Nous sommes le Vendredi 12 Décembre. Il est 19 heures. Je suis debout, immobile, face à la porte d'entrée de ma meilleure amie. J'hésite. Ai-je bien fait de venir ? Je n'en sais rien, seulement quitte à être sur place autant aller au bout des choses. Je frappe.

J'attends à peine dix secondes que déjà mon amie ouvre la porte avec un grand sourire qui, à vrai dire, s'efface à l'instant même où ses yeux se posent sur moi et ma mine déconfite.

« Sakura ! Tu vas bien ? Demande-t-elle, inquiète.

-Mouais... Réponds-je sans grande conviction. »

Elle fronce les sourcils et finit par s'écarter de l'embrasure de la porte pour m'intimer à entrer, ce que j'effectue sans plus d'hésitation. En effet, l'appartement d'Ino m'apaisait. Sa chaleur et sa sobriété étaient les bienvenus dans une situation comme celle-ci. Le blanc et le chocolat ornaient les murs adoucissant le salon et le vieux canapé brun qu'elle avait récupéré de ses parents était d'un confort inestimable. Toutes ces choses que j'avais toujours aimées ici n'étaient rien comparées au fait que cet appartement avait été, à d'innombrables reprises, notre lieu de rendez-vous favori pour nous retrouver rien que toutes les deux et profiter d'un moment agréable ensemble.

En fait, « agréable », n'est pas le terme qui convient vraiment pour décrire ces divers instants passés ici. Non... En réalité, cet appartement a été un nombre incalculable de fois le témoin de nos fous rires, de nos coups de gueule, des larmes d'Ino, de mes larmes à moi. C'est pourquoi je me sens bien ici. Je sais que je peux dire tout ce que j'ai sur le cœur, sans retenue ni crainte. Je peux me livrer totalement, révéler mes secrets les plus intimes ou mes hontes les plus dissimulées. Tout, absolument tout, reste et restera à jamais entre ces murs.

Ces murs qui acceptent volontiers que je leur lègue une partie de mon mal-être, pour que je puisse repartir le cœur un peu plus léger. Ces murs qui, en réalité, sont le cœur et la mémoire d'Ino.

« Dis-moi ce qui ne va pas, me dit Ino, me sortant de mes pensées. »

En vérité, je ne sais même pas par où commencer. Dois-je commence par les reproches de Gaara ? Dois-je lui révéler que je ne sais plus où j'en suis ni que penser ? Dois-je lui dire que je me sens nulle de ne pas réagir face à l'attitude de mon copain qui dépasse les limites de plus en plus souvent ? Ou qu'un malaise m'a indéniablement envahit depuis quelque jour. Malaise dont j'ignore la raison.

Ou alors, dois-je simplement lui avouer que malgré le fait que je sois avec l'homme que j'ai désiré plus que de raison, je suis en fait atrocement malheureuse ?

« Je... J'ai juste envie de pleurer .

-Et bien vas-y. Laisse-toi aller, me dit-elle en me prenant dans ses bras. »

Pourtant, les larmes ne coulent pas. Elles sont bloquées même si elles ne demandent qu'à tomber.

« Je...J'aimerais tellement pouvoir mettre des mots sur ce qui ne va pas, tu sais.

-Tu n'y arrives pas, finit-elle. »

J'hoche la tête.

« Quelque-chose ne va pas avec Gaara ?

-En fait, je te mentirais si je te soutenais que si.

-Il ne te traite pas bien ? Fait-elle, inquiète.

-Si... Enfin... Il m'étouffe. Sa jalousie devient incontrôlable depuis qu'il a appris ce qu'il s'est passé avec Sasuke. Il pense que j'ai des sentiments pour lui. L'autre jour, nous l'avons croisé à la gare... Je ne préfère même pas te raconter la scène qu'il m'a faite après...

-Tu ne lui as pas dit que tu ne pouvais pas vivre comme ça ?

-En fait, je fuis tellement tout ce qui peut ressembler à un conflit que je suis obligée de te répondre que non.

-Ca ne te ressemble pas, me dit-elle sceptique.

-Je sais.

-Autre chose te tracasse ?

-Oui. Seulement, je suis aussi incapable de savoir quoi. Je suis... complètement perdue. »

Ino me regarde, comme si elle essayait de lire en moi. J'ai sûrement l'air d'une pauvre idiote mais la réalité est ainsi.

« Dis-moi, Sakura, dit-elle en sortant de son silence. Qu'as-tu ressenti en voyant Sasuke à la gare ? »

Je vois où elle veut en venir. Seulement, elle se trompe. Je ne suis pas amoureuse de Sasuke.

« Quoi que tu penses, Ino, tu fais fausse route. Tout ça n'a rien à voir avec Sasuke.

-Désolée de te le dire, ma grande, mais je suis persuadée du contraire. Sinon, tu ne te prendrais pas la tête comme ça et tu serais en mesure de rassurer ton copain.

-Non...

-Si tu veux vraiment savoir ce qui cloche, commence par arrêter de te voiler la face et tu y verras plus clair. Tu te sentiras mieux.

-Me sentir mieux d'aimer un connard ? Un homme qui joue avec les sentiments des autres ? Un homme égoïste ? Me sentir mieux de trahir Gaara ?

-Pourquoi penses-tu une telle chose concernant Sasuke ?

-Il a levé le masque, si tu veux savoir .

-Pfff ! Je crois surtout que vous avez autant de fierté l'un que l'autre et que si vous ne passer pas outre ça, vous finirez malheureux tous les deux.

-Ino. S'il te plaît, parlons d'autre chose.

-Ok. »

POV Ino.

J'avance, d'un pas décidé dans les rues de Tokyo. Ma destination, je la connais. Mais la finalité, elle, demeure quelque peu difficile à établir. Effectivement, je me rends au local de Sasuke pour, officiellement, régler les heures de coaching que j'avais offert à mon amie. En vérité, c'est tout ce que je suis sensée et, devrais-je dire, autorisée à faire là-bas. Seulement, au fond de moi, une sournoise envie s'insinue inexorablement. Oui, l'envie de me mêler de ce que le destin a décidé. L'envie de mettre un bon coup de pied dans la fourmilière. Cela me démange à un point qui pourrait paraître non acceptable pour la plupart, car cette initiative franchirait la limite de ce que la décence permet.

Il est 18h30 et les lumières de la ville de Tokyo brillent de mille feu. Moi, je suis au milieu de tout cela, un peu perdue.

Ma longue veste noire me protège des gouttes qui commencent à tomber mais mon esprit, lui, est déjà inondé d'interrogations qui restent sans réponses. Je suis tellement tourmentée que même la ruelle sombre et sinueuse dans laquelle je m'engage ne suffit pas à m'inquiéter.

Tout ce que je souhaite, c'est que mon amie soit heureuse avec l'homme qui partage sa vie. Seulement, ce n'est pas l'impression que j'en ai eu lorsque je l'ai vue hier. D'ailleurs, bien malgré moi, le sentiment que la situation risque de ne pas s'arranger me hante.

En vérité, je ne suis pas tout à fait objectivité. Cet homme, ce Gaara... Je ne le sens pas. Lorsqu'il regarde Sakura, je ne vois pas cette flamme qui doit briller dans les yeux d'un homme amoureux. Cette flamme que j'ai vu dans ceux de Sasuke.

Le Sabaku a un comportement étrange. Je ne saurais l'expliquer mais je sens qu'il cache quelque-chose. D'ailleurs, Naruto aussi a cette impression.

J'ai envie d'agir. J'ai envie de tenter quelque-chose pour Sakura. Je me sens d'ailleurs doublement responsable d'un éventuel échec amoureux dans sa vie : Premièrement parce qu'elle est ma meilleure amie et deuxièmement car c'est bel et bien moi qui l'ai poussé à le conquérir. C'est donc de ma faute si tout cela a finit par la rendre malheureuse.

D'après moi, si un homme la mérite, c'est bien son « Docteur Love ». Il a prouver à déjà maintes et maintes reprises que le bonheur de la rose passait avant le sien. Il a beau se montrer taciturne, froid et sans cœur, je suis certaine que ses sentiments envers elle sont réels. Les yeux ne mentent pas.

La seule véritable question à laquelle il me faut une réponse est : Ai-je le droit de me mêler ainsi de la vie de Sakura ?

C'est en pensant à cela que je pénètre dans le local de Sasuke et mes yeux se posent immédiatement sur lui.

Il est assis derrière son grand bureau, le regard plongé dans ses dossiers. Il ne me remarque même pas, tant son attention est rivée sur ce qu'il est en train de lire. Je le trouve beau. Beau comme personne, vêtu de son costume noir, la main sous le menton. Mais cette beauté n'est que plus grande combinée avec cette classe et ce charisme qui font ce maître dans l'art de la séduction.

Sakura a beau me dire qu'il ne se sert que de ça pour se jouer du monde qui l'entoure, j'ai quelques doutes. De toute façon, la rose ne peut en aucun cas être objective dans une situation pareille.

Sortant de mes pensées, je me racle la gorge pour signidier ma présence. Il lève immédiatement la tête vers moi et je crois percevoir, un court instant, une once de surprise passer dans son regard d'ébène. Apparemment, il me reconnaît.

« Bonsoir, me dit-il calmement.

-Bonsoir.

-Que puis-je pour vous ?

-Je viens régler les séances que j'ai offertes à Sakura, répond-je simplement.

-Ah. Ce n'était pas la peine de vous déplacer. Ces séances ne vous seront pas facturées, fait-il, poliment. »

Pas facturées ? Là, je ne comprends vraiment pas pourquoi. Surtout après tant de temps passé avec Sakura. Le manque à gagner n'est pas négligeable, d'autant plus qu'il me semble que le ténébreux s'est déjà fait défavorablement remarqué avec sa hiérarchie. Apparemment, il devine mon incompréhension puisqu'il reprend :

« Je n'ai pas l'habitude de faire payer les gens qui n'ont pas obtenus satisfaction.

-Vous rigolez ? Fais-je, n'osant y croire. Elle a pourtant bien atteint l'objectif qu'elle s'était fixé, et ça, grâce à vous...

-Certes, mais notre collaboration ne s'est pas déroulée comme elle l'espérait et la faute me revient intégralement.

-Ne dites pas n'importe quoi ! »

Ma remarque le surprend, je le vois. Pourtant, je n'arrive pas à aller plus loin. Je ne sais pas quoi dire pour le tirer du déni dans lequel il semble s'être enfermé.

Je reste muette. Pourquoi je n'arrive pas à trouver les mots ? Peut-être bien parce que le simple faux pas pourrait bien tout foutre en l'air pour de bon cette fois. Dois-je arrêter d'intervenir dans la vie de mon amie, et laisser, pour une fois, le destin se charger du reste ?

« Sasuke, dis-je en me lançant. Ne voulez-vous pas mettre pour une fois votre fierté de côté et assumer ce que vous ressentez. Si vous saviez comme Sakura fais fausse route, en ce moment...

-La vie de Sakura ne m'intéresse pas. Mon rôle de coach s'est stoppé le jour où elle a conquit Gaara. Le seul lien qui ait existé entre elle et moi était professionnel. Je n'ai plus à intervenir dans sa vie.

-Sasuke, dis-je calmement. Arrêtez de vous voiler la face. Le lien qu'il y a entre vous était bien plus que professionnel. Les sentiments s'en sont mêlés et vous le jiez car vous n'avez aucune idée de la façon de gérer cela. Plutôt étonnant d'ailleurs pour un Docteur Love ! »

Sasuke rit à la mention du surnom que lui donnait Sakura.

« Je n'ai jamais eu le titre de professionnel de l'amour mais celui de professionnel de la séduction. Vous, les femmes, avez tendance à faire l'amalgame.

-Sauf votre respect, la seule personne ayant fait l'amalgame dernièrement, c'est vous, réponds-je calmement.

-Pardon ? Fait-il sans comprendre.

-Oui, ce n'est pas Sakura qui s'est fourvoyée sur votre rôle en tant que coach, mais vous même qui avez oublié la mission que vous deviez remplir pour elle.

C'est mesquin, seulement, son attitude froide et l'arrogance qui découle de ses paroles me mettent hors de moi. Ce mec est dans un déni total. Il refuse d'admettre les sentiments qu'il porte, ou tout du moins qu'il a porté pour mon amie. Au nom de quoi ? D'une fierté à laquelle il accorde une bien trop grande importance. Pfff ! Que tout ça est futile !

Je voulais le faire réagir, mais malgré tout, si je persiste sur cette voie, je crois que je vais le braquer davantage qu'il ne l'est maintenant. Si toutefois c'est possible.

« Ne nous attardons pas sur un sujet qui n'a pas lieu d'être, fait-il d'une voix sans appel en me tournant le dos.

-Ecoutez... Pardonnez-moi, je suis un peu sur les nerfs en ce moment. Il faut dire que... Je m'inquiète vraiment pour elle.

-Pourquoi cela ? Demande-t-il, sans pour autant se retourner.

-Je n'aime pas savoir ma meilleure amie malheureuse.

-Comment pourrait-elle être malheureuse ? Fait-il, incrédule.

-Avec Gaara... Il n'est pas pour elle.

-Il n'y a qu'elle qui peut le dire.

-Elle le dit. A demi-mots.

-Et il n'y a qu'elle qui peut changer cela et mener la vie qu'elle souhaite.

-Et vous, savez-vous ce qu'elle souhaite ?

-Ça ne me regarde pas. Je ne propose pas de thérapies de couple. Vous ne vous adressez pas à la bonne personne.

-Arrêtez, Sasuke, lui dis-je calmement. Vous savez que je ne parle pas de ça.

-C'est à vous de vous arrêter ! S'emporte-t-il tout en se retournant vers moi, cette fois. Je ne suis ni le frère, ni l'ami de Sakura. Tout cela ne me regarde pas ! Je ne comprends pas pourquoi vous me parlez de tout ça ! Qu'attendez-vous de moi ?

-Ne vous êtes-vous jamais dit que si elle a refusé vos avances, c'est simplement parce qu'elle pensait être allée trop loin dans sa démarche pour conquérir Gaara ? Peut-être a-t-elle pensé qu'elle n'avait plus le droit de le laisser tomber même si rien n'était encore gagné ? Sakura est quelqu'un de fidèle, peut-être même un peu trop ! La question est : Êtes-vous capable de laisser sciemment cette chance vous passer sous le nez ou allez vous tenter quelque-chose ?

-Vous pensez qu'elle ait pu, un jour, éprouver quelque-chose pour moi ? Vous affirmez tant de choses sans en avoir la certitude.

-Je connais mon amie. »

Il se tourne vers la grande fenêtre qui orne le mur à sa gauche et lâche douloureusement :

« Vous êtes en train de me dire... Que vous voulez que je fasse ce qu'il faut pour qu'elle revienne vers moi ?

-En quelques sortes...Je sais que vous avez déjà grandement souffert de tout cela, mais je pene que ce n'était pas le bon moment pour elle. Désormais, elle a pris du recul par rapport à tout cela et, à mon avis, il vous sera moins difficile que la première fois de la ramener à vous. Tout simplement... Parce que vous lui manquez atrocement.

-Réalisez-vous à quel point cela peut être cruel de donner de l'espoir à un homme alors que c'est peine perdue ?

-Je vous assure, Sasuke, que vous n'aurez jamais à le regretter. D'ailleurs, si vous choisissez de ne rien faire, ce sont d'atroces remords qui vous attendent.

Alors, dans ce cas, que faire pour ne jamais rien avoir à regretter ?