Disclaimer : Seule la présente histoire m'appartient. Aucun des personnages servant à sa construction ne possède pareil statut.

Note absolument inutile de l'auteur : Cette fic est une très ancienne idée que j'ai décidé de mettre sur papier après une écoute très répétée de la chanson Afterglow de Vanessa Carlton, que je vous conseille d'écouter de ce fait (mais la version acoustique avec juste sa voix et le piano, qui est meilleure que la version studio). Je ne suis pas un spécialiste du Rugby, mais j'apprécie grandement d'aller voir des matchs et de les regarder à la télévision, alors j'espère que je vous transmettrai un peu de cette passion, ou que, tout du moins, je vous rendrais plus curieux/curieuse de ce sport.

Si vraiment vous n'avez aucune connaissance de celui-ci, je me contenterai de vous expliquer les rôles des deux postes occupés par Ron et Harry dans cette histoire. Ron est demi de mêlée, numéro 9 et son rôle est principalement d'introduire le ballon lors d'une mêlée ou au contraire de le sortir afin de le renvoyer vers un autre joueur. Harry est arrière, numéro quinze, et son rôle est principalement d'être la dernière barrière de défense, en plus de réceptionner les balles longues. Mais chacun de ces rôles peut évoluer selon l'habilité des joueurs qui les occupent. Le choix des équipes ne s'est pas fait quant à mes préférences, mais quant à la régularité avec laquelle j'ai entendu parler d'elles durant les saisons que j'ai pu suivre. Je précise aussi que ce que l'on nomme « transformation » dans le domaine du rugby est un tir effectué par le buteur suite à la réussite d'un essai par son équipe. Son emplacement dépend de l'endroit où le ballon a été précédemment aplati.

AFTERGLOW

Ou

L'Ovalie sentimentale

Première partie

J'avais cette boule au ventre avant de pénétrer le stade, ce poids qui me faisait un peu boitiller et qui menaçait d'avoir bientôt raison de mes jambes si je ne faisais rien pour l'alléger. Je sentais, avec trop de vigueur, mon cœur s'agiter dans ma poitrine, ma gorge s'assécher et ma vision se troubler par les goutes de sueur perlant de mon front, le tout se décuplant face à tous les regards qu'on attribue généralement à ceux qui se permettent un retard lors d'un jour aussi important que celui de la sélection pour les prochains joueurs espoir de l'ASM Clermont auvergne.

« Ton nom ? »

« Ronald Weasley. »

Et mon Dieu que la peur s'était décuplée quand l'entraineur mit un siècle à trouver mon nom sur la liste, parce que même si l'on sait, on a toujours cette crainte d'une erreur de la part de l'administration.

« Bien, va te changer et rejoins-nous sur le terrain. »

Il ne m'en fallut pas plus pour diriger mes pas vers les vestiaires et pour y enfiler le short, le t-shirt et les protections adéquates. Quoiqu'en retard, je pris néanmoins le temps de jeter un bref coup d'œil à mon allure générale, réponse involontaire à un manque de confiance. Vain espoir que mon aspect influerait sur le choix du sélectionneur en plus des capacités dont je ferai preuve. La phrase « on se rassure comme on peut » ne me parut soudain plus être un synonyme de lâcheté.

Je rejoignis alors mes nombreux concurrents qui avaient déjà commencé leurs tours d'échauffement, et m'implantai dans un groupe dont le rythme de course me semblait aussi abordable que suffisant pour habituer mes muscles à l'effort prochain. Nous fîmes ainsi autant de tour que le sélectionneur jugea nécessaire, avant qu'il ne nous réunisse autour du terrain afin de nous expliquer les modalités de l'épreuve, les critères décisifs – auquel n'appartenait hélas pas l'apparence, comme je l'avais redouté – ainsi que le temps sur lequel nous serions jugés.

Ce qu'il dit me rassura assez. Conformément à mon rôle, j'étais plus que rapide dans la prise de décision et ne laissais pas le stress me submerger trop vite dès lors qu'une décision se devait d'être prise sur le terrain, à condition que mes camarades m'y aident. Mais ce sur quoi se fondait mes espoirs, c'était ma qualité de buteur, qui venait à mon sens ajouter un poids supplémentaire à ma candidature si jamais mes performances de demi de mêlée ne satisfaisait pas entièrement leurs attentes.

Je pris donc mon temps pour chaque tir, et fus plus qu'heureux de constater qu'aucune situation ne me fut impossible à surpasser – mis à part celles volontairement mises en places pour ne tester que la réception d'un échec, ce à quoi je réagis plutôt bien vu qu'il était clair que seul un titulaire entrainé depuis des années pouvait espérer marquer avec une telle distance – et qu'une seule autre personne à part moi, parmi tous les candidats, réussit à marquer autant de points. Il ne me restait alors plus qu'à montrer mon aptitude en dehors de ce poste.

Suivit ensuite plusieurs tests ou je pus me débrouiller avec pas mal de succès – notamment sur l'évaluation de la longueur des passes et de leur précision – avant que le sélectionneur ne nous réunisse de nouveau pour composer plusieurs équipes qui devraient s'affronter sur une courte période, et qui me semblèrent assez équilibrées, du moins de ce que j'avais jugé du niveau de chacun en les observant brièvement. De ce fait, je pris soin de préparer mes mains ainsi que mon esprit à ralentir la cadence vis-à-vis de certains joueurs, sachant que la capacité à savoir m'adapter jouerait pareillement en ma faveur.

La match se déroula plutôt mal, en revanche. L'équipe adverse semblait plus mature et de ce fait plus capable d'occulter l'esprit de compétition entre chacun de ses membres afin de donner lieu à un véritable jeu d'équipe. La plupart de mes coéquipiers, quant à eux, n'avaient en tête que la volonté d'impressionner au plus haut niveau et ne se passaient pas souvent le ballon, pensant stupidement qu'ils pourraient à eux seuls traverser toute une équipe. Mais malgré tout, nous réussîmes à marquer deux essais que je fus capable de transformer, et eûmes une pénalité qui égalisa le jeu à quelques minutes de la fin.

Voilà pourquoi, je me devais de renvoyer le ballon à la bonne personne, alors que celui-ci sortait péniblement d'un amas de joueurs entassés les uns sur les autres. Proche de la ligne d'essai, c'était là notre dernière chance de remporter la victoire et de combler au minimum nos espoirs de sélection. Et je n'avais que peu de temps, vu que mon attardement permettait aux adversaires de restituer plus efficacement leur défense et leurs prévisions quant à l'attaque que nous allions mener, alors qu'aucun des joueurs qui se présentaient devant mes yeux ne me semblait suffisamment bien placé ou suffisamment fort pour marquer.

Mais soudainement, sorti de nulle part, je vis arriver au loin un éclair brun inconnu au bataillon et qui paraissait impossible à stopper. J'ignorais la raison de mon geste, mais la passe lui fut immédiatement attribuée, juste avant que cela ne se transforme en passe avant et donc en faute. Je le vis alors surprendre notre équipe et celle adverse par sa vitesse d'exécution et d'esquive, qui lui permit en quelques secondes d'atteindre la ligne d'essai et de nous offrir une victoire éclatante.

Ce fut avec surprise que je remarquais le numéro quinze sur son maillot, dans la mesure où la manœuvre qu'il venait d'exécuter était plus l'apanage des ailiers, d'ordinaire. Néanmoins la surprise fut vite remplacée par l'enthousiasme qu'il reçut des coéquipiers, et par celui qui me fut accordé ensuite pour avoir rendue la victoire plus écrasante encore en transformant l'essai avec brio. Mon cœur s'accorda un répit et ma bouche un soupir de soulagement, tandis que nous quittions le terrain pour laisser place aux deux équipes suivantes.

Le match qui se déroula après eu raison de mes dernières craintes. En effet, l'unique concurrent ayant réussi à obtenir les mêmes résultats que moi durant les tests de tirs avait perdu une bonne partie de son habilité face à la responsabilité qu'une équipe entière plaçait sur ses épaules. D'autant que ses passes se faisaient par moment hésitantes et difficilement rattrapables, ce qui accentuait l'impression que devait se faire le sélectionneur de son incapacité à faire preuve de sang froid.

Nous rentrâmes aux vestiaires une fois le match fini, et le jet puissant de la douche me parut si doux, si apaisant, que je crus rester une éternité sous son joug. Prenant ensuite place ou j'avais auparavant disposé mon sac, cheveux séchés à la va vite, je m'accordai un dernier et long soupir, qui fut interrompu par la vision du susnommé éclair brun s'asseyant juste à côté de moi et poussant également, avec plus de conviction que moi si possible, un soupir chargé de fatigue.

« Très belle accélération, » dis-je.

Tournant lentement sa tête vers moi, il m'offrit un petit sourire en coin.

« Très belles transformations, » répondit-il.

Nous enfilâmes le reste de nos affaires, attendîmes que nos camarades aient fini de se changer et sortîmes pour un dernier discours du sélectionneur, qui nous garantit que les délibérations ne dépasseraient pas les deux semaines, et que nous recevrions les réponses par téléphones. Puis nous quittâmes le stade, exténués, rejoignant parents ou arrêts de bus qui nous ramèneraient chez nous. Mais, avant que je ne puisse atteindre les deux seules têtes rousses, l'éclair brun me tendit une main.

« Harry. Harry Potter. »

J'ignorais si ce geste était une conséquence de mon compliment, une présentation qui supposait qu'à son esprit, nous étions déjà acceptés, ou encore un simple signe de politesse, mais je la serrai dans un geste mécanique.

« Ronald Weasley. Mais tout le monde m'appelle Ron. »

O(+RW/HP+)O

...

« AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH ! »

« RONALD ! Pour l'amour du ciel, baisse d'un ton ! »

Elle n'avait pas tort de me donner cet ordre vu que les voisins supportaient déjà assez mal les bruits provoqués par sept enfants, alors si l'un d'eux se mettait à hurler... Mais je ne pouvais rien entendre, l'unique son à mes oreilles demeurant la résonance du « vous êtes accepté dans l'équipe. »

« Laisse-le donc Molly, il le mérite et finira de toute façon par tomber de fatigue. Allons plutôt préparer quelque chose pour célébrer l'évènement ! »

O(+RW/HP+)O

...

Je ne savais pas véritablement pourquoi, mais mon premier geste, en arrivant au premier entrainement, fut de me diriger vers Harry, qui attendait l'arrivée de l'entraineur, lunettes sur le nez et écouteurs sur les oreilles. Une impression initiale favorable, une poignée de main énergique, un sentiment étrange, ma passe décisive et son essai. J'avais comme le pressentiment qu'un lien s'était établi entre nous par cette action et que je pourrai aussi bien m'en faire un ami qu'un allié.

Et j'eus raison. Après avoir constaté avec une certaine joie que nous avions tous deux été retenus dans l'équipe, nous commençâmes immédiatement à nous entrainer ensemble, à nous mettre en binôme dès que l'exercice s'y prêtait – alors que mon poste me rapprochait normalement plus du demi d'ouverture – et à discuter de ce que nous pouvions avoir en commun : Notre désir d'atteindre rapidement un niveau meilleur et ainsi l'équipe professionnelle, notre volonté de fer, la manière dont nous démarquions dans nos anciennes équipes, etc.

Notre amitié naquit ce jour-ci, au début fragile, mais ensuite indestructible.

Les semaines défilèrent ensuite, puis les mois. Nous pûmes tester quelques rares fois nos capacités quand les titulaires se blessaient lors d'un match, et ainsi découvrir la dureté de la compétition, nos anciennes équipes n'offrant pas vraiment une sensation aussi forte, ni un niveau similaire. Nous nous blessâmes, nous disputâmes sur certaines performances, nous réconciliâmes, nous emportâmes dans des fous rires et dans tous ces trucs qui caractérisent une amitié, je suppose.

Mais ce qu'il y eut de formidable par-dessus tout, en dehors de ce que nous partagions en tant qu'amis, fut ce que nous partageâmes en tant que coéquipier. Notre complicité sur le terrain était à la hauteur de notre niveau. Ne nous accordant aucune faute, notre vitesse d'exécution laissait généralement peu le temps à l'équipe adverse de mettre ou remettre en place un jeu de défense adapté, ce qui ne tarda pas à nous faire remarquer auprès de l'entraineur, qui nous offrit par là plus d'occasions d'occuper le poste de titulaire.

Notre épanouissement atteint un sommet jusque là inégalé. Ce rêve que nous entretenions depuis notre premier ballon, nos premiers crampons et nos premiers essais se rapprochait de plus en plus. Nous nous imaginions déjà arpenter les terrains professionnels, détruire chacun de nos adversaires, et, à terme brandir une coupe, nationale, internationale. Toujours amis et toujours coéquipiers, connus en tant que partenaires inséparables qui ne trouvaient leur force que dans la profonde amitié qu'ils entretenaient.

Tant d'espoirs, de paroles, de souvenirs, d'imagination, de projections, de rires; tant de volonté, tant d'énergie, de courage, de persévérance… Ce fut la base de notre relation, un soutient stable qui tangua par moment, comme dans toute amitié, mais qui jamais ne faillit et alimenta en conséquence un sentiment de sureté. Ceci expliqua surement l'intensité de la douleur qui survint ensuite, exactement deux ans après notre rencontre.

C'était à l'époque ou l'entrée dans l'équipe pro' se profilait de par les départs qu'elle avait subie et de par le rafraichissement qu'elle éxigeait en permanence. J'avais un bon feeling quant à mon acceptation et quant à la sienne puisque nous occupions désormais systématiquement la place de titulaire lors de rencontre. D'autant que les départs en question concernaient en partie nos postes et que l'entraineur nous avait confié nous penser prêts.

Mais ce jour, ce maudit jour où nous recevions le coach de l'équipe professionnelle afin qu'il nous informe des joueurs qui la rejoindraient pour la saison suivante changea tout… Ce jour où il ne pointa pas le bout de ton nez, ce jour où la chaleur étouffante rajouta des coulées de sueur à celles déjà provoquées par le stress qui me nouait l'estomac, ce jour ou notre entraineur me lança un regard triste sans que je ne sache pourquoi marqua le début d'un nouveau tournant dans notre relation.

Car il ne fus pas pris, car toute l'équipe s'en indigna et demanda pour quelle raison, car on nous répondit qu'il avais reçu une proposition du Stade Toulousain, car il l'accepta, car il nous trahit tous, car il ne m'en avait pas informé, car je compris les raisons du regard lancé par le coach, car je ne devais plus l'imaginer dans un maillot jaune et bleu mais noir et rouge, car j'étais son ami, car les larmes menacèrent mes yeux, car ma respiration se coupa, car je ne pus croire que ce que l'on venait de me dire relatait un fait réel.

Car maintenant, nous n'étions plus coéquipiers mais adversaires.

O(+RW/HP+)O

...

Je n'entendis plus parler de lui pendant une semaine, hormis les appels qu'il me passait et auxquels je ne répondais pas. Non pas qu'à mes yeux il était mort, seulement je me doutais qu'entendre sa voix aurait rendu son départ trop concret et m'aurait ainsi forcé à l'empêcher de l'accomplir. Je préférai à ca n'opposer que la colère, la frustration et le sentiment de trahison qui m'étreignaient, qui facilitaient sa disparition de mon esprit et qui avaient probablement retenu les larmes alourdissant les bords de mes yeux jusque là.

Mais il ne l'entendit pas de cette oreille. Non, il fallut qu'il vienne expliquer son geste de vive voix, qu'il amène tout ce que je cherchais à esquiver, sans doute parce que je n'étais pas qu'un simple coéquipier, à l'inverse du reste de l'équipe, et que ne pas s'attirer toute l'étendue de ma haine lui importait. Et ma mère, qui lisait en moi comme dans un livre ouvert, comprit que le voir ne me serait pas si préjudiciable, que me voir lui était indispensable. Aussi, alors qu'elle n'ignorait pas sa faute, alors que je lui avais formellement interdit de me transmettre le moindre de ses appels, elle n'hésita pas à le faire rentrer dans l'appartement.

Il pénétra dans ma chambre, il me regarda un long moment, avant de prendre place en face de moi, sur le lit de Ginny qui était fort heureusement partie dormir chez une amie. Il installa un silence qui perdura une bonne dizaine de minute et durant lequel on ne put entendre que le bruit des voitures passant plus bas et celui de ma mère rangeant ses ustensiles de cuisine. Puis, passant une main dans ses cheveux tout en poussant un soupir, Il décida de se lancer le premier.

« J'ai essayé d'étendre la proposition à toi et moi, mais ils n'ont rien voulu entendre… »

Je me doutais bien qu'il n'avait pas répondu oui de manière égoïste, le tout en quelques secondes, et que mon nom avait fait son apparition dans la conversation. Malheureusement, le demi de mêlée toulousain se comptait parmi les meilleurs de la ligue, l'hébergement de deux joueurs coûtait bonbon, tout comme le salaire d'un joueur.

« Qu'est-ce que tu veux, Harry ? »

Le ton se voulait méchant, impatient, mais ne sut transparaître qu'une écœurante tristesse. Car la véritable question était plus « qu'est ce que je veux ? », car j'ignorais encore si je devais laisser mon égoïsme lui interdire de saisir une opportunité qui ne se présentait qu'à un nombre restreint de rugbyman ou bien laisser le siens trahir le serment implicite que nous avions crées. Et je priai pour qu'il ne soit pas aussi perdu que moi, pour qu'il prenne la décision, pour qu'il endosse une responsabilité qui pèserait lourd.

« Je ne sais pas… Je voulais te voir avant de partir… »

« Pourquoi ? »

Le silence retomba, à la différence qu'aucun regard n'interféra dans sa continuité, ses yeux restant fixés vers ses chaussures. La pièce s'emplissait petit à petit d'une culpabilité étouffante, et quoique l'envie de l'enfoncer encore plus dedans par quelques reproches bien trouvés me grattait la gorge, je n'en fis rien. C'aurait sans doute été aussi douloureux pour moi, si ce n'était plus.

« Regarde-moi bon sang ! Et parle ! Que moi je ne trouve rien à dire, c'est normal, mais pas toi ! »

Il sursauta face à ma remarque mais n'y répondit pas immédiatement, se contentant de restaurer notre échange visuel.

« Merci… » dit-il avant d'enchainer, remarquant mon étonnement quant à sa réponse. « Tu m'as tellement aidé à devenir meilleur, à augmenter la confiance que je place en moi… Alors merci, parce que cette occasion, je ne l'aurai sans doute jamais décroché sans toi… »

Il n'y avait rien à répondre à cela, du fait que la réciproque s'instaurait dans le procédé qu'il nommait. J'entrevoyais moi aussi assez mal quel niveau caractériserait mon jeu s'il n'avait apporté son soutient au développement de ce dernier. Voilà pourquoi son départ me faisait si mal et peur, à dire vrai: je craignais que mon niveau stagne désespérément s'il n'offrait plus sa présence. J'ai donc cherché une faille.

« Pourquoi pars-tu, Harry ?... Je conçois que l'occasion soit alléchante, mais je ne conçois pas que tu puisses faire ça et à l'équipe, et à moi… Je veux dire, pourquoi faut-il que ce soit immédiat ? Avec ton niveau, tu aurais très bien pu faire plusieurs saisons à Clermont et partir ensuite vers Toulouse, sans que personne ne t'en tienne rigueur. »

J'avais moi-même réfléchis sur le sujet mais n'avais pas trouvé suffisamment d'élément pour établir une seule hypothèse. Après tout, il m'avait prouvé par son geste que ma connaissance de sa personne était bien maigre.

« Je le devais. »

« Comment ça ? »

« Je le devais, c'est tout… Je ne saurai pas véritablement t'expliquer pour quelle raison je fais ça… Bien sûr je t'ai pris en compte ainsi que l'équipe, j'ai réfléchis longtemps, mais au final, ce choix m'ait apparu comme le bon… Et ça n'a rien à voir avec une envie de changer d'air – vous êtes tous une équipe géniale dans laquelle je me plais – ou encore avec un désaccord entre l'entraineur et moi… C'est juste un sentiment indéfinissable qui s'est lentement transformé en devoir… »

Cette explication, qui en aurait laissé plus d'un perplexe et insatisfait, me suffit pourtant. Non pas que j'avais déjà éprouvé une telle chose, mais je me contentais du fait qu'il venait de choisir à ma place. Parce que je connaissais bien ses principes, et plus spécialement ceux concernant les devoirs. C'était donc son égoïsme qui remportait la victoire, et je sus que mon statut d'ami devait enterrer le miens dans les profondeurs de ma tête.

« Va-t-en. »

C'en était fini du duo de choc que nous formions. Tout était dis, il n'y avait rien à rajouter, et les larmes que j'avais contenu revinrent me hanter, sans pour autant sortir. Je gardais ce que j'avais de haine et lui ordonnais simplement de déguerpir avant qu'elles ne trouvent l'issue de secours, avant qu'elles n'attisent sa compassion et ne réveillent mon égoïsme, me ramenant à la même bassesse qui le définissait en cet instant.

Oui, tout était dis. Mais je ne compris pas immédiatement que, pour lui, tout n'étais pas fait. Je ne compris pas immédiatement qu'il ne pouvait pas se satisfaire de quelques paroles balancées en toute vitesse, pressé qu'il était par un départ qui devait s'opérer bientôt. Je ne compris pas immédiatement qu'une amitié aussi profonde que celle que nous avions entretenue pendant deux ans ne devait pas s'achever par un ordre si strict. Je ne compris pas immédiatement qu'il attendait plus. Tellement plus.

Alors je le laissai s'asseoir à côté de moi sur le lit, je le laissais passer ses bras autour de moi et me faire un adieu digne de ce nom, au travers d'une longue étreinte. Là, dans cette chambre ou nous avions jadis passés un temps fou, le temps se stoppa soudain, et la rue située en contrebas ainsi que ma mère offrant à ce moment le silence qu'il exigeait et méritait.

Ce qui arriva ensuite échappa complètement à mon contrôle, mon corps se mouvant de son propre chef. Je ne pus que subir la séparation, le regard qu'il me lança, le poids de ses bras sur mes épaules, la beauté de ses yeux verts, la lente approche de sa tête vers la mienne, le contact qui s'établit entre nos lèvres, les douces trajectoires que commençaient à effectuer ses mains, la vigueur qui s'installa dans notre échange buccal, la vitesse à laquelle nos vêtements s'envolèrent, la patience avec laquelle nous découvrîmes mutuellement le corps de l'autre.

Il me fit l'amour, lentement, avec autant de douceur que d'énergie. Je lui fis l'amour avec les mêmes arguments, mais avec sans doute un peu plus de timidité. Pendant une heure, puis deux, puis trois. Pendant autant de temps que nos corps nous le permîmes, pendant ce qui, à notre sens, valait bien la peur de se faire découvrir par une mère toujours servante et prête à ramener une citronnade bien fraiche. Pendant, il me sembla, deux ans. Ces deux années que nous venions de passer à ne jamais envisager cet acte, mais qui me semblait si évident maintenant, si essentiel.

Puis je m'endormis aussi fatigué qu'après un entrainement mortel imposé par le coach. Ma dernière vision fut son sourire, la sienne fut le miens. Je sentis sa main se saisir de la mienne sous les draps, je sentis quelques mouvements durant mon sommeil. Je sentis que finalement, il ne pouvait pas y avoir de meilleure fin, comme je réalisai également qu'il n'y avait pas de meilleur début, pas de meilleur commencement pour autre chose auquel je venais de prendre goût mais que sa fuite m'interdisait, désormais.

Et quand je me levai le lendemain, je ne sentis que ma présence dans le lit.

Et quand je me levai le lendemain, les larmes ne tardèrent pas à enfin s'échapper.

TBC

Rassurez-vous, ce sera une happy end ! Cela faisait bien longtemps que je n'avais pas écris à la première personne, ce qui explique l'absence de lemon, aussi je vous demande de bien vouloir excuser les possibles erreurs concernant ce fait. Quant à la deuxième partie, elle ne devrait pas arriver dans plus d'un mois, c'est promis. Encore merci d'avoir pris le temps de me lire !