A/N : Réponse au thème "L'odeur du thé"pour Accio Prompts


Un éclat de rire clair et chaleureux, une remarque polie sur l'excellence du repas, une question sur le travail de guérisseur de Scorpius, un compliment sur la décoration de la salle à manger, un sourire poli à la maitresse de maison… Tout cela résonne dans la tête d'Asteria, mais rien n'est aussi insistant, persistant, transperçant que l'odeur du thé au citron qui imprègne le tapis sur lequel est posée la table… Parce que l'odeur du citron est aussi celle de la trahison.

Et pourtant, elle fait comme si elle ne savait pas, et elle se force à rire avec Miss Weasley, à remercier la meilleure amie de son fils avec un sourire, à répondre à l'amante de son mari avec enthousiasme. Comme si elle ne savait pas, même si elle en meurt un peu plus à chaque seconde qui passe. Comme si elle ne savait pas, parce que malgré tout, elle aime toujours son mari. Malgré la trahison. Avec la trahison.

— Une dernière part de gâteau, Miss Weasley ?

— Merci, Mr Malfoy, mais cette troisième part était déjà de trop.

Asteria fait comme si elle ne voyait pas le regard déçu de son mari. Evidemment qu'il voudrait que Rose soit un peu plus ronde, parce qu'il a toujours aimé les courbes, Asteria le sait mieux que quiconque.

— De toute manière, il est temps que je rentre, mes parents vont finir par croire que je veux m'installer chez vous.

Asteria fait comme si elle ne voyait pas le sourire amusé de son époux. Evidemment que Rose Weasley s'est déjà installée chez eux. Elle s'est déjà glissée dans les draps de leur lit et dans l'esprit de son mari.

— Tu peux rester une nuit de plus, s'il te plait, Rose ?

— Mais…

— Juste une nuit… J'ai besoin de toi.

Asteria prétend que le fait que Scorpius soit aussi dépendant de sa meilleure amie ne la touche pas. Elle se ment, elle se dit que si Scorpius a besoin de Rose, c'est parce qu'elle est la cousine de celui qui a brisé le cœur de son fils et qu'il espère que la jeune fille pourra convaincre Louis de donner une nouvelle chance à leur histoire. Elle se ment, parce qu'au fond, elle sait que même son rôle de mère s'échappe petit à petit.

— Très bien.

Asteria prétend ne pas voir leurs deux regards qui se croisent, prétend ne pas sentir leur fébrilité à l'idée de se toucher à nouveau. Asteria prétend ne rien savoir, et refoule toutes ses questions au fond de son âme. Elle ne se demandera pas si cela fait longtemps que ça dure ou si ce n'est arrivé qu'une seule fois. Elle ne se demandera pas si ce n'est qu'un passe-temps ou s'il y a des sentiments. Elle oubliera, elle se forcera à oublier. Parce qu'elle ne veut rien perdre. Ni Draco, ni sa vie.

Alors à la fin du repas, quand Scorpius et Rose s'éclipsent pour discuter de Louis, quand Draco s'enferme dans son bureau pour travailler, quand elle se retrouve seule dans la salle à manger, et que leur elfe de maison se présente pour débarasser la table, Asteria lui demande de jeter aussi le tapis.

Et elle est ravie que l'elfe ne demande pas pourquoi. Elle ne se voit pas lui expliquer qu'elle a renversé la tasse de thé qu'elle voulait boire en lisant le journal. Elle ne se voit pas lui expliquer que l'incident a été provoqué par le choc de la vision des lèvres de son mari dévorant le cou de Rose Weasley, des mains de la jeune fille dans le pantalon de Draco, de leur passion dévorante, là, contre le mur. Leur passion si aveuglante, si assourdissante, qu'ils ne se sont même pas rendu compte qu'elle était là.

Asteria ne dit rien, regarde l'elfe se débarrasser du tapis, et va se coucher dans ce qui est encore un peu son propre lit. Elle ne dit rien. De toute manière, elle n'aurait pas pu expliquer à l'elfe : elle va faire comme si rien ne s'était passé. Elle va oublier. L'odeur du thé appartiendra au passé.