Auteur : Ryuh'

Disclaimers : Les personnages tels qu'Azaria, Nathanaël ou même le nouveau venu sont à moi!

Message : Plus ça va et plus j'ai des idées pour la suite! Après, savoir si l'inspiration va toujours être au rendez-vous... J'espère! Je prends mon temps mais je lâche pas! ;) D'ailleurs, j'ai vu que certain(e)s avaient ajouté cette histoire dans leurs favoris ou bien dans les alertes mais... J'aimerais bien que vous me donniez votre avis! Ca aide à progresser et à donner envie d'écrire, je suis sûre que vous savez ce que c'est... :) Dans ce chapitre, nous avons l'apparition d'un nouveau personnage! J'espère qu'il vous plaira... Autant qu'à moi! Je vous réserve de sacrés surprises alors... Tenez-vous prêt(e)s! (Y a-t-il seulement des garçons qui lisent cette histoire? xD) Enjoy ~


Si on m'avait dit un jour qu'étant transformé en un morpion d'humain je passerais mon temps à fuir des créatures qu'en temps normal j'aurais expédié au Tartare... Je lui aurais ri au nez. Et proprement. Avec les intérêts. Mais présentement, j'étais beaucoup plus occupé à tenter de ne pas trébucher grâce à mes deux adorables pieds. Assez difficile en somme. Particulièrement quand une demoiselle en détresse s'accroche à vous comme une bouée de sauvetage alors que vous faites la moitié de sa taille et de son poids aussi... Probablement. Nous étions essoufflés et effrayés, il faut le reconnaître. Azaria était proprement terrorisée – il y avait de quoi malheureusement - et pour ma part je n'étais pas au quart de ma forme. Dire qu'en temps normal, j'aurais pu...

- S... Stop! J'en... Peux plus! S'écria mon indésirable compagne d'infortune. Nous ne croisions plus personne dans les couloirs et je dois avouer qu'il était ainsi plus simple de filer, quoi que plus effrayant aussi. Claudiquant, elle se tenait les côtes, signe évident de souffrance, non loin de là où les fils récemment installés pour coudre sa blessure devaient la démanger. Je ne fis aucune réflexion sur ses joues rouges, son souffle rauque, ses cheveux dans tous les sens ou son regard hagard. J'avais d'autres créatures à fouetter. Elle... Peut-être qu'elle a abandonné? Sa voix n'était qu'un murmure tremblotant que je comprenais parfaitement. Quoi de plus normal?

- Non. Elle n'abandonnera pas. Pas tant que nous s... Que tu seras en vie. J'avais failli lui rappeler qu'elle n'était pas sa seule cible. Je lui étais reconnaissant – quoi qu'assez étonné – qu'elle ne me pose en ces instants aucune question, que cette dernière soit d'ordre rhétorique ou hystérique. Et pour cela je l'aurais presque bénie s'il m'avait été donné la possibilité et l'occasion de le faire. Mais laissons là mes divagations religieuses.

J'étais celui qui gardait la tête froide. Celui qui paraissait le plus jeune mais sur qui reposait la réussite de notre dangereuse entreprise. Il est vrai que j'avais ouvertement provoqué Lamia. Il était donc normal que je sois celui qui en pâtisse. Mais pour une raison qui ne m'était plus obscure – il était à présent clair que je m'évadais d'un hôpital de San Francisco en compagnie d'une charmante mais diablement tarée demi-déesse, les Dieux m'en gardent –, la vilaine ex-copine du Dieu des Dieux avait décrété, sur ordre d'un bon Samaritain que je remercierai un de ces jours, qu'elle nous éliminerait. Tous les deux.

Un bruit de talons aiguilles retentit à nouveau au détour d'un couloir et le bruit aussi lancinant que stressant s'amplifia, raisonnant le long des murs, se répercutant de sorte à brouiller nos sens. Je sentis mon rythme cardiaque s'emballer bien malgré lui – et bien malgré moi aussi d'ailleurs - et je pouvais sans peine deviner qu'il en était de même pour celui d'Azaria. Nous ne pouvions donc pas deviner d'où provenait cette menace latente. Devant nous, ou bien derrière, dans un autre couloir? Nous n'avions présentement pas d'échappatoire et je ne tenais pas à me risquer à tenter le Diable – quelle ironie... - à choisir l'une ou l'autre issue. Mais rester ainsi immobiles et à découvert en plein milieu d'un couloir n'était pas non plus ce que j'appelais une sortie de secours. Avec une rapidité qui m'était propre, j'analysai les alentours alors que le claquement des talons sur le sol ne cessait de s'accélérer et de s'amplifier plus encore si c'était possible. Soudain, une infime possibilité de fuite m'apparut sous la forme d'une large bouche d'aération, juste assez grande pour laisser passer l'humaine et donc moi-même. Sans ménagement, je la bousculai jusqu'à cette dernière et nous tirâmes comme des forcenés sur la grille jusqu'à ce que cette dernière ne cède sous nos efforts. Je fus d'ailleurs obligé de pousser à nouveau la gamine pour qu'elle pénètre dans le conduit car son regard peu assuré et ses tremblements l'avaient un instant figée, ses deux pupilles émeraudes vissées sur la plus proche porte coupe-feu à battants, comme si elle s'attendait à voir Lamia surgir d'un coup. Ce que je craignais aussi.

- Avance! Ordonnai-je sans ménagement à la loque qui me précédait. OUI. La loque. Parce que vous l'auriez vu...

- Mais je vais où? Se plaignit-elle incertaine en rampant, son corps étendu et ses pieds manquant à chaque centimètre de notre progression de m'arracher la peau du visage. Heureusement qu'elle était pieds nus.

- Ben toujours tout droit ducon! Tu vois d'autres chemins?! Crachai-je par simple envie mais surtout sous le coup du stress. Putain mais ça t'arrive de couper tes ongles des pieds? Tu vas finir par me scalper! Scandai-je d'un air dégoûté et scandalisé à voix basse. Et malgré ça, celle-ci résonna dans le conduit en métal qui ne cessait de bifurquer, gauche, droite, gauche, encore gauche...

- Me tente pas... Se contenta-t-elle de grogner entre ses dents parfaitement alignées, que je devinais serrées par l'effort fourni, la peur mais aussi la colère.

Je préférais ce type de comportement. Si elle avait le temps de m'envoyer chier, même à moindre échelle, c'est que cette folle allait mieux. Enfin je l'espérais. Car pour l'instant, elle était mon seul point de repère dans cette époque.

Au bout d'un temps qui me parut interminable - et s'il me paraissait interminable, c'est qu'il l'était ! – Azaria stoppa net sa progression chaotique et je manquai une fois de plus de m'empaler la tête sur ses ongles de pieds.

- Put…

Mais avant que je n'aie pu protester/gueuler/maugréer – rayez la mention inutile -, un étrange bruit, un peu similaire à celui d'un serpent qui se glisse dans un conduit d'aération – au hasard hein, évidemment – résonna. La chasse reprenait.

- Grouille ! Prends à gauche, ça devrait déboucher dehors ! La pressai-je en tentant difficilement de la pousser à avancer, mes mains bousculant ses chevilles et ses cuisses.

J'évitai d'ailleurs à ce moment précis de justesse un coup de pied en me plaquant contre l'une des parois de métal.

- Garde tes mains dans ton short ! L'entendis-je pestiférer alors qu'elle reprenait sa course avec plus de vigueur.

Je fus tenté, mais alors outrageusement tenté, de la titiller encore – que voulez-vous, c'est dans ma nature ! – mais mon bon sens – et oui j'en ai ! Etonnant n'est-ce pas ? – me convainquit plutôt d'accélérer moi aussi la cadence. Quelques secondes plus tard, une fois la grille défoncée et tombée sur le sol, l'extérieur s'offrait à nous. Dégringolant dans les buissons les plus proches avec une classe intersidérale – si, si, c'est possible -, nous roulâmes au sol, l'un contre l'autre, écoutant les bruits alentours qui se résumaient à des sons de circulation routière et à nos respirations erratiques. Il nous fallut encore quelques secondes supplémentaires pour être capable de calmer nos rythmes cardiaques et pour retrouver la parole.

- Et maintenant on fait quoi ? Me demanda à voix basse la demoiselle en me fixant de ses prunelles émeraude, non sans jeter de fréquents coups d'œil autour de nous.

- Comment ça on fait quoi ? Je crois que t'as pas bien compris là… A partir de maintenant, c'est chacun pour soi. Tu te démerdes. Basta. Dégage. Tu veux que j'explicite un peu plus ma pensée en te filant un coup de pied au cul ? Moi ? Lunatique ? Voyons… Si j'ai sous-entendu qu'elle était mon seul repère dans cette époque ? … Probablement. Fichue fierté qui ressort peut-être ?

J'aurais dû le savoir, j'aurais dû deviner qu'elle me ferait regretter un jour mes paroles car aussitôt, ses prunelles emplies d'espoir s'obscurcirent et j'eus alors le loisir de voir ses sourcils symétriques se froncer.

- Tu m'as fichue dans la merde alors tu vas m'aider.

- JE t'ai fichue dans la merde ?! Non mais écoutez-la cette gamine ! Tu t'es fichue dans la merde toute seule en venant au monde ! Crachai-je mon venin avec satisfaction. Et ma remarque fit mouche puisqu'une voile de tristesse passa momentanément dans son regard avant qu'elle ne reprenne son air coléreux.

- … C'était mesquin.

- Oui, je sais. Ca t'a blessé j'espère ?

- Tu vas me le payer.

- Mais oui, c'est ça, allez. Sans plus de cérémonie, je me mis accroupi alors qu'elle me lorgnait dessus comme un chihuahua cherchant le point faible de sa proie. Sauf que c'est moi le prédateur dans l'histoire. Enfin là, c'est l'ex de Zeus mais bon, on va pas chipoter.. Ciao. La saluai-je presque gaiement en me remettant prestement sur pieds afin de quitter notre sympathique bosquet… Avant de me retrouver face à Lamia.

- Coucou mes mignons !

Ah euh… Non. Pas coucou. Je crois pas nan…

- Dégage ! Hurlai-je subitement à Azaria en amorçant un mouvement de recul. Mais cette fois-ci, c'était pour qu'elle prenne la fuite car déjà, la poigne de la vile sorcière à corps de serpent se refermait sur ma gorge.

Oui, je sais, je change souvent d'humeur, c'est ça la schizophrénie, que voulez-vous.

J'eus tôt fait de suffoquer car il faut dire que cette saloperie de monstre n'y allait pas de main morte – sans mauvais jeu de mot –. 10/10 pour sa technique de strangulation ! Elle me fixait droit dans les yeux, avec délectation. Elle ne prononça pas un mot à voix haute mais j'eus le loisir de voir ses lèvres fendues d'un sourire remuer et, lisant sur ses lèvres charnues, il ne me fut pas difficile de comprendre ce qu'elle me disait.

Ce n'est que le commencement. Vous tomberez, ils tomberont, tous autant qu'ils sont et je gravirai les marches de ma déchéance grâce à mon nouveau maître !

Pas que la mégalomanie me gêne, loin de là, j'ai moi aussi mes moments de fou furieux, mais là… Elle a craqué son slip ? Sincèrement ? Déjà, je sais qu'elle a un maître, un type, un sacré salaud, qui en veut à tout le monde, que je ne connais pas, enfin je présume, mais qui veut ma peau. S'il veut atteindre mon paternel via cette manière de procéder, soit en m'assassinant, il peut toujours courir pour que le vieux lève ne serait-ce qu'un petit doigt ! Ah ! Que je regrette de ne pas pouvoir me défendre. Quoi ? Comment ça je peux me défendre ? Vous rigolez oui ! Avec un corps de gamin de dix ans, des pouvoirs inexistants et… Une demi-déesse terrorisée ? Sérieusement ?

D'ailleurs… Où était-elle passée elle ? Pas que je m'en inquiète, soyons clairs mais… Dans un sens, j'aurais aimé qu'elle ait foutu le camp, histoire que ma mort ne soit pas vaine. Mais au vu de la situation actuelle, je ne pouvais pas me détourner pour savoir où était Azaria. J'avais déjà bien assez à faire en tentant de faire desserrer sa prise à Lamia. Inutilement puisque mes griffures et autres pressions exercées sur ses mains et ses poignets devaient plus ressembler à des effleurements pour elle. Surtout, je devais plus me blesser qu'autre chose, esquintant le bout de mes phalanges en grattant et griffant sa peau écailleuse. Oh et sa langue fourchue… Mais berk ! BERK ! Quelle manie que de me la passer sur le visage ! C'est visqueux, ça pue et… Ah ! Elle me donne la gerbe ! En plus de m'étouffer.

Un hoquet m'échappa lorsque sa poigne se raffermit encore si cela était possible et je sentis mon corps se rétracter, comme s'il cherchait à puiser dans des forces jusque là inexistantes. Qu'est-ce que j'aurais donné pour ressentir dans les veines l'affluence de mon ascendance, le parcours d'une étincelle magique électrisant mon corps ! J'aurais vendu père et mère ! … Enfin père pour être plus exact. Mais rien. Juste la pulsion difficile du sang dans mes veines qui m'assourdit lentement mais sûrement. Je me tortillai. Elle ne bougea pas d'un millimètre. Je tentai de l'insulter mais les mots s'étouffèrent dans ma gorge, tout comme mon souffle à présent presque inexistant. Elle rit à gorge déployée, une lueur assassine dans ses yeux fendus en leur centre. Je ne voulais pas lâcher prise. Pas encore. Pas tout de suite. La seconde main du monstre me griffa alors violemment la joue, faisant jaillir du sang dont la couleur oscillait clairement entre le carmin et l'or, signe que mon ascendance ne pouvait en aucun cas passer inaperçu. Sa langue s'empressa de lécher la plaie d'une façon ignoblement répugnante alors que la douleur irradiait mon visage. Et un cri strident fendit la nuit. Mais ce n'était pas le mien.

- Nath !

Le choc fut rude. Enfin plus pour Lamia que pour moi. J'eus tout juste le temps de voir une vive lumière foncer sur la sorcière avant de me retrouver projeté violemment en arrière pendant que, sous le choc, la créature lâchait prise. J'échouai lamentablement et toujours aussi douloureusement dans un large parterre d'aubépine quelques mètres plus loin – je retiens les bâtards qui en avaient planté là ! – avant de grogner en sentant le souffle revenir dans mes poumons. Je mis du temps, il me semble, à retrouver un rythme cardiaque somme toute normal alors que je crachai presque mes tripes. Mais bien vite la réalité me rattrapa lorsque je sentis une poigne agripper mon épaule et, dans un geste purement défensif – quoi que ridicule – je lançai mon poing qui n'atteignit que le vide. Ma vision était toujours aussi trouble et mes sens bousculés mais je pus soudain sentir une douce chaleur m'envelopper. On m'enlaçait. Je ne comprenais pas encore très bien les mots qui m'étaient adressés mais… C'était rassurant. Je pense.

- … Va aller. On va partir. Tout va bien. Je suis là. Tu es vivant. On est vivant… Oh mon Dieu j'ai eu tellement p…

- Azaria ! Mon Dieu ! Tout va bien ?

Mon audition revint aussi vite qu'elle s'était envolée et j'eus une grimace en entendant une voix inconnue nous alpaguer moi et Aza… Quoi ?

- T'as deux s'condes pour m'expliquer pourquoi tu es en train de me câliner.

- Euh j… En fait…

Ma voix siffla alors que je prenais conscience de notre position – pas que mon visage dans sa poitrine ne me dérange, pas la peine de le nier –, coupant ainsi la demoiselle dans son monologue effrayé. Et aussi sec, elle cessa son étreinte et se remit debout sur ses jambes flageolantes alors que je me frottais la tête. Non. Elle m'avait fait un câlin et j'avais osé – OSE – trouver ça apaisant, agréable, rassurant… Di Immortales ! Je déteste ma condition. Je déteste cette gamine. Je déteste tout.

- C'est qui ? La voix masculine me sortit à nouveau de mes flagellations mentales.

- Quand on est poli on commence par se présenter. Persiflai-je avec bien du mal.

Levant mon regard sur le jeune homme face à moi, je le vis soutenir la demi-déesse de son corps d'athlète. A première vu, il devait faire presque deux fois ma hauteur et trois fois ma largeur. Mais à choisir, j'avais plus peur de Lamia que de sa dégaine d'ours. Possessivement, ses mains maintenaient la taille d'Azaria alors que cette dernière me regardait sans mot dire. Allait-elle me faire payer mes précédents affronts ou attendrait-elle plus tard ?

- Allons-nous-en avant que l'infirmière ne revienne. Et il tourna les talons en entraînant la folle qui me collait aux basques depuis un moment déjà.

Ca, ce n'était pas une réponse à laquelle je m'attendais. Généralement, face à mon arrogance – oui je suis arrogant, ça pose un problème ? – et mon impertinence – encore quelque chose à dire ?! -, les gens avaient plutôt tendance à vouloir me recadrer. Mais là… Il se prenait pour un mannequin ou quoi avec ses yeux d'un bleu lagon et ses cheveux blonds courts et coiffés en brosse ? L'archétype du mec qui fait tomber toutes les nanas dans son établissement scolaire. Berk. Les humains sont tous des…

- Je ne pars pas sans lui.

Ah non, pas tous des cons. Mademoiselle Black me faisait-elle l'honneur de requérir ma présence à ses côtés ? Pour me coller des emmerdes jusqu'au cou ? Visiblement, la vengeance était pour Azaria était un plat qui se mangeait froid. Je dégusterai mes conneries et mes remarques, à n'en point douter mais plus tard, au moment où je m'y attendrais le moins probablement.

L'ours se figea lorsque sa copine – pas que ça m'intéresse leurs histoires éphémères d'humains pathétiques – le planta pour revenir dans ma direction. Je n'avais toujours pas bougé de mon piquant parterre et je louchai un instant sur la main qu'Azaria me tendit. Je n'avais pas envie de m'enfoncer encore plus dans la merde dans laquelle j'étais fourré. Mais vu le regard de Mister Univers – signifiant clairement « Pourvu qu'il ne vienne pas… » - je saisis la main de la graine de Dieu. Elle me tira des buissons et me permit de me mettre debout, allant jusqu'à m'épousseter – comme une grande sœur le ferait avec son frangin… Elle a cru elle ou quoi ?! – avant que je ne la rappelle à l'ordre d'une petite tape sur la main et d'un claquement de langue agacé. Mais la tête du Musclor blond valait le détour. Rien que ma présence le faisait chier. Le fait que la folle se soucie de moi le faisait chier. Ca se lisait dans ses pupilles fatiguées. J'allais adorer le faire chier.

- Montez. Finit-il par soupirer lorsqu'Azaria et moi nous recommençâmes à nous fixer à demi en chien de faïence. A moins que vous ne vouliez que la nana ne revienne. Pas sûr que mon pare-choc n'apprécie une seconde confrontation. Nous indiqua-t-il en désignant d'un index provocateur le pare-choc de son pick-up couleur sable. Ce dernier avait semble-t-il ployé en rencontrant le corps écailleux de notre agresseur.

- Où est Lamia ? Réalisai-je soudainement en tournant la tête, avisant les alentours. Mais pas de traces de la sorcière. Mon regard se porta donc sur le sportif – enfin je présume – qui se tenait appuyé contre la portière de sa voiture, les bras croisés sur sa poitrine et un petit sourire fier mais discret plaqué sur son visage carré alors que l'un de ses sourcils parfaitement symétrique à l'autre se soulevait.

- L'infirmière là ? Je l'ai renversée avant de rouler à nouveau dessus. Histoire de m'assurer qu'elle avait son compte. Quand je suis descendu j'ai juste vu un nuage de poussière doré s'estomper. Je ne sais pas où elle est partie et à dire vrai… Tant qu'Azaria va bien, je m'en contrefiche. Enonça-t-il seulement d'un air nonchalant – qui me donnait envie de le baffer –.

Contrairement à ce que je pensais, il semblait capable de faire de très longues phrases. Suintantes de supériorité, presque… Azaria s'était déjà installée côté passager de l'automobile et bientôt, elle fut suivie par l'autre inconnu qui démarra aussi sec la voiture. Je fus donc obligé de courir pour pouvoir m'installer avant que, taré du volant, le mec ne démarre dans un grand dérapage. Décollant de mon siège, mon crâne vint heurter le pare brise.

- Par l'oeil moisi des Moires, tu peux pas faire gaffe espèce de merde ?! Hurlai-je d'une voix beaucoup trop stridente pour être crédible. Mais ce qui me mit le plus hors de moi ce fut le petit sourire à peine désolé du blond.

- Oups.

- Dean… S'te plaît. Geignit Azaria en laissant sa tête retomber sur l'épaule du conducteur alors qu'à mon tour, je m'empressai de m'attacher. Elle ne releva même pas mes insultes. Dean donc…

- Désolé, j'aime juste pas sa façon de se comporter. J'ai pas pu m'empêcher de le recadrer.

- Laisse, il n'est pas… Méchant ? Enfin laisse juste… S'il-te-plaît.

- Ne vous dérangez pas hein, faites comme si je n'étais pas là. Signifiai-je en portant une fausse attention à mes ongles crasseux. Aucun des deux ne broncha mais je pouvais voir le type appelé Dean me jeter des regards en coin.

Son silence fut tout à fait relatif. Il attendit qu'Azaria s'endorme d'épuisement, vaincue par le trop plein d'émotions qu'elle venait de subir, pour entamer une conversation. Ou les hostilités, voyez ça comme vous le voulez.

- T'es quoi au juste ?

Quoi. Pas qui. Hm…

- Qu'est-ce que ça peut te faire ?

- Ca peut me faire que t'attires des emmerdes à Azaria et rien que ça, ça me fout en rogne.

- Ben quoi ? Tu défends ta copine, Dean – c'est quoi ce nom pourri d'ailleurs ? –?! Ben sache qu'elle se fout dans la merde toute seule, moi je suis juste un facteur aléatoire de l'équation, je me trouvais au mauvais endroit, au mauvais moment.

- Ce n'est pas ma copine et…

- Vraiment ? Ouille. En même temps, ça se voit. Vu comment elle te repousse sans vraiment y faire attention.

- Elle ne me repousse pas, on est amis, c'est tout. Il venait d'entrer dans mon jeu sans même y prendre garde.

- Vu comment tu la tenais possessivement… J'en doute. Et je m'y connais en relations. T'es juste un pauvre demeuré amoureux d'une fille qui ne te verra jamais que comme un frère, un meilleur ami. Pauvre petit cœur brisé… Sifflotai-je en portant mon regard pourpre sur son visage. Etrangement, je n'y trouvai aucune émotion. Si ce n'est une étincelle d'amusement dans le coin de ses prunelles.

- Tu n'es pas humain et t'as l'air d'avoir quelques bonnes dizaines d'années à ton actif. Des centaines peut-être... ?

- Qu'est-ce qui te fait dire ça ? Demandai-je, aussitôt sur mes gardes et coupé dans mes machiavéliques plans pour le blesser. Son sourire s'élargit. Merde. J'étais le demeuré dans l'histoire. Piégé dans son jeu.

- « Je m'y connais en relations. ». T'es bien présomptueux pour un gamin sensé avoir dix ans. Et sincèrement… Vu ton aura tu peux pas être humain. C'est trop noir.

- Merci pour le compliment… Mais c'est quoi votre délire d'aura ? Vous êtes tous voyants ? C'est quoi votre groupe d'amis ? Une secte ?

- Azaria ne voit rien. On t'a trouvé dans les poubelles et Az' a décidé de te ramener chez elle malgré mon avis négatif. T'es un peu comme un chiot abandonné tu vois. Apparemment tu t'es réveillé juste après que je sois parti. Je suis donc celui qui t'ait déposé chez elle alors qu'on se baladait. T'arrache pas la tronche avec un merci, j'en veux pas. S'empressa-t-il de lâcher avant que je ne lui lance une vacherie. Mes mains vinrent serrer mon short et ma mâchoire claqua d'agacement.

- J'allais pas te remercier.

- Je m'en doute bien, vu ton arrogance, je doute que tu saches épeler « politesse » ni même que tu saches ce que cela veut dire.

- Tu devrais surveiller tes paroles. Grondai-je en rendant ma voix aussi rauque que possible. Si mes yeux avaient pu le foudroyer... Il serait tombé raide mort.

- Ou sinon quoi ? Tu vas me mordre avec tes dents de lait ? Te briser les pieds sur mes tibias ? Au fait, sympa le tee-shirt petit poney.

Oh l'enflure, j'allais le… Une claque nous cueillit l'un comme l'autre à l'arrière du crâne.

- J'essaie de dormir alors Dean tu conduis aussi loin que possible sans la ramener et Nathanaël… Tu fermes juste ta gueule sinon, périphérique routier ou pas, je te balance par la fenêtre.

Ca avait le mérite d'être clair.

- Maintenant excusez-vous.

J'eus un moment de latence. Aha… M'excuser ?

- Pardonne-moi Dean d'avoir froissé ta sensibilité émotionnelle et d'avoir été impoli.

Traduction : Tu peux aller te faire entuber connard, je vais te pousser à bout, te briser et tu ramperas à mes pieds misérable vermine. A quelques détails près.

- Je t'en prie Nathanaël. Excuse-moi aussi pour ma conduite et mes questions impersonnelles.

Sous entendu : Je vais te harceler de questions, et si tu m'emmerdes, c'est sur toi que je ferais rouler mon pick-up. C'est dingue comme ses yeux azurs étaient expressifs à ce moment-là.

- Bien. Maintenant… Bonne nuit. On reparlera de tout ça demain. C'est ça. Décrète ça toute seule sans nous consulter, on va rien te dire. Et l'autre folle se rendormit aussi sec après s'être lovée contre le corps de son meilleur ami dont je ne distinguais que vaguement les vêtements… Du moulant. Tapette.

Nous échangeâmes un regard blasé et vaguement menaçant. Il allait me faire royalement chier, je le sentais… C'est dingue la propension qu'avait l'être humain à m'attirer des ennuis et à me foutre les nerfs en pelote. D'abord la folle et maintenant le meilleur pote possessif. Karma, si t'as encore des crasses à me faire, c'est le moment. Quoi que je ne pense pas pouvoir tomber sur pire… Enfin, faut jurer de rien.

La voiture fut bien vite enveloppée par les ténèbres, seulement éclairée par les phares des voitures que nous croisions de temps en temps en sens inverse. Je ne savais pas où nous allions puisque seul le maître de ce véhicule semblait connaître notre future destination.

Ma vie prenait encore un tournant bien emmerdant. Destinée de merde. Karma de merde… Vie de merde. Aha.


Chauffard (n, m) : 1. Connard inconscient qui conduit comme si sa vie ou celle des autres en dépendait, ce qui est souvent le cas d'après le connard en question, et qui cause des situations parfois chaotiques et bien souvent mortelles. 2. Illustre inconnu qui, à défaut de vous tuer, peut parfois vous sauver la mise. Synonyme : SuperHéros.

Source : Nathanaël.