A/N : les lignes en italique ont été traduites de la chanson Help Me Please de Hard-Fi.
Je reste là, planté devant la porte qui mène au petit cinq pièces. Je ne sais pas quoi faire, je n'ai pas envie d'entrer, je n'ai plus envie d'entrer mais… je ne vais pas avoir le choix, n'est-ce pas ? Alors je pousse la porte de notre appartement… de mon appartement. Parce qu'il sera toujours vide de toi, désormais.
L'entrée n'est pas allumée. Aucun son ne résonne dans les pièces. Il n'y a que moi, que moi et les meubles froids, que moi et les murs trop blancs, que moi et le vide. Le vide, rien que le vide domine. Me domine. Pourquoi voudrais-je même rentrer chez nous ? Tu n'es pas là, ni assis sur ta chaise préférée, ni occupé à nettoyer le labo, ni à cuisiner pour le diner ? Tu n'es pas là, tu n'es plus là, tu n'y seras plus jamais, n'est-ce pas ?
Personne ne m'appelle quand je pose mon manteau sur un fauteuil. Personne n'est là, il n'y a que l'horloge qui fait tic toc dans un rythme trop régulier. Ca m'angoisse, alors je la décroche du mur, et je la cache sous un coussin, parce que c'est malsain : rien ne devrait plus être aussi normal, sans toi. La vie n'a pas le droit de continuer, sans toi. Et sans le bruit de l'horloge, le son de mon propre chagrin me frappe encore plus. Les sanglots ne meurent plus dans ma gorge : ils sont là, dehors, n'importe qui pourrait les entendre. Mais il n'y a que moi, n'est-ce pas ? Que moi, et mes larmes qui coulent, nombreuses, si nombreuses.
Je descends dans la boutique, après une nuit blanche, après le petit-déjeuner. Le premier que j'ai pris seul. Il était immangeable, et au final, je ne l'ai quasiment pas touché. Les choses semblent simplement plus amères, sans toi. Je descends dans la boutique, mais je n'ai même pas mis le pied sur la dernière marche que je craque dans les escaliers. Parce que je sais que comme tu n'étais pas là dans la cuisine, tu ne seras pas en bas pour me lancer « Salut George ! » A la place, c'est moi qui dis « salut ». Salut solitude, salut désespoir.
Quand enfin je me reprends – ou que j'ai l'impression de m'être repris – je pénètre en tremblant dans le magasin. Tout est froid, si froid, les couleurs vives semblent avoir perdu leur éclat, et les sourires joyeux sur les boites semblent se moquer de moi. Tout cela, Fred, tout cela, c'est … injuste, parce que tu ne rentreras plus jamais. Alors j'attrape celles qui sont le plus proche de moi, et je les sors. Je les pose là, devant la porte du magasin, dans la rue. Là où je ne peux plus les voir. Des gamins qui passent par-là les voient, et après s'être assuré que personne ne les regarde, ils les prennent et s'enfuient en courant. Et je m'en fiche, ils peuvent bien prendre ce qu'ils veulent, tout est gratuit, je m'en fiche.
Parce que la seule chose à laquelle je tenais, on me l'a prise. On me l'a arrachée. Putain, tu me manques, Fred. Si tu savais comme tu me manques. Je ne sais plus quoi faire, je ne veux plus rien faire. Et bon sang, aidez-moi, par pitié. Je vous en prie, j'en ai besoin. Parce que c'est la première fois que ça m'arrive, être seul, et que ça me fait mourir de terreur.