Bon sang!

Ça fait une semaine entière jour pour jour que j'essaie de poster ce foutu chapitre! Il était temps! Le site n'arrêtait pas d'afficher un message d'erreur... Je suis désolée de vous avoir fait attendre comme ça. J'espère que la qualité du chapitre compensera le retard que le site a occasionné!

Grrr. Je suis fâchée, alors je vais vous laisser sans blabla, bon.

Bonne lecture!

Lexa Nedra


Une leçon d'honneur

Chapitre 26
La Confrérie de l'Ombre

Hermione était certaine qu'en temps normal, la vue du haut de la montagne devait être imprenable, mais les circonstances qui l'emmenaient là l'empêchaient de pleinement savourer le tableau hivernal. Le village de Pré-au-Lard, le parc de Poudlard et son château ainsi que la Forêt Interdite paraissaient si petits qu'elle avait du mal à évaluer l'envergure de ce qui se tramait dans les tréfonds de l'illustre école, juste là, sous leur nez. C'est uniquement en faisant de nouveau face à la majestueuse silhouette de Poudlard qu'elle avait pris conscience à quel point le choix du refuge de la Confrérie de l'Ombre était outrageant à l'égard du bâtiment. C'était comme si, en retournant entre les murs qu'ils avaient eux-mêmes salis, ils se moquaient de tout ceux qui avaient voulu les chasser de là. En fait, ce devait être précisément leur but.

Elle resserra l'étreinte de ses propres bras autour de son corps et le nuage immaculé que sa bouche exhala brouilla sa vue. Dans une grotte située à une telle altitude, le vent était extraordinairement mordant, aussi la buée fila aussi subitement qu'elle était apparue, balayée par une bourrasque sans pitié qui la fit vaciller. Derrière elle, dans la tente qu'Harry avait habilement amarrée au plancher de roc glissant, des parasites affrontaient la voix de Celestina Moldubec à la radio. Plus discrètement mais lui lacérant pourtant les entrailles, les murmures d'Harry et de Drago chuintaient à ses oreilles ; ensemble, ils peaufinaient le plan avant le grand départ qui aurait lieu plus tard dans la journée. Hermione avait délibérément tenu à ne pas y participer histoire de ménager ses émotions qu'elle avait à fleur de peau. De toute façon, elle lui avait suffisamment dicté la conduite à adopter une fois qu'il serait rendu dans la Chambre des Secrets.

Ils s'étaient tous mis d'accord sur trois jours de noyautage ; Drago rejoindrait leur destination le soir même, tenterait de tirer un maximum d'informations dans un intervalle de trois jours et s'enfuirait ensuite du château, bredouille ou pas, avant que la nuit ne tombe sur le terme. Hermione s'était tue à ce propos, mais elle s'était personnellement jurée qu'elle irait elle-même chercher Drago s'il n'était pas revenu avant minuit ce jour-là.

Les crépitements de la radio s'intensifièrent et brisa sa focalisation. La voix d'un animateur – la même que la veille – s'éleva soudain au beau milieu d'une phrase exubérante :

« …de la nouveauté! Oui, nous l'avions tous craint, mais la bande d'Harry Potter serait apparemment en sé-cu-ri-té! (Le cœur d'Hermione se contracta subitement. Elle pivota sur elle-même, toute ouïe.) Ronald Weasley, l'un de ses fidèles compagnons, a refait surface hier au matin en transplanant dans la demeure familiale et se porte très bien… »

- Hermione! lança la voix fébrile d'Harry alors qu'elle se dirigeait déjà vers la tente. Hermione, viens vite!

Elle y pénétra juste à temps pour entendre la suite. Harry et Drago étaient penchés sur la table, attentifs.

« Puisque des agents de la Brigade de Police Magique étaient déjà sur place afin d'assurer la sécurité de la famille Weasley qu'ils avaient cru menacée, le jeune Ronald a aussitôt été interrogé sur la raison de leur courte escapade. (Hermione pria le ciel que la colère de Ron ne l'ait pas poussé à dévoiler des informations révélatrices sur leurs activités.) Il est toutefois à noter qu'Harry Potter, Hermione Granger et Drago Malefoy, les jeunes avec qui il se tenait lors du signalement de leur disparition, ne l'accompagnaient pas lorsqu'il a transplané. Plutôt étrange, non? En fait, selon les dires de Weasley, il ne s'agirait que d'un banal accès d'adrénaline qui aurait poussé le groupe d'amis à quitter leur zone de confort… Mais est-ce la vérité? La réputation d'Harry Potter n'est pas à faire ; depuis quand se jette-t-il lui-même dans la gueule du loup-garou?

Alric Malone, chef de la BPM, (Drago ferma les yeux, exaspéré par la simple prononciation de ce nom qui ne semblait pas vouloir les quitter) doute de la raison qu'a communiqué Weasley. A-t-on vraiment affaire à un accès d'adrénaline? Pourquoi Weasley serait-il revenu sans ses amis? À la place de Malone, je ne crierais pas marmite. Il serait même actuellement en pourparlers avec le Ministère de la Magie afin d'avoir recours au Veritaserum pour lui tirer les veracrasses du nez. (Harry, Drago et Hermione s'échangèrent un regard inquiet. Le blondinet semblait particulièrement scandalisé.) Malone a-t-il raison d'employer de tels moyens pour une histoire qui ne pourrait effectivement qu'être une simple quête d'adrénaline ou ferait-il preuve d'une excessive vigilance qui se rapprocherait de la paranoïa?

Quant aux questions de Malone en lien avec leur liaison avec Drago Malefoy, le fils du dangereux criminel Lucius Malefoy, Weasley refuserait catégoriquement d'émettre un quelconque commentaire, ce qui aurait achevé Malone de ne pas laisser tomber l'affaire et de persister jusqu'à ce que lui et son équipe mettent la main sur Harry Potter et ses deux acolytes qui restent toujours introuvables. Non mais tout de même, pourquoi Weasley refuse-t-il tant de parler s'il ne s'agit, comme il le prétend, que d'une insignifiante escapade? C'est louche. Très louche…

Plus de détails seront communiqués lorsque nous saurons si Alric Malone aura obtenu ce qu'il souhaite auprès du Ministère. Nous espérons que ce sera dans le bulletin de demain.

Le nouveau single de Celestina Moldubec vient à peine d'être dévoilé qu'il grimpe déjà en première place du palmarès de- »

Harry avait fermé la radio. Un lourd silence s'installa, chacun fixant un point fixe d'un air accablé.

- Il ne nous a pas dénoncé, constata sobrement Hermione au bout d'un moment.

- Bien sûr que non, rétorqua vivement Harry, consterné. Qu'est-ce que tu croyais?

- Il était furieux en quittant la tente…

Sa voix s'était brisée. Drago, perturbé par la réaction que cette constatation avec suscité chez elle, l'observa avec désarroi. Regrettait-elle son départ?

- Ron n'a simplement pas voulu participer à notre quête. Ça ne veut pas dire pour autant qu'il souhaite nous mettre des bâtons dans les roues, Hermione, trancha Harry comme si elle venait de d'insulter ses parents. Nous sommes amis. Il le sait tout autant que nous.

Drago se permit d'émettre un très bref soupir ironique. Harry et Hermione le regardèrent tandis que le blondinet croisait les bras et s'éloignait en direction d'un mur de toile si usé qu'il en était quasiment transparent. Le silence le convainquit de s'exprimer :

- Oui, un ami qui traite la fille qu'il aime de garce et qui abandonne ses meilleurs amis dans une situation critique pour ce que j'ai cru entendre être la deuxième fois.

Il se retourna, la mine sombre.

- Ce n'est pas comme ça que je définirais un « ami », ajouta-t-il en entourant le dernier mot de guillemets invisibles.

Ni Harry ni Hermione ne trouva quoique ce soit à répliquer, car ils savaient très bien, au fond d'eux, que Drago avait raison.

- Ça me consterne, poursuivit le blondinet. Pour ma part, il aurait aussi bien pu tout balancer à Malone que ça ne changerait rien. Il vous a trahi. En fait, il nous a trahi, car n'oublions pas que je suis ton nouveau meilleur ami, Potter, glissa-t-il avec une excessive touche de sarcasme.

Un muscle sur le visage d'Harry tressaillit et Drago crut halluciner l'ébauche d'un sourire.

- Il reviendra sans doute, comme la première fois… dit Hermione d'une toute petite voix.

- C'est ce que tu souhaites? rétorqua abruptement Drago.

- Drago… Il a beau ne plus être mon petit copain, mais Ron reste un ami que j'affectionne depuis des années…

Drago tiqua au choix du verbe « affectionner ». Il se rembrunit davantage. Il avait peine à croire qu'elle arrivait encore à être complaisante à son égard!

- Même après ce qu'il t'a fait? persista-t-il.

- Ne ressens-tu pas la même chose envers tes parents?

La réplique jeta un froid. Harry, qui avait suivi la conversation comme on suivait habituellement un match de tennis, haussa un sourcil en direction du blondinet, stupéfait par l'échange de répartie qui allait jusque là bon train. Il sourit discrètement. Hermione avait toujours été douée pour faire naître la culpabilité et la remise en question dans certaines conditions, comme, par exemple, lorsqu'Harry, autrefois, s'apprêtait à faire quelque chose de téméraire.

- Tu les détestes parce qu'ils sont des assassins, mais tu les aimes car ils sont, après tout, tes parents, non? poursuivit Hermione.

Drago baissa la tête, fixa la radio, promena son regard jusqu'à la fenêtre de plastique et s'intéressa à la pointe de ses chaussures.

- J'ai… Je n'ai pas envie d'en parler.

Le silence revint. Il régnait une drôle d'ambiance dans la tente ; l'évocation de l'amour inconditionnel que Drago portait envers ses parents les avait tous rendus mal à l'aise. Après tout, ils révisaient à l'instant un plan pour leur nuire… Harry, craignant soudain que la détermination du blondinet ne flanche, tapa des mains.

- Bon. Nous devons nous y mettre. Malefoy, nous devons s'assurer que tu maitrises bien le sortilège de désillusion. Hermione, tu es prête pour la leçon? Nous avons jusqu'au crépuscule.

La mine sombre, Drago et Hermione hochèrent la tête, tous deux conscients que la leçon ne s'exécuterait pas avec la plus grande des complicités étant donné du léger différend qu'Harry avait interrompu.

Drago ne fut pas très performant au cours des heures qui suivirent, mais ni Harry ni Hermione ne le réprimandèrent ; la tension était à son apogée. La pression du délai qui approchait affectait sa concentration, et les sortilèges qu'il aurait en temps normal maîtrisé en quelques essais s'étalaient en longues séances interminables, si bien qu'Hermione décida de réduire le registre de sorts à réviser au strict minimum. Mais Drago savait que lors de l'instant où nécessiterait l'application de ces connaissances, il se dégonflerait. Après tout, c'était exactement ce qui s'était produit la dernière fois qu'on lui avait imposé une mission à accomplir en solo…

La clarté diminuait progressivement au travers des murs de toile et Hermione sentait son cœur se flétrir comme la nuit étendait son encre dans le ciel. Lorsqu'elle finit le volet théorie de ses leçons, c'est Harry, qui avait remarqué le manque d'assurance de Drago, qui prit le relais afin de s'attaquer à la pratique. Les qualités de leader qu'il avait employées lors de l'époque de l'A.D. ne l'avaient pas quitté. Mieux, même : en raison des circonstances, elles semblaient s'être perfectionnées. Hermione se demandait si ce n'était pas la maturité et l'aplomb d'Harry qui réduisaient Drago à une telle docilité ou le simple fait qu'il réalisait que devenir un héros ne se faisait pas la conscience tranquille, car même lorsqu'il corrigea son élève pour la septième fois, ce dernier se contentait d'opiner du bonnet et de réessayer, imperturbable.

- Ça devrait suffire… dit Harry suite à une dizaine d'heures d'entrainement.

Il souriait, manifestement satisfait des progrès de Drago, mais lui n'affichait pas un faciès aussi réjoui. Au contraire, il avait le visage grave et le teint verdâtre. Les deux garçons rangèrent leur baguette et Hermione, sagement installée sur le fauteuil, se leva soudain, comme si elle craignait que Drago ne s'évapore d'un instant à l'autre sans prévenir.

- C'était pas mal, commenta Drago.

Mais le cœur n'y était pas. Le visage tourné vers la fenêtre de plastique transparent, il fixait l'horizon enténébré, tentant de distinguer les pourtours du maudit château qui se fondaient dans le ciel sinistre. Harry et Hermione l'imitèrent, et ils furent tous confinés dans un épais silence.

- Les marchands de Pré-au-Lard ont fermé leur commerce, constata Harry.

Effectivement, il ne restait plus que quelques lumières de porche et quelques lueurs diffuses aux étages supérieurs des commerces qui indiquaient que les propriétaires ne tarderaient pas à se mettre au lit. Aux rez-de-chaussée, les carreaux étaient d'un noir opaque. C'était le feu vert. C'était son feu vert, celui de Drago. Mais pourtant, il ne bougeait pas, et ni Harry ni Hermione n'osaient le pousser devant. Ce n'est qu'après avoir pris une grande inspiration, pour s'imprégner de courage, qu'il fit face à ses deux amis. Hermione, le front barré d'une quantité impressionnante de plis, fit un pas dans sa direction, pressentant ce qu'il était sur le point de dire.

- Il est temps.

Aussitôt, elle se jeta dans ses bras et l'enlaça avec une force étonnante en couinant, d'une toute petite voix, son prénom. Drago referma ses bras autour de son corps et enfouit son visage dans son cou, humant l'odeur fraiche que dégageaient ses cheveux en broussaille, appréciant la fermeté de son étreinte qui témoignait de l'amour qu'elle lui portait. Il n'en fallut pas davantage pour que l'émotion le submerge, et il dut faire appel à son orgueil d'homme pour ne pas se mettre à pleurer.

- J'ai encore du mal à croire ce que tu t'apprêtes à faire… geignit Hermione, le visage contre son épaule.

- Moi aussi, avoua-t-il d'une voix chevrotante.

Hermione se dégagea subitement et amarra son regard au sien.

- Drago… si tu ne te sens pas prêt…

- Non. Non, il est beaucoup trop tard pour reculer, je-

Harry, qu'ils n'avaient pas vu disparaitre, revint avec un sac à dos sur l'épaule. Il s'installa en retrait et fit mine de s'intéresser à la solidité des bretelles ajustables, la tête baissée. Drago, qui s'était interrompu, lui jeta un regard oblique et le désigna d'un signe de tête.

- Mes choses sont déjà toutes prêtes, de toute façon, compléta-t-il.

Voyant que Drago et Hermione le regardaient, Harry s'autorisa à parler :

- Hein? Heu, oui… J'ai mis quelques paires de chaussettes, des vêtements de rechange et autres trucs du genre pour ne pas éveiller des soupçons en te présentant avec un sac à dos quasiment vide. Tout y est.

Drago hocha la tête en signe de remerciement et Harry s'approcha du couple.

- Je vais vous laisser seuls, mais… je tiens simplement à te souhaiter bonne chance, Malefoy, et merci. Nous te faisons pleinement confiance.

Le couple se dissocia et Harry tendit une main solennelle vers Drago. Tandis qu'Hermione se recroquevillait dans sa propre bulle en croisant les bras contre sa poitrine, le blondinet serra la main de son ami et, contre toute attente, l'attira subitement contre lui pour l'étreindre amicalement de son bras libre. C'était purement masculin. Harry fut toutefois si stupéfait par le geste qu'il n'eut pas le temps de répondre avant que Drago se libère prestement, comme s'il venait de se frotter à un Scroutt à pétard. De nouveau, il hocha la tête, geste qu'Harry lui rendit avant de disparaître diplomatiquement dans sa chambre, laissant aux deux tourtereaux une pleine intimité.

- Je savais que tu finirais par bien t'entendre avec Harry, déclara Hermione une fois qu'ils furent sortis de la tente, à l'entrée de la grotte. C'est fantastique.

Cette fois-ci, Drago ne s'efforça pas de justifier son attitude ; il se contenta d'hausser les épaules, fataliste. Ça ne servait plus à rien de nier un fait si évident. Il passa ses deux bras dans les bretelles du sac à dos et l'installa confortablement sur ses épaules malgré la difficulté qu'occasionnait l'épaisseur de son manteau. Hermione, toujours aussi étroitement emmitouflée sous sa propre étreinte, parcourut Pré-au-Lard d'un œil inquiet ; il ne restait plus que deux ou trois bâtiments dont les fenêtres situées au deuxième étage brillaient timidement. Le vent s'était calmé.

- Promets-moi que tu seras prudent, Drago… marmonna-t-elle en pinçant les lèvres.

Pour toute réponse, les mains gantées de Drago s'agrippèrent à ses bras. Il appliqua une douce pression.

- Tu te souviens du chemin à prendre? ajouta-t-elle en haussant les sourcils.

- Évidemment.

- La trappe se trouve dans la cave de chez Honeydukes, précisa-t-elle tout de même. Ne te trompe pas de bâtiment.

- Hermione, j'ai fréquenté Pré-au-Lard durant six ans…

- Et sous la trappe, ça ne sera pas bien compliqué… Te souviens-tu? Il y a un long escalier, puis beaucoup de coudes. Mais il n'y a qu'un chemin alors tu ne risqueras pas de te tromper.

- Je sais, je-

- N'oublie pas les plafonds, aussi ; ils sont traitres.

- Hermione…

- Tu te rappelles du toboggan? Tu devras le remonter. Et ensuite-

- Je sais, je sais…! Il y aura une statue – celle de la sorcière borgne. C'est ce que tu allais dire?

- Oh, je t'en prie, ne m'interromps pas… Je ne veux que m'assurer que tout se passera bien…

Drago roula les yeux, mi-exaspéré, mi-amusé. Il s'approcha un peu plus d'elle et fit glisser ses mains le long de ses épaules pour les enfouir dans son cou. Hermione frissonna au contact du cuir froid avec cette peau tiède mais ne se dégagea pas ; elle ne sentirait plus son toucher pour les trois prochains jours… et peut-être même plus.

- Tout se passera bien, lui promit-il en un murmure grave.

- Tu te souviens du sort à jeter vers la statue pour qu'elle s'écarte? lui demanda-t-elle à brûle-pourpoint.

- Heu…

Hermione plissa les yeux, transformant la lueur inquiète de son regard en lueur réprobatrice.

- C'est « Dissendium ».

- Oui. Oui, c'est ça, « Dissendium ».

Enfin, elle se tut et baissa la tête à défaut de brandir un drapeau blanc. Drago approcha son visage du sien et baisa tendrement, doucement, interminablement son front, laissant Hermione s'accrocher à lui en même temps. Puis, naturellement, leurs lèvres se trouvèrent et se scellèrent d'abord en douceur avant de gagner en frénésie, guidées par l'intensité de leurs appréhensions communes. C'était la soif de vivre avant de se laisser flotter à la surface d'un trou noir capable d'aspirer imprévisiblement et pour toujours. C'était de ne pas savoir si tout se passerait bien malgré les paroles creuses qui l'attestaient. C'était le désespoir du baiser qui était peut-être le dernier… Ils avaient beau avoir « tout prévu », mais les circonstances rendaient les précautions bien oiseuses.

La seule raison qui rompit le baiser fut le souffle qui leur manquait. Ils tremblaient mais savaient pertinemment que le froid mordant des montagnes n'y était pour rien. Hermione avait peur. Drago aussi, d'ailleurs.

Longtemps, ils restèrent ainsi, front contre front, leur souffle se mêlant au même petit nuage blanc qui séparait leur bouche, voulant repousser le plus possible le moment où ils devraient se séparer. Mais Hermione, malgré ses réticences, savait que procrastiner ne ferait que retarder le moment de son retour. Au prix d'un immense effort, elle parla :

- Allez… pars, Drago. Pars maintenant pour revenir plus vite.

Doucement, l'implorant, elle le repoussa, le regard vitreux, les mâchoires serrées par l'anxiété. Celui-ci semblant un instant la prier de le retenir mais effaça rapidement l'affolement sur son visage ; il devait se montrer fort et lui prouver qu'il était digne d'elle.

- Bien, dit-il simplement.

Il fit quelques pas à reculons, refusant de lui tourner le dos, mais le sol irrégulier et glissant acheva de le convaincre de regarder en direction d'où ses pieds le menaient. C'est en sentant la brûlure de son regard sur sa nuque que Drago suivit le chemin tortueux et périlleux des montagnes pour gagner la hauteur du village de Pré-au-Lard. Il ne restait plus que l'éclat des lampadaires sur les chemins.

oOo

À la table ronde positionnée face à la statue qui représentait Salazar Serpentard, huit chaises étaient occupées. La conversation en cours était murmurée, comme s'ils craignaient que les murs aient des oreilles et n'aillent répéter ce qu'ils entendaient à autrui. Au centre de la table, à la hauteur du visage d'un homme se tenant debout, un bouquet de flammes illuminait les traits d'Antonin Dolohov, Amycus et Alecto Carrow, Augustus Rookwood, Rabastan et Rodolphus Lestrange ainsi que Narcissa et Lucius Malefoy. Ce dernier, les doigts entrecroisés sur le meuble, écoutait et présidait les propositions de ses acolytes depuis maintenant une heure mais n'avait fait que rejeter les idées obtuses. Seuls les demi-frères Lestrange n'avaient pas encore parlé, tous deux taciturnes, mais c'était précisément de ces deux-là que Lucius attendait gros ; depuis le tout début des opérations, Rabastan et Rodolphus étaient ceux, excluant sa propre personne et sa femme, qui s'étaient le plus distingués, et Lucius n'ignorait pas la raison. Aussi ne fut-il pas surpris lorsque Rodolphus, à bout de nerf, frappa la table de son poing. Le bruit du choc se répandit dans la pièce en échos interminables et Rookwood interrompit son monologue. Les sept têtes se tournèrent vers le perturbateur.

- Ces idées sont toutes pathétiques! Pourquoi ne pas les traiter aux petits oignons, tant qu'à y être?

Vexé, Rookwood enfonça son poing entre ses doigts libres et, les coudes contre la table, appuya ses mains jointes contre sa bouche.

- Enfin, Rodolphus… lança Lucius avec l'ébauche d'un sourire. Je me demandais quand allais-tu manifester ton désaccord. Tu as raison ; ces idées sont toutes exécrables. Procède, si tu veux bien.

- Ce n'est pas parce que nous en sommes au dernier morceau qu'il faut faire des cérémonies avant d'agir! s'insurgea-t-il en se redressant. Attaquons, c'est tout! Et je refuse que nous nous en prenions au traitre à son sang! Il est à moi, celui-là! Il faut choisir la Sang-de-Bourbe!

- Rodolphus, trancha Lucius sur un ton sec, j'ai constamment cette impression que tes désirs de vengeance passent avant notre mission… Me tromperais-je?

D'un mouvement saccadé, comme s'il s'effectuait à contrecœur, Rodolphus se rassit, le visage tourné vers son maître.

- La seule chose qui importe est de fabriqué ce dernier Horcruxe, que ce soit grâce à Weasley ou à Granger, annonça Lucius tandis que Narcissa, à ses côtés, se raidissait. (Lucius trouva la main de son épouse et la serra affectueusement.) N'oublions pas que notre but est d'éliminer Harry Potter. En choisissant une dernière victime qui fait partie de son cercle d'amis intimes, il n'aura pas le choix, ensuite, de venir nous trouver pour se venger. Le pauvre enfant… Avec l'étendue de mes pouvoirs, il n'aura aucune chance. Tu pourras ensuite directement t'attaquer à Molly Weasley. Qu'en penses-tu, Rodolphus?

- Lucius…

Narcissa avait enfoncé ses longs ongles dans la main de son mari. Les sept têtes se tournèrent vers elle d'un mouvement simultané. Ses yeux bleus écarquillés fixaient la Carte du Maraudeur qui flottait au-dessus d'un socle de pierre à quelques mètres de leur position, entre les piliers ouvragés les plus près, en pivotant lentement sur elle-même. Comme un seul homme, tous suivirent la trajectoire de ses yeux et plusieurs d'entre eux se redressèrent subitement ; un point, dont le nom restait illisible en raison de la distance qui les séparait, bougeait sur la carte, et s'approchait des toilettes au deuxième étage du château.

- Quelqu'un approche, souffla-t-elle comme si elle ne pouvait le croire.

- Quoi? s'exclama Rabastan. Comment est-ce possible?

- C'est improbable! s'écria Rookwood. Personne ne sait où nous nous trouvons!

Les plus près du socle, Amycus et Alecto Carrow, s'y précipitèrent, suivis de près par Lucius qui les écarta brusquement de son chemin.

- Qui est-ce? demanda Dolohov, qui comme la plupart, restait en retrait.

Lucius fixa le point sans ciller, abasourdi, puis, lentement, pivota sur lui-même.

- C'est notre fils, annonça-t-il à Narcissa.

Narcissa fut catapultée de son siège pour rejoindre son mari, complètement hystérique. D'ailleurs, comme si personne n'osait le croire, tous se rassemblèrent autour du socle afin de le constater. Le petit point qui représentait Drago venait de pénétrer dans la salle de bain et se dirigeait vers les lavabos.

oOo

- Ouvre-toi.

Bien qu'il savait que c'était ce qui devait se produire, Drago fut cloué sur place lorsque l'évier dont le robinet était creusé d'un serpent bougea soudain, libérant peu à peu un immense trou dans le sol. Prudemment, il s'approcha de l'ouverture ; il ne voyait pas le fond. Par chance, Hermione avait pensé à glisser l'Éclair de feu d'Harry dans son sac de perles qu'elle avait lui-même enfoui dans son sac à dos afin de lui éviter de devoir s'y jeter sans support. Il posa donc un genou contre le carrelage froid et farfouilla parmi les vêtements inutiles sans cesser de scruter les ténèbres du gouffre dans l'espoir d'apercevoir le fond. Il renonça rapidement.

Balai en main, il se redressa. Il avait la désagréable impression que d'immenses tentacules visqueuses surgiraient de l'immense tuyau à l'instant où il s'en attendrait le moins pour le trainer dans les profondeurs de l'enfer, mais Harry ne lui avait glissé aucune note à ce sujet – qui plus est, un Basilic ne possédait pas de tentacules, et, outre cette observation, cette bestiole répugnante était morte depuis six ans. Il n'avait donc aucune raison de craindre quoique ce soit d'autre que sa propre famille qui, il l'espérait, n'estimerait pas son arrivée comme étant suspecte.

Il passa une jambe par-dessus le manche du balai et ses pieds quittèrent doucement le sol. L'étau qui serrait son cœur se referma, lui arrachant une grimace. Somme toute, l'élément potentiellement problématique ne risquait pas d'être ses parents qui l'aimaient et le couvaient d'affection depuis sa naissance, mais plutôt leurs congénères qui auraient probablement un point de vue beaucoup plus impartial sur sa subite apparition. Bien que Drago était persuadé que son père et sa mère avaient perdu la boule, il croisait les doigts pour qu'ils le défendent à tout prix et qu'ils se montrent aveuglément, inconditionnellement loyaux dans le cas où leurs complices feraient preuve de méfiance à son égard.

Faire preuve de loyauté… La loyauté était bien la dernière chose dont lui faisait preuve en se rendant dans la Chambre des Secrets pour jouer les espions…

Sa gorge se noua et ses pieds retrouvèrent le carrelage. À force de réfléchir ainsi, il ne savait plus trop où il en était. Que se passerait-il une fois dans la Chambre des Secrets? Avec le recul et tous les meurtres dont la Confrérie de l'Ombre était l'auteur, il avait appris à mépriser le comportement de ses parents, mais que se produirait-il, dans son for intérieur, lorsqu'il les retrouverait en chair et en os, lorsque sa mère l'enlacerait avec une excessive tendresse maternelle, lorsque son père poserait une main fière sur son épaule pour l'accueillir? Arriverait-il à faire abstraction de toutes ces années de vie commune et de complicité afin de se dévouer à sa tâche, d'abuser de la confiance de ses parents, de la trahir?

Que deviendrait la suite des événements s'il parvenait à s'enfuir avec toutes les informations pour lesquelles il s'y serait rendu? Lui, Harry et Hermione iraient détruire les Horcruxes, donc, sensément, supprimeraient les portions d'âme que son père croyait avoir entreposé en sûreté. Drago avait lu attentivement le chapitre de Secrets les plus sombres des forces du Mal qui traitait du sujet et savait qu'une fois les objets pulvérisés, il n'y avait aucune chance que la fraction d'âme survive ou rejoigne les autres restantes. Elle périssait simplement en laissant ses sœurs mutilées, incomplètes, infirmes.

Il avançait étourdiment vers la destruction de son père, et c'est uniquement à cet instant, au pas de la porte, qu'il en prit pleinement conscience. C'était pourtant une réalité criante ; dès la toute première découverte en lien avec les intentions de son père, il avait été question de détruire les Horcruxes.

Mais ce long processus requerrait-il également son… son meurtre?

Drago laissa tomber l'Éclair de feu par terre et le choc émit un son que la salle de bain vide reproduisit plusieurs fois. Non, il n'était absolument pas question qu'il tue son père, peu importe le service qu'il rendrait à la population magique. Comment avait-il pu se rendre aussi près d'un tel objectif? Une honte l'étouffa avec une telle intensité qu'il sentit ses yeux picoter. Un poing s'enfonçait dans sa cage thoracique, lui coupant le souffle. Comment avait-il pu…? Harry et Hermione ne pouvaient pas lui demander une telle chose. N'avaient-il jamais considéré la délicatesse de sa position? À cette pensée, un accès de colère l'envahit et il serra les mâchoires. Il donna un violent coup de pied sur le balai qui vola à l'autre bout de la pièce en provoquant un vacarme épatant qui aurait bien alerté l'étage au complet si l'école avait encore hébergé des étudiants.

Mais aussi subitement qu'elle était née, sa fureur mourut ; c'était son idée. Ce n'était pas celle d'Harry. Ce n'était pas celle d'Hermione. Ce n'était même pas celle du méprisable Ron. C'était la sienne. Harry lui avait demandé à plusieurs reprises s'il souhaitait vraiment poser ce geste ; jamais il n'avait fait volteface. Et Hermione…! Hermione… Elle avait pleuré, elle l'avait supplié, elle avait tant essayé de le dissuader…! Jamais, jamais il n'avait renoncé. Il avait voulu se montrer courageux, se montrer digne, jouer les héros…

Sa confusion lui donna le vertige, et bientôt, il n'eut plus d'autre choix que de s'asseoir par terre, complètement désorienté, les mains plaquées contre son crâne. Recroquevillé dans une bulle dévastatrice. Qu'était-il en train de faire…? Sur la ligne imaginaire de la morale humaine, il ignorait où il se trouvait ; penchait-il plus vers le Bien, ou au contraire, vers le Mal? Son menton tremblait, ses mains aussi. Jamais il n'aurait cru qu'il était possible de se sentir plus faible, plus rongé, plus lamentable que lors de ses démarches pour accomplir la mission que Lord Voldemort lui avait ordonné de faire deux ans plus tôt. C'était pourtant le cas et c'était incroyablement effroyable, complètement terrifiant… Comment imaginer que c'était ses parents qui lui inspiraient un tel trouble?

Drago leva brusquement la tête lorsqu'un bruit sonore retentit dans la salle de bain. En cherchant la cause de cette soudaine frayeur, il réalisa combien il était imprudent de rester à cet endroit à s'apitoyer sur son sort tandis que la Confrérie de l'Ombre avait sans doute déjà détecté, à l'aide de la Carte du Maraudeur, sa présence dans l'école. Il se redressa, sur le qui-vive, et constata avec soulagement que le responsable du bruit n'était que l'Éclair de feu ; en lui balançant un coup de pied, il avait atterri debout, en équilibre, entre deux éviers situés plus loin, et était maintenant étendu sur tout son long contre le carrelage miroitant. Il renifla et sortit sa baguette magique d'une main secouée de soubresauts.

- Accio Éclair de feu, geignit-il.

L'Éclair de feu vola dans sa direction et Drago l'attrapa d'un geste habile et naturel, typiquement quidditchien. Il se pencha, saisit le sac de perles d'Hermione et enfouit le balai à l'intérieur avec raideur. Il allait quitter les lieux sur-le-champ et ne plus jamais y revenir.

Qu'allait-il dire à Harry et Hermione pour justifier son retour précipité? Il n'en avait aucune idée. Il y réfléchirait durant le chemin du retour, dans le passage qui reliait Poudlard à la cave d'Honeydukes. À moins qu'il ne retourne pas à la tente, dans les montagnes, et qu'il prenne la fuite afin d'éviter de devoir affronter le poids de sa honte…

Au moment où il fourra le sac de perles dans le sac à dos, Drago s'interrompit ; une feuille de parchemin soigneusement pliée entre deux paires de chaussettes trouées avait attiré son attention. Malgré sa hâte de quitter les lieux, il fronça les sourcils, intrigué, posa un genou à terre et déplia ses multiples pans. L'écriture délicate d'Hermione lui assena un énième coup au ventre.

- Quelques sortilèges à ne pas oublier et à pratiquer… lut-il. Protego… Expelliarmus… Stupéfix… Petrificus Totalus… Impedimenta…

Sa voix s'étrangla. Tout à coup, il oublia son désir de partir et se demanda plutôt s'il parviendrait à les utiliser correctement si jamais les choses tournaient en sa défaveur durant son séjour dans la Chambre des Secrets. Mais à peine se posa-t-il la question qu'il le regretta ; pourquoi s'attarder sur un tel questionnement s'il n'avait pas l'intention de s'y rendre?

Excédé par sa valse-hésitation, il baissa vertement ses bras en poussant un rugissement impatient. Sa main, d'elle-même, se resserra sur la feuille de parchemin qui se fripa entre ses doigts. Il avait envie d'hurler, de tout briser, de tout saccager. Pourquoi était-ce si difficile de faire un choix? Il n'avait pas de temps à perdre…! Il décida de simplifier le dilemme afin de parvenir à trancher : c'était la vie de ses parents, ou celles d'un nombre encore indéterminé d'innocents. Le choix lui appartenait. S'il avait été dans la peau d'Harry, il n'aurait pas tergiversé bien longtemps, mais étant parfaitement conscient de son propre égoïsme, la décision n'était plus aussi évidente.

Sauf si… Sauf si parmi ces innocents dont les vies étaient menacées, Hermione était du lot…

La gifle chassa ses tourments comme une tornade pouvait raser un édifice. Il était inévitable que son père s'attaquerait bientôt à un proche d'Harry, et Hermione leur avait posé bien trop de soucis dans les années antérieures pour qu'elle ne figure pas parmi leurs candidats.

S'il devait un jour se trouver face au cadavre de la fille dont il était éperdument amoureux…

Il pinça les lèvres en sentant une vague d'une nouvelle vaillance l'inonder de l'intérieur, enfonça la feuille de parchemin dans le sac à dos sans se soucier de son état puis sortit de nouveau l'Éclair de feu d'Harry. Tout ça n'était pas arrivé pour rien. Son dédain pour les forces du Mal, sa liaison amoureuse avec Hermione, son amitié avec Harry… Il était clair qu'il avait depuis un bon moment rejoint le côté du Bien et il n'avait nullement l'intention de retraverser la frontière pour ternir son âme derechef. Il ne pouvait pas agir comme une girouette et changer de motivations lorsque la situation devenait trop compliquée à gérer. Un homme ne se conduisait pas ainsi. Il avait fait un choix et devait l'assumer, quitte à faire quelques douloureux sacrifices, ou un seul, inimaginable.

Il enfourcha de nouveau l'Éclair de feu et s'approcha du trou béant qu'il jaugea longuement avec défi. Enfin, malgré l'ouragan qui lui ravageait encore l'estomac et lui donnait un puissant goût amer dans la bouche, il s'y engouffra.

Sur le balai, le trajet fut court, et la porte que lui avait décrite Harry apparut beaucoup plus rapidement qu'il ne l'avait escompté. Toutefois, il y avait une majeure différence avec la description très pointue que le Survivant en avait fait ; les deux serpents entrelacés étaient absents. À leur place, un oiseau aux longues ailes majestueuses autour duquel sept têtes de mort entourées de ce que Drago croyait être du feu – ou de la fumée? – trônait au centre. Il n'eut pas besoin de réfléchir sur la signification de ce symbole car il n'aurait que très difficilement pu être plus explicite.

Une conclusion parfaitement plausible lui sauta au visage comme un hippogriffe sur un furet : l'oiseau qui avait subtilisé la Carte du Maraudeur au Terrier n'était pas qu'un simple animal de compagnie relié à la Confrérie de l'Ombre… Il était son père. Lucius avait appris, au cours de sa peine à Azkaban, à se métamorphoser, à devenir un Animagus.

Un frisson rampa contre l'échine de Drago. Il ne calculait plus le nombre de fois qu'il avait aperçu cet oiseau blanc perché à la fenêtre de sa chambre de préfet à Poudlard à l'observer fixement. Voilà qui expliquait également comment il avait pu pénétrer dans l'enceinte de l'école aussi aisément afin de tuer Dennis Crivey et Seamus Finnigan… Tout se liait. Tous les morceaux s'emboitaient tranquillement les uns dans les autres.

Une excitation malsaine le fit sourire, sourire qui s'effaça néanmoins en un claquement de doigts lorsque la porte devant laquelle il se trouvait répandit dans l'immense cavité un son extraordinairement sourd, comme si quelqu'un, de l'autre côté, la déverrouillait. La surprise fut si impromptue qu'il faillit s'uriner dessus, mais il ne fit que bondir de plusieurs mètres en arrière, affolé. Son cœur heurtait sa cage thoracique avec une telle violence qu'il crut qu'il allait s'éjecter de sa poitrine de son propre chef.

Devait-il se cacher? Devait-il sortir sa baguette? Ou devait-il simplement faire le pied de grue devant la lourde porte tandis qu'elle s'ouvrait lentement? Un insupportable grincement enfonça machinalement sa tête entre ses épaules. Il avait une de ces envies de s'enfuir à toutes jambes…! Son cœur lui monta dans la gorge, à moins que ce ne soit que le dernier repas ingéré… Quoi qu'il en soit, il tint sa bouche obstinément fermée. Il était certain qu'il vomirait s'il n'osait qu'entrouvrir les lèvres.

La porte poursuivait sa lente ouverture, et une première personne apparut devant lui. Son cœur cessa de fonctionner bien qu'il ne put reconnaître les traits caractéristiques à la personne en raison de la source lumineuse qui la plaçait en contrejour. Ce n'était qu'une masse noire, une silhouette. Puis une autre fut dévoilée, et une autre, puis encore une autre. Il en compta huit lorsqu'enfin la porte fut entièrement ouverte. Drago avait plissé les yeux, aveuglé par la lumière absente jusqu'à maintenant. Il n'allait pas tarder à découvrir le genre d'accueil que la Confrérie de l'Ombre offrait à des intrus.

Ses huit membres restaient immobiles devant le nouvel arrivant, apparemment imperturbables. Ce fut Lucius et Narcissa qui s'avancèrent les premiers en dévoilant progressivement leurs traits physiques, cette dernière ayant manifestement toute la misère du monde à contenir sa fébrilité.

Lorsque les yeux de Drago furent habitués à la nouvelle luminosité, il trouva devant lui les parents qui l'avaient élevé, émus. Et Drago, ému, s'avança vers eux comme si le Poudlard Express venait tout juste de le ramener à la gare de King's Cross.