Titre : Le Secret de ma mère
Auteur
: Alohomora
Avertissements
: PG. Je me suis posée pendant quelques secondes la question de savoir à quel niveau j'allais mettre la "protection parentale". Du fait que l'on est du côté du "méchant" de l'histoire, que ses pensées ne sont pas toujours… comment dire ?… très gentilles et innocentes et que son passé est plutôt chargé, j'ai quand même estimé qu'il fallait mettre un avertissement.
Spoilers
: Les quatre premiers tomes (hors canon pour les tomes 5, 6 et 7 qui n'existaient pas encore quand cette fic a été pensée, écrite et publiée).
Résumé général
: Cinquième année à Poudlard, école de magie et de sorcellerie. Alors qu'en arrière fond la situation politique s'envenime, Draco Malfoy ne pense qu'à éclaircir le secret que sa mère cache. Il est prêt à tout pour le découvrir, même à s'intéresser à Harry Potter, la personne qu'il déteste le plus au monde.
Et bien évidemment la partie obligée, j'ai nommé le Disclaimer (on applaudit bien fort) : Harry Potter & C° appartiennent à dame JK Rowling. On en déduit donc très simplement qu'ils ne sont pas à moi (logique imparable). Et non, je ne perçois aucun argent. Et oui, j'ai emprunté Harry Potter & C° mais je ne les ai pas abîmés, je les ai traités avec soin et attention.


Chapitre 1 : Némésis

J'ai chaud.

C'est dingue comme j'ai chaud.

Il faut que je boive.

Peut être que je pourrais faire partir ce goût amer… Cet horrible goût de défaite.

Depuis le temps, je devrais m'y être habitué. Trouver cela plus supportable, voire normal. A l'instant même où l'abjecte idée s'insinue dans ma cervelle, tout ce qui fait mon être se révolte.

Un Malfoy n'admet pas la défaite !

Un Malfoy ne tolère pas la défaite !

Pourtant, un Malfoy peut connaître la défaite… Alors il hait ! Il hait plus que tout celui qui la lui apporte. Il le maudit sur des générations, blasphème son nom et surtout, se venge.

Harry Potter !

Mon royaume pour sa disparition.

Que la terre s'ouvre et l'avale !

Que les océans se déchaînent et l'engloutissent !

Que les tornades se lèvent et l'emportent !

Que les volcans se réveillent et le consument !

Qu'il soit réduit à l'état de molécule, d'atome, de nano-truc !

Qu'Il le tue !

Qu'Il boive son sang !

Qu'Il le dévore vivant !

Que quelqu'un nous débarrasse de lui ! Je me contenterais même d'un cognard un peu vicieux, d'un coup de batte involontaire, d'un morceau de poulet avalé de travers, d'une soupe de poissons avariée, d'un pot de fleurs mal fixé…

Mais que quelqu'un s'en charge…

Si je n'avais pas si mal, je m'en occuperais… Oui, s'il n'y avait pas cette insoutenable douleur dans les bras, dans le dos, la nuque, les cuisses. Chaque muscle de mon corps crie répit. Il va falloir que je passe à l'infirmerie. Madame Pomfresh doit bien avoir quelques potions dans un de ses tiroirs sans fond.

Mais comment se fait-il qu'il ne meurt pas ? Y a-t-il un sort sur lui, un enchantement qui le préserve ? Chaque année, il croise au moins une fois la mort et il ne meurt pas. Pouvez vous m'expliquer ce mystère ?

J'ai chaud.

En appuyant le dos contre la paroi métallique du casier, peut être que je gagnerai un peu de fraîcheur… A peine… Et une serviette humide sur le visage ?… Non, ça mouille plus qu'autre chose. Alors peut-être que c'est véritablement cette colère qui met le feu en moi.

Silence.

Silence total et pesant.

Personne ne dit le moindre mot. Mais peut être parce qu'il n'y a rien à dire. C'est vrai, que pourrions-nous bien dire ? A part, que l'on maudit Potter ? A part qu'on aurait préféré qu'Il l'éventre ? Tout cela a déjà été dit, au début. La première année surtout et déjà moins la deuxième. Maintenant, c'est la cinquième et il n'y a plus rien à dire. Juste un terrible constat : Potter est le plus fort ! Et il me coûte de le reconnaître. Il nous coûterait à tous, donc on ne dit rien. Et on se change en silence.

Soudain un bruit mat et un craquement sinistre me font sursauter. Je sors la tête de la serviette et je découvre que notre capitaine a la main en sang et que la porte d'un des casiers est enfoncée. Ce lèche-botte de Montague se précipite sur Flint pour s'enquérir de son état, mais le capitaine l'envoie balader. Je suis persuadé qu'il n'a même pas dû remarquer l'état de sa main. Le temps que l'information arrive jusqu'au cerveau de ce balourd, Pomfresh aura eu le temps de le soigner de toute façon. Flint arrive en bonne position dans la liste de ceux qui haïssent Potter… Après moi et juste derrière Lui. Ou peut-être l'inverse.

Mais que peut-on faire contre une telle machine à gagner ? À part défoncer les meubles ? Le pousser à la faute ? On a essayé et il ne s'est jamais laissé abuser. La seule et unique fois qu'une équipe a gagné contre lui, c'est en troisième année. L'équipe adverse doit ce miracle, non au talent de son attrapeur, mais à l'intervention impromptue de détraqueurs. Quand je pense que ce Diggory a pavané dans tout Poudlard en s'attribuant les mérites de la victoire… En voilà un qu'on n'entendra plus de si tôt !

Voilà donc à quoi on en est réduit pour battre Potter : s'allouer les services de détraqueurs. Ça se trouve à quel prix sur le marché des détraqueurs ? Quelqu'un sait ?… Personne évidemment ! De toute façon avec Son retour, on n'aura bientôt plus besoin de les chercher bien loin ces monstres putrides ! Je les hais ! Je les hais tellement !… Eux aussi… Tiens, je déteste beaucoup de monde ces derniers temps. Trop ?

Lorsque Potter a réussi en première année à obtenir le droit de voler, j'en ai crevé de jalousie. Il parcourait le ciel librement et moi, je devais rester cloué au sol à le regarder faire ses voltiges et ses prouesses. On lui cède tout. Rien n'est trop beau pour lui. Il demanderait la Lune qu'on la lui décrocherait immédiatement et enrubannée en plus. Et sous quel prétexte, je vous prie ? Sous prétexte que grâce à lui ces couards de sorciers peuvent dormir tranquilles la nuit et laisser leurs enfants se promener seuls, salir leurs noms dans des mariages insultants. Mais ces lâches qui se cachaient derrière le miracle et le mystère d'une cicatrice ne doivent pas en mener bien large maintenant qu'Il est de retour.

Même pas capable de faire le boulot jusqu'au bout, Potter ? Je me demande si les filles vont continuer de se pâmer sur son passage et les garçons de vouloir être lui, maintenant que Diggory est mort, maintenant que l'on sait que c'est à lui que l'on doit Son retour ?… Et pourtant, je suis prêt à parier que cela ne va pas changer grand chose !

Harry Potter, 'the-boy-who-lived'. Ainsi il a été baptisé et ainsi il restera. Quoiqu'il fasse, quoiqu'il dise, même quelque chose de fou, l'Histoire se chargera pour lui de trouver un sens à ses actions, à ses paroles. Pourquoi ? Dites-moi pourquoi. Parce qu'il vit ? Le simple fait qu'il vive est pour eux source d'émerveillement. Et pourquoi pour moi est-ce source de haine ? Et lorsque je le vois évoluer dans les couloirs du château, ne prêtant aucune oreille, aucun regard à leur admiration, je le hais davantage. Comment peut-on être loué et si désinvolte ?

Le battre est devenue une obsession brûlante, l'humilier un plaisir simple, l'accabler une occupation profonde. Je veux lui faire payer au centuple chacune des faveurs qu'on lui alloue. Je veux le blesser, le déchirer. Je veux qu'il souffre et qu'il se torde de douleur. Je veux qu'il en pleure et qu'il en hurle.

Je veux le battre…

Le seul terrain où j'ai la suprématie est le cours de potions. Mais qu'est-ce qu'un cours de potions quand on règne comme lui sans partage sur le terrain de Quidditch ? Qu'est-ce que c'est que d'être le meilleur élève de potions et le préféré du prof quand on est l'enfant chéri des stades et des foules ?

Rien.

Quand j'ai reçu ma lettre d'inscription de Poudlard, j'ai pesté contre cette mention : "les premières années ne sont pas autorisés à posséder un balai". Voler ! Je ne demandais pas grand chose ! Juste voler et jouer. Je rêvais, probablement comme n'importe quel enfant, d'être admiré pour un don surnaturel que je manifesterais. Je rêvais que pour moi on ferait une exception, que devant l'évidence de mes capacités on modifierait cette règle ridicule. Que m'importait la position tant que je pouvais parader. Mais je rêvais… et c'est lui qui a vécu mon rêve.

L'année suivante, je suis entré dans l'équipe, rongé de l'intérieur par une jalousie et une haine que personne ne peut soupçonner. Personne ne peut penser que dans un enfant de douze ans il y a autant de rage. Il était attrapeur, je me devais donc de jouer également à ce poste… Oui, Weasley a raison, pour que cela se fasse, mon père a dû acheter l'équipe. J'aurais voulu que Flint me prenne pour ce que je suis mais il a fallu y renoncer.

Malgré cette atteinte à ma fierté juvénile, je persistais à imaginer une démonstration flagrante de mes talents. Avant de m'endormir, je me figurais avec précision le déroulement de nos rencontres. Il y avait des variations, mais irrémédiablement cela s'achevait par une victoire écrasante des Serpentard et une fête dont j'étais le seul héros. Pour que ce fantasme devienne réalité, j'avais en main toutes les cartes pour le battre : mon balai ainsi que mon équipe étaient meilleurs. Parce qu'on a beau dire ce qu'on veut, mais l'équipe de Gryffondor est loin d'être aussi excellente. Seul Potter est bon. La force de notre équipe, c'est qu'elle ne recule devant rien. C'est ça être un Serpentard ! Non, il n'y a aucune ironie. Je suis fier d'être un Serpentard car je suis fier d'être ce que je suis. Comme je suis certain que ce rat est fier d'être un Gryffondor… Gryffondor, lui ? Ne me faites pas rire ! … Il y a quelque chose en lui qui fait qu'il est différent des autres. C'est dans le regard… Le regard… Ces yeux trop verts… Je me rappelle que le Choixpeau a pris du temps avant de se décider. Trop de temps…

Le battre…

Pourtant, je lui suis redevable.

A vouloir le battre, à voler désespérément après le vif d'or, à courir après la victoire, j'ai fini par attraper un trésor.

Le Quidditch.

Petit, je l'aimais comme tout enfant de la communauté magique. Je ne suis plus très sûr de me souvenir ce qui me réjouissait autant. Peut-être était-ce les figures complexes que les joueurs traçaient dans le ciel. Peut être était-ce les capes qui volaient. Peut être était-ce les moments que je passais avec mon père.

Puis, j'en ai fait une vitrine de mon être et de mon paraître. J'étais Draco Malfoy, l'attrapeur officiel de la Maison de Serpentard. J'étais irremplaçable. J'étais celui qui apportait la victoire. L'élément sans qui l'équipe ne pouvait fonctionner.

Et enfin…

Enfin il y a eu la découverte.

Comment tout cela a changé, je ne le sais pas. Ni pourquoi et encore moins à quel moment. Mais je me souviens très bien du jour où je l'ai compris.

C'était en quatrième année. À cause de ce fichu tournoi, les matchs de Quidditch avaient été annulés. Comme tous, j'en ai éprouvé une sincère déception et le fait que Potter participe au tournoi ne m'a pas aidé à trouver un substitut au Quidditch dans ce simulacre de confrontation. Et tout au long des semaines, j'ai senti grandir en moi un vide et une colère dont je ne pouvais trouver le fondement.

Jusqu'à ce soir-là.

La première tâche allait se dérouler dans quelques jours, Potter était alors seul, toute l'école lui avait tourné le dos, son seul soutien restait cette Sang-de-bourbe. J'étais assis sur un banc dans le parc, mon esprit entièrement concentré sur le livre de magie appliquée que je lisais. Je ne sais ce qui attira mon attention, probablement rien, mais je relevai la tête. Et je découvris dans le ciel rougi par le couché de soleil, une forme noire qui dansait avec un point doré étincelant. Le ballet était magnifique et ce n'est que lorsque la forme noire eut saisi le point doré que je compris qu'il s'agissait de Potter qui venait d'attraper le vif d'or.

Je n'ai pas réfléchi une seconde, j'ai posé mon livre et je suis allé chercher mon balai. Je n'ai pas pris la peine de lui demander son avis, je me suis élancé dans les airs et je me suis joint à sa danse. Maintenant que j'y repense, je m'étonne qu'il n'ait pas réagi à mon intrusion, bien au contraire, il m'a accepté sans condition ni question. Et nous avons dansé et nous avons combattu.

Loin du regard des autres, des joueurs, des professeurs et des arbitres, notre lutte n'avait plus rien à voir avec la petite exhibition à laquelle nous nous prêtions habituellement. C'était violent, sans fair-play, ni de ma part, ni de la sienne. C'était la rencontre de deux rancœurs, de deux haines, de deux colères contenues, d'aversion, de rage, de besoin de voler. C'était l'envie de retrouver quelque chose qui manquait à l'esprit et au corps. Nous n'avons regagné la terre que lorsque l'obscurité devenue trop opaque ne nous a plus permise de distinguer le vif d'or.

Peut-être ne me croirez vous pas, mais je ne sais pas qui a gagné. Je sais que j'ai attrapé le vif d'or, je sais qu'il l'a également attrapé. Mais dans quelle proportion ? Pour la première fois, le plus important n'était pas de se mesurer pour gagner, mais seulement de se confronter.

Aujourd'hui, c'est devenu vital. Mon esprit, mon corps, tout en moi hurle si je ne joue pas. Il ne s'agit plus d'attraper une pauvre malheureuse petite balle avant un autre et encore moins de me pavaner. Non, c'est la tension, la lutte contre les autres, contre les éléments et contre soi-même. C'est cette possibilité d'exprimer pleinement haine et rage, d'oublier ce qui se passe en bas, de couper les liens avec ceux qui restent en dessous ignorant tout de ce qui se passe quand on est en l'air. C'est le souffle coupé et les bras douloureux, c'est l'aveuglement et l'assourdissement, c'est le cœur qui bat sourdement puis subitement s'arrête.

C'est vivre.


Fin du premier chapitre