Note :Ouhlà ! Encore une fois, désolée pour le retard. J'ai eu un petit imprévu ce weekend qui m'a empêchée de relire ce chapitre à temps...

Quoi qu'il en soit, voici le 4° et dernier chapitre !

Bonne lecture !


4. La Foi

La chance, c'est croire que vous êtes chanceux
- Tennessee Williams

Les yeux bleus d'Albus Dumbledore pétillaient gaiement. Drago n'avait pas la moindre idée de ce qui rendait le vieux sorcier si joyeux ; il était mort après tout. Drago arracha son regard du portrait et se concentra sur la Directrice, qui était assise en face de Drago, derrière son bureau. Les lèvres du professeur McGonagall étaient serrées en une fine ligne, ce qui n'était jamais un bon présage.

« C'est tout ? demanda-t-elle sèchement. »

Drago hocha la tête. Il avait raconté à McGonagall tout ce qu'il se rappelait. Il lui avait dit comment il s'était réveillé sans se rappeler de rien, comment il avait utilisé Felix Felicis et trouvé la cabane, comment il avait donné des potions à Potter pour le soigner, et comment il l'avait réchauffé. Il avait, toutefois, négligé de mentionner quelle utilisation avait été prévue originellement pour le Felix Felicis, et il ne lui avait certainement pas dit ce qui s'était passé pendant le rêvede Potter. En ce qui concernait Drago, cela resterait pour toujours un rêve.

Les lèvres de McGonagall s'amincirent encore davantage, jusqu'à disparaître carrément de son visage.
Drago grimaça. Maintenant qu'il lui avait raconté son histoire, elle lui semblait ridicule, même à ses propres oreilles. Si McGonagall ne le croyait pas, il ne pourrait pas l'en blâmer. Et si elle le croyait et pensait néanmoins qu'il était coupable, il ne pourrait pas l'en blâmer non plus. Drago avait fait attention à la façon dont il avait formulé son récit. Il avait essayé de ne pas s'incriminer plus que nécessaire, mais il ne savait pas comment pointer qu'il était possible qu'il soit innocent quand il n'y croyait pas lui-même. Il lui apparut qu'il aurait pu mentir et dire qu'il se souvenait de tout, et qu'une mystérieuse personne sous une cape les avait attaqués, mais ça n'aurait servi à rien. Une fois que Potter serait réveillé, il raconterait à tout le monde ce qui s'était réellement passé.
McGonagall eut une sorte de grimace désapprobatrice.

« Prenez un biscuit, Mr Malefoy. »

Drago la fixa avant de regarder le bureau et l'assiette de biscuits au gingembre.

« Allez-y Mr Malefoy. Vous avez été porté disparu pendant des heures. Les cuisines sont fermées, j'en ai peur. Prenez un biscuit. »

Elle poussa l'assiette vers lui.
Au moment où elle dit le mot biscuit, Drago se rendit compte qu'il mourait de faim. L'espace d'une seconde, il se demanda si McGonagall voulait l'empoisonner, mais son estomac poussa un grognement et Drago attrapa vivement un biscuit. Il le dévora en quelques secondes, tout en surveillant McG onagall du regard. Son comportement avait clairement été étrange, mais il supposait qu'on pouvait dire exactement la même chose de lui.

Quand il avait assommé le Professeur Primevère, il avait vraiment cru pour cinq bonnes minutes qu'elle était derrière tout ce qui s'était passé. Cependant, quand elle eut retrouvé conscience, il comprit qu'elle était seulement un membre de l'équipe de secours. Ca n'avait pas calmé Drago. Elle insistait pour voir Harry et il n'avait pas l'intention de laisser Primeperversapprocher de son Sauveur préféré alors qu'il était nu et sans défense. Primevère, de son côté, pensait que Drago était un abominable meurtrier qui avait caché le corps de Potter quelque part dans la clairière. Quand Slughorn et Hagrid étaient arrivés, suivis de près par le reste des secours, ils étaient tous les deux hystériques. Drago se calma seulement après que Madame Pomfresh soit arrivée. Elle l'examina rapidement et lui jeta un sort sédatif. Magiquement apaisé, il lui montra l'entrée de la cabane et lui dit quelles potions il avait utilisées pour soigner les blessures de Potter. Drago avait refusé de se séparer de Potter, malgré les effets du sort de Pomfresh, mais à son humiliation la plus complète, Hagrid l'avait soulevé et l'avait porté jusqu'au château. Cela avait été atrocement gênant, sans mentionner désagréable – Hagrid sentait bizarre.

Ils furent accueillis par des Aurors en arrivant au château, et ils avaient essayé d'aborder Drago immédiatement. Cependant, McGonagall leur avait répondu sèchement, avait attrapé Drago et l'avait carrément traîné jusqu'à son bureau. Elle l'y avait laissé pour de longues et terrifiantes minutes avant de revenir avec des nouvelles de Potter. Il était endormi et Madame Pomfresh avait assuré à tout le monde qu'il s'en sortirait. Primevère souffrait également d'une légère commotion cérébrale, mais cela serait sans conséquences. Drago était soulagé, mais toujours troublé par le comportement de McGonagall . Il ne savait pas pourquoi elle l'avait sauvé des Aurors, mais il était possible qu'elle prévoie juste de l'assassiner elle-même.
Il prit un autre biscuit dans l'assiette. Au moins s'il mourait, il ne mourrait pas affamé.

« Très bien, soupira Mac G onagall. Je vais vous dire que ce je sais. Votre absence n'a pas été remarquée immédiatement, mais une fois qu'elle l'a été, certains étudiants ont eu une réaction plutôt émotive. Pansy Parkinson a affirmé que Théodore Nott avait quelque chose à voir avec votre disparition…

— Est-ce le cas ? demanda Drago avec espoir.

— Il dit que non. Cependant, Miss Parkinson a trouvé la baguette de Harry Potter en sa possession. »

La pièce se mit à tourner tant Drago était soulagé.

« Mais alors… »

Alors, je suis innocent. Drago fixa McGonagall avec incrédulité. Si Nott avait la baguette de Potter, il devait être celui qui l'avait attaqué.

« Est-ce qu'il a attaqué Potter ? Est-ce qu'il a avoué ? »

McGonagall eut une moue désapprobatrice.

« J'ai peur que non. Il nous a dit qu'il vous avez trouvés tous les deux en train de vous battre dans la forêt et que dans le feu de la dispute, vous aviez jeté un maléfice à Potter. Vous avez remarqué la présence de Nott quand Potter s'est effondré et vous avez essayé de lui jeter un sort à lui aussi. Nott affirme qu'il a réussi à vous Stupéfixer. Il dit que votre baguette s'est brisée quand vous êtes tombé et qu'il a pris celle de Potter afin que vous n'ayez pas d'arme si vous vous réveilliez. »

Le doute assaillit à nouveau l'esprit de Drago.

« C'est ridicule, se plaignit-il. Pourquoi est-ce qu'il n'a rien dit à personne ?

— Il dit qu'il a paniqué et qu'il a pensé que tout le monde croirait qu'il était impliqué s'il mentionnait sa présence lors de l'incident. »

Drago secoua la tête, complètement perdu. L'implication de Nott lui donnait de l'espoir. La possibilité que Nott soit responsable du fait que Potter ait failli mourir était plus que ce qu'il avait pu espérer. Cependant, Drago avait écarté Nott de la liste des suspects pour une raison. Il y avait un tas de qualificatifs pour décrire Nott, mais stupide n'en faisait pas partie. Il ne pouvait sûrement pas s'être imaginé qu'il pouvait attaquer Potter et s'en sortir comme ça en accusant Drago du meurtre. Le fait qu'il ait gardé la baguette de Potter prouvait qu'il avait paniqué et agi sur le coup. Il était possible qu'il dise la vérité. S'il était tombé sur Potter et Drago en train de se battre, qu'aurait-il fait ? Il les détestait tous les deux. Ne rien dire de l'incident était à coup sûr quelque chose qu'il ferait ; il n'aurait pas envie d'être impliqué là-dedans. Et Drago pensait savoir pourquoi Nott n'aurait pu résister à la tentation de prendre la baguette de Potter. Une rumeur disait que Potter avait la Baguette de Sureau. Drago en doutait, mais beaucoup pensaient que c'était vrai.

« Mr Malefoy, l'appela McGonagall »

Drago releva la tête vers elle et elle lui fit un petit sourire.

« Je crois qu'il ment.

— Vraiment ? demanda Drago avant de pouvoir s'en empêcher. Mais je ne me rappelle pas ce qui s'est passé. »

Drago se força à fermer la bouche. Qu'est-ce qui n'allait pas chez lui ? Peu importait ce qui c'était passé dans la forêt, si McGonagall ou n'importe qui d'autre avait envie de croire que Nott était coupable, Drago ferait aussi bien de les y encourager. Néanmoins, la culpabilité menaçait de le consumer et Drago lutta pour la repousser.

« En effet. Et c'est pour cela que je ne crois pas un mot de ce que Mr Nott dit.

— Vous ne le croyez pas ? chuchota Drago. Vous me croyez moi? Pourquoi ? »

Les yeux de McGonagall s'adoucirent ; Drago ne lui avait jamais vu un air aussi sympathique.

« Mr Malefoy, vous n'avez rien fait de mal, dit-elle gentiment. »

Et c'en fut trop. Drago avait essayé de pleurer plusieurs fois ce jour-là mais n'y était pas parvenu. Et maintenant voilà que sa vision devenait floue. Il ne savait pas pourquoi McGonagall avait choisi de le croire, mais Drago ne le méritait pas. Il s'essuya les yeux avec rage et lui jeta un regard furieux. Les mots sortirent de sa bouche avant qu'il ne puisse s'en empêcher.

« Vous ne comprenez pas. Nott ne serait pas aussi stupide. Pas à moins qu'il ait réellementpaniqué. Et me battre avec Potter semble être quelque chose que je ferais… Hier, j'ai même envisagé cette possibilité…

— Oui, j'ai entendu parler de l'incident en cours de Défense. Nott m'a régalée de cette histoire. »

McGonagall secoua la tête.

« Je savais que vous laisser parler avec les Aurors serait une très mauvaise idée. Mr Malefoy, vous avez traversé une terrible épreuve. Vous n'arrivez plus à réfléchir correctement.

— Mais je suis peut-être celui qui a…

— Ecoutez-moi. Vous avez fait des choses extraordinaires pour sauver la vie de Mr Potter, et vous avez réussi. Aussi, avant que je continue, je voudrais vous remercier. »

Drago grimaça.

« Je pensais que je l'avais attaqué. Je ne pouvais pas le laisser mourir. Je ne faisais que me protéger… »

McGonagall lui coupa la parole :

« Cependant, vous ne pouviez pas dire à Madame Pomfresh quel maléfice vous aviez utilisé, alors même que, suivant votre propre logique, cela aurait aidé à vous sauver tous les deux.

— Parce que je ne me rappelle

— Et Madame Pomfresh me dit que vous n'avez pas souffert de blessures graves. Votre amnésie reste donc inexpliquée.

— Je ne mens pas, dit aussitôt Drago.

— Non, en effet. Je suis en train d'essayer de vous expliquer pourquoi je vous crois. Vous sembliez assez surpris quand j'ai mentionné Mr Nott, et si vous aviez été moins empressé de vous accuser de ce qui s'est passé dans la forêt, je penserais que vous essayiez seulement de dissimuler la présence d'un témoin. Mais les choses étant ce qu'elles sont, je ne peux qu'en conclure que vous avez reçu un sortilège d'Oubliettes. Et personne ne vous aurait lancé ce sort à moins d'essayer de cacher une vérité gênante. »

Drago y réfléchit avec soin. Il avait dû recevoir un Oubliettes. Mais…

« Nott aurait pu me jeter un Oubliettes pour que personne ne sache qu'il était là au cas où j'essaierais de le rendre responsable. Ça ne veut pas dire… »

Drago se tut en voyant McGonagall se masser les tempes.

« Pourquoi Nott s'inquiéterait-il d'une telle chose quand un simple Priori Incantatem sur votre baguette vous désignerait commecoupable?

— Priori Incantatem ! s'exclama Drago. Vous avez examiné la baguette de Nott ?

— Madame la Directrice ! cria l'un des portraits. Il y a pas mal de gens qui vous attendent dehors. Les Aurors veulent parler à Mr Malefoy. Ils sont plutôt insistants. »

Drago se tendit.

« Encore une minute, répondit-elle au portrait. »

Elle se leva et reprit pour Drago :

« J'ai bien peur que ni la baguette de Nott, ni celle de Mr Potter n'aient été utilisées pour jeter un quelconque Sort de Mémoire. Je suppose que c'est votre baguette qui a servi pour ça. »

Super, pensa Drago. Ça ne l'aidait certainement pas à se sentir moins coupable.

« Et pour cette raison je ne vous laisserai pas parler avec les Aurors jusqu'à ce que Mr Potter se réveille et puisse nous dire exactement ce qui s'est passé.

— Et s'il ne s'en rappelle pas non plus ? Je lui ai demandé, mais il a juste dit que ce n'était pas des loups-garous… »

Drago cligna des yeux. Il se rappelait avoir demandé à Potter s'il pensait que des loups-garous les avaient attaqués et Potter avait dit « Non, not, pas des loups-garous. » Est-ce que Potter avait pu vouloir dire Nott ?
Drago s'autorisa à avoir de l'espoir à nouveau.

« Je crois que Potter a dit quelque chose à propos de Nott, mais il délirait et je n'y ai pas fait attention.

— Trop occupé à vous sentir coupable ? »

Il releva la tête vers McGonagall. Les coins de sa bouche tressaillirent et elle désigna l'assiette sur le bureau.

« Ils ne vont pas se manger tout seul, Mr Malefoy. »

Elle marcha jusqu'à la porte et ajouta par dessus son épaule :

« Attendez ici. »

Dès qu'elle eut disparu, Drago attrapa l'assiette et se jeta sur les biscuits. Il se sentit mieux une fois que l'assiette fut vide, et qu'il eut rejoué dans sa tête la réponse de Potter à propos de qui les avait attaqués. Il avait été si sûr que c'était lui, il était difficile d'accepter la possibilité qu'il soit innocent. Enfin, il n'était pas totalement innocent ; il avait profité de Potter pendant qu'il délirait. La culpabilité refusait de le quitter.

« J'ai eu tort bien souvent dans ma vie, dit l'un des portraits. »

Drago n'avait pas besoin de regarder pour savoir qui c'était.

« Mais je suis heureux de ne pas m'être trompé sur vous, Mr Malefoy. Vous n'êtes pas, et ne serez jamais, un meurtrier. »

A contrecœur, Drago releva la tête vers Dumbledore.

« Il est toujours possible que ce soit moi qui l'ai attaqué, protesta-t-il.

— La gravité du maléfice me dit que ce n'est pas toi. Une personne capable d'une magie aussi noire se serait simplement enfuie, n'aurait jamais mentionné l'incident, et aurait espéré que Harry meure – précisément ce que Mr Nott a fait. L'idée de simplement vous enfuir ne semble pas vous être venue »

Drago le fixa du regard. Il ne savait pas comment il avait fait pour gagner la confiance de Dumbledore et Mac G onagall sans même essayer.
La porte du bureau s'ouvrit et Drago tourna la tête avec appréhension, s'attendant à ce que les Aurors soient venus le chercher. Mais le sorcier qui entra ne ressemblait pas à un Auror. Il portait une cape de voyage vert vif et des bottes montantes. Ses cheveux blond roux étaient longs, mais pas aussi longs que sa barbe. Il sourit agréablement à Drago et leva les mains en un geste apaisant.

« Minnie a dit que je pouvais monter. »

Il sourit en exposant une rangée de dents blanches et Drago le reconnut soudain.

« Mr Borage ! s'exclama Drago en se levant aussitôt.

— Oh, je vous en prie, restez assis. »

Merwyn Borage se hâta de le rejoindre et serra la main de Drago. Il lui fit signe de se rasseoir et Drago lui obéit en silence, ayant du mal à croire que Merwyn Borage, le fameux Maître des Potions, venait d'apparaître ainsi à Poudlard.
Et qu'il avait appelé le Professeur McGonagall « Minnie».

« On m'a dit que vous avez eu une journée plutôt épuisante, reprit Borage. »

Il fit apparaître une chaise et s'assit en face de Drago. Il le fixait de façon trop intense.

« Je sais que vous êtes fatigué, mais il fallait absolument que je vous rencontre. »

Borage lui adressa un sourire affectueux.
Drago se demanda si Potter n'avait pas raison en prétendant que tout ça n'était qu'un rêve bizarroïde. Il était simplement impossible que cette journée ne devienne plus étrange qu'elle ne l'était déjà.

« Heu, pourquoi ? demanda Drago.

— Oh, pardonnez-moi. Vous devez penser que je suis un peu dingue. »

Drago mentit et secoua la tête. Dingue ou pas, c'était Merwyn Borage et il n'avait pas l'intention de l'insulter.

« Oh, et il est plein de tact en plus, à ce que je vois. »

Borage se mit à rire.

« Laissez-moi vous expliquer. J'étais à la maison, me délectant d'un verre de vin et d'une soirée tranquille quand mes alarmes se sont déclenchées, m'informant que quelqu'un avait pénétré dans ma réserve. Ma très secrète réserve, si je puis me permettre.

— La cabane ! s'exclama Drago. C'est la vôtre.

— En effet. Je n'y croyais pas, mais un ami au Ministère m'a appelé pour me dire qu'un étudiant de Poudlard avait trouvé la cabane, s'y était introduit et avait utilisé mes potions pour sauver la vie de Harry Potter. Pas besoin de préciser que j'ai cru que mon pauvre ami était ivre et racontait n'importe quoi, mais je suis néanmoins venu vérifier. Et bien… »

Borage secoua la tête.

« Je suppose que ma cabane secrète n'est plus un secret. »

Drago se recroquevilla.

« Je suis vraiment désolé…

— Non, je vous en prie. Ce n'est pas la peine de vous excuser. La cabane est juste un endroit où j'aime travailler en paix, et la Forêt Interdite est une source d'ingrédients merveilleuse. Très pratique, vous voyez. Oh, mais ça n'a pas d'importance. »

Borage fit un geste de la main pour appuyer ses propos.

« Les potions utilisées pour guérir sont ma passion. Savoir que ma cabane a aidé à sauver une vie est plus que je ne pouvais souhaiter. »

Il pencha la tête de côté.

« Je suis curieux de savoir exactement comment vous l'avez trouvée. Je pensais que ma cachette était terriblement bien faite.

— Elle l'est ! répondit aussitôt Drago. J'ai juste eu de la chance. »

Les sourcils de Borage se soulevèrent.

« Vraiment chanceux, alors.

— Heu… »

Drago hésita. Il y avait une voix dans sa tête qui lui répétait de ne pas parler du Felix Felicis. Il ne pouvait s'empêcher de l'écouter.

« Un Jobarbille a volé à travers la barrière et en est mort, donc je savais qu'il y avait quelque chose. Vous voyez. Un pur coup de chance !

— Je ne crois pas. Ça arrive tout le temps. La barrière supérieure est un piège splendide. Plus d'un oiseau a rencontré là son destin. Je les plume et je cache les corps. »

Borage lui fit un clin d'œil, et puis, comme s'il avait eu peur d'avoir l'air dérangé, il toussa et ajouta :

« J'ai un permis pour cette cabane. »

Drago hocha la tête en silence.

« Maintenant, ce que je voudrais savoir, Mr Malefoy… J'ai eu l'opportunité de parler à l'adorable Madame Pomfresh et d'examiner Mr Potter tout à l'heure…

— Il va bien ? demanda aussitôt Drago.

— Oh oui ! répondit Borage avec un grand sourire. Nous pensons qu'il sera pleinement remis d'ici demain. Lundi, au plus tard. Ce qui, je dois le dire, est assez exceptionnel si on considère qu'il a été frappé d'un maléfice de Videntrailles et n'a pas reçu de soins médicaux immédiats. »

Drago avait arrêté d'écouter.

« Videntrailles, répéta-t-il. »

Cela voulait dire que ça devait être Nott ; c'était une trop grosse coïncidence que Potter ait reçu le même maléfice que celui qui avait tué le père de Nott.

« Mais ce maléfice n'est-il pas virtuellement indétectable ? Surtout après qu'un certain temps se soit écoulé ? »

Borage inclina la tête.

« Vous avez raison. Et normalement, il vide effectivement la personne de ses entrailles, ce qui à l'évidence n'est pas arrivé à Mr Potter. Je suis à peu près certain que le sortilège a été bloqué. Par un Protego, j'imagine. Il n'a pas pu détourner le maléfice complètement, mais ça a certainement aidé. »

Drago fronça les sourcils. Si le sort avait été détourné, alors Potter et Nott avaient dû se battre.

« Les dommages étaient néanmoins importants, poursuivit Borage. Mais les potions que vous lui avez administrées ont non seulement sauvé la vie de Mr Potter, mais ont aussi réparé les dégâts causés. Il ne souffrira d'aucune conséquence. La combinaison de potions que vous lui avez donnée était particulièrement inspirée. Comment donc y avez-vous pensé ? »

Drago le regarda dans les yeux. Ils étaient marrons et brillants. Borage avait vraiment l'air impressionné.

« J'ai eu de la chance, marmonna-t-il. »

Pour l'amour de Dieu ! Borage pensait que Drago était une espèce de génie, mais il ne savait pas pour le Felix Felicis, et Drago ne parvenait pas à se forcer à le dire.

« Tellement modeste ! rit Borage

— Non, vraiment. J'ai juste essayé au hasard. »

Borage secoua son visage barbu, riant toujours.

« Mon cher petit, la chance fait partie du processus en potions. Je vais vous dire où est la chance. La chance c'est de boire un peu trop et de tomber endormi à votre bureau sans remarquer que vos plumes de Jobarbille sont tombées dans votre verre de Whisky Pur-Feu. C'est aussi de la chance si vous êtes trop paresseux pour aller en acheter de nouvelles et que vous les utilisez quand même. Et c'est de la chance de découvrir que ça n'a pas du tout nui à la potion mais au contraire que ça l'a améliorée. »

Borage lui fit un clin d'œil.

« C'est ça, la chance. Mais un coin de votre esprit sait comment les ingrédients réagissent les uns aux autres et au final, vous savez que vous n'avez eu de la chance que parce que vous avez eu le courage de suivre votre intuition.

— Vraiment ? demanda Drago avec espoir.

— Oui ! répondit Borage avant de froncer les sourcils. Enfin, soit ça, soit vous avez bu une bouteille de Felix Felicis et vous avez vraiment eu de la chance. »

Il éclata de rire. Drago regarda ses pieds.

« Ah là là ! fit-il. »

Drago crut qu'il venait de comprendre comment Drago avait eu autant de chance, mais Borage avait juste l'air de se faire du souci.

« Vous êtes fatigué et je vous interroge. Où sont passées mes manières ? Voilà… »

Il plongea la main dans sa poche et en ressortit un petit objet argenté.

« C'est pour vous, dit-il en tendant à Drago une espèce de carte en métal avec le nom et l'adresse de Borage dessus. N'hésitez pas à m'envoyer un hibou, Mr Malefoy, si vous avez envie de discuter potions un de ces jours. Ou des techniques d'effraction pour rentrer quelque part. »

Il rit à nouveau.

« Et… »

Il s'éclaircit la gorge et se tut. Drago releva la tête vers lui. Borage devait avoir attendu d'entrer en contact avec son regard pour continuer.

« N'oubliez pas de me contacter une fois que vous aurez passé vos ASPICs. »

Il lui fit un clin d'œil et se leva. Drago regarda à nouveau la carte avec incrédulité. Apparemment, on venait juste de lui offrir un travail. Et pas n'importe queltravail. Travailler avec Borage, ce n'était pas rien. Drago avala sa salive. Merlin, est-ce que le Felix Felicis fonctionnait toujours ?

Il se leva et serra la main de Borage, se sentant atrocement gêné. Comment pouvait-il le laisser penser qu'il était un génie ? Il finirait bien par se rendre compte que ce n'était pas le cas. Drago ouvrit la bouche, sa confession sur le bout de la langue, mais McGonagall fit irruption dans le bureau à ce moment-là et Borage reporta son regard sur elle. Elle lui sourit avant de s'adresser à Drago.

« Les Aurors ont arrêté Mr Nott. Vous pouvez retourner à votre dortoir. Reposez-vous.

— Est-ce que Nott a avoué ? demanda Drago.

— Non. Il était en possession de la baguette de Harry, cependant, et il a été arrêté pour vol. Les Aurors reviendront pour interroger Mr Potter quand il se réveillera.

— Alors c'est sûr que Potter va s'en sortir ? »

Borage poussa un profond soupir.

« Il ne croit pas un mot de ce que je lui dis.

— Je connais ça, répondit McGonagall en secouant la tête.

— Non, c'est pas ça, répondit aussitôt Drago. C'est juste…

— Il n'a pas foi en ces capacités, termina Borage pour lui. Je lui ai juste dit que son instinct avait sauvé la vie de Mr Potter et il me répète que c'était juste de la chance. Franchement. »

Drago ferma les yeux et baissa la tête. Il avait parlé à McGonagall du Felix Felicis. Apparemment, sa carrière dans les potions était terminée avant même d'avoir commencé.

« Je suis surprise par sa modestie, fut la réponse inattendue de McGonagall. Mr Malefoy a toujours été l'un de nos meilleurs élèves en potions. N'est-il pas vrai, Albus ?

— Tout à fait ! se dépêcha d'acquiescer le portrait de Dumbledore. Je crois que c'est Mr Potter qui a eu de la chance aujourd'hui. »

Drago regardait toujours ses pieds, n'en croyant pas ses oreilles.

« Allez-y, Mr Malefoy, avant que vous ne tombiez endormi dans mon bureau, gronda McGonagall. »

Les jambes de Drago se mirent en branle toutes seules et il marcha jusqu'à la porte. Il jeta un regard furtif à McGonagall et Borage. Ils souriaient tous les deux et Drago marmonna un merci avant de se précipiter hors du bureau.

Une fois qu'il fut seul dans l'escalier en colimaçon, il ferma les yeux et respira un grand coup. Ses méninges travaillaient à toute allure, mais il ne parvenait pas à former une seule pensée cohérente. Il avait hâte que la journée soit terminée.
Il prit le chemin de son dortoir, les mains dans les poches. Au lieu de penser à quelque chose de productif, il pensa à Potter. Il se demandait si McGonagall serait aussi gentille si elle savait ce qu'il avait fait avec le Héros du Monde Sorcier dans la cabane. Une fois que Potter serait réveillé, qui sait ce dont il se rappellerait et ce qu'il dirait ?

Une pensée idiote lui traversa l'esprit. Si Nott était coupable et que Drago était innocent, peut-être que Potter aurait toujours envie de lui. Ou peut-être qu'il le haïrait quand même parce que Drago l'avait violé.

Drago était sûr d'une chose. Demain, Felix Felicis aurait définitivement cessé d'agir et alors, il serait tout seul.

Ses doigts heurtèrent les lunettes de Potter dans sa poche. Machinalement, il décida de les garder.

Ce dimanche n'était pas une bonne journée. Drago n'avait pas bien dormi et quand il s'était finalement traîné dans la salle commune, il y avait été assailli de questions. Il y avait un temps où Drago aurait pris plaisir à toute cette attention, mais maintenant il n'avait envie de parler à personne. Après avoir donné une version abrégée des évènements (« On s'est fait attaquer, on s'est perdu, on nous a retrouvé et maintenant foutez-moi la paix, bordel ! ») il avait fui dans son dortoir et décidé d'y rester caché. Pansy avait subtilisé un peu de nourriture pour lui mais en échange elle avait voulu son récit complet. Drago se dit qu'il lui devait sans doute quelque chose pour avoir découvert l'implication de Nott alors il lui donna quelques détails. Elle déplora le fait que le Felix Felicis ait été gâché pour sauver la vie de Potter et Drago lui en voulut pour cela. Bien sûr, il ne lui avait pas raconté ce qui s'était passé dans la cabane et avait vite changé de sujet pour se vanter de l'offre d'emploi qu'on lui avait faite de manière inattendue. Malheureusement Pansy, qui n'avait pas la moindre idée de qui était Merwyn Borage en dépit du nombre de fois où Drago l'avait mentionné, ne fut pas impressionnée.

Drago avait écrit à ses parents et leur avait donné la même version des évènements que celle qu'il avait donnée à ses camarades de classe (sans le « foutez-moi la paix, bordel, » toutefois). Il ne voulait pas donner trop de détails à ses parents avant d'être sûr qu'il était innocent. Personne n'était venu l'arrêter et personne n'était venu lui dire ce qui se passait, mais Blaise avait dit qu'il avait entendu Granger dire à Londubat que Potter était toujours endormi à l'infirmerie.

Lundi commença beaucoup mieux. Drago n'avait pas cours le matin, aussi fit-il la grasse matinée, ce qui était une bonne chose puisqu'il n'avait presque pas dormi de la nuit. Il ne pouvait pas s'arrêter de rêver de Potter. Dans ses rêves, Potter se tenait devant lui, avec un grand sourire et de l'affection dans les yeux, et Drago le regardait sans savoir s'il devait lui jeter un sort ou l'embrasser. A chaque fois, il se réveillait, trempé de sueur, sans avoir pris de décision.

Drago venait juste de sortir de sa douche et d'enfiler un caleçon quand Pansy fit irruption dans le dortoir.

« Tu es habillé ? demanda-t-elle innocemment en voyant que ce n'était pas le cas.

— Pas vraiment, non, grommela Drago. »

Il enfila un pantalon et une chemise. Pansy le regarda s'habiller avec intérêt et ne sortit de son hébètement que quand Drago se racla la gorge. Elle sursauta.

« Oh ! Tu ne devineras jamais ce qui s'est passé.

— Je ne vais pas essayer alors. »

Drago rassembla ses livres et son parchemin pour les cours, faisant exprès d'ignorer Pansy. Il savait que ça la ferait parler plus vite. Effectivement, elle craqua vite.

« Oh, très bien, je vais te le dire. Les Aurors sont venus pendant le petit-déjeuner et… »

Drago laissa tomber le livre qu'il tenait et se tourna vivement vers Pansy. Il s'attendait à moitié à ce que les Aurors fassent irruption dans le dortoir.

« …ils ont arrêté Derwent Harper ! »

Drago fronça les sourcils.

« Pour quoi ? Stupidité ? C'est un crime de nos jours ?

— Apparemment ! s'exclama Pansy. Daphné a entendu une partie de sa conversation avec les Aurors. Remarque, on l'a tous entendu glapir qu'il était innocent. Il essayait de les convaincre qu'il n'avait pas la moindre idée de ce que Nott complotait, mais Daphné dit qu'ils ne l'ont pas cru.

— Ils pensent qu'il est impliqué ? »

Harper était le partenaire de Nott pour la chasse aux plumes, mais Drago ne pouvait pas voir pourquoi Harper aurait voulu faire du mal à lui ou Potter.

« A l'évidence. Ils l'ont arrêté et l'ont emmené.

— Ils sont partis ? »

Drago trouvait dur de croire que les Aurors n'aient pas au moins voulu lui parler. Pansy hocha la tête.

« Harper était hystérique. C'était un sacré spectacle. Tu as manqué quelque chose. »

Ses genoux cédant sous lui, Drago se laissa tomber sur le lit.

« Qu'est-ce que j'ai bien pu faire à Harper ?

— Et bien, la sœur de Daphné – elle s'entend bien avec Harper – a dit qu'il s'était vanté d'avoir commandé un nouveau balai de course, alors même qu'il s'était plaint d'être fauché seulement quelques jours auparavant. »

Pansy lui lança un regard entendu.

« Tu penses que Nott l'a payé pour l'aider ? demanda Drago avec incrédulité. Mais Nott est pauvre.

— Oh, ne sois pas stupide, Drago. Harper est un idiot. Je ne pense pas que Nott l'ait payé en avance. Il n'avait probablement pas prévu de lui donner une Mornille. Peut-être qu'il pensait aussi lancer un Oubliettes à ce pauvre crétin. »

Drago joua avec l'attache de son sac. Harper était un idiot, mais pas Nott. Et c'était une chose de plus sur laquelle il s'était planté. Il aurait dû jeter un Oubliettes à Harper. Qu'est-ce que c'était que ce plan à moitié pas fini qu'il avait concocté ? Et il avaiteu un plan en avance puisqu'il s'était assuré de l'appui de Derwent Harper. Qu'est-ce qui s'était donc passé dans la forêt. On aurait dit que Nott s'était enfui, fou de terreur, aussi vite qu'il le pouvait.

« Est-ce que Nott a avoué ? demanda-t-il. »

Pansy renifla avec mépris.

« J'en doute. »

Drago lui lança un regard aigu.

« Mais alors ça veut dire que Potter est réveillé ? Pourquoi tu me l'as pas dit ? Je t'ai dit de me prévenir dès que tu entendais quelque...

— Mais Drago, protesta-t-elle. Je pensais que tu voulais juste savoir ce qui s'était passé. Et maintenant tu sais. Qu'est-ce qu'on s'en fiche que Potter soit réveillé ou non ? Il a tout raconté aux Aurors et à l'évidence, tu n'étais pas impliqué. »

Drago l'écoutait à peine.

« Je veux que Potter me dise exactement ce qui s'est passé, dit-il en tirant sur sa robe. »

Il fallait qu'il aille voir Potter et lui parle. Il avait besoin que Potter lui dise tout ce dont il se souvenait.

« Drago, on a Métamorphose, maintenant…

— J'ai pas ma baguette, de toute façon, si ? la coupa Drago. »

Il attrapa son sac et se dirigea vers la porte.

« Attends. Je pense que si. »

Pansy se dépêcha de sortir quelque chose de son sac.

« Ce paquet est arrivé pour toi. Ça vient de ta mère. »

Drago le lui arracha des mains et parcourut rapidement le petit mot qui y était joint. Sa mère lui avait envoyé sa baguette en lui promettant qu'ils lui en achèteraient une nouvelle pendant les vacances de Noël. Elle posait plein de questions et s'inquiétait visiblement. Drago fourra le mot dans sa poche, préférant s'en occuper plus tard.

Un regard à Pansy l'informa qu'il l'avait blessée. Avec un soupir, il marcha jusqu'à elle et lui donna un coup de coude dans les côtes. Elle grimaça et lui jeta un regard mauvais mais arrêta de faire la tête quand il lui sourit et dit :

« Merci, Pansy. »

Et alors qu'il se précipitait hors de la chambre, elle hurla dans son sillage :

« Tu es complètement malade ! »

Drago se précipita vers l'infirmerie ; Potter était la seule chose qu'il avait à l'esprit. Plusieurs étudiants l'appelèrent quand il traversa la salle commune puis les couloirs, mais Drago les ignora tous. Il était déjà devant l'infirmerie quand son courage l'abandonna.

Il réalisa soudainement qu'il était possible que Potter se rappelle tropde choses. Si Potter avait compris que son rêve n'était pas un rêve, Drago était probablement la dernière personne qu'il avait envie de voir.

Il regarda les portes fermées avec regret. Il ne savait pas combien de temps il était resté là, à les fixer, mais il avait déjà décidé de partir quand elles s'ouvrirent d'un coup. De façon irrationnelle, il s'attendit à voir apparaître Potter, mais bien sûr, ce n'était pas lui. C'étaient Granger et Weasley.

Ils le repérèrent immédiatement. Weasley se figea et Granger s'écria :

« Malefoy ! »

Elle le regardait comme si c'était la première fois de sa vie qu'elle le voyait. Drago fit un vague signe de tête qu'on aurait pu interpréter comme un salut.

« Est-ce que… ? »

Granger regarda Weasley comme pour lui demander de l'aide. Weasley se contentait de regarder Drago avec des yeux écarquillés.

« Heu, tu es là pour voir Harry ? finit par demander Granger. »

Elle bougea un peu sur le côté, comme pour le laisser passer.

« Hum, fut tout ce que Drago parvint à répondre. »

Il voulait voir Potter plus que tout, mais il semblait plus raisonnable de s'en aller.

« Il a sûrement envie de te voir, dit soudainement Weasley. »

On aurait dit qu'il avait du mal à croire à ses propres mots. Drago haussa les épaules.

« Je passais juste par là. Je vais en Métamorphose.

— Oh. »

Granger fit une petite moue et ajouta :

« On a Métamorphose aussi. »

Drago soupira intérieurement. Il avait une envie folle de dire :

« Beau temps, n'est-ce pas ? »

Sérieusement, pourquoi se retrouvait-il à avoir une conversation absurde avec Granger et Weasley ?

« Harry restera là toute la journée. Si tu veux passer plus tard. »

Elle essayait à l'évidence de faire passer ça pour une simple suggestion, mais échoua lamentablement. Drago avait l'impression qu'elle venait de lui donner un ordre. Cela lui donnait envie de faire juste le contraire. Il laissa échapper un son évasif et se retourna, pressé de partir. Granger et Weasley se mirent à marcher avec lui.

« Tu sais, Malefoy, commença Granger avec hésitation. Harry nous a dit ce qui s'était passé dans la forêt et je voulais juste te dire que je trouve ce que tu as fait vraiment formi…

— J'ai oublié ma plume ! s'exclama Drago en faisant vivement demi-tour.

— La salle commune des Serpentard est par là ! cria Weasley comme Drago s'enfuyait dans la mauvaise direction. »

Drago ne fit que se mettre à courir plus vite. L'expression de Granger lui rappelait McGonagall et il soupçonnait qu'elle avait l'intention de chanter ses louanges et de le remercier d'avoir sauvé Potter. Il n'avait pas envie d'entendre ça. Tout ce qu'il avait fait, il l'avait fait pour sauver sa peau. Personne ne lui devait quoi que ce soit. Il voulait juste qu'on le laisse tranquille.

Cependant, ça ne risquait pas d'arriver. Ça empira au cours de la journée. Les autres élèves le regardaient avec insistance et venaient lui parler pour essayer de lui soutirer des infos. Drago les ignora et finalement ils abandonnèrent et essayèrent d'interroger Weasley et Granger qui parlaient bien plus facilement que Drago, même si eux aussi commençaient à perdre patience.

Drago s'était retrouvé plusieurs fois devant la porte de l'infirmerie mais il n'arrivait pas à rassembler le courage nécessaire pour entrer. A en juger par le comportement de Granger et Weasley, Potter n'avait rien dit de gênant, mais ça ne voulait pas dire que Potter n'essaierait pas de lui poser des questions sur ce qui s'était passé dans la cabane, et Drago n'avait pas envie d'en parler.

L'occasion de parler avec Potter se présenta mardi soir. Drago avait fini de manger et était parvenu à sortir de la Grande Salle sans qu'on le remarque. Mais soudain, sorti de nulle part, Potter l'appela. Ne s'attendant pas à le voir sorti si tôt, Drago paniqua et se précipita dans un couloir désert.

« Malefoy, attends ! J'ai quelque chose pour toi ! cria Potter alors que Drago avait presque atteint la fin du couloir et se rapprochait des cachots »

Ne pouvant résister à sa curiosité, il s'arrêta et se retourna . Potter courait vers lui et Drago faillit craquer et engueuler cet idiot. A quoi est-ce qu'il pensait ? Courir comme ça alors qu'il avait failli mourir à cause d'un dangereux maléfice.

« C'est pas facile de te trouver, l'accusa Potter quand il l'eut rejoint. »

Il était légèrement hors d'haleine. Drago parcourut ses traits du regard. Ses joues étaient colorées et ses yeux étaient brillants et clairs. Il semblait en parfaite santé. Il portait de nouvelles lunettes avec une monture fine. Ça lui allait bien. Il avait l'air distingué et non pas abruti. Drago se sentit moins mal d'avoir gardé ses vieilles lunettes, bien qu'il ne sache toujours pas pourquoi il avait fait une chose pareille. Il les avait réparées et avait passé un long moment à les contempler dans son lit, la veille.
Potter lui sourit.

« Tu as besoin de quelque chose ? demanda sèchement Drago. »

Le sourire de Potter vacilla, mais presqu'aussitôt il pencha la tête et plongea la main dans sa poche. La seconde suivante, il pointait une baguette sur Drago.
L'espace d'une seconde, Drago fut certain que Potter allait lui jeter un mauvais sort. Mais lorsqu'il baissa les yeux, il réalisa que la baguette n'appartenait pas à Potter. Drago la regarda avec stupéfaction avant de lentement tendre la main pour la saisir. La tiédeur du bois contre sa paume était familière.

« C'est impossible, murmura-t-il, complètement fasciné.

— Les Aurors l'ont trouvée dans la cabane. Je leur ai demandé de me l'apporter. »

Drago secoua la tête et arracha ses yeux de la baguette en parfait état pour regarder Potter qui rayonnait littéralement.

« Elle était détruite, dit-il. Elle était cassée et à moitié brûlée. »

C'était impossible, et pourtant c'était bien la baguette de Drago. Il l'aurait reconnue n'importe où.

« Et bien… sourit Potter. Je l'ai faite réparer.

— C'était impossible à réparer. »

Potter haussa les épaules.

« Et pourtant la voila. »

Drago le regarda droit dans les yeux.

« Tu comptes me dire comment tu as réussi ça ?

— Non, répondit Potter fermement avant de se mordre la lèvre. C'était le moins que je puisse faire, après tout ce que tu as fait pour moi. »

Drago eut envie de rentrer sous terre. Toutes ses louanges le mettaient mal à l'aise. Le regard de Potter était chaleureux ; cette émotion que Drago y avait vue dans la cabane n'avait pas disparu. Il détourna rapidement les yeux.

« Tout ce que j'ai fait, je l'ai fait pour moi, et pour la plupart, ce n'était que de la pure chance, dit-il d'un ton brusque. »

Il releva la tête vers Potter à temps pour voir les yeux verts s'assombrir. Pour tout dire, Potter avait l'air déçu. Drago détourna à nouveau le regard.

« Alors tu te rappelles de tout ce qui s'est passé ? demanda-t-il. »

Il avait parlé un peu trop doucement mais Potter l'entendit quand même.

« Oh oui ! répondit Potter, avant de se taire. »

Drago lui jeta un regard mauvais.

« Et ben ? Tu me racontes ? »

Potter fourra ses mains dans ses poches, l'air un peu amusé.

« Je suis surpris que tu n'aies pas essayé de me mettre la main dessus pour m'interroger dès que je me suis réveillé. McGonagall m'a dit que tu étais certainque tu m'avais attaqué. »

La voix de Potter laissait entendre qu'il pensait que c'était là une idée ridicule.

« Bon, ce n'est pas moi qu'on a arrêté donc je me suis dit que ça ne devait pas être moi. »

Drago fit appel à toute sa patience et attendit en regardant Potter.

« Très bien. »

Potter hocha la tête avec un brin de résignation. Il prit une grande inspiration et commença son récit. Celui-ci manquait méchamment de détails.

« On s'est disputé, j'ai dit certaines choses et tu m'as mis un coup de poing…

— J'ai fait ça ? Qu'est-ce que tu as dit ? demanda Drago, pas satisfait du tout par le début de l'histoire. »

Potter eut un sourire penaud.

« Rien d'important. Je suis heureux que tu ne t'en rappelles pas. Bref, se hâta-t-il de poursuivre en voyant que Drago ouvrait la bouche pour demander des détails sur la raison de la dispute. On ne faisait pas attention et Nott et Harper nous ont attaqués et désarmés – avec bien trop de facilité, si je peux donner mon avis »

Potter eut un petit soupir.

« Ils nous ont emmenés dans la forêt, loin de tous les autres. C'était un long trajet et Nott n'a pas arrêté de parler tout du long. De Voldemort, et comment toi et ta famille étaient des traîtres, de la mort de son père et de la folie de sa mère. Il était fou de rage.

— Je ne sais pas pourquoi, dit Drago avec humeur. Sa colère est complètement injustifiée.

— Oh, non. Sa colère est complètement justifiée. »

Drago releva vivement la tête vers lui.

« Simplement mal dirigée, ajouta Potter d'une voix douce. Je ne sais pas qu'est-ce que tu sais exactement, mais apparemment quand ton père et Nott ont été sortis d'Azkaban, Voldemort était toujours furieux après eux pour avoir perdu la prophétie au Département des Mystères. Et à peu près à la même période, tu avais échoué dans ta mission pour tuer Dumbledore. »

Drago regarda ses pieds.

« Voldemort les a torturés tous les deux. Et dans sa rage, il a tué Nott pour montrer à ton père ce qui lui arriverait s'il le décevait à nouveau. La mort de Nott était inutile. C'était juste pour donner une leçon à ton père.

— Ce n'est pas la faute de mon père, dit doucement Drago. Il avait juste plus de Gallions et plus de connexions. L'allégeance de Nott était beaucoup moins importante pour le Seigneur des Ténèbres. Ou pas importante du tout.

— Bien sûr, je me rends compte de ça. Et je suis heureux que tu saches qui est le coupable. Nott ne reproche rien à Voldemort. Sa mère a perdu l'esprit en voyant son mari agoniser, mais elle et son fils en veulent à ton père, et pas à Voldemort. Et Nott te déteste toi aussi. Il dit que si on lui avait donné ta mission, il n'aurait pas échoué »

Drago souffla légèrement.

« J'aime à penser qu'il a raison, murmura Potter. »

Drago continua à fixer ses pieds.

« Ça dépend de ta définition de l'échec, laissa-il échapper.

— Absolument. »

Potter hésita.

« Je connais ma définition ; je ne connais pas la tienne. »

Saleté de Potter. Voilà que maintenant, c'était lui qui interrogeait Drago.

« Je suis content que les choses aient tourné comme elles l'ont fait, avoua-t-il en regardant ses pieds. »

Il releva la tête pour ajouter :

« Je veux dire, je ne suis pas content que Nott ait eu une mort aussi affreuse et que sa femme soit devenue folle, mais… »

Il haussa les épaules, suppliant intérieurement Potter de laisser tomber le sujet. Heureusement, c'est ce qu'il fit, et il reprit :

« Finalement, ils nous ont dit de nous arrêter et alors… Nott m'a jeté le maléfice. Et ensuite, je suppose qu'il t'a jeté un Oubliettes et a arrangé la scène pour faire croire que tu m'avais attaqué. »

Drago fronça les sourcils, pas satisfait. Quel genre d'histoire était-ce là ? Blablabla et ensuite, Nott m'a jeté un maléfice.Franchement.
Drago étudia le visage de Potter avec attention.

« Alors, Nott déteste mon père plus que tout ? »

Potter hocha la tête.

« Et donc son plan était de… ?

— Et bien, d'envoyer son fils unique à Azkaban ? »

Drago pencha la tête de côté.

« Est-ce que Nott n'a pas expliqué son plan pendant son petit discours ?

— Et bien, si. »

Potter se gratta la tête.

« Si, c'était ça son plan. De te faire porter le chapeau pour mon meurtre.

— C'est un plan… tordu. Et avec peu de chances de succès. Et tu n'étais pas mort. Pourquoi n'a-t-il pas relancé le maléfice ? »

Potter haussa les épaules.

« Nott est probablement un peu fou aussi, j'imagine. »

Drago plissa les paupières. Les joues de Potter étaient un peu plus rouges qu'auparavant. Etait-il possible qu'il lui cache quelque chose ? Mais quoi ? Et pourquoi ?

« Merwyn Borage m'a dit que le maléfice avait été détourné, se rappela-t-il. Je pense qu'il y a eu un duel entre toi et Nott.

— Borage a dit ça ? Je suppose qu'il se trompe.

— Il ne se trompe pas.

— Si, il doit se tromper, insista Potter. On était tous les deux désarmés. Le maléfice a dû mal fonctionner. »

Potter leva le menton, l'air têtu.

« Mais… commença Drago. »

Potter le coupa :

« Oh, je viens de me rappeler qu'il faut que j'y aille. Il faut que je révise. Je suis un peu en retard. J'ai manqué pas mal de cours. »

Potter se hâta de reculer.

« Attends ! s'écria Drago. Tu es sûr que c'est tout ? Il n'y a rien que tu ne me dis pas ? »

Potter hésita pour une seconde et ouvrit la bouche avant de changer d'avis. Il se contenta de sourire.

« Malefoy, tu n'as rien fait de mal, je te le promets. Tu devrais te détendre et arrêter de t'inquiéter autant. »

Potter semblait franc et Drago se détendit un peu.

« Tu te rappelles ce qui s'est passé après que tu aies reçu le maléfice ?

« Je me rappelle que j'avais froid, et ensuite j'ai eu chaud. Je me rappelle que j'avais mal, et ensuite ça allait mieux. Je ne sais pas… McGonagall m'a dit tout ce que tu lui as dit, donc j'ai sûrement l'impression de me rappeler plus de choses que ce je me rappelle pour de vrai. Certaines des choses qu'elle m'a dites semblent familières. Tout est un peu confus, cela dit. Certaines choses… »

Potter le scruta du regard avec attention. Drago se força à prendre une mine détendue, et finalement, Potter lui fit un petit sourire, même s'il avait l'air un peu triste.

« Très bien alors, dit Drago un peu rudement. »

Il était pressé d'échapper à la vue de Potter. Si celui-ci se rappelait quoi que ce soit concernant les baisers, les caresses, et le fait qu'ils aient presque couché ensemble, il devait penser que c'était un rêve. Et Drago avait l'intention qu'il continue à le penser.
Potter hocha la tête avec hésitation, mais soudain ses yeux s'écarquillèrent.

« Oh, j'ai failli oublier ! »

Il sourit.

« Slughorn l'annoncera demain en cours de Potions, mais il me l'a déjà dit – on a gagné la chasse aux plumes. »

Pris de court, Drago grimaça.

« Heu, comment ?

— Primevère a trouvé un Jobarbille mort à côté de la cabane et elle m'en a apporté les plumes. »

Drago cligna des yeux avec incrédulité.

« Elle a plumé un oiseau mort pour toi ? »

Potter se mit à rire, les yeux pétillant.

« C'était un moment très émouvant.

— J'en suis sûr. »

Drago sourit un peu ; le rire de Potter était contagieux.

« On se verra en cours, dit Potter, en marchant lentement à reculons.

Drago souriait toujours.

« Merci ! Pour la baguette.

— Merci à toi, rétorqua Potter. »

Il lui lança un drôle de regard furtif, chargé d'émotion. Drago arrêta de sourire, et Potter se dépêcha de se retourner et de s'en aller.
Drago fixa le point où il avait disparu pendant un long moment. Il avait l'impression que quelque chose d'important venait juste de lui glisser entre les doigts.

Dès que Harry Potter revint en cours, l'histoire de leur aventure en forêt se répandit dans l'école comme une traînée de poudre. Comme toujours avec ce genre d'histoires, elle devenait plus ridicule de jour en jour. D'après la dernière version que Drago avait entendue, il avait porté Potter à travers toute la forêt, avait trouvé la cabane en faisant de la magie sans baguette, avait fait du feu en frottant deux pierres l'une contre l'autre, et avait soigné Potter en faisant apparaître Merlin pour l'aider. Il avait entendu un élève de deuxième année essayer de convaincre son ami éberlué que Drago avait carrément construitla cabane de ses mains avant qu'ils s'y abritent.

Les autres élèves passaient leur temps à le fixer, et on venait souvent lui parler pour avoir des détails ou qu'il confirme les rumeurs. De nombreux Gryffondor le félicitèrent et le remercièrent d'avoir sauvé la vie d'Harry Potter, une fille de Serdaigle lui envoya une corbeille de fruits, et quelques Pouffsouffle de cinquième année l'embûchèrent dans un couloir et l'entourèrent pour lui chanter une chanson qu'ils avaient composée à propos de son aventure. Drago soupçonnait que Blaise avait demandé aux Pouffsouffle de le faire car il était la seule personne assez stupide pour penser à quelque chose d'aussi humiliant.

Les professeurs étaient encore pires. Flitwick lui donnait une Chocogrenouille à chaque fois qu'il agitait sa baguette et Pomona Chourave lui fit cadeau d'une paire de cache-oreilles rose. (« Ils appartenaient à mon arrière-grand-mère ! Elle les a portés jusqu'à sa mort ! »). Slughorn l'avait serré dans ses bras – de manière tout à fait inappropriée – quand il lui avait donné le flacon de Potion de Mémoire ; Drago avait toujours vaguement envie de vomir en se remémorant l'incident. Même Primevère était polie avec lui, bien qu'elle lui jetât des regards mauvais quand elle pensait que personne ne la voyait. Drago soupçonnait qu'elle était en colère à cause de la pierre et peut-être aussi jalouse qu'il ait eu Potter nu pour lui tout seul pendant des heures. Et en plus de tout ça, McGonagall fit une annonce publique durant le repas du soir ce samedi. Elle le félicita, le remercia, déclara devant toute l'école qu'il était un héros et accorda quatre-vingt points à Serpentard pour son courage et sa capacité à réfléchir vite, et vingt de plus à Pansy pour avoir mis à jour l'implication de Théodore Nott.

Les Serpentard qui, jusque-là, n'avaient pas succombé à la flagornerie (certains lui en voulaient franchement pour avoir sauvéPotter) rejoignirent rapidement son fan-club après avoir réalisé que ces cent points signifiaient qu'ils avaient à nouveau leur chance pour la Coupe des Quatre Maisons.

Pansy le força à se lever et à faire une révérence avec elle quand McGonagall commença à applaudir et que le reste de l'école l'imita. Les autres Maisons n'avaient même pas l'air mécontentes que Serpentard ait gagné autant de points. Tout le monde lui souriait et un groupe de filles de Serdaigle souffla des baisers dans sa direction.
Drago chercha des yeux un Gryffondor aux cheveux ébouriffés au milieu de la foule. Potter riait et quand il s'avisa du regard noir de Drago, il ne fit que rire plus fort.

« Est-ce que c'est pas génial, ça ? chuchota Pansy, extatique.

— Ouais, c'est ça, génial ! répondit Drago avec colère. »

Mais Pansy ne sembla pas l'entendre.
Presque toute l'école le regardait avec de grands yeux admiratifs, et Drago détesta chaque seconde de ce moment.
Il avait tout ce qu'il avait toujours voulu, et plus encore. Il avait le respect des gens qui l'entouraient, élèves comme professeurs. Les ASPICs ne semblaient plus si terribles maintenant. L'histoire se répandait vite, même les examinateurs en auraient entendu parler d'ici là. Ils le traiteraient équitablement, voire même avec plus d'indulgence que nécessaire. Et de toute façon, Drago n'avait plus besoin d'obtenir un score parfait. Il avait d'ores et déjà une proposition d'emploi mirifique ; Merwyn Borage lui avait écrit pour le confirmer. Il semblait réellement inquiet que Drago choisisse une autre carrière.

Il avait sauvé la réputation de sa famille. Son père lui avait écrit pour lui dire à quel point il était fier qu'il y soit parvenu d'une si ingénieuse manière. Drago soupçonnait qu'il pensait qu'il avait planifié toute l'affaire.

Et Drago ne méritait rien de tout ça. Il n'aurait pas été capable de faire tout ça sans le Felix Felicis, mais personne ne tenait compte de cette partie de l'histoire. Ni Pansy ni McGonagall n'avaient partagé cette information. Drago supposait que Potter savait, lui aussi ; McGonagall ne lui aurait pas menti, mais à l'évidence il n'en avait parlé à personne. C'était comme s'ils avaient tous comploté pour faire passer Drago pour ce qu'il n'était pas. Drago n'avait pas parlé à ses parents de la Potion de Chance. Ils avaient correspondu avec Borage qui leur avait dit que Drago était un pur génie. Drago ne parvenait pas à leur dire que Borage se trompait. Ils avaient semblé si fiers.

Et en plus de tout ça, il avait autre chose qu'il ne méritait pas : l'affection de Potter. Il pouvait la voir clairement dans les yeux verts, chaque fois que Potter le regardait, et Potter le regardait énormément même si, heureusement, il gardait ses distances.
Drago n'avait pas la moindre idée de comment il avait gagné cette affection improbable à la base, mais il savait qu'il aurait dû la perdre après avoir cédé à ses désirs et pris ce qu'il pouvait d'un Potter en proie à la fièvre.

Son sentiment de nullité atteignit son apogée une semaine après les faits, le jour même où McGonagall fit son éloge devant toute l'école et où ceux qui avaient douté de son héroïsme furent enfin convaincus. Ce fut la lettre de Merwyn Borage qui porta le coup final à sa confiance vacillante. Aussi charmante qu'ait été la lettre en elle-même, Borage y avait également joint ses recherches sur les Potions de Mémoire, disant que Drago pourrait trouver cela intéressant. Et il avait raison.

Borage n'avait pas essayé d'améliorer les Potions de Mémoire pour aider les étudiants à tricher à leurs examens. Il espérait qu'un jour il parviendrait à augmenter la mémoire suffisamment avec la potion pour permettre de restaurer les souvenirs des gens qui les avaient perdus irrémédiablement. C'était un but admirable. Il restait encore beaucoup de progrès à faire mais la nouvelle formule pour la Potion de Mémoire pouvait d'ores et déjà contrer les effets d'un simple Sortilège de Mémoire. Borage lui avait donné des instructions détaillées sur la façon dont s'y prendre pour retrouver ses souvenirs, tout en le prévenant qu'il pourrait rester des points noirs.

Drago n'était pas certain de vouloir savoir exactement ce qui s'était passé dans la forêt et ce que Potter lui cachait, mais la tentation était trop forte.
Il le fit dans son lit, au milieu de la nuit, quand tous les autres furent endormis. Il suivi avec application les instructions de Borage : il but d'abord une Potion Calmante, fit de l'Occlumencie et seulement une fois que son esprit fut suffisamment vidé il but le flacon de Potion de Mémoire que Slughorn lui avait donné. Borage avait dit que Drago devrait se concentrer sur quelque chose de spécifique qui stimulerait sa mémoire et il avait trouvé le truc parfait pour ça. Il extirpa les vieilles lunettes d'Harry Potter de sous son oreiller, et se mit à les contempler, ordonnant à son esprit de se souvenir.
Cela fonctionna, dans une certaine mesure, mais voir ce qui s'était passé ne le fit pas se sentir mieux, plutôt le contraire.

Les souvenirs étaient flous et incomplets, mais il se rappelait maintenant pourquoi il avait donné un coup de poing à Potter. Ils se disputaient, ou plutôt, Drago se disputait et Potter flirtait. Quand Potter avait essayé de l'embrasser, Drago lui avait mis son poing dans la mâchoire. Il se rappelait l'émotion qui l'avait fait réagir de cette façon : la panique. Une panique dévastatrice.

Mais il se doutait déjà plus ou moins qu'il s'était passé quelque chose de ce genre-là. Même si cela voulait dire que sa réaction avait aidé Nott et Harper à les surprendre et les désarmer, ce n'était pas cet incident qui le perturbait. Ce qui s'était passé après était bien plus troublant.

Drago se rappelait le visage de Nott, tordu dans une grimace de rage. Il avait pointé sa baguette vers Drago et avait eu un rictus moqueur, de la haine à l'état pur dans les yeux.

« J'aimerais pouvoir voir le visage de ton père quand ils te trouveront dans la forêt, avec tes boyaux au-dehors. A l'évidence, tu auras été attaqué par une bête sauvage. Une horrible et inévitable tragédie. Je doute qui quiconque se donne la peine de faire une enquête. Ils seront trop soulagés que Potter ait survécu, même s'il sera un peu perturbé, notre pauvre héros, après que je lui aurai lancé mon Oubliettes. »

Drago se rappelait les grands yeux choqués de Harper, et l'expression surexcitée de Nott, et puis un sortilège gris avait volé vers lui. Il se rappelait sa peur, et le vent froid sur son visage tandis que le sort semblait mettre une éternité à arriver. Il se rappelait avoir pensé à sa mère, qui serait anéantie lorsqu'on lui dirait que Drago ne rentrerait pas.

Le sort ne l'atteignit jamais. Potter, ce stupide, intrépide, et dépourvu de baguette, Potter, avec ses grands yeux verts emplis de terreur hurla « Protego » et se jeta devant le sort.
Une partie du sortilège rebondit sur le bouclier, manquant frapper un Nott éberlué qui sauta sur le côté à la dernière seconde. Potter vola en arrière. Son épaule percuta celle de Drago, et ses lunettes glissèrent au sol tandis qu'il tombait, entraînant Drago avec lui. Drago se rappelait la peine qui avait explosé dans sa tempe au moment où il avait heurté le sol. Il était tombé sur le côté, avec le bras de Potter qui le tenait de façon protectrice.

Le souvenir devint flou, et tout ce que Drago pouvait se rappeler était la douleur et le choc. Potter avait pris le sort pour lui, et le résultat était qu'il était étendu au sol, immobile, comme s'il était mort. Drago avait été certain que Potter était mort.

Nott, bien que clairement terrifié, avait essayé de jeter un nouveau sort à Drago. Incapable de se lever, celui-ci avait juste entouré Potter de ses bras dans un geste inutile, stupide, et avait attendu son inévitable mort. Mais un bouclier brillant était apparu devant lui, plus fort que jamais, et avait bloqué le sort complètement. Nott avait à peine eu le temps de l'éviter à nouveau. Derwent Harper s'était enfui en courant.
La dernière chose dont se rappelait Drago était la voix apeurée de Nott criant « Oubliettes ! » et ensuite, Potter avait été arraché à ses bras et tout était devenu noir.

Potter ne réalisait probablement même pas ce qu'il avait fait. Il ne savait pas que son Protego sans baguette marcherait, mais Drago l'avait vu faire de la magie sans baguette dans la cabane. Tout ce qu'il essayait de cacher était le fait qu'il avait pris le sortilège à la place de Drago.

Mais il avait fait tellement plus. Drago se rappelait son discours après qu'il ait vaincu le Seigneur des Ténèbres. Il se rappelait la partie bizarre où Potter avait parlé du pouvoir du sacrifice et de la seule forme de magie assez forte pour contrer un sort de magie noire. Drago avait traité son radotage avec dédain à l'époque, mais cela ne semblait plus du tout aussi ridicule maintenant. Le bouclier qui avait protégé Drago après que Potter ait eu reçu le sort n'était pas un simple sortilège. Drago n'en avait jamais vu de tel. Il avait laissé Nott lui lancer un Oubliettes, mais pas un maléfice. Nott ne pouvait pas lui faire de mal. L e bouclier avait protégé Drago de cette magie noire mieux qu'il n'avait protégé Potter lui-même ; il était plus fort après son sacrifice stupide.

Nott ne devait pas avoir osé lever sa baguette contre Potter à nouveau. Au vu des circonstances, sa tentative de charger Drago n'était pas si idiote. Si Potter était mort, ça aurait pu marcher.

Les souvenirs se dispersèrent et Drago resta assis sur son lit. Il fixa l'obscurité un long moment, jouant avec les lunettes dans ses mains.
Potter les avait sauvés tous les deux. Ses sentiments pour Drago devaient avoir été plus forts qu'il ne l'avait pensé. Bien plus fort. C'était une pensée absolument terrifiante. Drago se sentait encore plus minable qu'avant.

Une chose était désormais parfaitement claire – Drago n'était pas le héros de cette histoire. Une fois encore, c'était Potter.

C'était le dernier weekend à Pré-au-Lard avant les vacances de Noël et il neigeait. Les flocons étaient si denses que le plafond de la Grande Salle paraissait blanc. Le courrier du matin était mouillé et abîmé, tout comme les pauvres hiboux qui l'avaient amené. Ils avaient aussi apporté avec eux de la neige qui fondait rapidement dans la Grande Salle.

Le colis empli de sucreries de Drago n'était pas en trop mauvais état, mais il ne ressentit aucune joie en le voyant. Ses parents, comme tous les autres, semblaient vouloir le couver d'attentions. Il abandonna son porridge, prit la lettre de sa mère et poussa le colis vers Goyle. Sa mine extatique fut si intense que, l'espace d'un instant, Drago pensa qu'il allait le serrer dans ses bras mais, heureusement, Goyle préféra déchirer l'emballage à la place.

« Laisse-m'en un peu ! s'écria Pansy. »

Goyle lui jeta une sucette. Pansy secoua la tête mais prit la sucette néanmoins.

« Quelle brute ! Dis-lui, Drago ! »

Il l'ignora, fronçant les sourcils en regardant la lettre de sa mère. La présence du colis de bonbons l'ennuyait. Cela voulait dire que la lettre contenait des félicitations et des paroles réconfortantes, et ce n'était pas ce que Drago voulait.

Deux jours auparavant un article très élogieux était paru sur lui dans la Gazette du Sorcier et il avait un peu craqué. Voire beaucoup craqué si on considérait qu'il avait fait la chose la plus terrible qu'on puisse imaginer : il avait écrit à sa mère et lui avait toutraconté. Il lui avait épargné certains détails mais n'avait pas laissé de place pour le doute quant à ce qui s'était passé dans la cabane. Il avait avoué s'être servi du Felix Felicis et lui avait dit de but en blanc qu'il n'était pas le génie qu'elle pensait qu'il était.

Mettre sur papier ses peurs et ses doutes avait été cathartique ; l'envoyer à sa mère avait été stupide. Mais sa mère l'aimerait quoi qu'il arrive et il avait besoin que quelqu'un connaisse toute la vérité. La mine maussade, il ouvrit la lettre.

La première partie en était bizarre. Sa mère semblait faire une fixation sur le fait qu'il avait fait des choses inappropriées avec un garçon, et lui rappelait son statut de Malefoy et ses responsabilités envers leur nom. Drago s'était attendu à ça, mais ce à quoi il ne s'était pas attendu était qu'elle finisse ce passage en lui disant que s'il choisissait d'avoir une relation avec Potter, son père ne le prendrait pas très bien et qu'il faudrait le lui annoncer avec précaution.

Drago fixa les mots avec incrédulité. Elle devait avoir mal compris quelque chose dans ce qu'il lui avait écrit. Elle lui donnait carrément sa bénédiction pour sortir avec Potter et promettait d'être leur alliée. Comme si Drago avait demandé une chose pareille. Il était certainque ce n'était pas le cas.

Cependant, la deuxième partie de la lettre lui ôta tout le reste de l'esprit. Drago la lut trois fois, sans arriver à comprendre les mots. Pansy était en train de le secouer avec vigueur, répétant qu'il était temps de partir pour Pré-au-Lard, mais il ne pouvait arracher ses yeux à la lettre, ni mettre son corps en mouvement.

Son monde entier venait de se renverser suite à la lecture d'un passage qui contenait les excuses inattendues de sa mère. Cela disait :

Pardonne-moi, mon fils, si ton père et moi t'avons trompé. Nous craignions pour ton bien-être mental et ton futur. Durant tout l'été tu t'es montré apathique et déprimé, et tu as plus d'une fois exprimé tes doutes quant à tes chances de réussite aux ASPICs. Tu as toujours été un enfant intelligent et nous savions, malgré tes doutes, que tu pouvais réussir tout ce que tu souhaitais, à condition que tu le souhaites assez fort.

Crois-moi lorsque je dis que nous n'avions pas d'autre but que de te redonner l'espoir et la confiance que tu avais perdus. Nous ne pouvions prévoir les terribles évènements qui se dérouleraient dans la forêt. Nous n'aurions pu imaginer que tu aurais besoin de la potion pour autre chose que tes examens. Cependant, la vérité Drago, c'est que tu n'aurais pas pu t'en servir pour tromper tes examinateurs. Rien qu'une seule goutte de la Potion de Chance aurait déclenché les sortilèges chargés de prévenir les tricheries. Il n'est pas possible de passer ses ASPICs en fraudant. Nombreux sont ceux qui ont essayé par le passé, et ont échoué. Tu peux demander à n'importe lequel de tes professeurs, ou aux examinateurs eux-mêmes, et ils confirmeront mes paroles.

Le liquide doré dans ton pendentif était un simple tonique. Tu n'as jamais bu de Felix Felicis. La voix qui t'as guidé dans la forêt et t'a tiré de tes ennuis n'était pas celle de la chance liquide – c'était la tienne.

« Je te jure, si tu ne te lèves pas immédiatement, j'y vais sans toi ! »

Il releva la tête vers Pansy. Son irritation disparut immédiatement.

« Oh, Drago, il s'est passé quelque chose ? demanda-t-elle, de l'inquiétude dans le regard. De mauvaises nouvelles ? »

Elle essaya de lui prendre la lettre des mains mais Drago réagit aussitôt. Il avait le désir irraisonné de la presser contre sa poitrine et de la garder au péril de sa vie. Pansy fronça les sourcils et Drago se leva du banc, juste pour qu'elle arrête de poser des questions.

« Tout va bien, murmura-t-il. »

Pansy lui jeta un regard soupçonneux mais Drago parvint à sourire.

« Très bien, allons-y alors, dit-elle, probablement trop pressée pour insister davantage. »

Drago la laissa le traîner vers le groupe d'élèves qui s'était rassemblé devant l'entrée de Poudlard. Rusard était en train d'examiner les fiches d'autorisation et les étudiants les plus âgés attendaient impatiemment à la fin de la file.

« Je ne sais pas pourquoi il insiste pour vérifier de nouveau ces stupides fiches. Il l'a déjà fait deux fois cette année, grommela Pansy. »

Drago n'écoutait pas. Il revoyait dans sa tête ce qui s'était passé dans la forêt. Il ne parvenait pas à comprendre ce qui l'avait aidé à sauver Potter si ce n'était pas de la chance. Toutes ces pensées qui lui avaient traversé l'esprit ne pouvaient pas venir de lui.

Ou bien si ? La voix ne lui avait jamais rien révélé de nouveau ; chaque information, toutes les conclusions qu'il avait tirées étaient basées sur des choses qu'il avait vues ou entendues auparavant. Qu'il soit parvenu à se rappeler ces diverses informations et qu'il les ait confrontées pour en tirer ces conclusions était simplement improbables. Mais c'était bien ses déductions, et quelques unes d'entre elles avait été fausses même s'il avait eu raison la plupart du temps. Néanmoins, il avait trouvé la cabane par hasard et, plus important, avait soigné Potter simplement en faisant des expériences et en espérantque cette combinaison inhabituelle de potions marcherait. C'était forcément de la chance.

Les mots de Borage lui revinrent en mémoire.

« C'estça, la chance. Mais un coin de votre esprit sait comment les ingrédients réagissent les uns aux autres et au final, vous savez que vous n'avez eu de la chance que parce que vous avez eu le courage de suivre votre intuition. »

Est-ce que c'était ça qu'il avait suivi ? Son intuition ?

« Oui ! s'écria Pansy. »

Drago cligna des yeux, se concentrant sur ce qui l'entourait.

« Il a enfin terminé ! l'informa Pansy, qui parlait probablement de Rusard. Il était temps. J'ai des courses à faire. C'est presque Noël ! »

Le regard de Drago passa au-dessus de la tête de Pansy et s'arrêta sur Potter, qui se tenait à quelques mètres de là, entouré d'un groupe de Gryffondor. Il surprit son regard et lui offrit un petit sourire avant de se retourner. Quelques Gryffondor sourirent à Drago également, et certains d'entres eux lui firent un signe de la main. Drago ne les reconnut pas, même s'il aurait probablement dû. Ses pensées étaient occupées par quelque chose d'autre. Quelque chose de complètement dément qui dansait à l'intérieur de sa tête et refusait de s'arrêter pour laisser Drago le capturer et y réfléchir correctement.

Potter avança vers la sortie et le vent s'engouffra à travers la porte, agitant ses mèches déjà ébouriffées. Les pensées de Drago se fixèrent enfin. Tout était clair, soudain.

Il avait eu de la chance parce qu'il pensait en avoir. Ce qui voulait dire qu'il suffisait de le souhaiter pour avoir de la chance. Il pouvait avoir de la chance tousles jours.

N'importequel jour.

Ce jour-ci.

Drago joua des coudes pour avancer à travers la foule.

« Oh, Drago, je t'adore. Tu libères le passage pour moi ! cria Pansy derrière lui. Voilà ! Pousse-les ! On se pousse tout le monde ! Le héros veut passer ! »

Les élèves durent réellement se pousser, parce que Drago se retrouva devant Potter en quelques secondes. Potter se tourna vers lui et les Gryffondor autour de lui s'arrêtèrent de marcher pour les observer.

Drago en conclut qu'il avait dû interpeller Potter, parce que celui-ci le regardait, l'air d'attendre quelque chose. Tout comme les élèves qui les entouraient.

« Je, heu… »

Drago jeta un coup d'œil méfiant à leur public.

« J'ai besoin de te parler.

— Heu, d'accord. »

Potter attendit.

« En privé, ajouta aussitôt Drago.

— Avancez ! cria Rusard, quasiment hystérique. »

Potter regarda Rusard, la foule autour d'eux, et puis les professeurs qui se tenaient au bout de la file. Il eut une grimace d'excuses.

« Ça peut pas attendre ?

— Non ! hurla carrément Drago. »

Les beuglements de Rusard le rendaient fou.

« Mais… »

Potter regarda à nouveau autour d'eux, Granger, Weasley, et le reste des Gryffondor. Ils bloquaient la sortie.

« Et bien, tu peux venir avec nous à Pré-au-Lard. »

Granger se hâta de hocher la tête, et après qu'elle lui ait marché sur le pied, Weasley fit de même.

« Mais, c'est ce… dit Drago avant de grincer des dents. »

Rusard avait commencé à leur crier dessus et les professeurs avaient l'air mécontent s eux aussi. Drago soupira intérieurement.Bon, tant pis.

« Je voulais te demander si tu voulais venir avec moi à Pré-au-Lard, dit Drago en regardant Potter droit dans les yeux.

— On va tous à Pré-au-Lard, Malefoy, dit Weasley.

— Tu peux venir avec nous. Y a pas de problème, ajouta Granger.

— Non, non, c'est hors de question, s'écria Pansy. Drago, qu'est-ce qui cloche chez toi ? J'y vais pas avec eux. »

Drago se disait qu'Albus Dumbledore s'était peut-être trompé après tout et qu'il allait devenir un meurtrier, ici et maintenant.
Potter n'avait pas dit un mot. Il se contentait de le fixer.

« Toi là ! Malefoy ! beugla Rusard. Je vais faire un rapport sur toi. Tu sais que je le ferai ! Bouge ! »

Drago l'ignora.

« Je voulais dire… »

L'hystérie de Rusard contamina Granger. Elle attrapa son coude.

« Sérieusement, Malefoy. Viens. »

Drago serra les poings.

« Je te demande un rancard, Potter ! hurla-t-il. »

Et voilà qu'il avait recommencé. Il avait parlé bien trop fort. Ses mots furent accueillis par un silence complet. Même Rusard s'arrêta de crier. Le seul son était celui du vent qui s'engouffrait à travers la porte, comme si lui aussi voulait écouter ce qui se passait.

Potter cligna des yeux une fois, deux fois, et puis arrêta complètement.

« Tu quoi ? demanda faiblement Pansy. »

Drago avait envie de gémir. Potter était silencieux et, il le soupçonnait, complètement choqué.

Merlin, à quoi est-ce qu'il avait pensé ? Ou plutôt, pourquoi n'avait-il paspensé ? Les révélations de sa mère et son soutien l'avaient rendu euphorique. Il n'avait même pas considéré la possibilité que Potter n'ait pasenvie de sortir avec lui. Il était très probable que Potter était perturbé par ses sentiments et n'avait pas envie d'avertir le monde entier de son orientation sexuelle. Drago aurait dû lui parler en privé. Il l'avait mis sur la sellette et maintenant Potter n'avait pas d'autre choix que de refuser et de le laisser totalement humilié.

De la chance tous les jours, pff.Qu'est-ce qui lui avait pris, bon sang ?

« Je… dit doucement Potter. »

Drago eut l'impression que tout le monde autour se penchait pour écouter. Ou peut-être qu'il avait juste le tournis. Potter s'éclaircit la gorge.

« Ça me plairait. Beaucoup. »

Il prit une brève inspiration. Apparemment, il était toujours incapable de cligner des yeux.

« Oui, ajouta-t-il. »

Tout le monde était complètement immobile et silencieux. La réponse de Potter arrivait lentement au cerveau de Drago.
La voix de Slughorn parvint à ses oreilles :

« Il est temps d'y aller ! disait-il. »

Il poussa quelques étudiants en avant, et soudain, comme si quelqu'un avait jeté un Babille-et-Potin, la foule entière éclata en chuchotements qui se firent de plus en plus forts. Drago s'en rendait à peine compte. Potter avait dit oui. Ils avaient un rancard. Un putain de rancard.

La foule se dispersa lentement. Les élèves se mirent à avancer, mais certains traînaient toujours à côté de Potter et Drago.
Slughorn sourit en passant à côté de lui, traînant à ses côtés une Primevère à l'air pétrifié.

« Qu'est-ce que j'avais dit ? demanda-t-il en tapotant son nez. J'arrive toujours à le savoir. »

Potter rougit un peu.

« Drago ! chuchota Pansy avec impatience. »

Il parvint à arracher son regard à Potter pour le tourner vers elle.

« Ceci fait partie d'un plan diabolique, n'est-ce pas ? demanda-t-elle doucement.

— Heu… »

Drago regarda ses yeux écarquillés et prit pitié d'elle.

« Oui. Ne le dis à personne. »

Il sourit. Pansy eut l'air incroyablement soulagée.

« Oh, merci Salazar. »

Elle lui fit un clin d'œil en avançant vers la sortie. Drago répondit à son clin d'œil en se giflant intérieurement. Goyle, une sucette rouge dans la bouche, lui sourit et leva le pouce. Drago ne savait pas si lui aussi pensait qu'il avait un plan diabolique, s'il le félicitait pour avoir un rancard, ou si c'étaient simplement les effets du sucre.

Drago se tourna vite vers Potter, soudain terrifié que celui-ci soit déjà parti. Cependant, à son grand soulagement, Potter se tenait toujours à quelques pas de là. Il chuchotait quelque chose à Granger. Elle lui fit un sourire hésitant avant de prendre la main de Weasley et de l'entraîner avec elle. Weasley avança à reculons. Il clignait des yeux à toute vitesse et sa bouche était grande ouverte.
Drago se concentra à nouveau sur Potter. Eux deux et Rusard étaient les seuls toujours dans le château. Les professeurs étaient déjà partis.
Potter lui fit un petit sourire et Drago répondit en souriant stupidement.

« Si je rends mon petit-déjeuner, devine qui aura une punition et devra le nettoyer sans magie ? demanda une voix railleuse. »

Drago se tourna pour regarder Rusard. Il les incendiait littéralement du regard. Drago ouvrit la bouche pour répondre par quelque chose de pas très poli, mais une main gantée attrapa la sienne et le tira en avant.

« Viens, dit Potter en souriant. »

Ils se hâtèrent de sortir du château, suivant le large groupe d'élèves devant eux. Ils ralentirent leur allure afin de rester en arrière. Potter ne lâcha pas sa main.

Il ne neigeait plus aussi fort, mais des flocons dansaient autour d'eux, atterrissant de temps en temps sur le visage de Drago comme de petits missiles gelés. Ça faisait presque mal de regarder autour d'eux ; tout était blanc.

« Malefoy ? demanda Potter sur un ton hésitant.

— Mmh ? »

Drago regardait droit devant eux. Il se demandait si Potter allait retirer sa réponse. Peut-être qu'il avait seulement accepté le rancard pour lui épargner l'humiliation publique. Il serra plus fort la main de Potter.

« Heu, tu as une lettre à la main. »

Drago regarda vivement sa main gauche. Il tenait toujours fermement la lettre de sa mère.

« Oh ! Tu devrais lire ça ! dit-il, désireux de lui faire savoir qu'il n'avait pas utilisé la Potion de Chance. »

Il lâcha à regret la main de Potter et ouvrit la lettre.

« Juste un passage. »

Il parcourut rapidement la lettre du regard avant de la fourrer dans les mains de Potter, lui indiquant où il devait commencer à lire. Potter le regarda, perplexe.
Drago souffla avec impatience. Potter était bien trop lent.

« Je n'ai jamais bu de Felix Felicis. Mère dit que c'était un placebo, déclara-t-il, incapable de dissimuler la fierté dans sa voix. »

Potter se mordit la lèvre. Il ne regarda même pas la lettre. La joie de Drago se mit à fondre lentement.

« C'est vrai, dit-il, sur la défensive. Lis-la. »

Il suppliait presque.

« Heu, je sais que c'est vrai. »

Potter lui rendit la lettre en évitant de le regarder dans les yeux. Drago le fixait. Potter soupira et s'arrêta de marcher. Il se tourna vers Drago et lui offrit un regard d'excuses.

« Je devrais te dire toute la vérité. Je suppose que ta mère n'a pas mentionné le fait qu'elle m'a écrit cet été. »

Drago secoua lentement la tête. Il n'arrivait pas à comprendre les mots de Potter.

« Bon, et bien elle l'a fait. Elle disait qu'elle s'inquiétait pour toi et ton futur. Elle disait que tu étais dépressif et que tu avais perdu ta confiance après tout ce qui s'était passé avec Voldemort. Elle demandait si je pouvais t'aider à la retrouver. Elle sous-entendait que je lui étais redevable et que peut-être je pourrais t'aider à trouver un bon travail.

Merlin, laissa échapper Drago, mortellement gêné. »

Il ne pouvait pas croire que sa mère ait demandé des faveurs à Potter.

« Je suis désolé. Je n'en savais rien. »

Potter secoua la tête, l'air de dire que ce n'était rien.

« Elle n'a pas été la seule à m'envoyer ce genre de lettres. »

Il sourit un peu.

« Je lui ai dit ce que j'ai dit à tous les autres. Que je ne comptais pas demander de faveurs pour moi-même ou quiconque. Que si quelqu'un voulait quelque chose, il lui fallait le mériter. Je suis désolé, mais…

— Non, je comprends, répondit aussitôt Drago. »

Il devait déjà bien trop à Potter. Il ne voulait pas son aide. Il voulait son respect.

« Bref, elle m'a assuré que tu étais très intelligent et qu'elle était certaines que les ASPICs ne seraient pas un problème si seulement tu avais un peu plus confiance en toi. »

Drago ferma les yeux, mortifié. Il allait falloir que lui et sa mère aient une conversation très sérieuse à propos de ça.

« Et bon, je lui ai dit que je ne pouvais pas l'aider. Mais j'ai mentionné que la seule façon que je connaissais de donner confiance en lui à quelqu'un était de lui donner du Felix Felicis pour de faux. C'était une blague, mais elle devait être vraiment désespérée car elle m'a répondu pour me demander des détails. Alors je lui ai raconté comment j'avais fait croire à Ron une fois qu'il avait bu de la Potion de Chance. Il avait eu beaucoup de chance ce jour-là. On a battu l'équipe de Serpentard grâce à ça. Ron est un bon Gardien, mais il n'a pas foi en ses capacités. C'était un petit coup de pouce, mais ça a beaucoup aidé.

— Oh. »

Drago enfonça ses talons dans la neige. Il ne savait pas trop comment il devait prendre cette révélation. Ça voulait dire que tout ce temps, Potter avait su que Drago n'avait pas eu d'aide extérieure dans la forêt. Ça voulait dire que Potter n'avait pas menti à ses amis pour donner une meilleure image de Drago, il avait simplement dit la vérité. Ça voulait dire que Potter en savait plus sur Drago que Drago lui-même.

« Quand McGonagall m'a dit que tu avais pris du Felix Felicis dans la forêt… »

Potter sourit en haussant les épaules.

« J'était à peu près sûr que la potion était un placebo. »

Drago lui jeta un regard noir.

« Tu aurais dû me le dire.

— J'ai pensé que tes parents finiraient par le faire, sourit Potter. Je me suis dit qu'ils n'avaient pas encore dû le faire parce que tu avais l'air tellement coupable et humble chaque fois que quelqu'un te félicitait. C'était quelque chose de fascinant à observer. »

Quelque chose passa dans son regard. Il plissa les paupières et pencha la tête.

« Tu aurais dû me dire ce qui s'était vraimentpassé dans la cabane. »

Le cœur de Drago manqua un battement. Les yeux de Potter semblaient forer dans les siens ; sa mine était sérieuse et accusatrice.
Merde. Le rancard était fini avant même d'avoir commencé. Il aurait dû savoir que ça ne serait pas aussi facile. Potion de chance ou pas, héros ou pas, il avait toujours profité de Potter. Et Potter s'en rappelait. Maintenant il savait pourquoi Potter avait accepté de venir avec lui – il voulait une occasion de se confronter à lui.
Drago pouvait sentir ses joues le chauffer. C'était dur de regarder Potter.

« Tu aurais dû me dire que tu avais pris le Maléfice pour moi, dit-il dans une tentative désespérée de changer de sujet. »

Le visage grave de Potter refléta soudain son choc. Ses lèvres s'écartèrent et ses yeux se firent ronds comme des soucoupes. Il étudia l'expression de Drago avec soin.

« Tu veux dire, c'est vraimentarrivé ? souffla-t-il. »

Il fallut deux secondes à Drago pour réaliser que Potter ne parlait pas du moment où il s'était jeté devant le sort. Potter savait que cela était arrivé.
Ses genoux cédèrent presque sous lui. Potter lui avait tendu un piège. Il bluffait. Et Drago n'avait pas cherché à nier ce qui s'était passé dans la cabane. Potter s'était juste douté de quelque chose. Il ne savait pas. Mais maintenant, il savait. Drago ne pouvait plus nier. C'était trop tard.
Drago hocha lentement la tête, vaincu. Il se sentit submergé par une honte intense.

« Oui. C'est vraiment arrivé.

— Mon rêve… n'était pas un rêve ? »

Le visage de Potter était livide. Il se rapprocha. Drago ferma les yeux afin de ne pas voir le regard de Potter devenir glacial.

« Pas un rêve, murmura-t-il. »

Le silence qui suivit était difficile à supporter. Drago ne savait pas à quoi s'attendre. Des mains gantées saisirent son visage, lui faisant pousser un petit hoquet de frayeur. Potter caressa ses joues avec ses pouces et Drago finit par oser ouvrir les yeux.
Potter se tenait près de lui, si près que leurs nez se touchaient presque. Il pouvait sentir la chaleur de son souffle sur ses lèvres.

« Tu m'as embrassé et tu m'as touché partout et tu me regardais comme si… C'était réel ? C'était pour de vrai? »

Potter n'avait toujours pas l'air en colère, juste abasourdi.

« Je suis désolé. Tellement désolé, dit rapidement Drago. »

Il espérait que l'absence de colère signifiait que Potter se sentait incliné à le pardonner.

« Tu es désolé ?

— J'ai profité de toi. »

Potter fronça les sourcils.

« Je me rappelle… t'avoir ligoté. »

Le vent tourbillonna autour de Drago, oppressant sa poitrine et l'empêchant de respirer. Il prit une brève inspiration et frissonna.

« Mais après tu m'as détaché. Et j'ai pas arrêté. Et je suis tellementdésolé. Tu avais de la fièvre et tu ne savais pas où tu étais, et j'ai pas arrêté et je sais que j'aurais dû. »

Drago savait qu'il était en train de bafouiller mais il ne pouvait pas se taire.

« Mais je n'ai pas pu. Je ne suis pas allé très loin. Je pensais que je t'avais attaqué et que tu me haïrais à jamais et que tu m'enverrais à Azkaban et je pouvais juste… Je pouvais juste pas m'arrêter. C'étaient juste quelques baisers volés… »

Les mains de Potter sur son visage se firent plus fermes et il secoua un peu sa tête.

« Ils n'étaient pas volés, dit-il vivement. Drago, je me rappelle de tout. J'en avais envie. »

Le regard de Potter se fit incroyablement doux.

« Tu n'as pas idée à quel point, murmura-t-il.

— Tu n'étais pas toi-même…

— Si. »

Potter se mit à rire, nerveux, ou peut-être simplement joyeux. Il tremblait.

« Merlin, c'est moiqui devrais m'excuser. Je t'ai ligoté et… Bon sang. »

Potter rougit, et la couleur s'étendit depuis ses joues, disparaissant sous son écharpe.
Les bras de Drago réalisèrent que Potter n'était pas en colère avant que son cerveau ne soit arrivé à la même conclusion. Ils se faufilèrent derrière Potter et entourèrent sa taille, l'attirant plus près, l'emprisonnant dans son étreinte.

« Alors on est un couple de sales vicieux ? demanda-t-il légèrement. »

Il était toujours incapable d'accepter le fait que Potter n'était pas du tout en colère, que malgré son délire, Potter savait exactement ce qu'il faisait dans la cabane. Et qu'il voulait Drago. C'était incroyable à quel point se rendre compte de cela était libérateur. Apparemment, c'était Drago qui avait besoin qu'on lui dise que ce qui était arrivé dans la cabane était réel.
Potter sourit et hocha vigoureusement la tête.

« C'est une bonne chose qu'on soit ensemble. Au moins les autres gens n'auront pas à craindre de se faire molester par nous.

— On est ensemble ? Pour de vrai ? demanda doucement Drago. »

La voix de Potter se fit plus basse ; il chuchotait presque :

« J'aimerais bien te voir essayer de te débarrasser de moi. Je suis à l'évidence un maître en bondage sans baguette. »

Leurs nez se touchaient. Un flocon de neige tomba sur la joue de Drago et Potter l'ôta de son pouce.

« J'en ai de le chance, murmura Drago en penchant la tête. »

Ses lèvres s'entrouvrirent. Le regard de Potter vola vers elle s avant de revenir vers ses yeux.
Une éternité passa avant que les lèvres de Potter ne touchent les siennes. La douce pression le fit soupirer et il ferma les yeux. Ils se tinrent un moment ainsi, et puis les mains de Potter se retrouvèrent dans les cheveux de Drago et ils s'accrochaient désespérément l'un à l'autre, leurs langues mélangées et leurs lèvres soudées ensemble.
Drago se dit qu'il avait été idiot de penser qu'il ne pourrait plus jamais faire ça. Il était évident, maintenant, qu'il ne ferait rien d'autre que d'embrasser Potter pour l'éternité.
Hors d'haleine, Potter se retira un peu, mais ses lèvres caressaient toujours celles de Drago, et le contact tiède envoyait des frissons dans tout son corps, jusque dans ses orteils.

« Franchement ! s'écria quelqu'un. »

Drago grommela contre les lèvres de Potter, les embrassa doucement une fois encore, avant de finalement regarder autour d'eux à contrecœur.

Primevère se tenait à quelques mètres de distance. Elle avait une main sur ses côtes et respirait fort.

« Je croyais qu'on vous avait perdus de nouveau. Vraiment ! dit-elle d'une voix haletante. Arrêtez de faire ça ! »

Drago soupçonnait qu'elle voulait qu'ils arrêtent de s'étreindre et de s'embrasser, plutôt que d'arrêter de disparaître.

« Nous venons tout de suite, Professeur ! dit Potter. »

Il lâcha à regret les cheveux de Drago, sur une dernière caresse. Celui-ci ricana :

« Pas tout de suite, j'en suis sûr. »

Potter renifla et secoua la tête. Il y avait de la buée sur ses lunettes et ça donnait envie à Drago de l'embrasser à nouveau.

« Alors ? »

Primevère fit un signe de tête vers le village.

« Allez-y ! dit-elle d'un ton sévère. »

Elle attendit sans bouger.
Potter attrapa la main de Drago et le tira en avant. Il donnait des coups de pied dans la neige en marchant, comme un gamin. Alors qu'ils dépassaient Primevère , Drago l'entendit grommeler.

« Et bien sûr, il est gay. C'est bien ma chance. »

Non, c'est la mienne, pensa Drago avec euphorie, en attirant Potter plus près de lui.
Potter lui sourit. Son expression était plus lumineuse que le sol couvert de neige.

The End


Note:

Comme vous le savez, les reviews sont le moyen de subsistance N°1 des auteurs et traductrices. ^^

Sinon, pas d'inquiétude, j'ai d'autres projets en route.
Déjà un petit OS Albus/Scorpius qui devrait paraître bientôt.
Et je suis en train de négocier avec Faith la traduction de sa toute dernière fic.
Donc en principe, je devrais vous garder alimentés en slash anglophone dans les temps qui viennent... ^^