COMPAGNON D'UN LORD

Chapitre 1


Harry laissa échapper un grognement furieux entre ses dents, se dirigeant à grands pas rageurs vers le parc. Cette matinée avait été catastrophique, plus même, apocalyptique ! Était-il possible à ce point de vivre un début de journée aussi merdique, dont chaque minute semblait programmer pour lui pourrir le moral ? Lorsque même Ron s'en était mêlé durant le cours de Binns pour le sermonner, il s'était senti au bord de la défenestration et avait fixé les arbres à travers la vitre avec un air de dément qui avait légèrement effrayé Hermione.

Et cela avait continué durant chaque minute de chaque heure de cette putain de matinée. Maintenant il en avait assez et avait décidé de s'accorder une pause amplement méritée, peu importe que les cours reprennent dans une heure, après le déjeuner. Une journée merdique comme il en avait rarement eu. Vivement qu'elle soit finie!

Harry dépassa le parc d'un pas vif et jetant un regard méfiant autour de lui, s'empressa de disparaître dans le sous-bois de la forêt interdite. Là, il s'enfonça plus en avant sous les arbres et lorsqu'il fut certain que personne ne pouvait plus le voir, il sourit et invoqua sa forme d'animagus cachée au fin fond de son esprit. Il avait appris en cachette de ses amis dans le but de pouvoir s'isoler tranquillement. Il adorait Ron et Hermione ainsi que ses amis Gryffondors, qu'on ne s'y trompe pas, mais de temps en temps, un break s'imposait. Et aujourd'hui, il était vraiment indispensable.

C'est ainsi qu'un gros loup gris aux larges pattes et à la gueule puissante prit la place de l'humain qui se tenait là auparavant. Ses yeux verts étaient seuls vestiges de son ancienne apparence ainsi qu'une fine marque blanche sur son front, reste de la fameuse cicatrice qui ne le quittait jamais. Les oreilles douces se dirigèrent vers l'avant, attentives.

Harry étira ses pattes une par une, ankylosé. Il ouvrit grand les mâchoires et bailla ostensiblement. Sa queue fouetta l'air une unique fois et il s'élança à travers les bois. Ravi de sentir le vent contre son museau et fouaillant dans son lourd pelage épais, il se mit à cavaler sans but précis. Bandant ses muscles, il se hissa d'un grand bond sur un amoncellement de rochers. Grâce à ses nouvelles facultés, il trottina agilement parmi les pierres coupantes, sans autre bruit que celui de son souffle.

Il parcourut la forêt interdite pendant un temps indéterminé, ne s'arrêtant que quelques instants pour se désaltérer dans un léger ruisseau presque inexistant qui passait par là. Alors qu'il enjambait une flaque de boue, il sentit une curieuse chaleur l'envahir suivit d'un froid plus fort qu'avant. Perplexe, il s'arrêta aux aguets. Devant l'absence de réaction de quoi que ce soit, il fit prudemment marche arrière, museau en avant. Il sentit à nouveau une chaleur uniquement autour de sa gueule cette fois.

Ce devait être les barrières de Poudlard, un genre de champ magnétique entourait le château et ses environs. Visiblement une partie de la forêt ne se trouvait pas sous sa protection. Le loup agita la tête d'un mouvement signifiant que cela lui était égal de sortir de l'enceinte de l'école. Il fit demi-tour sans s'inquiéter et poursuivit son chemin.

Cela dura une bonne demi-heure de plus. Il avait l'impression de ne jamais pouvoir se lasser de cette liberté et cela faisait longtemps qu'il ne s'était pas offert une aussi longue promenade, ses sens de loup le démangeaient.

Il se figea brusquement. Son instinct lui hurlait que quelque chose n'allait pas. Il ne savait absolument pas d'où lui venait cette sensation, rien de visible ou d'audible et menaçant ne semblait se profiler à l'horizon. Entrouvrant la gueule, il aspira l'air aux alentours. Il lui resta un mauvais goût sur la langue, un goût acre qu'il détesta immédiatement. Quelque chose sentait mal ici. Mal pour lui, pour son loup. Et ce fut la seule chose qu'il put penser avant qu'un sort de stupéfixion le touche de plein fouet.

Il s'effondra sur le flanc. Le jappement surpris qu'il eut envie de lâcher se bloqua derrière ses crocs. Il eut le temps de voir deux yeux rouges flamboyants avant de se laisser emporter par l'inconscience.

Merde !

xXx

Harry se sentait tout comateux et le goût dans sa bouche était âcre et vraiment pas agréable. Il papillonna des paupières, cherchant mentalement ce qui avait bien pu se passer pour qu'il se sente comme si un concert de rock s'était déroulé dans son crâne.

Son estomac avait l'air instable lui aussi, une nausée lui tournait sinistrement au fond de la gorge, hésitante à se révéler. Il se redressa tant bien que mal. Le sol était froid sous lui et au milieu de deux grimaces d'inconfort, il se demanda vaguement pourquoi il était couché sur des pavés glacés.

« Réveillé Potter ? »

La voix moqueuse le tira brusquement de son état larvaire et lui fit lever la tête. Il était absolument certain de pouvoir reconnaître cette voix dans n'importe quelles circonstances.

Voldemort ! Songea-t-il

Il fit un gros effort pour s'asseoir mais ne put se lever debout. Un cuisant sentiment d'humiliation le pris à la gorge à ce constat. Être assis par terre avec si peu de force le mettait dans une position bien trop désagréable.

« Mon petit loup je crois que la suite va beaucoup te plaire, reprit Voldemort. »

Ce dernier se tenait fièrement droit, drapé dans une lourde cape aux riches broderies à ses extrémités et au velours noir soyeux. Il avait recouvert un visage jeune, loin de l'horrible face de serpent sans narines et chauve qu'il avait la dernière fois. Harry ne savait pas comment mais au sein de l'Ordre on chuchotait qu'il prenait une potion pour stabiliser son apparence.

Il avait le visage d'un homme extrêmement séduisant, c'était un fait que personne ne pouvait nier. Ses yeux avaient gardé la teinte rubis qui le caractérisait et si sa peau n'était plus blanche cadavérique, elle en restait néanmoins pâle. Les traits aristocratiques de sa figure dénotaient clairement sa lignée de Serpentard.

Il était enveloppé d'une telle aura de puissance et de charisme ainsi dressé devant lui, le dominant de toute sa hauteur, qu'Harry se sentit encore plus envahit par la soumission. Il se sentait ridiculement faible et petit face au Mage Noir dans toute sa splendeur.

Et il haïssait ça.

Revenant sur les paroles du Lord, il se sentit brusquement happé par les premières. « Mon petit loup ». Merlin oui ! Il était sous forme de loup quand Voldemort l'avait capturé ! C'est à ce moment qu'il se rendit compte qu'il était toujours transformé et qu'il était dans l'impossibilité de répondre à son ennemi.

Se concentrant le plus fortement qu'il put, Harry chercha à redevenir humain mais ce fut avec horreur qu'il se heurta à une barrière énergétique entourant sa forme humaine dans son esprit. Un gloussement au-dessus de lui le fit lever les yeux.

« Comme tu viens sans doute de le voir, il ne t'est plus possible de redevenir un garçon, sourit Voldemort. »

L'homme contemplait sa Némésis à ses pieds. Le loup était gros pour son espèce, lui arrivant quasiment à la taille avec une gueule qui pouvait facilement arracher un bras à un humain. Les grosses pattes étaient pourvues de griffes acérées qui claquaient contre le sol dallé. Les émeraudes en revanche étaient en tout point semblables à celles qu'il connaissait. Même la cicatrice était là.

A vrai dire, il avait été plutôt étonné de constater que son ennemi était animagus. En devenir un était une prouesse mais il fallait être culotté pour le devenir au nez et à la barbe du Ministère. Et plus il le voyait ainsi, plus une idée délicieuse et malsaine lui venait à l'esprit, éloignant les images premières de tortures qu'il avait imaginé.

Il s'accroupit alors pour être au niveau des yeux du loup et sourit d'un air malveillant.

« Tu as pénétré sur mes terres petit garçon, tu dois donc être puni. »

Il s'attira en retour un regard bien plus que méfiant couplé à une haine inoffensive qui le fit rire.

« Tu vois, je ne pensais pas que tu pouvais être un animagus mais maintenant que j'y réfléchis, cela pourrait être amusant. »

Profitant que le loup n'ait que de maigres forces, il leva la main et attrapa le museau en le maintenant avec force. Il sentit les muscles de la mâchoire se contracter sous ses doigts ainsi que le plissement de la peau lorsqu'il montra les crocs.

« Tu es à quatre pattes à mes pieds, incapable de parler et trop faible pour me désobéir, chuchota la voix doucereuse du Lord. Et cela me donne des idées vois-tu mon loup. »

Harry sentait venir l'idée tordue grosse comme une maison et il commençait à craindre le pire de ce qui avait pu germer dans l'esprit tordu de ce fou.

Sans prévention, le Seigneur des Ténèbres l'attrapa soudain à deux mains et lui fit courber l'échine impérieusement. Malgré le sursaut de surprise qui lui échappa et les maigres tentatives de défense qu'il fit, Harry se plia à la volonté du mage noir, trop faible. De nulle part sortit une épaisse chaîne en fer qui s'enroula sur elle même et forma un genre de collier très banal, lourd et résistant. Avec délectation, Voldemort le lui passa au cou.

« Te voilà affublé de ce qui sied à ton rang mon cher Harry, susurra le Lord. »

La chose qui apparut ensuite fit se cambrer Harry et se tortiller dans un vain espoir d'y échapper. Elle passa cependant son museau alors que les mains puissantes le maintenaient en place. Et il fut maintenu la tête prise dans la poigne intransigeante d'une muselière en cuir épais. Ses mâchoires étaient fermement calées l'une contre l'autre.

« Que voilà un joli chien, exulta Voldemort. »

Harry sentait très nettement la caresse humiliante de la main de l'homme sur son crâne comme celle d'un maître à son clébard.

« Je vais t'emmener avec moi Harry, souffla le Lord presque contre son visage. Tu seras derrière moi, à me suivre religieusement, obéissant à la pression de ta laisse. Les oreilles baissées avec soumission, tu marcheras à chacun de mes pas, attentif à ne jamais me contrarier. Et tous mes mangemorts te connaîtront comme mon chien, la bête qui me suit comme une ombre et éperdue d'obéissance envers moi, son maître. Et eux les autres, ceux qui avaient foi en toi le Sauveur, ils te regarderont avec pitié. Ils te hueront de n'être plus qu'un corps sans âme qui se traînera à mes pieds pour avoir droit à un peu d'attention, un corps qui gémira de plaisir pour une pauvre caresse sur la tête quand tu auras bien aboyé à l'ordre que je t'aurais donné. »

Et plus Voldemort parlait, plus Harry sentait les larmes s'accumuler dans ses yeux. Ça pouvait pleurer un loup ? Parce qu'il en était vraiment heureux si la réponse était non. Le programme de ce mage noir de malheur lui semblait de plus en plus horrible et il avait extrêmement peur de la . Il ne voulait pas être un chien. Non...

Il sentit une autre caresse, presque douce qui lui déchira pourtant le cœur avant que le Seigneur des Ténèbres ne se relève et quitte le cachot dans un tourbillonnement de cape. Harry s'allongea sur le sol, les pattes avant repliées sous lui, sa fierté brisée en mille morceaux sur le sol.

xXx

Un très maigre rayon de soleil vint frapper le museau de Harry. Il ouvrit les yeux doucement avant de tenter de se mettre debout sur ses pattes. Il se sentait très faible pour une raison inconnue. Il pouvait marcher mais en aucun cas courir et encore moins se révolter et tenter de s'échapper.

Cela faisait une journée qu'il était là. Après sa visite, Voldemort n'avait plus daigné le voir. Un mangemort était descendu lui porter une gamelle en ferraille dans laquelle se trouvait des morceaux de viande crue. L'humiliation ne s'en était faite que plus intense. Comment osait-il le traiter de la sorte ?

Harry avait refusé la nourriture - et puis quoi encore ?! - et s'était roulé en boule sur le sol de dépit. Petit à petit, la nausée avait reflué et son mal être s'était calmé. Il se sentait mieux, plus alerte. Cependant la faim l'avait tiraillée. Si dans son enfance il avait pu tenir le coup sans manger grand chose, après avoir profité des repas copieux de Poudlard, il n'était pas certain de pourvoir recommencer ce genre d'exploit. De plus, même s'il rechignait à l'admettre, il aurait besoin de forces pour tenir tête à son ennemi.

C'est pourquoi il avait difficilement mis sa fierté de côté pour se restaurer. Il avait découvert que sa fameuse muselière s'adaptait aux mouvements de sa gueule lorsqu'il s'agissait de faire des mouvements non agressifs. Lorsqu'il voulait mordre ou montrer les crocs, il était immanquablement bloqué mais pour manger, il avait eu le droit d'ouvrir les mâchoires. Cela avait renforcé son sentiment de colère. Il était un chien qu'on autorisait ou non à faire quelque chose. Tout était contrôlé.

Agacé, il se retourna en boule sur le sol glacé. Lorsqu'il avait mangé la viande crue contenue dans son bol, il avait senti avec soulagement son estomac s'apaiser et il avait pu dormir tranquillement. Seulement voilà, maintenant il se sentait mal à nouveau. Et il n'avait pas la moindre idée du pourquoi.

Il se sentait lourd et faible comme si une chape de plomb s'était abattue sur son dos. Ses pattes étaient si dures à bouger. Si leurs apparences n'étaient pas strictement la même qu'avant, il aurait juré qu'elles avaient doublé de volume tant elles lui semblaient pataudes. Pourquoi se sentait-il ainsi Merlin ? Il avait mangé, il avait dormi même si ça n'avait pas été du plus réparateur des sommeils, alors pourquoi était-il si faible ?

Dépité, le loup posa sa lourde tête sur ses pattes. Il poussa un soupir. Lui qui avait simplement voulu se calmer avant de retourner en cours se trouvait bien mal maintenant. Bien sur ça avait été stupide de traverser les barrières de Poudlard. Il s'en mordait les doigts maintenant mais pouvait-il se douter lui qu'un malade mental l'attendait de l'autre côté pour en faire son chien ?

Il se demandait maintenant s'il reverrait jamais un jour Ron et Hermione. Si Voldemort avait le pouvoir de le maintenir sous forme de loup et avec la muselière et le collier où il était sur qu'il aurait droit à une laisse, il n'avait que très peu de chance de sortir d'ici un jour en homme libre.

Un grincement de porte l'interrompit dans ses pensées. Levant le museau, le loup observa la haute silhouette qui se glissait par la porte vers sa cellule. Drapé de noir comme à l'habitude, le Lord noir s'avança près de la lourde grille qui l'empêchait de sortir. Il fit un signe négligent de la main, ouvrant sa cellule.

Harry aurait bien tenté de grogner face à cette pourriture d'homme mais la muselière autour de sa gorge était très fortement serrée et il sentait l'énergie s'en dégager. Il était sûr que s'il tentait de gronder face à Voldemort, il prendrait une décharge comme les chiens dont les colliers leur donnaient un coup d'électricité s'ils aboyaient.

Harry ne s'en sentit qu'encore plus mal.

Le mage sombre se pencha et fit apparaître une lourde laisse en cuir qui semblait dure comme le roc. Sans doute que jamais ses crocs ne pourraient entailler pareille chose même s'il avait pu.

« C'est le grand jour mon chien, chuchota Voldemort, aujourd'hui est ta première sortie en tant que bête soumise d'un Lord. »

Un sourire mauvais aux lèvres et l'air bien peu impressionné par le regard furieux du loup, le Seigneur des Ténèbres se redressa et tira un coup sec sur la laisse.

Affaibli, Harry ne put que se relever en catastrophe pour ne pas finir étranglé par le collier de ferraille qui lui entamait la peau du cou. Un peu tremblant sur ses pattes, il n'eut d'autre choix que d'obéir à la pression autoritaire du Lord et le suivre alors qu'il le tirait hors de la cellule. Merlin rien qu'à être debout il avait l'impression d'avoir de la fièvre et il avait très chaud sous la lourde couche de poils de sa forme canine.

Cependant l'idée qu'il allait être exhibé comme un moins que rien, plus bas qu'un esclave, suffisait à lui nouer le ventre et lui donner des sueurs froides.


To be continued