Je vais maintenant m'employer à blabla-ter pendant quelques instants, parce que cette histoire a besoin de beaucoup d'explications (à mon avis)... Mais vous pouvez tout passer si vous vous en fichez comme de votre première chaussette, personne ne vous en tiendra rigueur. Sauf que vous risquez de vous sentir comme si vous aviez raté une marche.

Nouvelle histoire donc, et cette fois Crossover avec Sherlock Holmes... Oui, je sais, c'est un peu cliché, mais que voulez vous que je fasse seule contre une armée d'idées dépravées et décidées à me faire écrire leur histoire coute que coute?

Bref. Pour ceux qui se le demanderaient, ayant vu (et adoré xD) le film mais trouvant que cette interprétation est quand même un peu bancale, les Holmes et Watson que je dépeins cette histoire sont uniquement conformes à ceux des livres (ou du moins à la représentation que j'en ai). Pour ceux qui n'ont pas vu le film, pas lu les histoires, et que j'emmerde avec mes explications : vous pouvez quand même lire cette fic, vous comprendrez tout xD avec un peu de chance.

Sinon, étant donné que je ne suis ni Historienne, ni Médecin, ni David Shore, ni Sir Arthur Conan Doyle, ni plante carnivore, ni parapluie, ni chausson en laine ; ne vous attendez pas à ce que mes écrits soient d'une complète et parfaite exactitude concernant les passages de l'histoire pouvant se rapporter à l'un ou à l'ensemble de ces sujets (d'autant plus que j'ai tordu la réalité des faits pour pouvoir arriver à mes fins à propos des maladies évoquées dans cette fic. Oui, je suis aussi maléfique que ça). Merci.

Dernière précision : l'une des raisons de ce crossover est parce que j'avais envie d'écrire à la première personne (à l'époque Victorienne, ça se faisait énormément, alors évidemment mon esprit a fait le lien xD) pour pouvoir juste faire une histoire détaillant un peu mieux les... euh... "sentiments intérieurs" des persos. Et même si ça ressemble à un speech de psychiatre en manque de patients, vous comprenez où je veux en venir. J'espère.

Donc, oui, récits à la première personne. Les points de vue vont varier d'un perso à l'autre au cours des chapitres, ce que je trouve bien pratique en tant que simili-écrivaine :p mais je sais que ça énerve certains -désolée de la gêne si vous êtes dans ce cas xD

L'histoire se concentrera plus sur House et Wilson que Holmes et Watson, pour la simple et bonne (j'espère) raison que je suis plus à l'aise avec ces persos là, et que mes mono-pensées révolvent quand même principalement autour d'eux. Mais tout le monde y a quand même son temps d'écran, parce que Holmes et Watson méritent amplement que je prenne sur moi et oublie mes réticences.

Ai-je tout dit... Ah non, encore un truc : j'ai aussi tordu certaines choses qui se sont passés dans les livres de Sherlock Holmes pour me faciliter la vie et parce que je n'ai aucune morale (je vous l'avez dit que j'étais maléfique! Et encore, vous n'avez rien vu de ce que je peux faire subir à un chiot lorsque je suis de mauvaise humeur!). Rien de grave, mais je préfère prévenir, si jamais un puriste Sherlockien se risquait à lire l'espèce de machin, hybride et mutant, qu'est cette fic (et là je vous donne tous envie de la lire :D)


house

Wilson émit un grondement sourd. Je me contentai de le surveiller du coin de l'œil, ma concentration étant plus ou moins prise par la route faiblement éclairée par trois lampadaires mal embouchés.

"Arrête la voiture, House" me dit-il.

"Non" répondis-je simplement, conscient que mon calme ne ferait que tripler sa mauvaise humeur.

"Arrête cette voiture!" rugit-il (prouvant ma théorie).

"Pourquoi?"

"Parce que j'ai pas envie de finir ma vie en prison! Si je reste une minute de plus avec toi dans cette boîte de conserve, je vais finir par t'étrangler!"

Je soupirai.

"Tu ne vas pas me dire que cette petite chose t'énerve comme ça!" essayai-je de contrer.

"Petite chose?!" répéta-t-il, aussi abasourdi que si je venais de lancer une insulte à la tronche de la reine d'Angleterre. "Tu as payé le concierge de mon immeuble pour qu'il te prévienne de quand je rentre ou sors! … Tu as payé des infirmières pour qu'elles te disent où je suis pendant la journée! Tu as payé le barman du coin pour qu'il te dise quand je suis chez lui!!"

Je ne pus empêcher un sourire de s'afficher. En fait je ne fis même pas d'efforts pour l'en empêcher. Oui, j'avais fait tout ça, mais c'était plus par… inquiétude, que par envie d'enquêter sur sa vie privée. Si tant est qu'il en ait une.

Je le lui fis remarquer, mais ça ne sembla pas le calmer, bizarrement.

"Si tu n'arrêtes pas cette voiture, je sors moi-même" grogna-t-il en posant une main sur la poignée.

Il l'ouvrit en grand, et par pur réflexe j'écrasai aussitôt les freins de toutes mes forces, mon corps dépourvu de ceinture de sécurité manquant de peu de passer à travers le pare-brise.

Il n'y avait personne d'autre sur la route à cause de l'heure tardive et de la chaleur étouffante qui régnait dehors, mais Wilson s'en était sans doutes déjà assuré avant de m'obliger à piler en plein milieu de la voie.

Il sortit sans ajouter un mot et commença à rebrousser chemin vers une allée qui devrait le conduire jusque chez lui. Je sortis aussi, abandonnant la voiture en plein milieu.

"Wilson, attends!" criais-je. "C'est dangereux pour une jeune fille de se balader toute seule dans les rues la nuit!!"

D'accord, j'avoue que cette dernière phrase n'était pas exactement ce qu'il fallait dire si je voulais le retenir, mais je n'avais pas pu m'en empêcher. J'attrapai ma cane et me mis à le suivre dans la ruelle étroite qu'il avait emprunté.

"Eh! T'as laissé ton sac dans la voiture!! Wilson!" essayai-je de le rappeler, alors que sa silhouette sombre s'enfonçait devant moi.

"Lâche-moi deux secondes, House!" me cria-t-il. "De toutes façons tu seras le premier au courant dès que je mettrais un pied chez moi!"

Je soupirai de plus belle. Wilson était pire qu'un enfant… Pas que ce soit entièrement mature -ni honnête- d'avoir soudoyé deux ou trois personnes pour qu'elles l'espionnent - qu'elles le surveillent gentiment-, mais il n'y avait quand même pas matière à l'énerver comme ça. Enfin, probablement pas.

Un certain doute commença à faire son chemin dans ma tête. La seule raison qu'il y avait pour qu'il réagisse assez violemment pour menacer de se jeter hors d'une voiture en pleine course, c'était parce que…

"Tu me caches quelque chose?"

"Quoi?!" s'exclama-t-il en me jetant un coup d'œil dans son dos. "Comment veux-tu que je te cache quoi que ce soit? Il ne te reste plus qu'a installer une caméra dans ma salle de bain et pourras m'observer 24h sur 24!"

"Ne me tente pas" répliquai-je, amusé malgré moi. "Pourquoi tu as aussi peur que je sache où tu vas pendant la journée?"

"Tu es complètement parano" grommela-t-il.

La silhouette de Wilson devant moi se mit à presser le pas, m'obligeant à avaler une Vicodin pour garder le rythme et ne pas le perdre de vue. Ce ne fut que maintenant que je réalisai que les éclairages des lampadaires avaient fortement diminués alors que l'on s'enfonçait dans cette étroite rue sans fin.

"House, arrête de me suivre!!" me cria-t-il par-dessus son épaule. "Tu m'espionnes à longueur de temps et tu trouves encore matière à… à me rendre responsable?! "

Je ne l'écoutai qu'à moitié. Maintenant que j'y pensai, la température avait bien chuté depuis qu'on était entrés dans cette allée. Au devant de nous, les éclairages devenaient de plus en plus rares, et le bout de la rue était carrément noir. La voix de Wilson continuait à babiller d'un ton indigné, et bientôt sa silhouette disparu dans la nuit au devant de moi. Seul le son de sa voix me permettait de savoir qu'il était encore en train d'avancer -il ne s'était sans doutes pas rendu compte de l'étrangeté de la situation, énervé comme il l'était.

Et puis soudain, il se tut complètement.

"Wilson?" appelai-je dans le silence.

Pas de réponse. Un étrange sentiment d'inquiétude fondit sur moi plus rapidement que je ne l'aurais cru.

"Wilson!"

Je pressai le pas et avançai dans la rue noire jusqu'à ce qu'il fasse trop sombre pour que je distingue mon propre nez. Malheureusement, parce que ce dernier finit sa course contre un mur, dans le noir total… Je remarquai une faible lueur à ma droite et tournai la tête ; et malgré tout le sang-froid dont je me savais capable, ma mâchoire manqua de tomber sur le sol.

A ma droite, il y avait une autre petite rue, beaucoup plus courte, au bout de laquelle il y avait Wilson complètement figé.

La raison de son immobilité n'était pas dure à déduire : devant lui, à la place de la rue où aurait dû se dresser sa maison dans l'air chaud et étouffant du New Jersey, s'étalait une grande avenue perpendiculaire et recouverte de neige alors que d'épais flocons continuaient de tomber du ciel. La substance blanche et frigorifiée brillait tout doucement à l'éclairage de quelques lampadaires à la lueur vacillante, prouvant qu'ils ne marchaient sûrement pas à l'électricité.

Il neigeait là bas, et là-bas seulement -j'étais parfaitement sec, même si gelé par le froid ambiant. Je secouai la tête et fronçai les sourcils.

Hallucination? Dans ce cas, j'hallucinai aussi Wilson devant moi, ce qui était mauvais signe. Ou alors nous hallucinions tous les deux, ce qui était généralement un encore plus mauvais signe.

Wilson tourna lentement la tête vers moi, et d'après l'expression déboussolée plaqué sur son visage, je penchai pour l'hallucination collective. Il y avait très peu de chance pour que mon cerveau ne se mette à imaginer un Wilson tremblotant de stupeur, ça n'avait rien de drôle pour moi.

Je me décollai du mur et avança vers la rue enneigée, comme hypnotisé par la lueur que rendait la neige dans la nuit noire.

Je débouchai sur l'avenue, aux côtés de Wilson, et faillis déraper sur le sol gelé alors qu'un énorme chariot noir tiré par deux grands chevaux me passait devant et le fis sursauter. Wilson fut assez rapide pour m'empêcher de m'étaler par terre alors que cette saloperie de mauvaise jambe tremblait sous moi, mais je me dégageai rapidement de son emprise et fis un nouveau pas en avant, les yeux fixés sur le chariot. Il s'éloigna en cahotant, avançant avec difficultés dans la neige couvrant la route, bien que celle-ci semblait avoir été un peu dégagée à coups de pelle.

Deux gamins habillés chaudement passèrent devant nous en rigolant, de la neige jusqu'à la taille, se lançant des boules de neige.

"Arrêtez!" leur cria une femme vêtue d'une grande robe d'un autre siècle d'une voix autoritaire, en tentant de les rattraper.

Elle nous jeta un regard dédaigneux en passant, et je sentis pour la première fois depuis que j'avais émergé de cette rue à quel point il faisait froid. Je jetai un coup d'œil à Wilson qui avait gardé ses yeux fixés sur le dos des gamins, complètement ahuri. Il était habillé aussi légèrement que moi, les bras nus. On venait de sortir d'une allée où il faisait près de 37°C. Il faisait 0° ici, peut-être moins.

Hallucination ou pas, (je ne savais pas bien pourquoi le 'ou pas' avait effleuré mon esprit) le froid mordait avec réalisme. La pensée de rebrousser chemin traversa mon esprit, mais je m'aperçus avec surprise que je n'en avais pas envie. Pas tant que je ne n'aurais pas au moins été touché l'un de ces chevaux qui arrivaient vers nous en tirant un autre charriot noir, pour m'assurer qu'ils avaient une masse et n'étaient pas juste… de la fumée, à défaut de meilleur mot.

Je fis donc un pas en avant, descendant sur la route. Je m'apprêtai à faire un second pas lorsqu'une main m'attrapa par le col et me tira sur le trottoir en arrière, le charriot que j'avais eu pendant un instant l'intention de confronter passant à toute vitesse devant moi.

"Vous êtes complètement fou, ma parole?" résonna une voix que je ne connaissais pas.

Une sorte de couverture fut jetée sur mes épaules avant que je n'ai pu faire quoi que ce soit. Je me tournai, vis que Wilson était lui aussi recouvert d'une couverture, et aperçu celui qui venait de m'attraper. Il fronçait les sourcils d'un air sévère, les lèvres serrées sceptiquement sous sa moustache, et était habillé d'un costume en tweed, les genoux enfoncés dans la neige.

"Venez vous réchauffer avant que vous n'attrapiez une pneumonie" nous commanda-t-il.

Il poussa doucement Wilson, qui avait les yeux fixés là-haut sur la plaque qui donnait le nom de la rue, pour le faire bouger et tenta de faire la même chose avec moi, mais j'esquivai son geste. Il m'adressa un regard surpris mais me laissa tranquille, nous devançant en boitant légèrement de la jambe gauche pour aller nous ouvrir la porte de la maison devant laquelle on se tenait, et nous fit signe d'entrer.

"Dépêchez vous" nous dit-il.

Je n'avais pas vraiment envie de lui obéir, mais Wilson avançait déjà docilement, et je fus obligé de le suivre… Je n'allais pas laisser cet idiot tout seul dans cette maison avec cet inconnu. Je me mis à ricaner alors que cette pensée me traversait l'esprit, réalisant à quel point je raisonnais comme si Wilson avait 4 ans et demi.

Mon rire s'arrêta vite cependant, car l'homme à la moustache me jeta un regard méfiant, comme s'il avait soudain peur que je ne sois devenu complètement fou comme il l'avait insinué plus tôt en m'empêchant de rouler sous les sabots d'un cheval ou deux.

La chaleur de la maison me dona une claque, et je n'en fus qu'encore plus conscient d'à quel point j'étais frigorifié.

Une petite femme apparu au coin d'une porte, un air interrogateur sur le visage.

"Tout va bien, Mrs Hudson" la rassura l'autre. "Ce sont des invités."

Ca ne sembla pas la rasséréner, apparemment pas franchement heureuse de voir le tapis du hall se faire piétiner par des inconnus trempés comme des chiens et habillés comme s'ils débarquaient de Hawaii.

"House" dit soudain Wilson d'une voix un peu chancelante.

Je lui jetai un regard en biais, m'apercevant que c'était la première fois qu'il ouvrait la bouche depuis que j'avais atterri ici.

"Il a dit « Mrs Hudson »" me fit remarquer Wilson à voix basse pour ne pas être entendu par l'autre qui nous guidait à travers un escalier étroit.

"…Et?" je demandais, ne l'écoutant qu'à moitié.

Mon cerveau était encore occupé à essayer de savoir pourquoi j'hallucinais, et si j'hallucinais, et si non, qu'est-ce qui se passait exactement, et pourquoi…

"T'as pas remarqué les maisons ou quoi!" s'excita Wilson comme s'il me trouvait trop lent à la détente. "Tu as bien vu les fiacres et les lampadaires au gaz!! Tu as vu le nom de cette rue?!"

"…Et?" répétai-je par automatisme, peu intéressé.

Avant qu'il n'ait pu répondre, la porte devant laquelle on venait d'arriver s'ouvrit. Un grand homme maigre aux cheveux noirs et aux yeux gris perçants nous jeta un regard neutre, puis se poussa de devant pour nous laisser passer.

"Merci, Holmes" dit notre « guide ».

Un rouage se mit soudain à tourner dans mon esprit, il y eu un déclique quelque part, et j'ai dû béer sans en avoir conscience, parce que Wilson me referma la bouche du dos de sa main.


Watson

Il était tard ce soir là, je regardais la neige tomber enjouement par la fenêtre à la lumière des réverbères. Derrière moi, j'entendais un journal bruisser sous les administrations peu attentionnées de Holmes, alors qu'il était plongé depuis quelques temps dans la lecture détaillée du journal datant de trois jours plus tôt, pour une raison qui m'échappait.

Les cabs cahotant étaient les seuls maitres de l'avenue lorsque les londoniens préféraient, et à juste titre, rester chez eux plutôt que de sortir à pieds par ce temps. Jusqu'à ce que je ne remarque, au milieu de la neige, un homme sortir de l'étroite ruelle qui faisait flanc à notre maison. Il était habillé d'un étrange accoutrement, pour dire le minimum. En tous cas sûrement pas quelque chose qu'il était bon de porter par ce temps détestable.

Bientôt, il fut rejoint par un second homme qui boitait, s'aidant d'une cane qui glissait sur la neige verglacée, et habillé plus ou moins de la même manière. Je fronçais les sourcils alors que je les observais, immobiles au milieu de la neige, comme perdus.

Ils furent bousculés par deux gamins et leur mère, uniques autres âmes parcourant les trottoirs, mais restèrent stoppés sur place devant chez nous, d'une manière qui devait s'approcher de l'obstination.

"Holmes?" appelai-je.

"Hmmm?" me parvint sa voix distraite.

"Vous attendez de la visite?"

Le journal bruissa une nouvelle fois.

"Non. Il est proche de 22h et le temps est horrible" fit-il remarquer. "Personne ne viendra me demander des services. Pourquoi?"

"Il y a des hommes à l'allure étrange qui semblent décidés à camper devant chez nous."

Holmes releva la tête de son journal en même temps qu'un sourcil sceptique.

"Et ils sont habillés d'une façon des plus curieuses" ajoutai-je.

"Ils ne montent pas?" me demanda Holmes.

"Non, ils restent juste devant."

Cette fois, Holmes se leva et vint me rejoindre pour scruter le trottoir enneigé. Il observa un instant les deux hommes qui n'avaient toujours pas bougé d'un pas, comme soudés au sol. J'en vis un se mettre à trembler plutôt violemment.

"S'ils comptent rester aussi inertes devant notre porte… on ne peut pas les laisser mourir de froid juste devant chez nous" fis-je remarquer en me retournant.

Je jetais un bref coup d'œil au salon pour y dénicher de quoi les couvrir.

"Faites-les monter, Watson" me dit Holmes. "On ne reste généralement pas devant cette maison en plein milieu de la nuit, sans avoir une quelconque raison."

"J'y comptais" répondis-je en disparaissant derrière la porte, mon manteau sur les épaules.

Je descendis rapidement les escaliers et ouvrai la porte d'entrée, aussitôt attaqué par le froid vicieux de décembre. J'arrivai juste à temps, comme celui qui boitait s'avança soudain en plein sur la voie, au milieu des cabs cahotant.

Je me jetai en avant et le retins par le bras, le tirant en arrière alors qu'un cheval passait à l'endroit exact où il se trouvait moins d'une seconde plus tôt.

"Vous êtes complètement fou, ma parole?" m'exclamai-je, le cœur battant.

Je lui jetai à lui et à son compagnon les Afghanes que j'avais dans les bras et ignorai leur regard surpris pour les pousser vers la maison.

"Venez vous réchauffer avant que vous n'attrapiez une pneumonie" leur conseillai-je.

Ils me suivirent sans bruit, les pieds trainants, comme hypnotisés. Nous passâmes devant Mme Hudson qui ne semblait pas voir d'un bon œil ces deux hommes à l'allure peu rassurante, et ils se mirent à parler à voix basse dans mon dos, assez fort pour que j'en saisisse des bribes qui renforcèrent la théorie de Holmes -ils nous connaissaient. Quant à savoir pourquoi ils avaient attendu dans le froid glacial plutôt que de venir frapper à notre porte, je n'en savais rien.

Holmes nous ouvrit la porte et nous laissa entrer, et je les conduisis près de la cheminée.

"Asseyez-vous" leur conseillai-je en leur désignant les fauteuils. "Il faut vous réchauffer le plus vite possible" ajoutai-je en remarquant leurs tremblements amplifiés par le brusque changement de température depuis qu'ils avaient pénétré la maison.

Holmes leur laissa un moment pour s'installer et le temps pour moi de leur apporter du thé brûlant, avant de leur demander d'une voix courtoise mais méfiante :

"Puis-je savoir ce qui vous amène devant chez nous à cette heure de la nuit? Mon ami le Dr Watson a eu peur que vous ne vous transformiez en stalagmites sur le pas de notre porte."

Ils échangèrent un regard –ou, pour être plus exact, celui aux yeux marrons lança un regard éloquent à son compagnon qui se contentait de regarder le feu brûler dans la cheminée. Je remarquai qu'il nous écoutait quand même avec la plus grande attention, car il eut une brève grimace en entendant mon nom.

Comme aucun d'eux ne semblaient décidés à ouvrir la bouche, Holmes me jeta un regard légèrement incrédule que je lui rendis, dérangé par leur silence persistent. Holmes s'apprêtait à reprendre la parole, mais l'homme aux yeux marrons le pris de vitesse, tournant son regard de sur le visage impassible de son compagnon, à celui, nerveux, du mien.

"Vous êtes… Excusez la question idiote," se reprit-il en plein milieu de sa phrase "mais êtes-vous Sherlock Holmes?"

Son accent était clairement américain. Mon ami souleva un sourcil dubitatif, probablement surpris par la question, ou par le ton proprement craintif qu'avait employé l'homme.

"Je le suis" répondit-il calmement.

L'homme aux yeux bleus décolla finalement ces derniers de l'âtre de la cheminée pour les poser, pensifs, sur Holmes, qui lui lança un bref regard impassible.

"Et vous avez maintenant un avantage certain sur moi" continua mon ami. "Puis-je vous demander à mon tour…?"

L'homme aux yeux bruns se redressa sur le fauteuil, laissant la couverture retomber de ses épaules et posant doucement sa tasse de thé sur la table devant lui, avant de s'éclaircir fébrilement la gorge.

"Je suis… Wilson, James Wilson" se présenta-t-il finalement. "Et « ça» " continua-t-il d'un ton beaucoup moins courtois en faisant un vague geste vers son compagnon, "c'est Gregory House."

"Je suppose que j'ai commis une erreur en supposant que vous étiez devant chez nous dans un but précis" dit Holmes après un très court silence.

"Euh… Oui" répondit Wilson avec une sorte de sourire embarrassé. "On s'est… disons qu'on s'est perdus."

"Perdus?" répéta Holmes. "Vous venez d'arriver en Angleterre?"

Je fus surpris de constater que son ton était clairement celui de la question ; d'habitude, Holmes, au moyen de ses méthodes d'observations dont il se servait instinctivement avec toute chose, humain ou objet, qui rencontrait son chemin, aurait déduit le nombre de jours que ces étrangers avaient passé en Angleterre, et même le moyen de transport qu'ils auraient pu prendre pour arriver à Londres. Mais je devais avouer que leur accoutrement plus que minimal pour ces temps hivernaux étaient bien trop légers et immaculés pour que l'on puisse y déceler facilement quoi que ce soit d'utile.

"On peut dire ça comme ça" murmura Wilson en remuant inconfortablement sur le fauteuil.

"Ce n'est pas possible!" s'exclama soudain le dénommé House, sortant de son immobilité pour jeter un regard furieux à son ami, qui le lui rendit tout aussi bien. "On n'est pas à Londres, on n'est pas chez Sherlock Holmes, crétin! "

"Si tu veux" répondit l'autre, ayant apparemment momentanément oublié notre présence. "Dans ce cas dis-moi où est-ce qu'on est"

House secoua la tête.

"Je suis en plein… délire" dit-il doucement.

Je vis Wilson baisser les yeux sur lui-même, comme pour vérifier qu'il était bien réel, avant de les relever vers House.

"Alors pour toi je suis une image de ton esprit? Tu aurais pu imaginer Angelina Jolie ou Carmen Electra, et tu m'imagines moi? Je suis flatté… Mais si tu comptes me passer une épée à travers le corps pour vérifier si je suis une hallucination, je préférerais que tu y réfléchisses à deux fois."

Holmes avait plissé les yeux en même temps que je m'étais tendu. Ce House était visiblement dérangé, et entendre Wilson parler de meurtre à son compte n'était pas le moins du monde rassurant.

"J'en ai marre" déclara soudain House en se levant brusquement, me faisant légèrement sursauter.

Il attrapa sa cane et franchit la porte d'entrée avant même que l'un de nous n'ait compris ce qui se passait. Wilson resta lui-même sur place un petit moment, se demandant visiblement si son compagnon était sérieux ou s'il allait réapparaitre rapidement. Mais lorsque la porte d'entrée claqua, il sauta du fauteuil à son tour, et de lui courir après en l'appelant à pleins poumons.

J'échangeai un regard incertain avec Holmes, qui paraissait confus.


voilà voilà... [juste pour éviter les confusions : fiacres, cabs, diligences, calèches, voitures, charriots à roulettes, truc avec des chevaux... tout ça désigne une seule et même chose. j'aime les synonymes.]