Disclaimer : J'en ai bien peur, ils ne m'appartiennent pas.
Note : Je sais, on n'y croit pas. Désolée d'avoir mis autant de temps, surtout que j'avais dit la dernière fois avoir une bonne partie d'écrite ce qui est le cas, mais en fait, j'avais complètement oublié de publier. Puis, il y a eu mes examens etc... Je vous remercie milles fois pour vos reviews et vos favoris, si ça vous plaît, je suis contente !
Enfin, je parle un peu plus d'Ayumu et ce n'est pas un bashing de ce OC.
A propos de l'histoire : Cette première partie que j'appelle celle du tribunal durera longtemps, alors oui, il y aura un peu d'action, un peu de romance, mais vraiment vers la fin de cette première partie ! Il y en aura quatre, cette fic sera un pavé. j'espère que ce chapitre ne vous ennuiera pas trop, mais j'avais besoin d'écrire ces parties pour la suite !
Sur ce,
"Rien ne devrait recevoir un nom, de peur que ce nom même ne le transforme." Virginia Woolf.
"Le nom grandit quand l'homme tombe." Victor Hugo.
Chapitre 5 : Light est Kira.
Sa journée qui avait été si parfaite, les conférences de presse, les journalistes qui se pressaient pour des interviews dont certaines ont dû être repoussées à six mois tant elles étaient nombreuses, déclinait dans le noir à l'entrée d'Ayumu Teru dans l'ascenseur de son immeuble.
Une odeur forte et irritante qui agressait les narines polluait l'air. Une odeur parfumée et dure, loin d'être une senteur florale : le parfum d'un homme. Cette odeur lui était douloureusement familière, comme cette irritation immédiate produite par sa senteur et qui lui donnait mal à la tête, voire même des nausées. Mais l'euphorie dans laquelle il était, l'empêchait de percuter immédiatement sur le porteur de ce parfum.
C'est pourquoi il fut à demi surpris quand l'ascenseur s'ouvrit directement sur la porte de son appartement et qu'il reconnut dans la silhouette de l'homme qui était devant sa porte et dos à lui : son oncle, Mikami Teru. Rien que par la largeur de son torse, ses épaules bien construites, son costume bleu foncé impeccablement repassé, sans un seul pli, et l'étiquette de marque qui se détachait du col : Ayumu pouvait dire qu'il s'agissait de son si génialissime oncle.
Ce dernier était toujours dos à lui, et ne l'avait donc pas remarqué, la porte de l'ascenseur était toujours ouverte, il pouvait toujours appuyer sur le bouton du rez-de-chaussé et aller boire un café. Mais l'ascenseur n'était pas aussi silencieux que lui, et les portes émirent un bruit électronique en se refermant, attirant l'attention de Mikami.
Son oncle se retourna et étrangement un sourire étira les lèvres de cet homme si sérieux. Ayumu ne manqua pas de remarquer que Mikami avait encore changé le design de ses lunettes depuis la dernière fois qu'il l'avait vu : c'est-à-dire l'année dernière, lors du repas de famille annuel. Rectangulaires et noires, la coupe de la monture encadrait parfaitement son visage, complétant la coupe de sa chevelure.
Cet homme était soigneux même dans le choix de ses lunettes.
« - Ayumu, le salua Mikami, en s'avançant vers lui, remarquant visiblement que son neveu ne bougerait pas, surpris de le voir là. Ayumu remarqua encore une fois le pas silencieux et gracieux de son oncle. Il ne l'aimait pas.
Le jeune avocat sortit de l'ascenseur pour s'avancer à son tour avant de le saluer d'une poignée de main très sèche. Si son oncle le remarqua, il ne dit rien, puisque la même sécheresse éteigna son regard.
- Pourquoi es-tu venu ? Demanda Ayumu, d'une voix brusque. Mikami ne se formalisa pas du ton un peu bourrin. Il jeta un bref regard à droite, puis à gauche, et une main dans la poche de son pantalon, il toisa son neveu avec une étrange lueur dans le regard, alors qu'il dit d'une voix basse :
- Ne m'invites-tu pas à entrer ?
Ayumu hésita franchement et le laissa paraître. Tout autre interlocuteur aurait senti le peu d'envie de répondre positivement du jeune avocat, mais Mikami pour qui tout était une question de droit, se trouvait être dans son droit en demandant à ce que son propre neveu l'accueil sous son toit quelques minutes.
Le jeune homme ne pouvait pas refuser, et Mikami qui avait lui-même une sorte d'inimité inexplicable pour son neveu, ne serait pas venu le voir si ce n'était pas important. C'est donc par curiosité, qu'Ayumu passa à côté de son oncle, sans rien dire, et sortit de sa poche son trousseau de clé. Il entra dans son appartement et laissa la porte ouverte derrière lui, comme pour inviter Mikami à entrer.
Ayumu rentra sans retirer ses chaussures et se dirigea sans même se tourner pour voir si son oncle l'avait suivi ou non, jusqu'à la cuisine pour prendre un verre de whiky. Mais Mikami prit le temps de retirer ses chaussures avant de suivre son neveu sans prendre grand soin de l'état des lieux. L'appartement était luxueux, mais on ne pouvait donner aucun autre compliment à la décoration. Parce que ça puait le décalage.
Chaque meuble, chaque tableau, même le papier peint valaient une petite fortune. Mais le mur violet était si mal assorti à la sculpture en or d'une femme nue, l'éventail en bronze si détonnant à côté du pistolet en argent que ça lui brûlait la rétine.
C'est comme si Ayumi avait juste décidé de prendre ce qui coûtait le plus cher et qui avait une vague fonction décorative.
Dans cette appartement rien ne semblait avoir sa place.
Comme son neveu qui était comme contre fait, c'est peut-être pourquoi Mikami avait toujours eu du mal à le supporter. Lui, brillant procureur faisait la fierté de sa famille. Ayumu qui n'avait jamais aimé rester dans l'ombre, avait décidé de suivre la même carrière pour le défier sur l'arène de la justice. L'esprit de compétition, Mikami y était favorable bien sûr, c'est normal d'avoir un modèle que l'on veut dépasser. Par contre, ce que le procureur ne cautionnait pas, c'est les raisons qui ont poussées Ayumu à une telle carrière : la jalousie. Ce n'était pas par esprit de justice ou de droiture, mais juste par jalousie. Quand Mikami lui avait fait remarquer que ce n'était pas un motif suffisant sur lequel basé sa carrière et sa vie, Ayumu s'est mis à le détester.
Au final, il n'était qu'un gamin capricieux. Si Mikami ne savait pas pourquoi Kira l'avait choisi, il se serait mis à douter du jugement de son Dieu.
Ayumu ne lui proposa même pas un verre alors qu'il buvait devant lui, adossé au bord de la table de cuisine sur laquelle reposait un fiacre qui contenait du whisky et un seul verre.
- Dure journée ? Demanda Mikami, pour engager la conversation.
Ayumu eut un sourire arrogant, et il garda un silence mystérieux le temps de boire une gorgée de son verre avant de répondre d'une voix où puait l'arrogance :
- A ton avis ? J'ai été choisi pour représenter Kira ! Sûrement la plus grande affaire du siècle, je suis un homme très occupé, tu devrais le savoir.
Ayumu ne manqua pas de noter le changement d'expression sur la face de son oncle à la mention de Kira. Les yeux inexpressifs brillaient et son regard le détaillait consciencieusement avec une éviction qui le rendait presque mal à l'aise.
Mikami hocha la tête, en souriant.
- C'est un grand honneur.
- Pour qui ? Fit Ayumu, avec cette même arrogance, pensant que son oncle était jaloux de lui. Mikami serra les dents pour s'empêcher de maudire ce comportement. Son neveu devrait remercier le ciel chaque jour d'avoir la chance d'être désigné émissaire de Kira, d'avoir la chance de pouvoir le voir et briller dans sa lumière. Bien que Mikami savait que lui-même avait un rôle important, il n'en était pas moins envieux.
C'est pour ne pas se mettre son neveu à dos, qu'il ignora cette remarque et continua :
- C'est pourquoi je suis venu te voir. Tu vas te faire une place dans le grand monde, susurra Mikami en avançant jusqu'à son neveu. Il le prit par les épaules pour le forcer à porter attention à lui. Ayumu remarqua l'étrangeté de l'expression de Mikami... joyeuse ? Un peu folle ? Lubrique ? Il n'arrivait pas à mettre le doigt dessus.
- Tu auras le destin du monde entre tes mains, tu auras le pouvoir de sauver Kira ou non, continua-t-il.
Mikami savait parfaitement que ce n'était pas vrai, son neveu n'était malheureusement qu'un pion dans le jeu de son Dieu, mais Ayumu ne devait rien savoir.
L'avocat eut une expression ennuyée et retira les mains sur ses épaules du bout des doigts avec mépris.
- N'exagère pas, tu veux ? Je sais quoi faire. Puis, tu es du côté de Kira on dirait, ce n'est pas très impartial, signala Ayumu avec suffisance, comme s'il avait découvert un grand défaut de son si génialissime oncle.
Mikami haussa un sourcil alors que son expression devenait plus stoïque.
- On a tous notre opinion Ayumu, personne ne peut être neutre. La neutralité n'existe pas. Et toi, mon neveu, quoique tu penses, tu seras forcément du côté de Kira. N'oublie pas, tu es son avocat, sa défense, tu es forcé de le croire innocent. Tu n'as pas le droit d'échouer, sinon je ne te le pardonnerai pas, siffla son oncle alors que ses yeux n'étaient rien d'autre que sérieux.
Décontenancé, Ayumu reprit une gorgée de son verre, qui suffit à lui embrumer assez l'esprit pour le rendre plus détendu et confiant alors qu'il répéta :
- Je sais quoi faire.
Mikami eut un air amusé en rétorquant :
- Tu sais quoi faire ? Es-tu seulement prêt à rencontrer Kira ? Je te parle là de l'homme. D'un homme qui a changé le monde ! Es-tu prêt à pouvoir converser avec lui ? Comme si c'était un vulgaire client ?
La faim brillait à nouveau dans ses yeux.
Ayumu eut un rire grossier, faisant couler quelques gouttes d'alcool sur ses lèvres et sur le visage de Mikami qui eut le tact de ne pas s'essuyer tout de suite.
- Je ne te comprends pas, c'est un criminel comme un autre. C'est un pauvre type qui s'est fait chopé, merde ! Tu en parles comme si tu parlais d'un Dieu.
Le ton d'Ayumu était à la plaisanterie mais il n'avait jamais aussi bien cerné son oncle.
La mine de Mikami se renfrogna devant la bêtise de son neveu. Il lui arracha tout à coup le verre des mains, et le claqua sur la table derrière lui, faisant gicler un peu de whisky sur sa main.
- Écoute moi bien. Si je te présente ça autrement, peut-être comprendras tu ! Cet homme a châtié des milliers de criminels ! Il a tué, Ayumu ! Il a échappé à L ! L lui-même pendant des mois ! Il a fait plier les plus puissants pays du monde ! Et tu crois vraiment que toi tu l'impressionneras ? Tu crois vraiment qu'il ne te méprisera pas ? Tu crois vraiment qu'il sera sans danger pour toi ? Il a tué, Ayumu.
Le nez de Mikami se retroussa en sentant l'haleine de son neveu. Le jeune avocat resta sans réaction aux paroles plus que véridiques de son oncle. L'odeur qui flottait dans l'air rappela à Mikami pourquoi ses paroles ne prenaient aucun sens pour ce garçon.
Son neveu était ivre.
Il posa un regard dédaigneux sur le verre.
- Tu comprendras très vite ce que je voulais dire, mon neveu.
Le procureur reprit une posture bien droite et s'éloigna quelque peu d'Ayumu qui haussa des épaules, ne comprenant pas ce que voulait lui dire son oncle. Quand Mikami recula, l'avocat remarqua enfin la présence d'une boîte, de la taille d'une boîte à chaussure à côté de ses pieds.
Mikami suivit son regard et eut un léger sourire. Il plia les jambes pour se baisser et ramasser la boîte avant de la lui tendre.
- C'est pour toi, pour te féliciter de cette ascension.
Ayumi prit la boîte, avec ce même rictus arrogant qu'il arborait si souvent. Il l'arracha des mains de son oncle sans délicatesse, et l'ouvrit précipitamment.
- Des chaussures ? Fit-il en haussant un sourcil.
Mikami hocha la tête et désigna la boîte d'un mouvement de tête.
- Regarde les de plus près.
Ayumu sortit les chaussures de la boîte et les tourna et retourna dans tous les sens, sous son regard inquisiteur.
- Tu as bon goût, le complimenta l'avocat.
Les chaussures sentaient encore le cuir, le vrai cuir, teintées d'un bleu foncé de très bon ton, elles changeaient du noir habituel. Quand Ayumu les porta vers l'ampoule de la cuisine, elles brillaient encore comme si elles venaient d'être cirées.
- J'allais te les offrir pour ton anniversaire, mentit Mikami parfaitement. Il ne savait même pas quand était l'anniversaire de son neveu. Mais je me suis dit que ton premier véritable jour dans l'affaire Kira valait un relooking un peu plus chic.
Ayumu grinça des dents, il était suffisamment chic comme ça. Il avait bien plus de goût que son oncle. Vexé, il rangea les chaussures dans la boîte et ferma le couvercle.
- Hmm, j'y réfléchirai.
- Très bien.
Si Ayumu avait eu toute sa tête, il se serait sûrement méfié de l'expression de son oncle.
- Je pense qu'il est temps de te laisser tranquille, tu dois te préparer pour demain. Ce sera une grande journée ! Mais avant, j'aimerai te féliciter une dernière fois.
Mikami s'approcha de lui et sans qu'Ayumu ne s'y attende, l'entoura de ses bras pour lui tapoter le dos fièrement, comme le ferait un père à son fils. L'avocat n'eut pas le temps de le repousser, trop surpris.
- Bravo encore. Tu feras des merveilles, j'en suis certain, lui souffla-t-il à l'oreille. Mikami était si près qu'Ayumu pouvait sentir l'odeur irritante de son eau de Cologne. Ce qui tira l'avocat de sa surprise, assez du moins, pour le pousser avec sécheresse.
Mikami, surpris, l'attrapa par le bras pour se retenir, et l'avocat se cogna contre la table. Soudain, un bruit de verre claqua, résonna dans la salle dans un son strident qui le fit grincer des dents, alors que l'alcool empestait davantage l'air. Ayumu sentait de l'humidité dégouliner de son pantalon et il baissa les yeux, furieux, en hurlant :
-Mes chaussures !
Le verre de whisky était cassé à ses pieds, et les milliers de morceaux reposaient sur ses chaussures, alors que l'alcool en recouvrait le cuir. Ayumu s'agenouilla aussitôt pour chasser les morceaux de verre de son pied et remarqua aussitôt les éraflures qu'avaient laissées les morceaux cassés sur le cuir de sa chaussure droite.
Il leva les yeux vers son oncle, irrité :
- Tu as vu l'état de mes chaussures ? ! Tu n'aurais pas pu faire attention, merde !
Mikami secoua la tête de gauche à droite lentement, la main devant lui dans un geste défensif.
- Je suis désolé. Mais au moins mon cadeau tombe à point.
Le procureur se tourna pour partir, l'odeur d'alcool lui pinçait les narines à en devenir insupportable. Son neveu pesta dans son dos en ramassant les bouts de verre. Mikami pencha la tête sur le côté, l'air illisible alors qu'il souffla de cette même voix étrange, qui disait à Ayumu qu'il y avait bien plus derrière ses paroles :
- Si jamais tu as besoin d'aide avec Kira, ou si tu as juste besoin de parler, n'hésite pas. J'ai déjà été confronté à ce genre de personne. »
Ayumu n'eut pas le temps de lui dire grossièrement que ça ne l'intéressait pas, que Mikami sortit de sa cuisine. Quelques minutes plus tard, une autre porte claqua.
En effet, si Ayumu n'avait pas eu sa tête embrumée par les vapeurs de l'alcool, il aurait peut-être senti la main de Mikami quittait son bras quelques secondes pour faire glisser le verre. Il aurait peut-être aussi noté que la porte n'avait claqué que cinq minutes plus tard, il en fallait moins d'une pour traverser son salon.
Les couverts qui claquaient contre les assiettes, le plissement des serviettes, les hoquets, les bruits de mastication, les conversations futiles de Sayu... tout ça rendait Soichiro Yagami malade, ce repas de famille qui puait la normalité le rendait malade.
Enfin normalité, si on peut dire. Son regard vacilla vers le siège vacant à la gauche de Sayu et en face de lui... la place officieuse de Light. Trois jours s'étaient écoulés depuis l'arrestation de Kira -il n'arrivait pas à dire Light, malgré ses nombreux efforts devant la glace- et sa femme devenait suspecte. Ce n'était pas dans l'habitude de Light de rester chez un ami aussi longtemps et surtout pas sans appeler sa famille.
Après tout son fils était quelqu'un de consciencieux, responsable, prudent, soucieux de la tranquillité d'esprit de sa mère. Son fils était parfait, pensa-t-il, amèrement.
« - Soichiro, de la salade ? Proposa sa femme en lui tendant le saladier. Soichiro hocha la tête distraitement, sa femme savait qu'il mangeait rarement de la salade, c'était juste une phrase comme ça, pour le distraire de l'inquiétude qui devait se lire de plus en plus sur sa face.
- Papa, tu vas bien ?
Non... ça ne va pas, ça n'ira plus jamais.
- Bien sûr, Sayu. Ne t'inquiète pas, alors comment ça se passe à l'école ? Répondit-il, le plus calme du monde, sans aucun trace du malaise persistant qui grandissait en lui depuis ce jour, et qui semblait s'amplifier à chaque fois qu'il était en présence de sa femme et de sa fille.
La jeune fille cligna des yeux.
- Bien papa... tu me l'as déjà demandé hier, tu te souviens pas ?
Soichiro eut un rire bref devant l'air perplexe de sa fille, il s'imaginait facilement ce qu'elle pensait là : t'es gâteux papa.
Si elle savait, si gâteux, si stupide qu'il n'avait pas vu la vérité alors qu'elle lui sautait chaque jour en plein visage.
- Oui, désolé. Cette question est devenue une vieille habitude, avant ce n'était jamais une répétition puisque j'étais rarement là, se justifia-t-il, en prenant une gorgée de son verre d'eau.
Sayu eut un sourire en hochant la tête.
- Oui, mais maintenant qu'ils ont attrapé Kira, tu seras à nouveau là tous les soirs, non ?
Soichiro pâlit à vue d'œil, le souci qu'il avait tenté vainement de cacher ces derniers jours alourdissait ses traits, et lui donnait l'air d'un homme âgé, bien plus qu'il ne l'était en réalité. Son front se plissa dans la concentration ou l'anxiété, il n'arrivait plus lui-même à distinguer ce qu'il ressentait maintenant.
- Attrapé Kira ? Répéta-t-il, d'une voix qui à son grand soulagement, n'était pas aussi chevrotante qu'il se l'était imaginé. Qui t'a parlé de ça ?
Sayu posa sa fourchette et eut vraiment un fou rire qu'elle tenta de cacher en buvant de l'eau.
Vraiment gâteux.
- Papa ! Il ne parle que de ça aux infos depuis deux jours ! Tu devrais le savoir, c'est toi qui a bossé sur cette affaire, c'est bien pour ça que tu es rentré, non ?
- Aux infos, répéta Soichiro à haute voix. Il n'avait pas regardé la télévision, ni lu le journal, non pas qu'il n'avait pas conscience que bientôt L annoncerait au monde sa victoire, mais il n'avait pas imaginé que ce serait si tôt. Le vieil homme avait véritablement pensé avoir plus de temps pour leur dire, plus de temps pour se le dire.
- Ils ont révélé son identité ? S'enquit-il.
Sayu ne cacha même plus son amusement.
- Bah, papa, tu dois le savoir, toi. Alors qui est-ce ?
La peur qui le saisit était si vive, si fulgurante, qu'elle le paralysa une seconde. Aussi assourdissante qu'un fracas, qu'un éclair, elle recouvrit toutes ses pensées sous son poids. Sa peur le domina complètement, et la seule chose qu'il avait envie de faire, c'était de partir, fuir très loin pour oublier. Mais sa paralysie l'empêcha de bouger, ses jambes restèrent clouer sur la chaise. Les mains qui tenaient les couverts devinrent moites à une vitesse impressionnante, et son coeur battait tellement fort qu'un instant c'était la seule chose dont il avait véritablement conscience.
Non, pas maintenant... c'est trop tôt !
Mais ce sera toujours trop tôt.
Soichiro se rendit enfin compte qu'il n'avait pas le choix, ce n'était plus qu'une question d'heure avant qu'elles ne le sachent. Le reste de dignité qui subsistait en lui s'effondrerait s'il laissait sa famille apprendre la nouvelle d'une manière aussi impersonnelle. Lui, c'était lui qui devait leur dire, pas les médias.
Le policier eut vraiment du mal à respirer un moment, et prit une deuxième gorgée d'eau pour faire passer cette espèce de boule dans sa gorge, comme s'il pouvait noyer ce malaise.
Puis, tout à coup, il se tourna vers sa femme, se rendant enfin compte de son regard qui n'avait pas quitté sa figure depuis cinq bonnes minutes. A sa plus grande surprise, ses yeux étaient illisibles, elle le détailla sans décence, puis tourna la tête vers le siège vide.
Oh non ! Non !
Pourquoi Sayu a-t-elle dû parler ? Pourquoi ?
- Soichiro, où est Light ?
Son épouse posa ses couverts délicatement sur la table, lui faisant comprendre sans parole qu'elle attendait une réponse claire et qu'elle était entièrement à son écoute. Soichiro utilisa ses talents et son expérience d'enquêteur pour sonder l'esprit de Sachiko, cherchant à savoir si elle avait compris, compris que son fils était un meurtrier.
C'est bien la première fois de sa vie qu'il eût à considérer sa femme comme un suspect, comme un ennemi. Rien de plus normal, il ne lui avait jamais rien caché puisqu'elle ne lui avait jamais rien demandé, elle se contentait d'être la parfaite épouse et mère au foyer, tenant sa maison, élevant ses enfants avec une adresse exemplaire. Un air doux et serein peignait ses traits, elle était la femme parfaite, la femme sans problème.
Finalement, Light tenait plus de sa mère.
Sa femme, comme tout un chacun devait avoir des secrets, des problèmes, des coups de déprime, mais il ne lui en avait jamais vu. Même quand il lui arrivait de ne plus rentrer en semaine, malgré des remontrances badines, elle ne lui reprochait rien. Là où la plupart des femmes lui auraient fait une scène parce qu'il n'était jamais là, elle se taisait. Quand Soichiro déprimait, elle ne disait rien, se contentant d'être là.
Sachiko avait un véritable don pour cacher ses pensées, remarqua-t-il en voyant son regard qui ne disait rien, un don qu'elle avait transmit à son fils. Alors, à quel point avait-elle compris la situation ? L'avait-elle devinée ?
Soichiro avait l'impression, non, la certitude, qu'il ne pourrait pas lui mentir. Pas maintenant. Il avait l'impression que s'il le faisait une dernière fois, il le paierait cher.
Alors sans penser, il lâcha cette bombe :
- Light est Kira.
On pourrait penser au ton désinvolte qu'il avait adopté que c'était facile pour lui. Oui, ça l'était, puisqu'il l'avait dit sans penser à rien. Son esprit était complètement vide, détaché, autant que le regard de sa femme maintenant.
Cette phrase était sortie d'elle-même, sans penser aux conséquences qu'il allait subir.
Sayu eut un rire, mais le vieil homme sentait une différence dans son timbre. Il n'était pas si vrai qu'elle voulait le faire croire.
- Elle était bonne celle-là papa, je ne te connaissais pas blagueur !
Soichiro ne répondit rien, il se contenta de la regarder.
Le verre dans sa main tomba subitement à terre, un éclat érafla sa paume. Elle la regarda sans comprendre. Son sourire se décomposa aussi vite que n'était mort son rire en voyant la face de son père.
La jeune fille secoua la tête avec véhémence. Elle ne comprenait rien, ce que disait son père, ça n'avait pas de sens.
- J'ai mal entendu alors.
Soichiro tenta vraiment, de toute sa volonté, d'empêcher ses peurs de le paralyser, de garder ses pensées aussi loin que possible de la surface pour garder son air neutre, s'il craquait maintenant, il ne trouverait pas la force de continuer.
- Non. Light est Kira.
Soichiro ne regarda pas vraiment sa fille, du coin des yeux, c'était sa femme qu'il voyait. Sa tête était baissée, derrière ses mèches, il ne put rien voir de son expression.
- Tu mens ! Cracha la jeune fille en se relevant brutalement, secouant la table par la même occasion, l'eau qui avait giclé sur la nape quand elle avait fait tomber son verre, s'écoulait maintenant le long du bord de la table. Personne n'y fit attention.
- Sayu, surveille ton langage. Tu insultes ton père, tu le traites de menteur.
La voix de sa femme était distraite, sans vraie trace de remontrance, comme d'habitude.
Comme d'habitude.
- Mais maman ! Soit c'est une blague, soit il ment ! Si c'est un mensonge, c'est ridicule ! Light est Kira ? Quand je lui raconterai, il ne s'en remettra pas !
Sayu continua de secouer la tête, ses yeux brillaient d'une certitude absolue. Elle n'avait aucun doute. Light est Kira ? C'était tellement comique qu'il aurait fallu inventer un nouveau mot pour décrire le ridicule de cette affirmation. Burlesque ? Grotesque peut-être ?
- Tu n'en auras jamais l'occasion, Sayu, je suis désolé. Tu ne le verras plus jamais, il a été arrêté.
Sayu claqua violemment du pied contre le plancher, les traits plissés, folle de rage.
- Mais arrête papa ! Bon sang ! Ce que tu dis n'a pas de sens ! Tu es devenu fou !
Son frère ? Son modèle ? L'homme pour qui la justice avait toujours été le seul but à atteindre ? Le rêve de Light, aussi loin qu'elle s'en souvienne, était de devenir flic, d'être un défenseur de la justice, il méprisait les criminels avec une hargne rare, alors en devenir un lui-même ? Cela n'avait pas de sens.
Quand bien même ce raisonnement ne tenait pas, son cœur lui hurlait que ce n'était qu'un mensonge. Son frère aimant, doux, serviable, charmant... son modèle, un meurtrier de sang-froid ? Impossible.
Il s'agissait de Light !
Light !
- Sayu, veux-tu ranger ton assiette et monter dans ta chambre ? Fit Sachiko en levant enfin le visage pour rencontrer le regard de sa fille. Le coin de ses yeux était plissé doucement, une pommette se dessinait en même temps que le sourire sur sa face s'élargissait.
La jeune fille cligna des yeux.
- Quoi ? Hurla-t-elle, enfin. Mais maman-
- Monte.
Son ton n'avait pas changé d'un iota, ni même son expression faciale mais elle restait malgré tout imposante.
Soichiro remarqua une énième fois la ressemblance entre sa femme et sa fille. Sayu était le portrait craché de sa mère plus jeune, est-ce que cette ressemblance pouvait être poussée plus loin ? Est-ce que la colère et l'incrédulité que Sayu affichait, étaient celles de sa femme, cachées derrière son air maîtrisé ?
- Vous êtes tous devenus fou ! Oui je vais monter ! Contente de quitter cette table, j'en profiterai pour appeler Light et lui raconter la blague du siècle, cracha-t-elle avec colère en sortant de table sans ranger son assiette.
La porte de sa chambre claqua bruyamment.
Soichiro sentit les pensées gratter sous la surface. La colère de sa fille faisait saigner sa blessure... parce que lui se rendait compte de ce que Sayu allait mettre longtemps à saisir. Si elle ne le croyait pas, pourquoi tant de haine ? Pourquoi le défendait-elle tant ?
Elle le croyait... ça y est, c'était fini.
Soichiro ne montra toujours rien, il sentait qu'il allait craquer mais plus tard, sa femme avait besoin de lui. Elle pencha la tête curieusement à son regard, comme si elle ne comprenait pas la gravité sur son visage.
- Mange, ça va refroidir.
- Sachiko...
- Mange, répéta-t-elle, en piquant de sa fourchette sa salade avant de l'ingurgiter.
Son mari la regardait comme si elle était folle, ou sourde peut-être. Mais elle avait entendu, parfaitement entendu. Et quand Soichiro avait prononcé cette phrase fatidique, cette sentence, ce n'était pas la surprise qui l'avait saisie, non, c'était un vieux sentiment, comme quelque chose de familier, comme si inconsciemment, elle avait toujours connu la véritable nature de son fils.
Son fils.
Personne ne pouvait comprendre l'attachement qu'une mère pouvait avoir pour son enfant, surtout son premier enfant. Un petit être qu'elle a porté neuf mois et à qui elle a donné la vie. D'une certaine façon, elle avait toujours été plus proche de son fils que de Sayu, ce qui socialement était tout à fait habituel. Les filles préféraient la compagnie de leur père – complexe d'Electre- et les garçons de leur mère -Oedipe - . Soichiro n'avait pas été aussi présent dans la vie de Light qu'elle ne l'avait été, elle l'avait élevé.
Son fils.
Là où tous les talents d'enquêteur de son mari avaient fait défaut, l'amour d'une mère avait pu voir. Elle voyait parfois, quelques brefs instants, le cœur de son enfant, quand celui-ci ne faisait pas attention.
Sachiko avait été la première a remarqué que l'intelligence qui brillait dans les yeux d'un enfant de cinq ans, n'était pas normale. Elle était la première à voir la contrefaçon derrière le sourire de son fils. La première même à voir son désespoir. Un désespoir profond, une lassitude de la vie que Light avait contracté comme une maladie alors qu'il n'était encore qu'un adolescent.
Ne croyez pas que Sachiko cherchait des raisons pour justifier les meurtres de Kira. Non, elle pourrait tout autant vous dire la noirceur présente dans l'âme de son fils. Il était manipulateur, ne s'occupait que de ses propres intérêts, c'était quelqu'un d'incroyablement égoïste.
Mais elle l'aimait.
Elle l'aimait de tout son cœur, d'un amour inconditionnel que seule une mère pouvait ressentir, et contrairement à son époux, elle ne le regrettait pas.
Parce que Sachiko, avait eu beaucoup de temps, vraiment énormément de temps, pour s'habituer à ce genre de vérités sur son fils, elle avait appris à l'aimer, malgré toute sa noirceur.
Si Light avait su, si lui aussi avait pu voir... peut-être aurait-il changé.
- A la télévision, ils ont décrété que le tribunal international s'occupera de l'affaire Kira. Son procès débutera bientôt, dit-elle finalement, en se levant de la table. Son avocat a été choisi. »
Elle empila ensuite les plats qui restaient sur la table pour les mettre dans l'évier et commença sa vaisselle.
Soichiro la regarda dans la pure incompréhension, une incompréhension aussi grande que produisait en lui la phrase « Light est Kira. ». En plus de le croire comme ça, sans protester, elle parlait du procès de son enfant, sans sentiment, sans montrer de peine. Attendait-elle qu'il parte pour exploser ?
Sachiko frotta énergiquement une assiette, un air détendu sur le visage. Si Soichiro avait bien regardé, il aurait peut-être revu à deux fois la ressemblance entre elle et Sayu. Son air était aussi contrefait que celui de Light.
Elle préférait ne pas penser aux conséquences pour son fils. Savoir n'était jamais bon, elle l'avait appris très tôt, c'était peut-être pour ça qu'elle ne demandait jamais rien à son mari. Chaque année depuis sa promotion d'enquêteur, elle avait de plus en plus conscience de son âge. Les crimes auxquels il faisait face et qu'il résolvait étaient des cadeaux empoisonnés.
La justice était empoisonnée.
Autant que l'était l'intelligence de Light. Elle plaignait sincèrement son enfant, elle n'aurait jamais voulu savoir et comprendre autant que lui, le Savoir rend les gens malheureux, c'est l'une des vieilles traditions du monde qui se perpétuait de siècles en siècles.
Un vieux souvenir couvrit ses pensées un instant.
Light était assis au bas de l'escalier de leur maison, celui qui menait à l'étage, pas plus âgé que cinq ans. Leur maison habituellement silencieuse l'était encore plus aujourd'hui. Il regarda son père passer devant lui, un costume noir très sobre sur le dos.
Il pencha la tête sur le côté, déjà très observateur.
« - Papa n'est pas habillé comme ça d'habitude, dit-il à l'intention de sa mère qui tenait Sayu, dans ses bras. Il se passe quelque chose ?
Sachiko avait toujours pensé que son fils était juste un peu plus vif d'esprit que les autres enfants, mais ça ne lui était jamais paru anormal, jusqu'à aujourd'hui. Ce jour là, elle comprit que son enfant était exceptionnel.
- Grand-père est mort, Light. Ton père prépare ses obsèques, fit-elle, d'une voix douce. Sachiko n'avait jamais été rien d'autre qu'honnête avec ses enfants, elle et Soichiro avaient toujours prôné l'honnêteté dans leur famille, même si parfois la vérité était laide. Peut-être que c'était là le problème de Light, il n'avait jamais eu d'illusion.
Alors quand enfin, un rêve s'était dessiné et avait survécu dans son esprit si logique qui détruisait habituellement toutes fabulations, il s'y était accroché.
- Mort ? Ça veut dire quoi ?
Sachiko se pinça les lèvres, ne sachant pas comment expliquer un concept à la fois si compliqué et si simple à un enfant.
- Ça veut dire que tu t'endors pour ne plus jamais te réveiller. Ton esprit part quelque part très loin, dans l'immensité du ciel, mais ton corps reste ici.
- Comme lorsqu'on rêve ? Répondit Light, arborant sa mine curieuse qui le quittait rarement.
Son père passa devant lui, un téléphone à la main. Light le regarda d'un air pensif.
- Où va le corps ?
Sachiko secoua la tête, et ne répondit pas, elle ne voulait pas répondre à ça, c'était déprimant.
- Bas, hein ? Si l'esprit vole haut dans le ciel, le corps reste là... bas ?
Pour la première fois, son fils lui fit peur, le regard dans ces yeux la rendit mal à l'aise, un enfant ne devrait pas comprendre ça, ne devrait pas pouvoir comprendre et exprimer ainsi la dualité corps et esprit.
- Si bas. C'est pourquoi les gens pleurent ? Parce que c'est trop bas. Grand-père n'a pas eu de chance.
Sachiko tourna la tête pour que son fils ne puisse pas voir son expression faciale, elle ne voulait pas lui dire que ce n'était pas une question de chance, que chacun à notre tour, nous tomberons... bas. Light fronça les sourcils vers la commode en face du mur à sa droite.
Une véritable série de cadres photo étaient les uns derrières les autres, empilés comme des dominos : des enfants, des parents, des vieillards.
- Grand-père était vieux... Son regard bifurqua vers Sayu entre les bras de sa mère. C'est un bébé, papa aussi a vieilli. Il va être mort ?
Sachiko se releva, un sourire sur les lèvres, tentant d'éclairer la révélation lugubre de son fils. Non, il ne pouvait pas réaliser ça... pas maintenant. Il ne pouvait pas comprendre l'universalité de la mort à cet âge, c'était impossible.
- On va aller mettre ton costume, viens, dit-elle en prenant Sayu uniquement dans un bras, pour tendre une main à son fils. Light hocha la tête en se levant, seul.
- Maman, je peux le faire tout seul, je suis grand.
Sachiko eut un rire devant l'air renfrogné de son fils. Voilà la mine que devrait avoir un enfant, boudeur et puéril. C'est tout. Elle secoua la tête devant sa bêtise, heureuse que Light ne comprendrait pas avant quelques années encore, déjà que l'illusion du père noël n'avait jamais marché avec lui.
Light la devança dans l'escalier, avec entrain, quand subitement, il se tourna :
- Maman, je tomberai jamais bas... je volerai toujours dans l'immensité du ciel. »
Son cœur manqua un battement.
L'assiette qu'elle frottait tomba de ses mains dans l'évier, la giclant d'eau savonneuse.
Elle pleurait.
Ayumu Teru adorait être sous les feux des projecteurs, sûrement parce qu'il n'y avait jamais été de toute sa vie. Pour lui, le système scolaire symbolisait parfaitement votre vie future, il triait les gens en trois catégories. La première, celle des coqueluches, les populaires, les stars du lycée qui avaient soit le physique, soit l'argent, soit le charisme. La deuxième : les intermédiaires, s'ils ne brillaient pas, et sortaient rarement des sentiers battus, ils avaient toujours une chance de réussir dans la vie. Enfin, la dernière... les loosers, les perdants, ceux qui avaient quelque chose de repoussant ou de peu attirant par nature, leur laideur, leur timidité, leur stupidité, leur pessimisme et tant d'autres tares, condamnés à rester dans l'ombre. Ces classes sociales, ces étiquettes, vous suivez toute votre vie, ne croyez pas que vous vous en débarrassez quand vous arrêtez les études.
C'est faux.
Malheureusement pour Ayumu, on l'avait rangé toute sa vie dans la dernière catégorie. Oh, il était devenu avocat, on pouvait donc dire qu'il gagnait bien sa vie, il n'était pas d'une laideur repoussante, mais le problème pour lui c'est qu'il ne brillait pas.
C'était un avocat, mais pas des plus connus, c'est à peine si le peu de ses clients se souvenaient de son nom, et ses collègues n'en parlons même pas.
Pourtant, malgré cette flagrante ignorance envers sa personne, bien qu'on lui prouvait tous les jours qu'il n'était pas plus important qu'un autre, il se voyait dans la première classe. Les histoires d'abord banales qu'il raconte de sa jeunesse ont été altérées tant de fois au cours de sa vie, qu'un dessin est devenu véritable œuvre d'art.
Ce qui était sans conteste remarquable chez cet homme, c'est son ego surdimensionné. En somme, il ne se prenait pas pour rien. Cela n'est pas remarquable, tout le monde est narcissique mais pour ça... il faut avoir des raisons. Il faut que quelqu'un entretienne votre arrogance et votre vantardise, mais là aussi, dans le cas d'Ayumu, il n'y avait personne.
D'où l'étrangeté : d'où vient cet immense orgueil ?
On pourrait dire que c'est naturel chez lui, comme une seconde peau.
Comme l'était naturel de sourire aux appareils photo, il s'y était entraîné toute sa vie.
« - Vous allez être le premier à pouvoir approcher Kira, n'avez-vous pas peur ? ! S'écria une journaliste, retenue par des forces de l'ordre devant l'immeuble qui abritait Kira.
Depuis 6 heures du matin, il y avait une véritable émeute devant le QG de L. Il était inutile de préciser à quel point le détective appréciait cette manifestation. Il avait pourtant prévenu l'avocat de Light que son arrivée devait être discrète pour éviter des désagréments de ce genre là.
Autant vous dire que L n'aimait déjà pas cet homme.
Il avait lui-même appelé les policiers pour maintenir cette émeute de média qui s'étalait sur plusieurs rues, des barrières ont été installées pour contenir cette masse de population.
Ayumu resta longuement assis sur son siège, la porte de sa voiture ouverte, comme pour profiter de cet instant. C'est une première jambe dehors qu'il répondit à la question sans même savoir d'où elle venait :
- Peur ? Qui vous dit qu'il s'agit bien de Kira ? Fit-il avec un air mystérieux, comme s'il détenait les clés secrètes de cette enquête, comme si grâce à son intelligence, il avait lui-même résolu l'affaire.
Un autre journaliste, d'une voix beaucoup plus masculine s'écria dans la foule :
- Vous insinuez que L s'est trompé ?
Ayumu sortit définitivement de la voiture. Les policiers forcèrent les média à s'écarter pour le laisser passer, un instant, le jeune avocat se sentit vraiment comme Moïse commandant les flots.
Il fit un geste de bras à la question, en avançant la démarche assurée, le dos bien droit et le visage figé dans une expression de pur ennui. Mais si on regardait bien ses gestes on voyait à quel point cette attitude n'était pas naturelle, à quel point il lui manquait la grâce de la première catégorie... la grâce de Light.
C'est ce que ce dit L en le voyant entrer dans l'immeuble à travers les caméras. Cet homme avait l'attitude de Light, mais là où elle était innée chez son prisonnier, chez lui elle en devenait grotesque.
Les portes se refermèrent immédiatement derrière Ayumu, se protégeant d'un ou deux journalistes qui voudraient se faufiler.
Deux hommes l'attendait dans le hall d'entrée, costume noir, lunettes de soleils noires et juste un insigne montrant qu'ils appartenaient au FBI.
L s'empara du micro et sa voix se fit entendre dans tous le hall.
- Ayumu Teru ?
L'homme cligna des yeux, voyant que la bouche des deux hommes était restée fermer. Qui parlait ?
- Confirmez.
- Pardon ?
Il leva la tête, cherchant d'où la voix venait, ayant remarqué que c'était une voix synthétisée.
- Peine perdue, remarqua L, ennuyé devant l'avocat de Light. Vous ne trouverez jamais tous les micros de cette pièce.
Bien que la voix n'avait aucun timbre, Ayumu s'imaginait bien l'air méprisant que devait arborer l'homme à l'autre bout du micro. Pas parce qu'il l'avait, mais parce qu'il pensait que tout le monde était contre lui.
- Qui êtes vous ? Cracha-t-il, irrité. L eut un rictus, en buvant son chocolat avec plaisir. L'homme n'était vraiment qu'une pâle copie de Light Yagami, son attitude de grand homme était déjà effritée.
- Il vous sera encore plus difficile de le savoir que de trouver mes micros. Puis, le détective continua immédiatement, sans lui laisser la chance de répondre. Ayumu Teru je vous demande de confirmer.
Le jeune avocat hocha de la tête, sèchement.
- Je vous demande de confirmer, répéta L. Avec vos cordes vocales, rien n'indique que j'ai placé des caméras.
Si tu n'as pas placé de caméras, comment tu as vu mon hochement de tête, bâtard ?
Il n'avait même pas entendu la véritable voix de cet homme, qu'il le méprisait déjà.
- Oui. Je suis Ayumu Teru, l'avocat qui a été choisi pour représenter Kira.
Les deux hommes du FBI s'avancèrent soudainement, et se mirent à le fouiller sans rien dire. Ayumu qui ne s'y attendait pas, émit un geste de rejet. Mais l'un deux lui tint fermement le bras, tendit que l'autre le tâta sous toutes les coutures.
- Hé mais ! Que faîtes vous ?
Les deux hommes ne répondirent rien et n'eurent aucun geste envers lui, comme s'il n'était pas grand chose. Rien. Ils le traitèrent comme on l'avait toujours traité, avec ignorance. Alors Ayumu adopta son attitude naturelle :
- Je vous jure que si vous ne me lâchez pas tout de suite j-
- Est-il nécessaire de faire de telles manières ? Ces hommes ont pour ordre de vous fouiller. C'est Kira que vous allez voir, pas un vulgaire voleur de sac à main.
Cette fois Ayumu s'imagina le ton froid de l'homme, mais cette fois avec raison. L n'aimait pas cet homme, en fait, Watari aurait dit que ça ne changeait rien puisqu'il n'aimait personne de toute façon. Mais pour cet homme, c'était du mépris que L ressentait. Il avait fait de la capture de Kira un véritable sujet pour magazine people, avant de faire grandes civilités devant une procédure plus que normale et même faible en vérité pour un criminel comme Kira.
L avait son fichier sous les yeux, tous les éléments de sa vie depuis sa petite enfance, et cet homme était vraisemblablement un novice. Light aurait pu choisir un plus grand avocat, même s'il n'avait pas l'argent, rien que la notoriété que ça aurait apporté au cabinet, certains bons avocats auraient offerts leur service à Light sans problème, alors pourquoi avoir choisi celui-là en particulier ? C'est bien ce qui échappait à L.
- Mon stylo ! S'insurgea le jeune homme.
- Aux mains de Kira, c'est mortel, expliqua L, mais ses yeux prirent une légère teinte plus clair,
comme s'il était amusé.
- Comment vais-je prendre des notes alors ? Gronda Ayumu, cherchant déjà dans sa tête un article de loi pour coincer l'homme derrière le micro.
- Un enregistreur audio. Si vous n'en avez pas, on vous en fournira un en entrant, mais vous nous le rendrez. S'enquit-il de rajouter. C'est un samsung.
Ayumu serra les dents, et fit mine de brosser sa veste dédaigneusement, comme pour se débarrasser des germes que le toucher de ces grosses brutes ont pu laisser sur son costume hors de prix.
- Suivez-nous, dit un des hommes tout à coup, d'une voix sans inflexion.
Le jeune avocat obtempéra, suivant les hommes jusqu'à un ascenseur. Ayumu ne manqua pas de noter la propreté du hall d'entrée, d'une blancheur hallucinante, rien de plus normal, puisqu'il était pratiquement vide, excepté un bureau juste en face de l'entrée.
Cet immeuble n'avait pas été investi depuis très longtemps.
Ayumu remarqua dans l'ascenseur que le bâtiment avait une vingtaine d'étage, dont trois au sous-sol, et c'est sur le plus bas des étages que le policier appuya.
Là où devait demeurer Kira.
Il frissonna sans vraiment comprendre pourquoi.
- Quand vous vous trouverez devant la cellule de Kira, ne dépassez en aucun prétexte la ligne blanche dessinée sur le sol. Ne lui donnez aucun objet.
- Cela serait difficile, vous m'avez tout pris.
Le policier fit comme s'il n'avait pas remarqué l'interruption et continua :
- Je vous dirais bien de ne pas donner votre nom, mais il le connaît déjà.
La voix de l'homme était tout sauf amusée.
Ayumu se pinça les lèvres quand la porte de l'ascenseur s'ouvrit, donnant une vue sur un immense couloir gris, si long qu'il semblait sans fin.
Maintenant qu'il était enfin là, près de la cellule de Kira, qu'il ne baignait plus dans l'euphorie de sa rencontre avec les journalistes, que le coup de la nouvelle était passé, il se rendait enfin compte de sa situation.
Cet homme a châtié des milliers de criminels ! Il a tué, Ayumu ! Il a échappé à L ! L lui-même pendant des mois ! Il a fait plié les plus puissant pays du monde ! Et tu crois vraiment que toi tu l'impressionneras ? Tu crois vraiment qu'il ne te méprisera pas ? Tu crois vraiment qu'il sera sans danger pour toi ?
Il allait être face à face avec Kira.
Ayumu n'avait jamais eu de grosses affaires, de vrais criminels. L'habituelle pour lui c'était les cambriolages, les divorces, les pensions alimentaires etc... pas les meurtriers. Et sûrement pas les meurtriers de la trempe de Kira.
- Est... est-il dangereux ? Sa voix semblait nettement moins assurée tout à coup.
Les deux types du FBI se tournèrent vers lui, avec leurs lunettes sur les yeux, Ayumu ne pouvait pas voir leurs expressions, mais leurs lèvres pincées indiquaient qu'ils étaient tout sauf amusés.
- C'est Kira, répondit l'un des hommes en donnant un léger coup sur l'épaule de l'avocat pour le faire avancer, vu que ce dernier avait apparemment perdu toute volonté de le faire.
- Non... Répéta-t-il, en tentant de garder une voix sûre de lui. J'entends par là, violent ?
- Ah, fit le policier en avançant le premier suivit d'Ayumu, qui lui-même était poussé par l'autre policier. Avec toutes ces mesures de sécurité, les micros, les caméras, les agents du FBI, et les barreaux de cellules, Ayumu se rendait enfin compte de l'ampleur de la situation. Vous demandez si Kira est un fou meurtrier, complètement taré et s'il va vous sautez dessus pour vous étranglez dès la première occasion ?
- Oui, avoua l'avocat, c'est ce que tout le monde, du moins, les non partisans de Kira pensaient.
- Non. Si on ne m'avait pas assuré qu'il était Kira, je n'y aurais jamais cru.
Ayumu tendit l'oreille, tentant d'avoir un aperçu de la présence de Kira, mais son cœur cognait si fort dans sa poitrine, qu'il n'arrivait même pas à entendre la respiration des policiers à quelques centimètres de lui.
Il arriva enfin au bout du couloir et aperçu une chaise devant la prochaine cellule.
Celle de Kira.
- Voilà, vous avez une demi-heure.
Dans d'autres cas, Ayumu aurait fait remarqué que trente minutes n'étaient pas suffisantes, qu'il avait le droit à plus de temps, mais en vérité, ça l'arrangeait. Il n'était même pas sûr de vouloir rester aussi longtemps avec cet homme. Il avait oublié que ses quinze minutes de gloire avaient un prix.
Les deux policiers se retournèrent pour le quitter, quand celui qui lui a donné les recommandations s'arrêta à mi-chemin comme s'il avait oublié quelque chose. Il resta dos à Ayumu quelques secondes, silencieux, puis comme s'il s'était décidé, tourna légèrement la tête vers l'avocat :
- Ne vous fiez pas à son apparence, c'est un joli garçon, c'est vrai. Mais il n'a que le visage de beau.
Les deux hommes du FBI le quittèrent. Le jeune avocat resta figé en les voyant rentrer dans l'ascenseur, personne ne restait pour garder Kira ? Pour le surveiller ? Et surtout pour sa protection ?
- Mais qu'est-ce que c'est que ce laxisme ? Hurla Ayumu en direction du plafond, espérant pour la première fois entendre la voix robotique, ça lui montrerait qu'il n'était pas seul. Il préférait se dire qu'il était stressé à cause du manque de sérieux ambiant dans un tel cas, non pas parce qu'il avait peur de rester seul avec Kira.
Mais aucune voix ne se fit entendre.
Et tout à coup, les plafonniers s'éteignirent, pour le plonger dans un noir total. Un glapissement s'échappa de lui à son insu, sous la surprise, et surtout la peur. Sa dégaine de grand homme fondit comme neige au soleil, remarqua L grâce au caméra infrarouge.
Son gâteau à la fraise avait meilleur goût tout à coup.
L'avocat se tourna dans tous les coins, et avança à tâtons, manquant presque de s'emmêler avec ses propres pieds.
- Que se passe-t-il ? Hurla-t-il, la voix véritablement chevrotante cette fois-ci.
Il y eut un silence quelques secondes, puis une voix douce, dépourvue d'inflexion se fit entendre à quelques centimètres de lui.
- Teru ?
Le dit nommé sursauta, en faisant un saut de 90 degrés sur sa gauche. Sa main rencontra une barre en métal, froide, puis une deuxième et une troisième... une cellule, celle de Kira. Il fit immédiatement un deuxième bond en arrière, sachant que pour toucher la cellule de ce meurtrier, il fallait forcément dépasser la ligne blanche, le criminel pouvait alors l'attraper...
Toute sa belle comédie passait sous la trappe.
- Aaaaaaaah !
Light soupira, il pouvait compter sur L pour empiéter sur sa demi-heure. La stratégie était tellement puérile, stupide et loufoque, que même Light, trouva un amusement à la terreur de son avocat, même s'il ne se l'avouait pas. Grand Dieu non.
L avait expressément éteint les lumières, laissant le couloir dans le noir total puis, avait fait croire à Ayumu Teru qu'il était seul, sans surveillance, avec lui, Kira, l'assassin mondial. Enfin, il avait juste fallu que Light rappelle sa présence à son avocat de sa voix sans émotion pour transformer sa visite juridique en un navet de film d'horreur.
Light claqua les doigts, et tout à coup les plafonniers se rallumèrent.
Derrière son écran, L grommela. Kira était vraiment maléfique, il aurait pu faire durer son divertissement un peu plus longtemps. L ne s'amusait pas souvent.
Le jeune homme haussa un sourcil en prenant note de la position de son avocat : penché vers l'avant, une main sur sa poitrine au niveau de son coeur, le souffle rapide, les yeux écarquillés. Light eut véritablement du mal à retenir la plaisanterie de mauvais goût : Attention, on croirait que vous êtes en train de faire une crise cardiaque. C'était la faute de L, pour l'avoir mis dans une pareille humeur.
Mais, comme de coutume, Light ne révélerait jamais ses véritables pensées, alors, il feignit un si parfait faux sourire, qui laissait voir à n'importe qui, qui regardait assez bien, le côté crispé de son expression :
- Je... je m'excuse pour les conditions dans lesquelles je me dois de vous recevoir. Vraiment, je suis désolé.
Ayumu releva la tête, remarquant seulement maintenant, que les lumières étaient rallumées et qu'il se trouvait à présent en face du présumé Kira. Avant même d'observer Light, c'est sa posture plus que ridicule qu'il remarqua. Ayumu tenta de la corriger immédiatement et très maladroitement.
Kira eut moins de mal à cacher le mépris que lui inspirait cet avocat.
- Je crains de manquer de temps, rappela Light, coupant court à son petit jeu.
Malgré sa figure recomposée, Ayumu ne put s'empêcher de déglutir en acceptant enfin de regarder Kira, et non le mur derrière le prisonnier. Ce qu'il vit le laissa vraiment perplexe. Bien entendu, il avait lu tout le dossier de l'affaire Kira, ainsi que tous les renseignements concernant le suspect.
Ayumu savait que le présumé Kira était étudiant à l'université de Todai, son père est un inspecteur de police (ironiquement), son casier judiciaire était vierge, et l'un de ses traits remarquable était son intelligence. En somme, il ne savait pas grand chose. L était à remercier pour ça.
Mais même sachant cela, sachant sa jeunesse, il ne put s'empêcher d'être troublé. C'est en voyant le visage de Kira qu'il prit pleinement conscience de son âge. Tout ce qu'il vit lui, c'était un jeune homme, parfaitement soigné, au physique plus qu'attrayant, et à l'air le plus sensé du monde.
Ayumu eut la même réaction que tous ceux qui assistèrent à l'arrestation de Light, il doit y avoir une erreur. C'est impossible.
Et puis ce sourire, un si charmant sourire, ne pouvait pas être à un meurtrier.
- Asseyez vous... s'il vous plaît, ne restez pas debout, ajouta Light, en remarquant la peur à présent absente des yeux de l'homme. Il lui désigna de sa couche la chaise contre le mur.
Ayumu se reprit, jusqu'à présent, c'était cet enfant qui avait fait la conversation, qui dominait même ce moment, ça n'allait pas durer, il devait se reprendre. Alors, il hocha la tête d'un geste sec comme réponse.
Il s'assit, la posture bien droite, et sortit de la poche de sa veste de costume un enregistreur qu'il enclencha.
- Je me présente, Ayumu Teru, avocat travaillant pour la compagnie de-
- Excusez mon interruption, mais je le sais déjà. Contrairement à la croyance populaire -L-, je ne vous ai pas choisi au hasard dans un annuaire.
Light, craignant que ses paroles possédaient trop d'arrogance, nuança son propos en baissant la tête, l'air hagard.
L se retint encore une fois de prendre des notes. Light était un prodige dans l'art de la flatterie, si on l'écoutait vraiment on remarquait qu'il était capable dans la même phrase d'insulter cet homme et de le glorifier. Le détective s'en amusa, c'était l'un des jeux qu'il aimait pratiquer avec Light, il le regardait dire tous ses boniments, et lui tentait de lire quelle vérité se cachait derrière ces paroles doucereuses.
- C'est vous que j'ai choisi, rappela Light, en faisant bien attention à croiser le regard d'Ayumu. Ce dernier leva encore la tête, Light s'étonna qu'il ne se tordait pas la nuque. J'espère sincèrement, que vous pouvez m'aider.
Lorsque le tueur vit le regard d'Ayumu bifurquer vers ses mains, qui trituraient toujours son vêtement, il manqua de sourire effrontément.
- Hmm. Débutons alors, monsieur... ?
Light se releva de sa couche, pour s'adosser contre le mur, en face de la grille, les bras croisés, se tenant ainsi debout alors que l'avocat était assis. Le détective eut encore un rictus, d'une manière ou d'une autre, Light rappelait toujours à son interlocuteur qui dominait.
- Vous ne connaissez pas mon identité ? S'étonna Light.
Ayumu secoua la tête.
- Cette information ne m'a pas été transmise.
- Je vois...
Kira comprenait aisément le choix de L, cet homme n'aurait pas perdu une seconde pour la révéler à la presse. Light l'avait consciencieusement étudié, un jour... en prévision du pire. Pas qu'il avait imaginé perdre. Non. Light était toujours sûr de sa victoire, c'était juste une mesure de précaution, qui a fini par servir.
- Donc vous êtes ? Rappela l'avocat voyant que le jeune homme se perdait dans ses pensées. Il pouvait parfaitement le comprendre, cet homme n'était encore qu'un enfant, accusé d'être le plus grand meurtrier au monde, en se trouvant face à lui, un avocat, l'homme sur qui allait reposer sa liberté, il était normal d'être intimidé.
Light dut vraiment refréner un reniflement méprisant devant l'air condescendant qu'Ayumu arborait envers lui.
- Que savez vous exactement ? »Demanda-t-il, voulant savoir ce que L lui avait permis de savoir, ses doigts allèrent triturer le bas de son pull noir, se voulant un geste de nervosité inconsciente.
- Sur vous ? Ou sur l'affaire ?
Le prisonnier dut se rappeler qu'il devait jouer le rôle d'un adolescent prisonnier injustement.
- Moi. Ma... ma famille... que savez vous ? La voix de Light trembla parfaitement, il aurait été impossible de croire que cette intonation avait été donnée expressément.
- Vous êtes le fils d'un inspecteur de police. Vous vivez avec votre mère et votre sœur. Ayumu espérait que l'enfant remarqua son utilisation du présent, il ne voulait pas trop le êtes aussi un brillant élève.
Light eut un bref regard vers l'une des caméras au plafond, imaginant l'air narquois de L. Avec ça, si l'avocat avait fait quelques recherches, il aurait pu facilement trouver son nom.
- Votre nom ? Répéta à nouveau Ayumu, d'un ton faussement patient.
Le criminel n'avait pas le choix. Il fallait bien le dire, Ayumu ne pouvait pas le représenter s'il ne connaissait pas son nom. Pourtant, malgré ce raisonnement plus que recevable, Light était réticent à lui donner son identité.
Light Yagami.
Ce n'était pas très difficile à dire. Ça ne changerait rien à sa situation.
Non.
C'était faux.
C'est de là que venait le goût âpre sur sa langue à l'idée de dire son nom.
Si tout le monde connaissait son nom, son identité, sa vie... Kira passerait du statut de Dieu, à celui de simple mortel. Kira n'incarnerait plus un haut concept de justice et de châtiment, mais un simple adolescent, un homme de chair et de sang, tangible, concret.
C'est la deuxième raison pour laquelle L n'avait pas révélé lui-même son identité. Pour que lui, Light, prenne conscience de son statut.
Light Yagami.
Son ennemi voulait qu'il en arrive à cette conclusion : qu'il n'était qu'un humain, pas un dieu. Mais encore une fois, le prodige parvint à un raisonnement hautement supérieur.
Son nom sera au bout des toutes les lèvres, scandé comme une prière éternelle, Light deviendra véritablement immortel. Vénéré à jamais, comme le dieu qui s'est incarné sur Terre. Personne n'oubliera son nom, l'immortalité serait sa récompense.
Oh, non il n'avait pas perdu.
Ce qu'ignorait Light, c'est que c'est cette raison qui poussa L à taire son nom. Il voulait que la cellule puisse encore supporter l'ego de son prisonnier.
Ayumu soupira en disant :
- Ne craignez rien, je vais vous défendre, vous ne risquez pas de perdre avec moi. Mais pour vous défendre, il me faut votre nom.
- Je suis Light Yagami, dit-il enfin, sans trembler.
L'avocat regarda son enregistreur et tritura les boutons pour s'assurer qu'il fonctionnait bien. Bien qu'il savait que ce nom resterait maintenant gravé dans sa mémoire.
L n'avait pas manqué un battement de cils de son prisonnier lorsqu'il avait donné son identité. C'est comme si son rival avait avoué lui-même : C'est moi Kira, Light Yagami.
Le premier qui découvrirait le nom de l'autre gagnerait, c'était un peu le principe de cette bataille.
Pourtant, la chaleur du triomphe ou de la victoire refusait de montrer ses couleurs. Le détective avait vu le visage souriant de Light lorsqu'il avait donné son nom : pensait-il maintenant que les livres d'histoire garderait une page pour sa photographie ?
Pourtant, comme lui, cette minime victoire était crispée. Il n'avait pas loupé l'hésitation de Light.
Light se retint plusieurs fois de simplement laisser son avocat déblatérer, alors qu'il lisait un livre. Cet homme avait mis une demi-heure pour lui dire qu'il ne savait rien. Que la structure du procès, les institutions, ainsi que les codes de loi -qui divergent selon les pays- n'avaient pas encore été définis, que donc il ne pouvait pas monter une défense.
Qu'il ne savait pas non plus comment l'enquête avait été menée, parce que les dossiers de L étaient classés top secret, de peur d'être révélés au média, ce qu'il ne ferait pas bien sûr. Il ne voulait pas rendre la situation plus difficile.
En somme, il était venu crier devant sa cellule, puis dire bonjour, et enfin au revoir. Ayumu se leva enfin de sa chaise quand la voix synthétisée rappela :
- Vous ne savez pas lire l'heure, monsieur Teru ? Une demi-heure j'ai dit. Vous empiétez sur votre droit de dix secondes et trois dixièmes.
Ayumu leva les yeux vers le plafond, cherchant encore une fois le micro.
- Vous m'avez retiré ma montre ! S'insurgea l'avocat. Vous pensiez qu'elle contenait quoi ? Une pile radioactive !
Light détourna le regard, coupable. Alors que L se mit à tousser devant tant de mauvaise foi, fallait-il dire à cet avocat ce qu'il avait trouvé dans la montre de Light ?
- Je suis désolé pour la grossièreté de cet odieux personnage, fit Light en pinçant les lèvres, gêné d'un tel comportement.
Ayumu se tourna vers lui, et Light fut surpris de voir que cet homme était sincèrement désolé pour lui. Il connaissait les expressions que pouvait prendre le visage par cœur, et celle-ci était la plus vraie qu'il avait vu sur la face de cet homme depuis une demi-heure.
- Et moi pour vous, de subir tout ça. Je suis convaincu que vous êtes innocent. Vous ne ressemblez pas à un tueur pour moi.
- Trente minutes et trente secondes ! Dois-je vous traîner jusqu'à la sortie ? Et je ne suis pas grossier mais ponctuel. Revoyez votre dictionnaire de définition monsieur Yagami, signala L d'une voix irritée devant la stupidité et la naïveté de cet avocat. Bravo monsieur Yagami ! Monsieur Teru si je battais des cils pour vous, pourriez vous diriger votre masse impotente vers la sortie sur votre droite ? Quarante secondes.
Ayumu se tourna en direction de la porte irritée. Il jeta un dernier regard de pitié à l'adolescent qui hocha simplement de la tête. L'avocat voulut rajouter quelque chose mais la voix synthétisée et désagréable se rappela :
- Cinquante secondes et deux dixièmes.
Ayumu grogna un juron entre ses dents alors qu'il éteignit l'enregistreur audio, avant de le mettre dans ses poches. Il amorça un pas vers les agents du FBI qui arrivaient quand la voix douce du garçon résonna dans le couloir :
- Au fait, je sais que c'est stupide à dire, mais j'aime beaucoup vos chaussures, fit Light en regard fixement les chaussures de son avocat, un sourire satisfait étira sa bouche dans un rictus.
- Battez plus des cils, monsieur Yagami ! Vous me décevez ! Trente-et-une minutes... Dieu -pas toi Light- ! Je retirerai cette minute sur votre prochaine visite.
- Merci du compliment, fit-il en ignorant difficilement le bruit de fond.
Pas seulement la voix synthétisée, mais la voix de son oncle.
Les chaussures, quelque chose n'allait pas avec ce cadeau de Mikami, l'avocat avait comme une sale impression. Le verre renversée hier droit sur ses chaussures. Et puis ce matin, il n'avait pas trouvé une seule paire dans son placard. Enfin comme par hasard, les seules chaussures qui étaient intact étaient celles que lui avait offertes son oncle. Ayumu ne croyait pas au coïncidence, mais Light ne pouvait rien avoir à faire avec ça, il n'avait sûrement jamais entendu parlé de Mikami. Non, c'était juste un sale coup de son oncle. Sûrement un coup puéril... avait-il mis un piège dans ces chaussures ? Ou peut-être c'était pour le rendre ridicule ? Parce que la couleur jurait énormément avec son costume.
- Les flatteurs se voient ouvrir toutes les portes, dit L en prenant un air de grand sage. Trente-et-une minutes et dix secondes. Sortez, vous dis-je ! continua-t-il en mordant d'un air stressé sur sa cuillère. Light retint son air blasé, L était franchement puéril.
Alors que l'avocat ignora à nouveau L, les dents serrées, pour répondre à Light ou du moins lui donner une petite parole réconfortante, L grogna mécontent :
- Et vous avez toujours mon enregistreur samsung, dépêchez vous de le rendre ou je vous fais arrêter pour vol.
« - Un appel de monsieur Bush.
L ne réagit pas immédiatement aux paroles de Watari qui se répercutaient en écho dans la salle, la voix amplifiée par un micro du dernier cri. Il regarda attentivement la pièce de son échiquier qui représentait le roi et le tourna entre ses doigts sous tous les angles, puis, s'apprêta à s'emparer du...
- L, c'est à propos de Kira.
L haussa juste un sourcil en direction de l'écran d'ordinateur en face de lui, où se dessinait le visage de Watari.
- Bien sûr Watari, de quoi d'autres pourrait-il bien s'agir ? Répondit le détective d'un air ennuyé.
Pour lui, L, il n'y avait rien à discuter, si Bush se pliait à ses directives et comprenait que lui, allait décider des directions qu'allait prendre le procès, tout se passerait bien.
- Je me doute bien que monsieur Bush n'est pas sur le point d'acheter mon vote pour ses prochaines élections. Sa fortune, malgré sa richesse, n'est pas aussi grande.
Watari garda un air neutre, et c'est avec la plus grande patience qu'il précisa :
- Je rectifie : à propos du possible procès de Light Yagami.
Le détective ne manqua pas de noter le changement de nomination. Watari avait changé Kira pour Light Yagami, s'attendait-il à le prendre par les sentiments ? Non, certainement pas. Watari détestait Kira, il ne l'aiderait pas, alors pourquoi insister autant sur le sort du garçon ? Pensait-il que ça l'intéressait tant que ça ? Il avait gagné, non ?
Les yeux de L se rétrécirent et il passa un bras autour de ses jambes fléchies pour les serrer davantage contre son corps, alors qu'il posa son menton sur ses genoux. Possible procès hein ? L se doutait qu'un problème de ce genre se profilerait, il espérait juste l'éviter.
- Très bien, consentit L, vaguement, en triturant à nouveau la pièce entre ses doigts. Met le sur l'écran 4.
L posa un pied à terre pour donner un coup, propulsant son siège à roulette de l'autre côté de la salle, sur un immense écran mural qui faisait la moitié du mur en largeur, et à peu près un tiers en hauteur. Le visage de Bush, avec comme fond son célèbre bureau de la maison blanche, alourdissait déjà les murs de son bureau d'un blanc immaculé -merci Watari- et donnait envie à L de recouvrir l'écran d'un drap mortuaire.
- L, le salua le président, assis dans son fauteuil. Son visage penché sur des pochettes noires sur la table, et le ton si dépourvu d'intérêt que L avait l'impression que Bush s'apprêtait à commander une pizza.
Le détective fit alors de même, et reprit là où Watari l'avait interrompu, son pied toujours à terre. Il se poussa vers l'arrière pour atteindre à nouveau son bureau où la figure de Watari restait immobile.
- Bonjour, monsieur le président, fit L, tout en roulant sur sa chaise.
Bush fronça les sourcils, la tête levée, en entendant sûrement le bruit des roulettes contre le carrelage.
- Je vous appel concernant la procédure judiciaire, ou plutôt le modèle de procédure judiciaire spécifique à traiter un criminel comme Kira, que vous avez envoyé. Bush voulut faire passer un petit rire, dans sa phrase, mais puisque L ne regardait pas, et n'avait pas l'air d'écouter, ça n'eut pas l'effet escompté.
L s'empara de son tube de colle, et de la plante des pieds sur la table, il se poussa pour rejoindre à nouveau l'écran numéro 4.
- Eh bien oui ? Il me semble que je l'ai simplifié et l'ai rendu suffisamment compréhensible, fit L en dévissant le bouchon de colle, d'un air concentré. Son regard ne prit même pas la peine de rencontrer celui de son interlocuteur.
- Quelle impolitesse, marmonna Bush. Sous-entendez vous que je suis stupide ?
- Plaît il ? Demanda L, d'un air niais, en levant la tête, les yeux grands ouverts, choqué. Essayeriez vous monsieur, dans votre grande sagesse de créer un incident diplomatique ?
Bush la bouche grande ouverte, s'exclama, outré :
- Quel incident diplomatique ? ! Vous n'avez aucune patrie !
Les grands yeux noirs de L s'élargirent davantage, il mit le tube de colle contre son cœur et souffla, l'air profondément blessé :
- C'est méchant, je vous insulte moi ?
L vit une veine pulser sur le front du président et estimant qu'il n'était pas sage de jouer avec le feu sans savoir ce qu'il allait brûler, posa son tube de colle sur l'accoudoir de sa chaise, gardant toujours le roi noir de l'échiquier dans l'autre main et répondit :
- Monsieur, excusez moi de piétiner votre temps si précieux. En quoi puis-je vous aider ? Termina L, d'une voix parfaitement posée en prenant soin de bien regarder le visage de Bush, ce qui aurait pu être pris comme une marque de respect, mais ça n'en était pas une, puisque Bush entendait juste sa voix robotisait et ne voyait aucunement son visage. Non, c'était juste pour voir si Bush comprenait qui maîtrisait cette conversation.
Bush fit comme si les excuses de L étaient sincères et dans sa grande mansuétude, il inspira un bon coup, ses narines se gonflèrent, mimant peut-être l'étendu de sa colère en réalité. Puis, le président jeta le dossier devant lui, un peu plus loin dans un geste méprisant.
- L, j'ai pris grand soin de lire votre proposition quant au déroulement du procès de Kira et-
- Excusez moi, fit L en tournant légèrement la tête derrière lui, pour voir le visage de Watari quitter l'écran. Le vieil homme sentait sans doute son irritabilité due au manque de sucre dans l'instant. Je crains de devoir corriger vos deux erreurs. Mon plan n'est aucunement une proposition, et ce Kira, dont personne ne connaissait le nom en a désormais un grâce à mes services, donc servez-vous en : Light Yagami.
La voix de L était plus sèche et moins posée qu'il y a une minute. Simplement parce que le détective était irrité devant ce qui allait être son plus grand défi après l'arrestation de Light. Faire comprendre au monde, qu'il ne s'agit pas d'un Dieu vengeur, pas d'une allégorie divine, mais d'un homme de chair et de sang, d'un criminel. Sa victoire, il la verrait seulement comme totale, s'il arrivait à faire comprendre aux juges, qu'il n'y avait rien à craindre de Kira, puisqu'il s'agissait... d'un enfant.
- Je préfère le voir immédiatement comme ce qu'il est, fut la réponse mordante de Bush, L le vit placer ses mains croisées sous son menton, l'air grave, en regardant fixement un écran qui ne devait que lui donner à voir le sigle L.
- Oui, moi aussi, répondit L, simplement. Mais si nous nous arrêtons sur ses considérations, je crains que nous n'aboutirons à rien. Qu'est-ce qui vous pose problème ?
- A part votre manque de respect ? Demanda le président, d'un air un peu plus léger, croyant faire une plaisanterie et s'attirer le bon œil du détective, mais celui-ci répondit d'un même ton sérieux :
- Résoluble, je n'aurais pas dû oublier de préciser. Excusez mon étourderie, mais je croyais m'éviter une évidence.
Le rictus du président tomba et il mima un toussotement, sûrement pour se retenir de l'injurier ou de pester, et reprit le dossier qu'il avait jeté devant lui :
- Vous proposez que la voix du Japon compte comme trois alors que celle des États-Unis comme deux. Cela est favorable à une non condamnation de Kira !
- Sujet suivant, commanda L en reprenant sa colle, pourquoi avoir voulu l'écouter ? La porte derrière lui claqua mais il ne prit même pas la peine de se tourner, concentré sur sa tâche à accomplir, c'est-à-dire coller la base de cette pièce d'échec.
Il arrêta son geste alors que la colle était sur le bord de la pièce et releva la tête, reniflant. Une bonne odeur parfumait l'air.
- Watari pose cette tarte aux fraises sur cette table, juste là, fit L en pointant du doigt d'une manière enfantine le carré de table étroit qui séparait le bord du meuble et le clavier d'ordinateur. Je pense vous avoir déjà expliqué mes raisons quant à ce choix.
- Je vou-
Watari posa la tarte aux fraises devant L et lui tendit avec un visage neutre une fourchette sur laquelle était enfourchée déjà une grande part de gâteau, surmonté d'un bon pourcentage de la bombe de chantilly.
- Coupons là l'intermédiaire et arrivons de suite à votre véritable problème, monsieur le président, merci Watari.
Les doigts de Bush étaient blancs, alors qu'il serrait le bord de son bureau. Ses narines gonflées le faisait penser à un buffle, vraiment, cet homme était trop facilement irritable. L'homme se leva de son fauteuil, qui roula de quelques centimètres vers l'arrière, à cause de la violence de la poussée.
La tête baissée quelques secondes, il la releva et dit d'une voix sérieuse :
- L, confiez nous Kira. C'est moi qui vous l'ordonne.
L n'écoutait plus que d'une oreille, la tarte en bouche. Bush pensant sûrement que le silence de L voulait dire qu'il avait toute son attention, il continua d'une voix étonnement maîtrisée.
- Comprenez bien, L. Vous n'êtes pas un imbécile.
L manqua de s'étouffer avec une fraise... quoi ?
- Pensez vous que vous allez mettre d'accord tous les pays qui ont le pouvoir de juger un génocide ? Parce qu'il s'agit bien d'un crime mondial ! Pensez-vous que nous allons tous nous plier à votre procédure ? Il faudra des mois de négociation ! Hurla Bush, finalement, avec bien plus de ferveur. Il relâcha la prise de ses doigts sur le bureau, et se tint plus droit, et plus calme tout à coup, alors qu'il reprit de cette même voix autoritaire :
- Kira doit être puni dans les plus brefs délais ! Le peuple perd foi en nous, ses dirigeants, parce qu'un adolescent a spolié notre pouvoir ! Un quart des citoyens du Japon ont plus de foi en Kira qu'en leur président ! Cet homme est un risque de guerre civile, comprenez vous, L ? Il faut le condamner maintenant. Il faut montrer notre pouvoir, si nous voulons rester crédible et retirer celui dont s'est emparé cet homme !
L posa sa tarte devant lui, Watari prit discrètement en main la fourchette loin de L. Le détective baissa immédiatement la tête vers le roi noir. Avant de le prendre en main, mais pas de sa manière habituelle, dans sa paume, la base était plate et le roi se tenait comme debout, fièrement, dans le trône de sa main. Il le regarda un moment, avant de répondre avec froideur :
- Ce que je comprends c'est que vous voulez assassiner Light Yagami. Ce que je comprends, monsieur Bush, c'est que vous voulez le faire passer pour un martyr ! Un pauvre enfant, que les États-Unis, ces gendarmes du monde, ont tué, sans procès, sans droit de se défendre. Un homme que le peuple voit comme un Sauveur pour l'instant. Cet homme a bafoué la justice, je veux le faire condamner, mais par la main de la justice. Cet homme qui s'est pris pour Dieu, je veux le faire condamner, mais par la main des hommes. La voix du détective avait quelque chose de plus vivant, remarqua Watari. Son regard était rivé sur le roi, le roi noir, le roi déchu.
L ne montra pas son étonnement lorsque le président hocha la tête lentement. Mais désapprouva d'un geste de la main.
- L'image de mon pays m'importe peu, L, quoique vous en pensez. Il s'agit pour l'instant de neutraliser ce danger mondial.
- Vous voulez simplement l'assassiner, répéta L, pas dégoûté par cette idée. Oh non, L au cours de toutes ses affaires avait trempé dans bien pire, ça l'étonnait déjà que le FBI n'avait pas encore tenté de kidnapper Kira. C'est juste que l'idée de voir Light mourir ainsi, abattu comme un chien : non. Ça n'allait pas avec sa grandeur.
Parce que même si Light était un criminel, un homme cruel dont la morale était terre inconnue, il avait fait de grandes choses. Derrière le mépris, la colère, la rancœur, demeurait toujours le respect.
Le visage de Bush resta fermé, comme sa bouche. Mais qui ne dit mot consent.
- Vous le condamnez coupable, alors même qu'il n'est pas passé par un tribunal. Je ne cautionnerai pas cette absence de justice.
L'air que le président des États-Unis avait tenté à tout prix de garder calme, l'image de l'homme de sang-froid avait disparu aussi brusquement que des papiers volèrent sur le bureau alors que son poing avait frappé avec une force étonnante la table. Ses mèches tombèrent sur ses yeux plissés, comme son front sous l'effet d'une colère mal contenue qui maintenant explosait. Ses narines se gonflèrent et se rétractèrent à un rythme irrégulier.
- Je ne vous demande pas votre autorisation, L ! Cracha Bush, littéralement, des postillons volèrent sur l'écran. L recula sa chaise, dégoûté. Ne sous-estimez pas ma puissance, vous ne pourrez pas le cacher éternellement !
L avait toujours les yeux fixés intensément sur le roi. Une telle grandeur. Souvent aux échecs, c'est la reine qui fait tomber le roi, enfin, dans sa stratégie. Pour lui, c'est inconcevable que le roi soit fait roi déchu par un pion.
Comme il lui était inconcevable que le seul homme qui lui soit égal, soit abattu comme on tue un porc. Non.
- Avez-vous fait part de votre intention aux autres pays concernés, monsieur le président ? Nous pourrions en discuter plus ouvertement, proposa L, avec tout son calme, mais dans les yeux noirs brillaient quelque chose de malsain.
- Cela doit rester entre nous, rétorqua Bush, la voix sifflante et les joues rouges. Faites votre choix, L, bientôt. J'ai fait le mien. Kira ne vivra pas assez longtemps rien que pour voir la porte de son tribunal. J'en fais le serment. Il ne le mérite pas !
Puis, tout à coup, le président se tourna vers sa gauche, traçant une ligne droite et raide sous son coup. L'écran devint complètement noir.
- L, le président a coupé la conversation », le prévint Watari.
Mais L ne regardait plus l'écran. Il avait les yeux fixé sur le roi noir dans sa main, puis, soudainement, il fit vaciller sa main grande ouverte sur la droite pour faire chuter la pièce.
Le roi roula jusqu'à un pied du bureau avant de ricocher à nouveau vers sa chaise.
La tarte avait un goût amer.
Light eut un regard méfiant en regardant l'échiquier devant ses yeux, puis L, l'échiquier à nouveau, puis L. Il pencha la tête davantage et renifla tout à coup une odeur forte et désagréable qui lui titilla les narines. Le détective était assis en face de lui, l'air fasciné par chacun de ses gestes, son visage penché au-dessus de la table était si près de celui de Light que le garçon pouvait sentir l'haleine du détective. Forcément, une odeur de chocolat.
« - L, va droit au but, qu'as-tu fait ? Soupira Light, trouvant la journée longue.
Le détective eut un immense rictus.
- Haha, j'ai trouvé le moyen de parer à tes coups en traître ! Tu croyais pouvoir m'assommer avec ce petit échiquier ! Eh bien revoie tes calculs !
Kira fronça les sourcils, L parlait beaucoup aujourd'hui. Sa bouche ouverte qui déblatérait des imbécillités était comme un appel pour lui dire : « vas-y ! Tire ! » Cette fois-ci l'adolescent n'attendit pas de jouer pour tenter de prendre un pion, lui faire avaler et si possible l'étouffer avec.
Les yeux de L s'agrandirent en fixant son regard sur les pièces.
Light en tira une vers le haut, mais rien. Elle resta coller sur le jeu d'échec. Le garçon fronça les sourcils et tira plus franchement, mais toujours rien, juste l'échiquier qui quitta la table. Light lâcha la pièce et le jeu retomba sur la table dans un bruit sourd. Il posa un doigt sur la case qu'occupait le pion et la frotta.
Il renifla à nouveau son doigt, avant de regarder subitement L, incrédule :
- Tu as collé les pièces ! Tu as collé les pièces sur l'échiquier !
Le détective hocha la tête fièrement, alors qu'il déclara :
- Je t'avais prévenu, plus de cavalier dans l'oeil, de tour dans la bouche ou de pion dans les cheveux. Le plateau de jeu sera cette table et non mon visage.
Light eut un rictus sardonique, hésitant entre être amusé ou sidéré par le comportement du détective.
- L, je t'en prie commence.
- Merci, pour ta galanterie, Light, fit le détective méfiant que Light accepte de jouer avec lui aussi facilement. Normalement, il aurait dû aller bouder comme un gamin capricieux sur son lit, refusant de jouer avec son pire ennemi, même si ça l'occuperait et L s'amuserait du comportement puérile. Ce serait une victoire joliment gagnée.
Mais voilà, quand L voulut bouger un pion, c'est l'échiquier qui se suréleva légèrement. Il avait aussi collé ses pièces de peur que Light ne les prenne aussi comme projectiles.
Il croisa le regard satisfait de Light.
Un ange passa.
- Alors L, commence, qu'est-ce que tu attends ? Demanda Light, d'une voix doucereuse.
Le détective sauta de la chaise sur les deux pieds, le visage contrarié.
- Match nul. Je t'avais dit que tu ne gagnerais pas cette fois Light, L s'en foutait d'être de mauvaise foi.
Il dut revoir son jugement quelques minutes plus tard, quand ce ne fut pas une pièce que Light, utilisa comme projectile, mais tout l'échiquier. C'était effectivement tout l'échiquier que Light lui lança en plein visage, les pièces étaient si bien collées que le fou s'enfonça presque comme un pique dans son œil avant de rebondir sur le sol.
Son visage lui grattait horriblement, et de ses yeux coulaient quelques gouttes, les pièces étaient entrées dans ses yeux avec une force prodigieuse.
Il détestait Light.
- Mon roi était dans ta bouche, non ? Echec et mat ? »
Pourquoi avoir traité Bush d'imbécile ?
Cet homme était tellement sensé !
Fin du chapitre !
Réponses aux reviews anonymes ou ne me caftez pas, je vous en remercie :
Ravy :
Hello, merci beaucoup pour les compliments ! Oui, il se passera plus que quelque chose entre les deux, d'où le rating M, mais pas dans l'immédiat, cette première partie de l'histoire sera assez soft, voir noire. J'espère que tu ne trouveras pas ce chapitre trop ennuyeux ! Et désolée pour le temps que j'ai mis à poster !
Vivi :
Coucou ! Même si c'est pas long, je te remercie de m'avoir mis un petit mot ! ça fait plaisir :)
Lost Breath : Culte, Dieu soyez en témoin !
Voilà, à bientôt j'espère ! Et je n'abandonnerai jamais cette fic ! Donc pas de peur si je mets du temps.
Bien à vous,
Shadow !