a/n: texte rédigé en une heure en réponse au thème "morsure" pour les nuits de HPF.


Ils déambulent parmi les manèges colorés et les rires des enfants, main dans la main, mais le toucher peu assuré. Ils sont un peu extérieurs au monde, pas tout à fait dans la ronde. Et pourtant ils sont là parce qu'ils en ont besoin. Besoin de se retrouver, besoin de s'aimer, après tout ce par quoi ils sont passés.

Rose sent sa gorge se nouer quand elle pense à tout ce qu'elle a failli perdre pour un instant de folie, pour une erreur de jugement. Scorpius serre sa main un peu plus fort, pour lui montrer qu'il ne lui en veut pas. Ou au moins qu'il ne lui en veut plus. Mais elle ne peut s'empêcher de se sentir mal à l'aise. Reine au bal des hypocrites, coincée dans sa robe de misère et cachée derrière son masque de mensonges.

Elle aime Scorpius. Elle n'en doute plus, et n'aurais jamais dû en douter. Mais une partie d'elle ne cesse de lui rappeler tout ce qu'elle manque désormais. Celle qui se rappelle de ses mains sur ses seins, de son souffle au creux de son cou, de ses dents sur son épaule, de son sexe dans son corps. Et pourtant, elle secoue la tête et tente de vider son esprit de ces pensées. Tente de ne pas prêter attention à la pression qu'elle sent encore sur son épaule, comme le fantôme de sa bêtise.

En réalité, Rose a eu peur. Peur de s'enfermer dans une relation toute sa vie. Elle n'a que vingt ans, et même si elle aime son fiancé, elle a eu le vertige, juchée tout en haut de sa tour d'engagements et de promesses. Alors quand une échappatoire s'est présentée à elle, Rose n'a pas réfléchi. Parce que tout ce qui comptait, c'était de s'abandonner, l'espace d'un instant, dans les bras de cet amant. De ne plus être qu'une fleur sauvage, sans aucune préoccupation, sans aucune pression.

Elle n'est revenue à elle que lorsque Scorpius les a trouvés, enlacés dans les draps, encore tremblants de leurs émois, de leurs ébats. Elle se souvient, le visage brisé de son fiancé, la honte de son amant, les éclats de voix des deux hommes, et ses pleurs, ses supplications, ses « je suis désolée, pardonne-moi Scorpius, pardonne-moi ». Rose se souvient et se met à trembler, alors Scorpius serre sa main encore un peu plus fort. Elle ne sent plus ses doigts, mais c'est peut-être mieux ainsi : trois semaines auparavant, ils couraient sur la peau d'un autre.

Scorpius lui sourit et Rose l'imite un peu faiblement. Tentative un peu désespérée de sembler heureuse alors qu'elle doute l'être un jour. Parce que quoi qu'il arrive, elle a l'impression qu'elle portera toujours en elle cette trahison. Après tout, trois semaines plus tard, elle en a toujours une marque sur l'épaule. Comme si la page refusait de se refermer.

Il y a un vendeur de pommes d'amour, un peu plus loin. Scorpius en veut une alors ils se dirigent vers la petite caravane colorée. Ils repartent avec une seule de ces friandises, parce que Rose ne se sent pas encore digne de partager à nouveau un tel symbole avec Scorpius. Il croque dans le fruit et quand Rose voit la forme faite par les dents de son fiancé dans la chair de la pomme, elle ressent un nouveau coup au cœur : une morsure très semblable marque encore son épaule.

Même si elle épouse Scorpius, une partie d'elle appartiendra toujours à son beau-père.