lui faire faire ?

Baissant les yeux sur la main de Sirius, qu'il n'avait toujours pas lâchée, Harry résolu de s'occuper de Dumbledore plus tard et de simplement le tenir dans l'ignorance jusqu'à ce qu'il puisse lui demander des comptes.

L'urgence, à présent, c'était de soigner les deux hommes et de les soustraire à la surveillance du Ministère et d'Albus. Autant ne pas donner l'alerte, résolu Harry. Je vais jouer l'imbécile jusqu'à ce que sache quel rôle le vieux fou citronné veux me faire jouer, puis je réagirai en conséquence.

"Vous disiez que vous étiez trop fatigué pour continuer à les prendre en charge tous les deux ?"

L'elfe se retourna vers Harry, ému de voir les traces de larmes sur les joues creuses du jeune homme.

Il répondit, comme le lui avait ordonné Albus : "à vrai dire, l'homme brun se remet de ses blessures et va bientôt sortir du coma, je pense. Il va avoir besoin de soins constants, de potions et de rééducation. Le blond, et bien...je ne sais plus quoi faire pour lui. Sa magie est revenue, en majeure partie, mais je ne sais pas comment soigner le reste des tortures qu'il a subit. Je pense qu'il souffre constamment et qu'il ne sortira pas du coma sans aide. Pour résumer, je pense qu'il va mourir. Vous le connaissez ? Y a-t-il quelqu'un qui puisse le prendre en charge ?"

Harry rétorqua, énervé par les réflexions cyniques de l'elfe et par son obstination à se débarrasser de Malefoy et garder Sirius sous bonne garde.

"Non. Sa famille a été obligé de fuir le Ministère. Même si je le voulais, je ne pourrais pas les joindre."

S'il devait être cynique lui même, il aurait dit qu'Albus voulait garder Sirius en otage.

Grand bien lui fasse, dès qu'il serait réveillé, celui-ci lui montrera qu'on n'emprisonne pas un maraudeur!

En attendant, il allait avertir Rémus de toute urgence.

Deux maraudeurs, un animagus, et un loup-garou dont on menace le compagnon, on verra bien comment Bubus allait se débrouiller...sans oublier mes propres projets concernant les friandises préférées du vieux croûton...

Ses doutes concernant les manigances de Dumbledore lui revenaient au galop.

Ah, il voulait lui fourguer Malefoy parce qu'il ne voulait pas s'en charger lui même ? Bien, c'était un homme arrogant et insupportable, mais il lui était redevable et il allait s'allier à un homme bien plus arrogant et insupportable que le Lord pour faire de la vie d'Albus un enfer. Severus Snape était un grand ami de Malefoy et n'allait sûrement pas être content d'apprendre qu'on lui avait caché sa survie et inquiété son filleul outre mesure. S'il y avait une chose qui rendait les Serpentard sympathiques, c'était bien les efforts démesurés qu'ils étaient prêts à fournir pour leur famille.

Harry ricana en lui même. Albus n'avait qu'à bien se tenir, il ne se doutait pas de la tempête qui allait s'abattre sur lui !

Le jeune homme interrompit ses pensées en constatant que l'elfe en remettait une couche.

"Je pense que vous devriez le laissez mourir en paix. Il n'y a que peu de chance que vous puissiez le sauver et même ainsi, ce sera très long, très douloureux pour lui et très onéreux pour vous. Ça va prendre des mois ne serait-ce que pour lui réapprendre à marcher et je ne vous parle pas des soins et des potions que vous allez devoir vous procurer. Ses blessures sont affreuses et chaque jour qui passe est un pas de plus vers la mort pour lui."

"Bien. Si je vous suis, vous voulez que je laisse chez vous cet homme auquel je tiens pour m'occuper du salopard moribond qui l'a sauvé, n'est-ce-pas ?J'accepte." déclara Harry brutalement, au grand soulagement de l'elfe. "Après tout, j'ai une dette envers lui, n'est ce pas ? Je vais le remettre sur pied. Simplement, j'exige d'avoir des nouvelles régulières de Sirius, vous comprenez ? Je vais lui laisser une lettre, vous la lui remettrez à son réveil si vous ne voulez pas d'ennuis."

L'elfe opina, subitement intimidé par ce petit bout d'homme et l'autorité qu'il dégageait brusquement.

Sans se soucier des états d'âmes de l'allié de Dumbledore, Harry continua son interrogatoire.

"Pensez vous que je puisse le déplacer ? Puis-je jeter un sort de diagnostique sur lui, ou avez vous installé des protections agressives ?"

Devant les réponses de l'elfe, le Survivant opina gravement puis déclara "Je vais devoir vous laisser cet après midi. Je dois prendre des dispositions pour accueillir un blessé grave. Je reviendrais ce soir vous débarrasser du malade dont vous ne voulez plus. En attendant, j'exige de passer dix minutes seuls avec eux."

L'elfe, honteux de la part qu'il devait jouer dans le plan du Directeur et prit de remord d'accabler encore un être aussi profondément torturé que le jeune sorcier devant lui, opina sans faire d'histoire et partit se reposer dans l'autre chambre du cottage.


Resté seul, Harry posa rapidement quelques sorts puissants de silence et d'intimité sur la pièce.

On n'est jamais trop prudent.

Il s'approcha ensuite du lit de Malefoy et, retirant le drap qui le couvrait, jeta le sort de diagnostique le plus précis qu'il connaissait. Il attendit patiemment que les résultats s'inscrivent sur un parchemin avant de léviter son corps brièvement pour l'examiner sous toutes les coutures. Il ne regardait pas vraiment, mais il savait que l'image dans son souvenir pourrait servir à affiner le diagnostique. Il recouvrit le blond soigneusement avant de jeter le même sort sur son parrain, vérifiant ainsi les dires de l'elfe. À part quelques potions de nutritions et un tonique pour ses muscles atrophiés par manque d'usage, il n'avait besoin de rien.

Se rasseyant sur le bord du lit de Sirius, Harry contempla son visage amaigri mais toujours marqué par ses fossettes et rides de rire. Ramassant une bûche, il la fendit en deux morceaux d'un sort. Il transforma le premier en parchemin et plume et rédigea une lettre rapide à son parrain, l'informant des manigances supposées d'Albus, du fait qu'il l'aimait et allait prévenir Rémus sans plus tarder, lui ordonnant de prendre soin de lui et de planifier les farces qu'il allait infliger au vieil homme à titre de représailles. Il lui assura qu'il l'aiderait et qu'il reviendrait très bientôt. Signant et scellant la missive d'un sort qui ne permettrait qu'à Sirius de la lire, il la replaça sur la table de chevet.

Il ramassa le second tronçon de bûche et le transfigura en une chaîne et un pendentif en or représentant un loup et un chien roulés en boule. Il l'enchanta pour qu'il soit le seul à pouvoir l'ôter du cou de son parrain puis passa les dix minutes suivantes à jeter tous les sorts de protection qu'il connaissait dessus. Il savait que ce genre de magie reposait sur les sentiments qui liaient le sorcier au porteur du bijoux et espérait que celui-ci réconforterait son parrain qui ne méritait pas de se réveiller seul auprès d'un elfe inconnu et à la solde du citronné.

Soupirant profondément, il embrassa une dernière fois le front de Sirius, rajusta sa couverture et sorti de la pièce après avoir démantelé les sorts de silence. Il promis à nouveau à Sil'Gan de revenir le soir même pour emmener Malefoy et prit, pensif, le chemin de Poudlard.

Il avait un maître des Potions, espion et directeur de Serpentard à recruter. Il allait aussi probablement devoir penser à aménager une chambre pour Lucius à Grimaud place, sans compter qu'il devait prévenir Rémus, sans le faire repérer par les Mangemorts qu'il poursuivait ou par le Ministère. Il allait aussi avoir besoin d'un allié puissant qui puisse le seconder en tant que garde malade et qui ne serait impressionné ni par Albus, ni par Malefoy, ni par Snape.

C'est pas gagné, pensa Harry. Il me faut quelqu'un capable de faire voltiger un Malefoy au mieux de sa forme... voltiger...Malefoy...

"Dobby!" s'exclama Harry et aussitôt une voix couinante s'éleva derrière lui.

"Qu'est ce que Dobby peut faire pour Monsieur Harry Potter ? Dobby n'espionnait pas Monsieur Harry Potter, Monsieur. Dobby ne voulait pas ! Dobby va se punir tout de suite ! Méchant Dobby !"

"Stop!" hurla Harry "Explique moi, Dobby ! Ne te fais pas mal, je suis sûr que ce n'est pas de ta faute...C'est Dumbledore qui t'a demandé de me surveiller, n'est ce pas ?"

"Monsieur Harry Potter est le plus fort, Monsieur! Dobby ne voulait pas que Monsieur Harry Potter continue à se faire mal, alors il a accepté de le surveiller. Méchant Dobby!"

"Je vois...C'est très gentil de ta part, Dobby. Je suis désolé de t'avoir donné du souci. Je te remercie. Tu as pris bien soin de moi. Mais je vais encore avoir besoin d'aide Dobby. Je vais avoir un grand malade avec moi. Est ce que tu sais qui pourrait m'aider?"

"Dobby sait ! Dobby sait ! Winky est très douée pour s'occuper des malades et Winky veut une famille, Monsieur Harry Potter. Mais Dobby peut aider aussi. Et Dobby aimerait bien être l'elfe de Monsieur Harry Potter, Monsieur."

"Je vois. Mais je croyais que tu voulais être libre, Dobby ?"

"Les elfes libres tombent malades, Monsieur Harry Potter, Monsieur. Mais Dobby préfère être malade qu'avoir à nouveau un mauvais maître!"

"Je ne le savais pas, Dobby...Très bien, peux-tu aller chercher Winky et revenir tout de suite, s'il te plaît ? Je t'attends ici."

Dobby disparut en sautillant de bonheur. Harry s'appuya contre un arbre et se perdit dans ses pensées. Il allait devoir discuter plus longuement avec les elfes de maison. Surtout Winky. Ils sauraient sûrement beaucoup de choses qu'il ignorait encore sur le monde magique et lui leur apprendrait à prendre soin d'eux.

Même s'il n'était pas un excellent exemple, pensa-t-il en contemplant les loques qu'il portait. Il n'avait toujours pas jeté les vêtements usés de Duddley, mais s'il voulait que les elfes abandonnent leurs torchons, il allait sûrement devoir donner l'exemple.

Un "pop" sonore l'alerta du retour des deux elfes. Winky semblait sobre, mais toujours triste et désorientée. Harry s'approcha lentement et la salua d'une voix douce.

"Bonjour Winky. Dobby me dit que tu pourrais m'aider à prendre soin de quelqu'un qui est très malade et que tu aimerais avoir une nouvelle famille." Voyant l'elfe hocher timidement la tête, il poursuivi.

"Et bien, ma famille n'est pas grande pour l'instant, mais j'ai toujours besoin d'aide et tellement de choses à faire que je serai enchanté de vous avoir tous les deux avec moi, si vous le voulez bien ?"

Winky continuait à hocher la tête, beaucoup plus fermement pendant que Dobby sautillait de joie à ses côtés.

"D'accord. Bon, je n'ai aucune idée de la manière correcte de nouer le lien, et avant tout, il y a des règles dont je veux vous parler. Vous me direz si vous êtes toujours d'accord pour devenir mes elfes ensuite. Vous recevrez des gallions toutes les semaines. Il faudra les dépenser pour quelque chose qui vous fasse plaisir à vous, d'accord ? Si vous avez un problème, des questions ou simplement une chose à dire, je veux que vous veniez m'en parler, encore d'accord ? Et les deux dernières conditions, si vous devenez mes elfes, je veux m'assurer que vous soyez en bonne santé et le restiez. Donc je voudrai que vous alliez voir le guérisseur tous les mois et que vous preniez trente minutes au moins tous les jours pour faire quelque chose qui vous plaît, un sport, un hobby... Vous êtes toujours d'accord ? Excellent. Vous serez mes elfes et mes amis et je veux que vous soyez fier de vous, alors je vous donnerai de l'argent et vous irez acheter une garde robe, d'accord ? Une sorte d'uniforme..."

Il fut interrompu par Winky.

"Winky aime beaucoup coudre Monsieur Harry Potter. Est ce que Winky pourra faire ses prorpres uniformes ?"

"Bien sûr, Winky! Si tu aimes coudre, tu pourrai peut-être aider Dobby et m'aider moi ? Je crois que je devrai aussi me refaire une garde robe... Bien. Savez-vous comment nouer le lien ?"

Les elfes s'emparèrent chacun d'une de ses mains et Harry sentit une aura chaude et familière de magie se répandre autour d'eux.

"Fantastique! Très bien. Je voudrais que vous passiez votre première visite chez le guérisseur aujourd'hui. C'est possible ?"

Les elfes hochèrent la tête.

Et Harry reprit "J'ai encore à faire à Poudlard et j'aimerai que Dobby cesse d'espionner pour le Directeur. Ah! Et mon premier ordre : Je veux que jamais, au grand jamais, vous ne vous punissiez pour quelque chose que vous auriez fait ou omis de faire à mon service et ce, même si quelqu'un vous en donne l'ordre. Me suis-je bien fait comprendre ?"

Les hochements reprirent de plus belle.

"Excellent. Je vous retrouverait dans quelques heures au square Grimaud, d'accord ? Filez chez le guérisseur et réfléchissez aux uniformes que vous voulez porter."

Les elfes disparurent avec un "pop" et Harry repris son chemin.

Il ne lui restait plus qu'à contacter Rémus, convaincre Snape de l'aider, préparer Grimaud Place à recevoir un malade et retourner s'occuper de Malefoy.

Au moins, pensa Harry philosophiquement, il ne risquait pas de s'ennuyer.

Il arrivait à l'orée de la Forêt quand son regard tomba sur une bûche ressemblant à celle dont il s'était servi pour laisser un message à Sirius.

Après tout, pourquoi pas ? Se dit-il.

S'installant au pied d'un arbre, il transfigura la buche et rédigea le court message qu'il devait transmettre à Rémus. Il y joignit son souvenir du visage de Sirius dans une fiole transfigurée et scellée, les directions pour se rendre aux cottage et des avertissement quant au rôle présumé d'Albus. Il ensorcela le petit colis pour plus de sécurité. Le contemplant quelques instants, il décida de tenter sa chance et appela "Fawkes!"

Quelques instants plus tard, dans une éruption de flammes carillonnantes, le magnifique phénix fit son apparition. Il fit quelques cercles au-dessus de sa tête avant de se poser gracieusement sur son épaule.

"Je me demandais, Fawkes, si tu consentirais à jouer un tour à Albus et à aider un loup-garou de ma famille à retrouver son compagnon ? J'ai peur qu'il ne dépérisse s'il continue à le croire mort. Il chasse les Mangemorts survivants, en ce moment. Acceptes-tu de lui porter ce message ? Soit prudent! Et merci!"

Avec une trille mélodieuse, l'oiseau prit son envol majestueusement et disparu dans une colonne de flammes, le paquet bien serré entre ses pattes. Le cœur plus léger, Harry repris sa route vers le château.


Il prit son temps. Snape était toujours irascible, ce n'était pas la peine d'en rajouter en l'informant qu'il allait devoir travailler avec lui pour déjouer les manigances d'Albus avant le déjeuner. L'homme le méprisait et le détestait, ne voyant toujours que l'image de son père en lui.

Et comment lui en vouloir maintenant qu'il connaissait la vérité ?

Harry avait un profond respect et beaucoup d'admiration pour l'homme, même s'il l'oubliait toujours une fois qu'il se retrouvait à la merci de sa langue acérée. Enfin, peut-être qu'il s'était déridé depuis la disparition de Voldemort, après tout, cela faisait au moins trois mois qu'il ne l'avait pas vu. Il savait juste que le Ministère l'avait obligé à retourner à Poudlard sous la "surveillance" de Dumbledore.

Tentant de conserver un point de vue optimiste, Harry entra sans plus traîner dans Poudlard et se dirigea vers les cachots. La salle de Potions était vide. Harry évita de se faire voir, souhaitant conserver le secret le plus longtemps possible. Il mit à profit les ombres des cachots et son entraînement pour se glisser jusqu'au bureau du Maître des Potions incognito, refoulant avec peine les souvenirs de la guerre qui tentaient de l'envahir, hurlants et sanglants. Il frappa à la lourde porte de bois sombre et entendit la même voix froide et cinglante lui ordonner d'entrer.

Certaines choses ne changent pas et ne changeront probablement jamais, marmonna Harry.

Poussant le lourd battant, il pénétra dans le sinistre repère du directeur de Serpentard d'un pas décidé.

Autant pour moi, se dit le jeune homme. Certaines choses changent.

Il a rajouté des fenêtres dans les cachots, constata le jeune sorcier avec stupéfaction. C'est beaucoup mieux.

Examinant toujours la nouvelle disposition des lieux, il jeta distraitement les plus puissants sorts de protection et de discrétion qu'il connaissait sur la salle. Il sentit Snape rajouter les siens.

Probablement magie noire, songea-t-il, il faudra que je regarde au Square Grimaud si je ne peux pas les retrouver, ils ont l'air plus efficaces que les miens.

"Bonjour Professeur." Autant rester poli le plus longtemps possible, résolu Harry.

"Potter" La voix de Snape non plus n'avait pas changé, il la maniait toujours comme une lame. Ses yeux le dévisagèrent des pieds à la tête avant de le gratifier d'une moue méprisante.

"Que me vaux le douteux plaisir de votre présence, sorts de protection en prime ? Seriez-vous venu quémander une faveur, jeune présomptueux ? J'aurai dû savoir que vous ne pourriez pas résister si longtemps avant de m'attirer dans vos problèmes."

"Je suis venu vous proposer un arrangement qui nous sera bénéfique à tous les deux, en plus de faire enrager Albus. Il a recommencé à comploter, le bougre et je suis franchement las de ses manipulations. Je suppose que vous aussi. Ses dernières stupidités vous concernent autant que moi et, même si je sais que je fais son jeu, je suis venu vous trouver. J'espère qu'à nous deux, nous pourrons au moins lui rendre la monnaie de sa pièce, voire lui faire passer le goût de recommencer. Qu'en dites-vous ?"

"Fort bien. J'écoute. Qu'est ce que le vieux fou à encore concocté?"

"Il s'est servi de Lucius Malefoy pour sortir Sirius Black du voile du Département des Mystères et les cache depuis deux mois dans la Forêt Interdite. Ils sont blessés tous les deux. Surtout Malefoy."

Harry prit une grande inspiration.

"Comprenez moi bien. Je l'ai appris ce matin. Je ne vous demande pas de m'aider à soigner Sirius. L'elfe qui les cachait le garde en otage. J'ai besoin de votre expertise pour soigner Malefoy. Même si je pense qu'il y a été contraint, je lui suis redevable. Il a sauvé mon parrain."

Les mains de Snape s'étaient crispées sur le bureau professoral et son visage afficha un nombre incroyable de sentiments différents avant de s'arrêter sur la colère.

"Vous pensez que je vais vous croire sur parole, Potter ? Me faire miroiter la survie de Lucius...C'est une farce cruelle, digne de votre cher père et de ce corniaud de Black!"

Avant que le professeur ne puisse s'énerver plus, Harry s'emporta : "Vous pensez sincèrement que je pourrai plaisanter sur le fait que Sirius est vivant ? Utilisez la légilimencie si vous voulez ! J'ai dit la vérité!"

Il fixait le professeur dans les yeux depuis le début et sentit immédiatement l'intrusion. L'homme ne prenait pas de gants. Au lieu de le repousser, il se concentra sur ses souvenirs de la matinée et sur ses actions auprès de Malefoy. Il sentit la présence de Snape se retirer avec plus de précaution de son esprit et lui accorda quelques instants pour se reprendre.

Ce n'était pas tous les jours qu'un de vos ami cher ressuscitait d'entre les morts.

Conscient que Snape n'apprécierait probablement pas qu'il soit témoin de son émotion, il se détourna légèrement sous prétexte d'examiner les changements survenus dans les cachots et tenta de planifier la suite des évènements. Que devait-il faire dans les prochains jours ? Comment accomplir la mission qu'il s'était fixé ce matin même : protéger ses amis et mettre un terme aux préjugés du monde sorcier, en commençant par ceux sur Harry Potter, tout en soignant un blessé grave ?

Il se tourna de nouveau vers Severus lorsqu'il l'entendit grogner dans sa barbe. Il lui tendit silencieusement le parchemin de diagnostique et le laissa le parcourir avant de lui expliquer.

"Je suis désolé que les nouvelles ne soient pas meilleures. Malefoy est véritablement mal en point, mais je suis sûr qu'à nous deux, nous pouvons le sauver. Je pensais le déménager ce soir à Grimaud Place. Je dois juste purifier la maison et vous préparer chacun une chambre. Si vous prenez l'habitude de vous cloîtrer dans vos quartiers à chaque opportunité, vous pourrez sans doute passer autant de temps que vous le souhaitez là-bas sans alerter qui que ce soit."

Toujours penché sur le parchemin Snape lui rétorqua d'un ton brusque, mais moins agressif que d'habitude.

"Disparaissez de ma vue, Potter. Je dois réfléchir à un traitement approprié au cas de Lucius et vous avez une une chambre de malade à dépoussiérer. Revenez à 17 heures précises."

Harry ne s'offusqua pas d'être congédié comme un malpropre. Toutes proportions gardées, c'était sans doute un des échanges les plus aimables qu'il ait eu avec le Maître des Potions. Même à son œil mal entraîné de Gryffondor, il était visible que l'homme luttait contre l'émotion et souhaitait un peu de paix et de solitude. Harry pouvait comprendre.

De plus, il avait du travail au Square Grimaud. Il prenait ces quelques heures sans Serpentard comme son dernier sursis avant d'être envahit et harcelé par les remarques sarcastiques.

Avec un peu de chance, ça lui donnerait l'occasion de mettre au point un début de vengeance contre Albus.

Le jeune homme sortit de Poudlard aussi discrètement qu'il y était entré. Il ne se faisait pas d'illusion. Le vieux fou savait toujours ce qui se passait sur son domaine, mais il ne fallait pas alerter le Ministère ou les élèves. Et puis, Albus serait plus facilement induit en erreur s'il le pensait sagement en train de suivre ses manipulations.


Harry poussa la lourde porte de la maison du Square Grimaud avec une grimace. Elle résista et finit par s'ouvrir brusquement dans un grincement sinistre, le faisant trébucher.

Non, décidément, grommela Harry, il est plus que temps de réagir. Cette maison a mauvais caractère et jamais personne ne guérira réellement ici. De plus, Sirius allait revenir. Harry se sentait toujours coupable du sort qu'avait subi son parrain. Séparé de son compagnon. Enfermé à Azkaban pour un crime qu'il n'avait pas commis. Obligé de rester enfermé dans une autre prison : la maison familiale. Et le dernier emprisonnement : celui du voile de l'arche de la mort. Rendre à cette maison un visage plus accueillant serait un bon moyen de commencer à s'excuser.

Préparant mentalement une liste des objets requis, il se dirigea vers sa chambre. Il récolta une potion de Pepper-Up. Il en aurait besoin. Il était à peu près certain que la maison allait lui résister de toutes ses forces. Il allait devoir mobiliser tout son potentiel magique. Heureusement qu'il était puissant. Ce genre de rituel s'effectuait normalement avec plusieurs sorciers unissant leurs magies autour de celui dont le sang présentait le lien le plus étroit à la maison. Son lien de sang avec les Black était ténu, mais il faudrait bien qu'il suffise. Il ramassa tous les cristaux de roche qu'il avaient disposés le long des murs de sa chambre pour empêcher la maison de le harceler pendant son sommeil.

Il devrait y en avoir assez, estima-t-il.

Harry parcourut ensuite chacune des pièces de la sombre demeure des Black, plaçant un cristal aux vertus purificatrices et protectrices précisément au centre de chaque pièce, en commençant par la plus hautes et descendant dans les plus profonds cachots. Revenant dans l'entrée, centre exact de la maison, il dessina deux triangle équilatéraux autour du point focal des enchantement de la demeure. Se plaçant au centre du pentacle, il frappa son talon d'un coup sec sur la pierre qui servait de clé de voûte aux enchantements défensifs, envoyant un bref pulse de magie qui activa toutes les défenses de la maison.

Harry inspira profondément, concentrant sa magie. A partir de maintenant, il n'aurait droit à aucune erreur s'il ne voulait pas réduire la maison à un tas de cendre et s'ensevelir en même temps. Il relâcha complètement le contrôle strict qu'il exerçait habituellement sur sa magie, laissant son aura se manifester autour de lui. Il commença à psalmodier les incantations de purification. À chaque nouvelle phrase du sort, il lévitait un cristal de roche sur l'une des branches du pentacle et l'activait. Recommençant son incantation, il laissa sa magie envahir la maison, pièce par pièce, s'ancrant sur chacun des cristaux qu'il avait déposé un peu plus tôt.

Respirant profondément, Harry ne relâcha pas sa concentration et entama la seconde partie du rituel. Il augmenta progressivement les flux magiques qu'il déversait vers chacun des cristaux, jusqu'à ce que chaque particule magique de la maison et des enchantements qu'elle renfermait soit saturée et entourée de sa propre magie.

Le jeune sorcier, baigné dans une tempête d'éclairs, ferma les yeux et prit une troisième profonde inspiration, se préparant mentalement à batailler avec la maison. Dans un grondement de tonnerre, la magie de Harry se déversa dans la demeure, bouleversant l'ancestrale construction magique. Les sorts étaient renforcés, remodelés, anéantis dans un déchaînement de magie.

L'atmosphère se chargeait d'électricité statique, et les cheveux fous de Harry ondulaient comme ceux, serpentins, de la Gorgone Médusa.

Une odeur d'ozone imprégnait l'air.

Seul au centre de ce maelström, Harry parla soudain d'une voix grave qui résonnait d'une étrange profondeur, comme si sa magie parlait en même temps que lui.

"Berceau des Black. Ton Patriarche revient. Il demande Protection et Asile du monde extérieur. Il demande Repos et Régénération dans la maison de ses Ancêtres. J'en appelle aux Magies Familiales des Black pour guérir, protéger et nourrir. J'en appelle aux Sortilèges du Sang des Black pour soutenir, attaquer et défendre. Prends la Volonté de l'Héritier des Black comme guide et sa Magie pour chemin. Qu'il en soit ainsi !"

Un grondement sourd s'éleva des murs et des plafonds de la maison, et un tremblement commença, prémisse d'une colère séismique de la demeure. Harry serra les dents et déversa plus de magie encore dans le squelette magique constitué du réseau de cristaux de roche, se concentrant uniquement sur ce qu'il voulait de la maison : un espace de protection, de guérison, des siècles de magies familiales léthales au service de la protection de la famille, toute la vicieuse férocité des Black, toute leur vindicte au service de la croissance saine de leurs nouvelles générations. Sa magie se manifesta dans un pulse de lumière aveuglante et féroce, pénétrant les murs aisément.

Les grondements continuèrent, cette fois, donnant l'impression d'une immense entité s'éveillant enfin après un long sommeil et s'étirant, testant ses forces.

Harry reprit ses incantations, répétant inlassablement ses demandes.

C'était une très vieille maison, après tout. Elle abritait tellement d'empreintes magiques, tellement de sortilèges, d'Histoire et d'esprits, qu'il faudrait probablement un certain nombre de répétitions avant qu'elle n'entende et ne comprenne.

Les éclairs reprirent leur course dans la maison, ponctuant la tempête qui agitait la maison ancestrale des Black.


Il semblait à Harry que des heures avaient passé quand enfin tout s'arrêta. En apparence, rien n'avait vraiment changé, mais il pouvait sentir les protections magiques de la vieille bâtisse se renforcer et se remodeler, gagnant rapidement en férocité et en puissance. La maison allait probablement encore progresser vers la sentience, mais ça ne devrait pas poser de problème maintenant que ses objectifs étaient clairement modifiés.

L'aura dégagée par les gardes magiques évoquait celle d'une mère dragon défendant vicieusement ses petits. Très approprié, ricana Harry.

Il tituba difficilement jusqu'à la fiole de potion énergisante et la vida entièrement.

Le jeune sorcier émacié se laissa glisser au sol. Malgré la potion, il se sentait toujours épuisé. Il décida de se reposer par terre encore un moment et examina plus attentivement les alentours. La maison était toujours sombre et sale, mais certains objets avaient disparus, comme les têtes d'elfes de maison empaillées, et d'autres semblaient avoir subi de profonds changements, comme le portrait de Walburga Black, qui était plongée dans un profond sommeil. L'atmosphère de la demeure lui semblait également moins oppressante.

Mais, si toute trace de malveillance avait disparu, le décor n'était toujours pas accueillant. Ce n'était toujours pas une maison où l'on avait envie de vivre.

Comme pour lui donner raison, la vieille pendule du hall sonna trois coups sinistres dans un concert de grincements et de rouages.

"Bien. Je crois que c'est l'heure d'appeler la cavalerie. s'écria Harry. Dobby! Winky!"

Les deux elfes apparurent aussitôt dans un "pop" sonore. Ils portaient encore leurs haillons, mais leur allure était imperceptiblement plus légère. Ils se tenaient plus droits et si le bonheur de Dobby était aussi exubérant qu'à l'accoutumée, le sourire timide de Winky était une nouveauté qui lui réchauffait le cœur.

"Maître Harry Potter, Monsieur ! Vous n'allez pas bien ? Qu'est ce que Dobby peut faire ?" s'écria l'elfe en le voyant à terre, se tordant les mains d'angoisse.

"Calme toi, Dobby. Tout va bien. Je suis juste un peu fatigué. Tu veux bien aller me chercher un des flacons de potion régénérante qui se trouvent dans ma chambre s'il te plaît ? Ça devrait me remettre d'aplomb en un rien de temps."

Harry n'avait pas fini de parler que l'elfe lui tendait déjà la fiole.

"Fantastique, s'écria Harry en riant, Je te remercie, Dobby."

Il vida la fiole d'un trait et les elfes furent soulagés de voir qu'il reprenait effectivement des couleurs. Harry se leva doucement et leur fit signe de le suivre dans le salon de la vieille bâtisse.

"Asseyez vous, dit-il en désignant le sofa qui faisait face à son fauteuil. Tout d'abord, ça me ferait très plaisir si vous vouliez bien m'appeler Harry. Qu'est ce que vous en dites ?"

Voyant leur air gêné et mal à l'aise, il poursuivit en soupirant. "Je suppose que Maître Harry suffira pour commencer. Mais je préférerai vraiment que vous m'appeliez par mon prénom. Avez vous eu le temps de passer chez le guérisseur ?"

"Dobby et Winky y sont allés, Maître Harry. Le guérisseur dit qu'ils sont des elfes en bonne santé, mais qu'ils sont sur-menés et que leur ali-mental-scion a des car-anses."

"Je vois. Et bien, nous allons nous reposer souvent et je ferrai des potions de nutriment pour tout le monde. Ça me ferra probablement du bien aussi. Je dois vous expliquer la situation. Nous sommes chez mon parrain. J'étais si fatigué parce que je viens de purifier la maison. Comme vous le voyez, l'ancien elfe de maison était trop vieux pour en prendre vraiment soin et il va falloir tout nettoyer et tout refaire. Mais comme j'insiste pour le faire avec vous et que nous allons avoir un malade à partir de ce soir et probablement aussi un visiteur, on va s'occuper d'abord du plus urgent et on verra le reste ensuite. Okay?"


Harry poursuivit ses explications et ses recommandations un long moment, leur faisant visiter la maison, ramassant les cristaux de roches du rituel et collectant quelques objets oubliés. Il dû insister longuement pour que les elfes consentent à prendre chacun une chambre, ce qui provoqua de longues effusions de gratitude. Gêné, le jeune sorcier leur indiqua qu'ils allaient commencer par nettoyer la cuisine, sa chambre et la salle de bain attenante, ainsi qu'une autre suite au même étage pour le visiteur. Pour être totalement sûr que les elfes ne déménageraient pas dans son dos, Harry ensorcela les portes pour indiquer leur nom et ne s'ouvrir que sous leur ordre, puis leur ordonna rapidement de nettoyer leurs pièces et de les modifier à leur convenance. Il tenta de prendre un ton strict et insista sur le fait qu'il ne les laisserait pas travailler ailleurs tant que leur première tâche ne serait pas accomplie, sous-entendant une sorte de test de leurs capacités.

Ayant coupé cours aux effusions de cette serpentarde façon, Harry se congratula intérieurement pour des débuts prometteurs avant de descendre faire le tour du laboratoire de potion et des placards de la cuisine. Ils allaient probablement devoir faire des courses. Harry espérait que les elfes pourraient s'en charger seuls car il devait être fort dangereux pour lui de montrer son visage en public, ces temps-ci. De plus, il n'avait aucune envie de s'imposer la compagnie du Monde Magique s'il existait une alternative viable.


Dix minutes plus tard, un jeune sorcier fort soulagé était attablé dans la cuisine, occupé à la rédaction d'une liste de course pendant que divers brosses, balais et plumeaux ensorcelés s'attaquaient à la saleté de la pièce. L'après midi avait été riche en découvertes. Tout d'abord, le laboratoire de potion était complètement stocké et l'armoire magique avait manifestement bien fait son travail : Harry avait trouvé des ingrédients positivement antiques dans un état de conservation impeccable.

Si Snape arrivait à mettre un pied dans la pièce, il allait probablement en tomber sur les fesses !

L'image du sévère et majestueux maître des potions affalé sur son derrière, un air choqué sur le visage le fit rigoler doucement.

Il était plus que probable que personne ne l'avait jamais vu ainsi ! et personne ne le verrait probablement jamais. Quoique si une personne au monde pouvait convaincre la Demeure des Black d'accorder l'accès au laboratoire de potion à un étranger au clan, cette personne serait sûrement Snape !

Ensuite, il avait découvert que la librairie avait quadruplé de volume, certains sorts de dissimulation ayant manifestement cessé de fonctionner pour lui. Sa taille équivalait environ à la moitié de celle de Poudlard. Encore une pièce dont il vaudrait mieux qu'il s'occupe personnellement, de peur que les protections n'attaquent les elfes. Elles semblaient bien disposées envers les humains à présent, mais la magie restait celle des Black et il connaissait l'opinion des Sang-purs sur les petites créatures.

Enfin, sa plus grande surprise concernant la maison avait trait aux portes qui avaient mystérieusement apparues à certains endroits et qui semblaient mener en majorité vers le jardin, quelques unes révélant des balcons et autres terrasses.

Enfin, jardin était un bien grand mot...

Les plantes des Blacks étaient aussi vicieuses que la magie familiale et il allait lui falloir un bon moment avant de dompter la Jungle qui avait conquis l'arrière de la Demeure.

Man versus Wild, indeed ! Ce ne serait probablement jamais un jardin paisible.


C'est ainsi que Dobby et Winky retrouvèrent maître Harry : penché et ricanant sur un parchemin au milieu d'une valse frénétique de balais. Dobby se vit confier la responsabilité des courses et du nettoyage de la cuisine, tandis que Winky et Harry s'attaquaient aux chambres. La magie des elfes était puissante et précise.

Comparant les résultats de son sortilège de nettoyage à ceux de Winky, Harry décida de s'attaquer au décor après l'avoir complimentée. Il raisonna que Lucius se sentirait probablement mieux dans le décor original des Black que dans ses propres créations, puis ricana et résolu de mélanger les deux.

Tout élément perturbant les deux Serpentards jouait en sa faveur après tout !

Il n'était pas noble au point de se refuser tous les avantages possibles. Il conserva le papier peint de la chambre mais rafraîchit la couleur à un vert menthe bien plus clair, relevé de discrètes arabesques argentées et dorées. Le lourd et imposant mobilier des Black prit une couleur chocolat plus chaleureuse qui rappelait le parquet et des formes plus douces et modernes. Le sol disparu sous d'épais tapis orientaux aux couleurs chatoyantes. Harry lévita le lit au centre de la pièce, le plaçant en biais, de façon à procurer une vue la plus variée possible, de la porte à la fenêtre. Il se félicita de sa considération et souhaita que quelqu'un lui ai manifesté la même lors de ses innombrables séjours à l'infirmerie.

Il supprima les montants du baldaquin, suspendant le lourd tissu vert moiré en un dais de princesse au-dessus du lit.

Après tout, c'est ce que lui évoquait Malefoy, une princesse ! Enfin, Draco lui faisait systématiquement penser à une princesse.

Il fuyait son père comme la peste et ne s'était donc pas formé d'opinion particulière sur lui. Il avait assez des remarques blessantes du maître des potions sans y ajouter les récriminations condescendantes d'un aristocrate qui prenait tout le monde de haut. Il était donc scrupuleusement poli avec le Lord Malefoy, par déférence envers les délicates sensibilités de son fils, mais ne s'attardait jamais en sa présence.

Les tables, bureaux et tablettes furent élargies. Les deux tables de nuit encadrant le lit conservèrent les romans des grands écrivains moldus qu'il avait aimé. Le fauteuil fut changé en un sofa confortable de velours sapin au cas où il lui faille passer la nuit avec le blessé. Le bureau était désormais une table assez grande pour servir de table de massage ou, au choix, entreposer une véritable infirmerie de fioles, baumes, potions et autres flacons.

Harry hésita, puis entraîna Winky dans la salle de bain attenante. Il n'aimait pas les portraits sorciers. Être observé pendant son sommeil, très peu pour lui. Il supposait que c'était pareil pour Malefoy.

Il allait avoir très peu d'intimité pendant toute sa convalescence. De plus, celle-ci risquait de durer des mois, alors autant lui accorder au moins ce répit.

La salle de bain subit des transformations comparables, en vu des besoins d'un homme fier et paralysé des deux jambes. La baignoire fut agrandie, le fond remonté et un siège aménagé, complet avec accoudoirs et dossier moulés dans le marbre. Le lavabo devint un boudoir de princesse, trône et miroir obligatoire. Le tout dans des tons clairs, bleus, verts d'eau relevés d'accents argentés. Harry ne lésina pas sur les sorts de coussinages, raisonnant qu'il valait mieux prévenir que guérir. De plus, la peau de Malefoy avait été considérablement fragilisée par les tortures qu'il avait subit.


Décidément, Winky et lui faisaient une bonne équipe! Ils étaient bien plus efficaces que prévu !

La suite qui faisait face à la chambre du malade fut nettoyée et transformée en un nid douillet pour la chauve souris des cachots. Harry mit un point d'honneur à ne transfigurer que des matières confortables jusqu'à la décadence mais charma la pièce pour résister à tout changement de couleur et lui donna des tons chocolats, relevés de discrètes touches vieil-or et pourpres.

Oh, rien de frappant : un discret filigrane sur le duvet, un tapis aux motifs pourpres, un coussin lie-de-vin, ce genre de choses...mais pas de vert, d'argent ou de noir ! Un peu de couleur ne tuerait pas Maître Snape, que diable ! Et si la théorie selon laquelle il y était allergique se confirmait, il saura sans aucun doute m'en faire part de façon suffisament percutante.

La salle de bain subit le même sort, dans des couleurs plus sombres : bleu marine, violet profond relevés de nombreuses touches ivoires. La pièce donnait l'impression d'évoluer dans le fond de l'océan. Dans la chambre, Harry demanda à Winky d'agrandir les fenêtres et la cheminée pour en faire une suite chaleureuse et accueillante qui laissait largement entrer la lumière. L'illumination de la salle de bain venait du plafond, qu'il avait charmé pour refléter une nuit de pleine lune, donnant à la pièce une lumière douce et relaxante.

Avec Snape, il fallait surprendre, désarçonner et penser le moindre détail.

Pendant que Harry s'assurait que rien n'était laissé au hasard dans la suite du Maître des Potions, Winky fut envoyée nettoyer la chambre suivante qui lui servirai de sanctuaire (autant dire qu'il risquait de vouloir s'y réfugier souvent!).

Il ne re-décorerait pas. Lui se moquait du décor de sa chambre. Au pire, il pourrait toujours faire ça rapidement, ce soir. Harry savait que c'était l'une des chambres qui avait été utilisées lorsque la maison servait de Quartier général à l'ordre du Phœnix, avant la disparition de Sirius. Il faudrait probablement procéder avec prudence, il pouvait tomber sur des pièges de Fol-Œil, des farces à divers degré de compositions "oubliées" par les Jumeaux Weasley ou sur des objets personnels quelconques. Il nota en lui même de faire le tour des pièces pour restituer d'éventuels objets oubliés à leurs propriétaires.


Le jeune sorcier passa l'heure suivante à nettoyer le laboratoire de potions et la bibliothèque. La décoration pouvait attendre, mais il voulait pouvoir explorer tranquillement le placard à ingrédients et les rayonnages de la famille Black. Quelques rapides sortilèges suffirent pour transformer les fauteuils et les sofas en versions en cuir plus accueillantes que les tissus fleuris mangés aux mites qui défiguraient l'espace auparavant. Il transfigura un nombre impressionnant de plaids, rideaux et coussins dans des tons chauds et des motifs orientaux. Il réussit même à convaincre la maison d'agrandir la cheminée et le vitrail qui inondait la pièce de couleurs et de rajouter des fenêtres.

Les gens avaient besoin de lumière pour vivre agréablement, par la myopie de Merlin ! Marmonna Harry.

Le jeune homme fut heureux de constater qu'il suffisait de secouer un peu la magie endormie des meubles de la bibliothèque pour que les charmes de conservation et les Repousse-poussières se déclenchent à nouveau. Il fut enchanté de découvrir un éventail large de thèmes et de nombreux livres anciens (donc probablement interdits actuellement par cet abrutit de Ministre !).

Il avait craint que les Black ne donnent que dans la magie noire la plus sordide, mais il semblerait que ses préjugés l'aient emportés. Il sélectionna d'ailleurs plusieurs tomes d'Introduction Aux Sciences Obscures qui dataient d'avant la distinction officielle entre Lumière & Obscurité.

Autant profiter au maximum des ressources à sa disposition, maintenant qu'Albus n'était plus là pour l'ennuyer !

Sa seconde surprise lui vint d'un rayonnage fourni consacré uniquement aux magies sexuelles. Cela allait du "simple" Kamasutra dans leurs versions sorcières et moldues, homo- et hétérosexuelles au Grand Livre des Rituels Sexuels Sombres et Lumineux, en passant par les diverses variations autout du titre : Recueils de Sorts Sympas pour Sorciers Coquins. Harry ricana en pensant que Sirius avait probablement eu des ancêtres qui lui ressemblait beaucoup, finalement ! Il s'empourpra violemment et hésita, mais fini par sélectionner quelques ouvrages également. Sa vie mouvementée ne lui avait pas offert beaucoup d'opportunités pour explorer sa sexualité, ni pour comprendre l'aspect magique des choses. Ses circonstances ne s'étaient pas arrangées, mais au moins, il disposait d'un moyen de s'informer qui lui éviterai une conversation humiliante avec Hermione ou Poppy Pomphrey.

Jetant un rapide Tempus, Harry constata qu'il disposait encore d'une demi-heure avant de devoir affronter Severus Snape pour la seconde fois aujourd'hui. Il expédia donc ses trouvailles devant la chambre que Winky devait avoir fini de nettoyer pour lui et retourna récupérer ses affaires dans son ancien placard.


Malefoy serait bien installé, pensa-t-il en survolant la chambre du regard.

Il attrapa ses quelques frusques, son ancienne malle, son précieux Éclair de Feu et partit à la découverte de sa nouvelle chambre. Titubant sous le poids combiné de toutes ses affaires, lévitant les livres des Black derrière lui, il ouvrit la porte d'un coup de hanche et faillit tout laisser tomber en découvrant la pièce. Plusieurs de ses affaires lui échappèrent malgré ses efforts. Ce qu'il pensait être l'une des chambres banales que les Black réservaient à leurs invités s'avérait être une suite immense dans des tons violets, noirs et argentés où prédominaient les tissus précieux.

Une immense bibliothèque en ébène habillait tout un mur, du sol au plafond. Un fauteuil confortablement habillé d'un plaid douillet brodé d'arabesques lavande foncée et un profond sofa croulant sous les coussins formant un camaïeu de violets faisaient face à la cheminée et aux fenêtres. Adossé au sofa et profitant de la proximité des fenêtres et de la bibliothèque se trouvait un grand bureau de bois sculpté qui n'attendait plus que ses affaires.

Le lit pouvait accueillir au moins quatre personnes et les draps de soie noire bordés de dentelle de même couleur disparaissaient presque sous d'épaisses couvertures aux motifs compliqués dans tous les tons d'indigos possibles et imaginables, d'un violet presque noir au lilas le plus clair en passant par toutes les teintes de lavande.

Il s'était vraisemblablement trompé de porte. Peut-être avait-il choisi une suite ayant appartenu à l'une des filles de la maison? Étonnant quand on savait que Sirius n'avait eu qu'un frère.

Winky, alertée par le capharnaüm engendré par la dégringolade de la malle, de la caisse d'Hedwige et des bouquins, libérés du sort de lévitation par le choc du jeune homme qui n'aurait pas dû relâcher sa concentration, apparut brusquement devant le jeune sorcier, lui arrachant un sursaut de surprise.

Fière de son travail, elle exposa joyeusement chacun des changements qu'elle avait apporté à sa chambre. Elle avait tout modifié spécialement pour lui. Dobby lui avait beaucoup parlé de Maître Harry et pour le remercier de lui avoir donné une famille, une maison, du temps libre et d'être aussi gentil avec elle, elle avait préparé cette chambre. Quand elle demanda anxieusement à Maître Harry s'il était content de son travail, le jeune homme, hébété et abasourdi, ne put que hocher la tête en souriant faiblement et balbutier un "merci beaucoup" presque inaudible.

Winky en fut si heureuse qu'elle rougit furieusement et disparut à nouveau en informant maître Harry qu'elle allait leur faire de nouveaux vêtements à tous, parce que Dobby l'avait bien avertie que le maître avait besoin qu'on prenne soin de lui.


Un quart d'heure plus tard, un jeune sorcier toujours sous le choc se laissa tomba sur son lit et se sentit délicieusement aspiré par les douces couvertures. Il avait rangé ses quelques possessions et exploré le reste de ses appartements. Winky lui avait aménagé un dressing énorme, occupant quasiment une pièce entière. Bien sûr, tout était encore vide, mais Harry avait le sentiment que cela ne durerait pas longtemps. Il frissonna et adressa une brève prière pour que le sens du style de Winky soit plus...comment dire ?...moins...flamboyant... que celui de Dobby.

Sa salle de bain était...décadente. Il n'y avait pas d'autre mot. Dans des tons vert d'eau, la pièce ressemblait à une clairière : d'immenses pots de terre cuite abritaient de jeunes arbres, disposés autour d'une baignoire creusée de la taille d'une piscine respectable. L'étendue d'eau jouait avec la lumière provenant de la verrière colorée qui composait le plafond. Les mosaïques abstraites enroulaient leurs entrelacs sur deux des murs et cédaient la place à des panneaux de bois blond sculptés qui encadraient une sorte de boudoir comprenant un lavabo, un miroir, des étagères et un meuble ouvragé du même bois clair qui n'attendaient apparemment que des produits de beauté. Le banc était garnis de coussins brodés verts d'eau rebondis.

La chambre n'était pas ouvertement efféminée, mais l'atmosphère était indéniablement délicate. L'elfe avait sans doute voulu manifester son attachement, mais le résultat final, quoique plaisant, était surprenant pour une chambre d'homme. Harry savait toutefois qu'il ne pourrait pas y toucher sans la blesser profondément.

Et puis, l'attention était touchante.

Surprenante.

Mais touchante.

Il fallait le reconnaître, il n'aurait sûrement pas prit le temps de s'en occuper lui même, de toute façon. Le livre posé en évidence sur le lit le fit ricaner. Rise and Shine : Magnifiez Votre Beauté Naturelle Ou Dix Mille Façons De Prendre Soin De Vous Par Magie. Apparemment, ses deux elfes avaient un caractère affirmé et étaient décidés à prendre grand soin de leur maître.

Bah, se résignât-il avec philosophie, autant d'alliés de gagné. Vu la suite des évènements, je risque d'en avoir besoin!

Il s'empara du bouquin pour le ranger dans la bibliothèque avec ceux qu'il avait emprunté dans la librairie principale. Les ouvrages qui occupaient ses étagères étaient fort divers et abordaient apparemment tout ce qu'un jeune Lord et/ou une jeune Lady des Black devait savoir.

Je ne pensais pas que leur éducation était aussi complète. Au moins, je saurai par où commencer mon éducation sorcière, ricana Harry.

Décidant de descendre voir ce que Dobby avait fait de la cuisine avant de devoir retourner affronter Snape dans son antre, le jeune sorcier ferma sa chambre de quelques sorts de son cru. Il n'y retournerai sans doute pas avant ce soir et, si les charmes n'empêcheraient pas les elfes de rentrer, il décourageraient au moins le Maître des Potions d'y fouiner s'il venait à s'installer au Square Grimaud.


Harry sifflotait sur le chemin de Poudlard, bien caché sous sa cape d'invisibilité. Dobby avait transformé la cuisine sombre et sinistre des Black en un espace chaleureux et rutilant de propreté. Les placards étaient pleins, les patines des meubles luisaient et la couleur des murs avait été altérée en un magnifique rouge lie-de-vin accentué d'une frise ébène. La lumière coulait à flot du plafond charmé en une réplique du ciel et faisait miroiter les casserolles en cuivre. Harry, débordant de fierté, avait donné quartier libre à ses elfes pour le reste de la soirée.

Ils devaient se remettre de leur surmenage, après tout.

Ce qui lui faisait penser qu'il devait brasser des potions de nutriments et des élixirs de nutrition. Et passer à Gringotts pour les informer de la renaissance de Sirius. Ou plutôt, leur expliquer sa réapparition. Les Gobelins savaient sans doute déjà qu'il avait réapparu. Cette fois, celui-ci pourrait réclamer la chevalière des Black et prendre officiellement sa place de patriarche. Harry savait que Sirius avait regretté de ne pas pouvoir déclarer Bellatrix apatride et rendre à Andromeda et sa famille leur place légitime dans la lignée des Black.

Sans doute devrait-il profiter de sa visite à Gringotts pour faire un testament. Retrouver Sirius avait un peu apaisé sa magie, mais ce n'était que partie remise et il ne tiendrait que jusqu'à l'accomplissement de sa mission s'il ne se trouvait pas d'autres raisons de se battre...


Ses ruminations l'avaient mené devant les cachots. Inspirant profondément pour se donner du courage, il poussa la porte du bureau de Severus Snape. L'homme l'attendait visiblement, sa haute figure appuyée contre son bureau.

"Bonsoir, Professeur." Harry le salua d'une voix douce.

N'obtenant pas de réponse et s'apercevant que l'homme le détaillait, il lui rendit la pareille.

Il semblait bien que la fin de la guerre avait réussi au Professeur.

Sa peau était toujours claire, mais avait perdu cette pâleur maladive qui le faisait ressembler à un vampire en pleine soif de sang. Il était toujours aussi grand, dominant Harry de trente bons centimètres. Son mètre quatre vingt quinze était encore allongé par ses longues robes noires qui transformaient le charisme naturel de l'homme en une aura presque écrasante de pouvoir.

Il avait prit du poids, nota Harry, et la transformation, quoique discrète, était saisissante. Les épaules et les bras dessinés par la robe avaient gagnés en muscles et en définition. Le reste disparaissait dans des replis compliqués, comme d'habitude. Son visage avait rajeuni. Ce n'était pas tant un changement spécifique qu'un relâchement imperceptible d'une tension auparavant toujours présente.

Comme à son habitude, toutefois, son masque d'impassibilité ne laissait rien filtrer de ce qui pouvait passer par la tête du maître Occlumens. Bref, Severus Snape était toujours un homme qui en imposait, un homme magnétique au charme ténébreux.

D'où sa sort, ça ? Charme ? Snape ?

Harry chassa rapidement la pensée de son esprit avant de paniquer et renforça ses barrières d'Occlumens, à tout hasard.

Snape désigna la besace qui se trouvait sur son bureau, en partie masquée par sa hanche avant de prendre la parole.

"Approchez, Potter. Les sorts de dissimulation et de silence sont en place. Si ce que j'ai vu dans votre souvenir est correct, vous ne pourrez pas déplacer Lucius avant de le soigner un minimum. Il est peu probable qu'il survive au transport dans le cas contraire."

"Je comptais demander l'aide d'un elfe de maison. Les moyens de transport sorciers restent assez violents, malgré leur instantanéité. À moins que Fawkes n'accepte de nous rendre ce service..."

"Il serait préférable d'éviter les transports sorciers, en effet. Mais même ainsi, je vous interdit de prendre des risques. Approchez, par les serpents de Salazar ! Je vais vous expliquer exactement où et comment appliquer les baumes. J'ai également noté la posologie. Je ne suis que trop familier avec la faiblesse de vos capacités de concentration."

Harry décida de rétorquer par une autre remarque sarcastique, doublé d'une subtile menace (pour un Gryffondor.) Après tout, son côté Serpentard n'avait eu que peu d'occasions de briller dans son passé récent.

Encore une chose qui va probablement devoir radicalement changer dans les jours et mois à venir, pensa-t-il distraitement.

"J'en déduis donc que vous ne souhaitez pas accepter mon hospitalité. Moi qui me réjouissait de vous abriter sous mon toit en même temps que l'illustre Lucius Malefoy."

Le demi-sourire sarcastique du jeune homme n'était manifestement pas du goût du Maître des Potions. Sa voix se fit froide et coupante. Pourtant, Harry aurait juré avoir vu le coin de sa bouche frémir en une ombre de sourire amusé devant cette tentative de sarcasme.

"Au contraire, Potter. Je sais qu'il vous faudra une surveillance constante si nous voulons éviter l'empoisonnement accidentel."

"Excellent, Snape." s'exclama Harry en attrapant la sacoche.

"Vous pourrez donc me retrouver dans une heure devant Grimaud Place, le temps que je rejoigne Malefoy et que je lui donne les premiers soins. Oh, un conseil. Même si je sais que vous les détestez." jeta-t-il par-dessus son épaule avec un sourire malicieux, avant de disparaître à nouveau sous sa cape d'invisibilité.

"Ne tentez pas d'entrer ou de toucher la Maison en mon absence. Je me suis amusé un peu avec les magies protectrices et elles sont...très..hum... Black."

Il s'enfuit dans un petit rire, heureux d'avoir eu le dernier mot, pour une fois. Il se sentait bien pour la première fois depuis longtemps, même s'il avait mal aux joues.

Cela faisait-il si longtemps qu'il n'avait pas ri ? Probablement.

L'adrénaline que lui procurait toujours ces petites joutes verbales avec le Directeur de Serpentard lui avait manqué plus qu'il ne pensait.


Le jeune sorcier n'avait pas fait trois pas dans le couloir sombre des cachots qu'il disparut dans une colonne de flamme.