Prologue:
Vendredi 1er Juillet, 10 h du matin, manoir des Gol D., Ace se réveilla. Il n'était pas seul, dans son lit se trouvait avec lui sa conquête de la veille, pas encore remise de leurs ébats nocturnes. Il s'agissait d'un homme, un peu plus vieux qu'Ace, les cheveux blonds coiffés –ou pas- un peu n'importe comment.
Ace s'extirpa du lit et attrapa un boxer avant de sortir de la chambre, uniquement vêtu de ce sous-vêtement. Il déambula dans les couloirs de la demeure, cherchant à atteindre la cuisine pour prendre un petit café.
Ses yeux jaunes dans le flou, titubant un peu de fatigue, il frottait sa tignasse noire en bataille. Ses muscles finement ciselés ondulaient sous sa peau caramel. Un homme vint à sa rencontre.
« Ace ! Enfin debout ? J'aimerais te voir dans mon bureau le plus tôt possible.
- Pourquoi ?
- Ne discute pas et viens. »
Ace ne dit rien. Il se contenta de soupirer et suivit l'homme aux cheveux aussi noirs que les siens. Ils arrivèrent vite dans une grande pièce éclairée par la lumière du soleil qui perçait par la baie vitrée qui recouvraient tout un pan du mur. Devant elle trônait un véritable bureau de PDG en bois massif.
« Qui y a-t-il père ? »
Le père du jeune homme s'assit sur son fauteuil en cuir noir et croisa ses mains sur le meuble en bois, posant son menton dessus.
« J'ai appris qu'on avait encore essayé de te kidnapper. »
Ace soupira. "Quoi, il est déjà au courant ?". Il acquiesça.
« Ouais, mais c'est bon, j'ai pu me débrouiller, comme toujours.
- C'est justement ça le problème, tu ne pourras pas t'en sortir à chaque fois. C'est pourquoi je t'ai fais venir. Je t'ai engagé un garde du corps.
- Quoi ?
- A partir de maintenant, il restera tout le temps avec toi, même lorsque tu es au manoir.
- Tu t'fous d'moi hein ? Je refuse de me retrouver avec une espèce de toutou collé aux basques ! Je peux très bien me débrouiller tout seul ! »
Gol D. Roger regarda son fils unique, totalement découragé. Sa main passa sur son visage dans un mouvement de lassitude. Il expira fortement par le nez, faisant frémir sa moustache.
« Je m'en doutais... Mais vois-tu, fils, tu n'as pas le choix. »
Il se tourna vers une autre porte sur sa droite et dit d'une voix forte :
« Entre ! »
La porte s'ouvrit et un homme pénétra dans la pièce. Il était un peu plus grand qu'Ace et particulièrement musclé. Ses jambes étaient enserrées dans un jean bleu foncé et il ne portait sur le dos qu'une simple veste blanche aux rebords en fourrure vert foncée, grande ouverte, laissant apparaitre son torse. Son visage était crispé dans une expression blasée et ses dents se serraient sur deux cigares allumés, dégageant une épaisse fumée blanche. Il passa une main ganté de cuir dans ses cheveux gris-bleus pour les ébouriffer d'un air vaguement embarrassé.
Roger se retourna vers son fils :
« Je te présente Smoker, c'est lui qui te servira de garde du corps.
- Mais t'es bouché ou quoi ? .. DU CORPS ! »
Ace lança un regard courroucé à l'homme aux cheveux gris. Ce dernier lui répondit en soutenant ses yeux jaunes des siens, gris clairs.
« Je te l'ai dis : tu n'as pas le choix. »
Ace reporta son regard sur son père et Smoker en profita pour détailler son corps uniquement couvert du boxer noir. "Sale gosse... Mais plutôt bien fait malgré tout." Il se re-concentra sur la conversation entre les deux hommes.
« Il n'y a pas à discuter. Que tu le veuilles ou non, Smoker a pour ordre de ne pas te lâcher d'une semelle. »
Ace gronda de colère et sortit en claquant la porte. Son nouveau garde du corps le suivit plus tranquillement, l'air déjà fatigué de son travail à venir. Avant de sortir, il inclina légèrement la tête pour saluer son employeur et partit à la suite du garçon.
Il ne parla pas, se contentant de marcher derrière le brun. Se dernier se retourna au bout de quelques mètres, toujours aussi énervé.
« Tu comptes me suivre longtemps comme ça ?
- T'es vraiment pas fut-fut comme garçon, hein ? Ton père te l'a pourtant dit : mon travail est de te protéger et pour cela, je serrais avec toi dans tous tes déplacements.
- Rah ! Putain, ça fait chier ! »
Ace s'en serrait arraché les cheveux. Il recommença à marcher jusqu'à sa chambre. "J'ai plus faim du coup…". Il poussa la porte de son "antre" mais se figea à l'entrée. Au centre de la pièce se trouvait une jeune femme.
Elle n'était pas très grande. Son corps était enveloppé dans une grande cape noire à la capuche rabattue qui ne laissait voir que son visage juvénile parsemé de tâches de rousseur et ses grands yeux bleus naïfs et mélancoliques à moitiés cachés par une frange rousse en bataille. Deux tresses tombaient sur chacune de ses épaules frêles. Elle tenait entre ses mains pâles une sorte de grimoire à la couverture en cuir noir.
Ace la regarda, surpris, alors que Smoker s'arrêtait derrière lui, regardant par-dessus son épaule pour voir ce qui se passait.
« Qui est-ce ? dit-il.
- J'aimerais bien le savoir… répondit le brun d'une voix troublée. »
La jeune fille eut un rire désabusé et ses yeux se remplirent de larmes prêtes à déborder.
« Tu aimerais bien savoir ? Espèce de monstre ! Et dire que j'ai pu croire à tes belles paroles… Je t'ai même offert ma première fois… Et toi, le lendemain, tu m'as jetée comme une malpropre, me disant que je n'étais qu'un coup d'un soir parmi tant d'autre alors que la veille tu m'avais certifiée que j'avais quelque chose de plus que toutes ces conquêtes que je te voyais ramener tous les soirs. Je t'aimais bordel ! J'avais enfin trouvé le courage de te le dire et tu m'as fais croire que c'était réciproque uniquement pour… »
Elle fondit en larmes, incapable de dire un mot de plus.
Ace la fixait, au début sceptique, puis il se souvint d'elle et commença un peu à paniquer.
Smoker, lui, avait plutôt l'air blasé. Après la tirade de la jeune fille, il souffla d'un air exaspéré. Qu'est-ce qu'elle avait à raconter sa vie celle-là ? Il se prit un coup de coude du jeune homme qui s'approcha de la rouquine, l'air embarrassé.
« Je suis sincèrement désolé de t'avoir fais ça mais… Que veux-tu qui j'y fasse maintenant ? »
Elle releva brusquement la tête. Elle se mordait la lèvre avec force pour retenir ses sanglots et son regard s'était fait haineux. Elle gronda d'une voix sourde et ses yeux virèrent au noir d'encre alors qu'elle marmonnait des paroles incompréhensibles. Une aura rouge l'entoura et ses cheveux et vêtements commencèrent à flotter, ballotés par un vent mystique. Une boule d'énergie rouge se forma au dessus de son grimoire et, alors qu'elle récitait les dernières paroles, elle fila droit dans la poitrine d'Ace qui fut projeté en arrière, difficilement retenu par un Smoker totalement abasourdi. La jeune fille redevint normale et s'écroula au sol, à genoux, essoufflée.
« Qu'est-ce que tu lui as fais ? »
Elle se releva difficilement mais arriva finalement à se redresser, se tenant droite et fière. Malgré son sourire en coin, ses yeux étaient plein d'amertume.
« Je lui ai lancé une malédiction. Ace… Il ne te reste plus qu'un mois à vivre. Dans trente jours, à minuit exactement, tu mourras. Si tu veux briser le sortilège, il te faudra tomber amoureux et le dire à voix haute à la personne concernée. Tes sentiments devront être sincère et tu devras lui dire "Je t'aime". Aucune autre formule ne fonctionnera. Je te souhaite bonne chance, car je ne pense pas que tu sois capable de tomber amoureux… Sur ce, adieu. »
Smoker voulu la retenir mais la fille disparue dans un tourbillon de flammes.
Ace restait là, immobile, à fixer l'endroit où elle se tenait quelques secondes plus tôt, le regard vide. Il était encore soutenu par son garde du corps. Toujours silencieux, il alla tirer les rideaux de sa chambre pour laisser entrer le soleil et il ouvrit les fenêtres. Appuyé sur le rebord, il laissa l'air doux caresser sa peau, respirant à pleins poumons. Il soupira.
« Quelle journée… Il n'est même pas 11 heures. »