AN : Dernier chapitre… enfin.

12 – Fin de l'innocence.

James fit un écart bien chronométré, et l'anneau de Sirius alla s'écraser dans le sable en projetant une gerbe dorée sur les serviettes de plage.

- Fais donc attention, Sirius, grogna Lily en lançant un anneau à son tour.

Cornedrue baissa élégamment la tête, et l'anneau bleu s'accrocha parfaitement à l'andouiller.

- Fais donc attention ? répéta Sirius, offusqué. James n'arrête pas d'esquiver mes anneaux, et les tiens arrivent toujours au but ! Tu ne sais même pas viser !

Le jeune Black s'apprêtait à lancer un autre anneau lorsqu'un choc sur son poignet le fit dévier.

- Je ne sais pas viser, hein ?

Sirius lança un faux regard noir à son amie, et tenta encore sa chance, sans plus de succès. Lily tira à nouveau, et le grand cerf prit position avec prestance pour recevoir l'anneau. Ce qu'il n'avait pas vu, cependant, c'était que Remus avait calqué son tir sur celui de Lily, et ce fut deux anneaux qu'il reçut.

- Bravo ! approuva Sirius avec une petite moue appréciatrice, tandis que James bramait de rage.

- Merci, salua Remus. Il suffit d'un peu de stratégie…

A eux deux, ils essayèrent toutes les ruses de Maraudeurs qu'ils purent imaginer pour coincer James et l'acculer à la faute.

Au bout d'une pleine heure de ce jeu, Cornedrue avait des anneaux de toutes les couleurs pendus à ses bois. Cela devait commencer à lui peser, d'ailleurs, car il avait la tête basse, il était essoufflé, et il devait supporter son corps tremblant de fatigue sur quatre jambes bien plantées dans le sable.

- On dirait un sapin de Noël, remarqua Peter, qui ricanait dans un coin, ayant refusé de jouer.

Le cerf tourna – lentement – une tête offusquée vers le jeune homme, et reçut aussitôt un anneau rouge supplémentaire dans le processus.

- Ne t'énerve pas, Cornedrue, c'est vrai que c'est… esthétique.

James tourna à nouveau sa tête chargée du côté de Remus, mais un flash le surprit. Aussitôt, il se transforma, laissant tomber tous les anneaux à terre.

- Oh, James, gémit Sirius. On ne va plus pouvoir compter les points.

Mais le jeune homme l'ignora, et se dirigea tout droit vers eux, l'air menaçant.

- REMUS !

- Oui ? demanda celui-ci avec un air innocent.

- Donne. Moi. Ça.

Le pauvre Lupin se mit à reculer, restant hors de portée de James, pour pouvoir ranger tranquillement son appareil photo.

- Je t'interdis de développer cette photo !

- Je ne vois pas ce que tu veux dire, répondit Remus, qui finissait de mettre l'appareil dans son étui.

- Donne-moi cet appareil photo.

- James, par pitié, il y a d'excellentes photos, dedans… il y a Lily…

Cela fit hésiter Cornedrue un instant, et Remus lança l'appareil – son TRES précieux appareil – à Sirius. Le cerf réapparut et fit volte face, chargeant Black, les bois en avant.

Sirius esquiva adroitement, et glissa à genoux dans le sable pour attraper une serviette de plage, qu'il lança à la tête de James, l'aveuglant momentanément.

Il en profita pour relancer l'appareil photo à Remus, qui s'éclipsa rapidement pour mettre l'appareil en sûreté.

Sirius avait ramassé une deuxième serviette et attendait, solidement campé, que James se débarrasse de son bandeau.

Lorsqu'il y parvint, enfonçant la pauvre serviette qui n'avait rien demandé dans le sable d'un sabot, il jeta immédiatement un regard meurtrier à Sirius, souffla bruyamment dans ses naseaux, et présenta des bois dans un geste menaçant.

Black leva lentement la serviette à son côté, de la manière élégante d'un toréador se préparant au combat, et tapa du pied.

Cornedrue ne se fit pas prier pour entrer dans le jeu. Il souleva des gerbes de sable en grattant le sol, avant de charger de toute sa vitesse.

La simili-corrida de James et Sirius dura un long moment sous les « olé » des trois autres. Ils ne s'arrêtèrent que lorsque le soleil, bas au-dessus de l'horizon, éclaira la scène d'une lueur sanglante.

- Et il faut encore préparer les bagages, soupira Lily en passant le perron.

Le lendemain matin, ils étaient tous réveillés aux aurores, mais, malgré le départ imminent, l'ambiance était toujours aux vacances.

Le soleil n'était pas encore levé, et déjà, le ciel à l'est était pâle, et toute la voûte céleste, où quelques étoiles scintillaient encore, était un dégradé de tous les tons imaginables de bleu.

- Remus, tu ressembles à James ! s'écria Sirius en faisant sauter le bacon dans la poêle.

Les deux garçons levèrent la tête, ouvrirent un œil pour se dévisager un instant, et s'empressèrent de se rendormir sur la table de la cuisine. Remus fit cependant un léger effort pour aplatir ses cheveux ébouriffés.

- Pourquoi on doit rentrer de vacances ? gémit Peter.

- Parce que ta Maman te manque, répondit gentiment Sirius en lui servant une assiette bien remplie.

- Oh…

Lily avait bien les yeux grands ouverts, mais si l'on en croyait son manque de réaction, elle devait être aussi réveillée que James et Remus. Sirius posa une assiette devant elle et agita la main devant ses yeux.

- James ! Réveille ta fiancée, je veux qu'elle nous rende nos baguettes avant qu'on parte !

Le jeune Potter ne prit même pas la peine de relever la tête. Il tendit simplement la main pour saisir le bras de Lily et la secouer… mollement.

- C'est la fin des vacances, Sirius, gémit Remus avec un faux sanglot dans la voix. Pourquoi dois-tu être aussi cruel et aussi… réveillé ?

Black se retourna, un torchon sur le bras, et regarda Remus avec un air offusqué, et se mit à énumérer les raisons sur ses doigts.

- Premièrement, je vais voyager en cabine ! La VRAIE cabine de l'avion, pas la soute ! Avec cacahouètes et soda ! Deuxièmement, je rentrerais chez moi, et j'aurais une merveilleuse moto dans mon garage. Un petit bi…

- Faux, interrompit James, en ouvrant un œil. Deuxièmement, on va à Poudlard voir Dumbledore…

- Tu permets, Cornedrue ? J'ai jamais dit que je parlais d'ordre chronologique. Bon, j'en étais où ?

- Un petit bi… répondit Lily d'une voix monocorde.

- Ah voilà ! Un petit bijou que je vais m'empresser d'ensorceler… J'ai déjà des tas d'idées, vous verrez ! Je vais revoir mes parents… mais surtout, et vraiment, par-dessus tout autre chose…

- Tu vas revoir Cathy, acheva Lily avec un clin d'œil.

Sirius se laissa tomber théâtralement sur une chaise proche.

- Je me demande encore comment j'ai pu vivre sans elle pendant tout ce temps…

Les autres ricanèrent, enfin réveillés, sauf Remus, qui semblaient perdu dans ses pensées.

- J'en connais un autre qui aimerait bien revoir sa douce moitié, murmura James avec un clin d'œil.

- Sauf que je voudrais bien m'endormir, et que Kyana soit là à mon réveil, finit Remus avec une grimace. Ce serait tellement plus simple…

- Oh, l'histoire du loup au bois dormant ! C'est tellement romantique !

Lupin lança un faux regard noir à Lily et lui tira la langue au milieu des rires.

- C'est pas tout ça, coupa Sirius en s'attaquant à son petit déjeuner, mais il reste encore plein de choses à faire !

- Un dernier petit coup de ménage, par exemple, continua James après un coup d'œil entendu avec son ami.

- Fermer tous les volets et sécuriser les portes, aussi…

- … ou même… réduire cinq lourds bagages en un seul, léger ?

Presque tout le monde avait les yeux fixés sur Lily.

- Il serait peut-être temps que cinq jeunes sorciers récupèrent leurs baguettes respectives, finit Sirius.

Le soleil était levé, maintenant, et brillait de tout son éclat estival sur la maison Evans. Tout était silencieux…

- QUOI ?

… ou presque. Le cri avait retenti jusqu'à l'extérieur de la maison, et quelques oiseaux s'envolèrent, terrifiés. Dans le salon, l'ambiance était soudainement devenue orageuse.

- Tu veux dire que c'était Remus qui avait la garde des baguettes pendant tout ce temps ?

Lily ne se laissait pas démonter, et tenait tête au Sirius furieux en face d'elle. Ils étaient assez comiques, tous. James semblait avoir perdu la faculté de parler, mais il y avait une lueur amusée dans ses yeux. Remus aurait disparu sous le tapis s'il en avait eu la possibilité, et Peter regardait par la fenêtre, distrait par le vol d'un papillon tardif.

Sirius frissonna de colère encore quelques secondes avant d'éclater de rire.

- M'en fiche, dit-il soudain sur le ton d'un enfant vexé. Je veux ma baguette !

Remus sortit aussitôt une petite boîte en bois de derrière son dos, et fit la distribution sans tarder.

Une heure après, ils partaient pour l'aéroport.

Lily devait admettre que le voyage en avion était loin d'être monotone avec Sirius en cabine. Il passa si vite qu'ils furent tous étonnés d'entendre le pilote annoncer l'atterrissage.

Le temps en Angleterre correspondait plus à celui d'un tel jour. Le ciel gris et la pluie fine sentaient si fort la fin des vacances qu'ils faillirent se mettre à déprimer en posant le pied hors de l'avion, dans l'aéroport.

- OOOOOUUUUUUAAAAAAAIIIIIIIIIIIIS !

Un ouragan de cheveux blonds bouclés leur tomba dessus presque immédiatement, fauchant Sirius au passage.

- CATHY ! s'écria Black en s'efforçant de garder son équilibre. Tu m'as manqué !

- Toi aussi, répondit la jeune fille en levant ses grands yeux bleu pâle et en regardant chacun de ses amis. Et vous tous ! Alors, comment étaient vos vacances ???

Chacun se mit à parler à tort et à travers pendant quelques minutes, dans un ouragan étourdissant de bonne humeur. Personne, excepté Remus, ne remarqua l'arrivée d'une autre jeune fille.

- Kyana ! s'écria Sirius quelques minutes plus tard, interrompant les retrouvailles – discrètes – de Remus et Kyana. Tu es là aussi !

- Bonjour, Sirius ! Bonnes vacances ?

- Fantastiques ! Dites, ça vous dirait de se trouver un endroit pour manger ? On pourra parler de tout ça !

- Sirius ! gronda Lily. Il faut aller à Poudlard !

- Vous aussi, vous devez voir Dumbledore ? s'étonna Cathy.

- Il semblerait qu'on ait tous été convoqué, dit Kyana. Mais on peut toujours manger aux Trois Balais avant, qu'est-ce que vous en pensez ?

L'unanimité ayant approuvé, ce fut l'affaire d'une minute de trouver un coin tranquille et d'aller à Pré-au-Lard.

Le ciel d'Ecosse déversait une pluie torrentielle sur le petit village sorcier. Aussi la jeune Madame Rosmerta ne fut pas surprise de voir entrer en catastrophe une petit groupe de jeunes sorciers trempés jusqu'aux os.

- Oh, oui, capitaine, ça c'était très intelligent de débarquer à l'autre bout de Pré-au-Lard ! grogna Cathy en repoussant ses boucles dégoulinantes. Quelle idée de te laisser faire le Portoloin !

- Hey ! Je suis juste le spécialiste en Métamorphoses…

- Un des spécialistes, coupa Sirius.

- … c'est Lily qui est spécialiste en sortilèges ! C'est elle qui aurait dû le faire…

- Allez-vous vous taire ? grogna Remus. Et avancez, on va bloquer l'entrée.

Ils s'installèrent rapidement, tous les sept, à une des plus grandes tables du petit bar.

- Bonjour, les garçons ! salua Rosmerta avec un clin d'œil. Et les filles ! ajouta-t-elle précipitamment en voyant Cathy lever un sourcil.

Ce fut peut-être le même regard qui incita la jeune femme à prendre rapidement leurs commandes et à disparaître en cuisine.

Quelques instants plus tard, ils étaient tous attablés devant un bon repas chaud, assis non loin du feu, leurs capes trempées séchant sur un porte-manteau.

- Alors, on ne salue plus son attrapeuse favorite ?

Tout le monde se tourna d'un bloc vers l'origine de la voix au fort accent espagnol.

- Serena ! s'écria James en bondissant sur ses pieds. C'est génial ! Qu'est-ce que tu fais là ? Ce n'est pas encore la rentrée à Poudlard, que je sache…

La jeune Andalouse tira une chaise à elle et s'assit au bout de la table avec un sourire satisfait.

- Mes parents ont à faire à Pré-au-Lard, alors ils nous ont emmenés…

- Ton frère est là aussi ? demanda Lily.

- Si, mais il est resté à Honeydukes… le gourmand ! Allez, racontez-moi vos vacances !

Le récit dura tout le repas, ponctué de fous rires. Madame Rosmerta participa de temps à autres, quand les autres clients ne l'accaparaient pas.

- Il serait peut-être temps de monter au château, dit Lily à la fin du repas. Dumbledore va nous attendre… tu viens avec nous, Serena ?

- Oh… no, ye vais retrouver mes parents… ye n'ai pas reçu d'invitation…

- Tu n'as pas besoin d'invitation pour venir avec nous, dit Remus avec un clin d'œil à la jeune Espagnole. Dumbledore ne va certainement pas t'arracher la tête.

- Merci pour cette délicate image, Lunard, mais mes parents vont vraiment se demander où ye suis… Ye vous écrirais !

Elle embrassa rapidement tout le monde et partit à un bout de Pré-au-Lard, tandis que les autres Gryffondor remirent leurs capes – sèches – et partirent, à nouveau sous la pluie, vers le château de Poudlard.

Quand ils ressortirent le soir du château, il pleuvait encore, mais ils avaient d'autres préoccupations en tête, et marchaient, tête baissée, sans but particulier.

Peu leur importait qu'ils se fassent tremper. Les vacances étaient irrémédiablement finies.

- Au moins, Dumbledore nous a laissé le temps de prendre notre décision, hasarda Kyana dans une tentative de réchauffer l'atmosphère ambiante.

- On n'a pas vraiment le choix, répondit Sirius dans un ricanement sarcastique. En tout cas, pour moi, la décision est déjà toute faite…

Les autres hochèrent la tête. Seul Peter gardait un air profondément dubitatif.

- Je ne sais pas, dit-il lentement, semblant peser chacun de ses mots. Est-ce qu'on fera une grande différence ?

- On ne sait jamais, dit Remus. L'union fait la force…

- Bien sûr ! assura James avec un sourire qui se voulait narquois. A nous sept, on va lui mettre un sacré coup de pied aux fesses, à Voldemort.

Ils rirent un peu plus fort qu'il n'aurait fallu, d'un rire qui sonnait faux, et le silence retomba sur eux, pesant.

Le choix était donc fait. Ils allaient tous, malgré leur jeune âge, rejoindre Dumbledore dans sa lutte incessante contre le dangereux mage noir.

- Quoiqu'il en soit… on a quand même passé de super vacances !

Fin… « Tout est bien qui finit bien », ou presque…