Pinceau

Partie 1

NDA : librement inspiré du film "The Pillow Book"

***

Le jeune homme fixait son maître avec un mélange d'enthousiasme et d'appréhension dans l'œil qui fit mal au Pope.

Lentement, Shion se força à décrisper ses mains des accoudoirs de son fauteuil.

De plus en plus, il souffrait de voir son ancien élève.

Le visage aussi froid et calme que possible, il camouflait son trouble à son élève du mieux qu'il pouvait.

"- Mu…. Je ne crois pas…"

Le jeune bélier insista.

"- S'il te plait !!!"

Le pope secoua la tête, désolé.

"- Mu…."

Le jeune atlante fronça les sourcils a mesure que la colère montait lentement.

"- Shion !!! C'est mon droit ! C'est mon héritage autant que le tien ! Tu es le dernier à qui je puisse demander ça !"

Le pope ferma les yeux.

Il entendit Mu quitter son bureau en claquant la porte, en colère comme un rat.

Mu avait raison et tous les droits de demander ça a Shion.

Mais le pope ne le pouvait.

"- Je suis désolé, Mu…."

***

Saga reposa le livre qu'il lisait lorsqu'il entendit Mu rentrer dans leur appartement.

L'aîné des gémeaux avait laissé son armure à son frère et ne s'en portait pas plus mal

Depuis leur retour à la vie, Mu et lui s'étaient installés ensemble dans la maison du Bélier. Ou plus exactement, depuis leur retour à la vie, Mu avait installé Saga chez lui.

A la grande stupeur de Saga, le doux et timide agneau lui avait littéralement sauté dessus avant de lui gronder à l'oreille qu'il était à lui, pour toujours, que ce n'était pas négociable et que maintenant, il allait l'embrasser, oui devant tout le monde merci bien.

Trop choqué pour se défendre, Saga avait tout simplement obéit au petit agneau qui le menait si bien par le bout du nez.

Depuis, il ne s'en était jamais plaint.

Il lui avait fallut un temps pour se faire à sa nouvelle relation avec Mu mais… Ce n'était pas tous les jours qu'un homme comme le bélier vous expliquait que vous étiez forcément amoureux de lui-même si vous n'étiez pas au courant. Et ce n'était pas tous les jours non plus que le petit agneau ait totalement raison !

Pourtant, ce soir, Saga ne sentait pas la calme satisfaction de son amant dans son cosmos.

Il sentait sa colère et sa déception.

"- Mu ?"

Le jeune chevalier d'or jeta le casque d'une armure en court de réparation à travers l'atelier avant de faire subir le même sort à l'armure de pégase qu'il piétina sauvagement.

Il n'avait rien contre elle, elle était juste là et il avait besoin de se défouler sur quelque chose."

"- Mu…" Répéta doucement Saga avant de venir encercler son amant de ses bras. "Qu'est ce qui ne va pas ?"

Mu se détendit quelque peu. Il ferma les yeux avant d'appuyer son front contre l'épaule du gémeau. Le bélier était content que Saga ait laissé son armure à son frère. Ainsi, il l'avait pour lui tout seul. Il se savait égoïste mais… Bah, il l'avait toujours été. Ses manières douces et gentilles camouflaient mieux que n'importe quoi son caractère parfois emporté, borné ou dédaigneux. Il n'était qu'un homme après tout. Pas le parangon de vertu que les autres semblaient croire qu'il était. Ce n'était pas parce qu'il se cachait derrière son masque de petit agneau prudent qu'il n'était pas en réalité un bélier adulte aux larges cornes aigues, tout comme son maître.

A une différence prêt.

Un sourire dégoûté lui monta aux lèvres.

"- Mu…"

"- Désolé, Saga. Je réfléchissais."

"- En transformant l'armure de pégase en poussière ?"

Mu agita vaguement la main vers l'armure qui retourna docilement dans son caisson.

"- ce n'est qu'une armure de bronze."

Les yeux brillant d'amusement, Saga déposa un rapide baiser sur les lèvres du jeune homme.

"- Alors, qu'est ce qui te chiffons, Ô mon doux bélier à la toison si douce…"

Mu jeta au gémeau un regard par en dessous.

Il se moquait de lui et c'était des avances ? Pas qu'il s'en plaigne hein. Mais Saga prenait un peu trop le pli de le calmer entre les draps quand quelque chose le mettait en rogne.

Le jeune bélier appuya encore son front contre l'épaule solide de son amant.

"- C'est Shion qui m'agace.

"- Qu'est ce que notre vénéré Grand Pope a bien pu faire pour te mettre en colère comme ça ?"

Mu grogna.

"- Rien justement."

"- Mu ?"

"- Il refuse de faire de moi un homme."

"- PARDON ????" hurla Saga en tenant Mu à bout de bras. "MAIS J'ESPERE BIEN !!!"

Mu allait pour répondre vertement avant de comprendre. Il éclata d'un doux rire cristallin.

"- Paix mon chevalier, paix…" Rit encore Mu en caressant la joue de Saga. "Je parlais juste des cérémonies de ma race qui marquent la vie d'un homme. C'est tout. Normalement, il y en a plusieurs. Je n'ai subit que les deux premières." Expliqua encore Mu.

Saga grommela un peu mais se calma. La pointe de ses cheveux étaient gris, ce qui amusa plus encore le bélier."

"- Et c'est quoi ces cérémonies ?"

"- La première à lieu à trois ans avec la circoncision. On donne également à boire à l'enfant un verre d'alcool des montagnes. Ensuite à sept ans, il s'agit de réciter des prières particulières tout en étant purifié dans l'eau d'une cascade particulière. A douze, c'est l'épreuve du feu, ou l'on doit endurer la brûlure de milles bougies…En fait, il s'agit juste de passer une nuit à lire des textes très barbant à la lueur de cierges. A quatorze, c'est l'épreuve de l'air, mais je ne sais pas en quoi elle consiste. Et enfin à dix huit, c'est le passage à l'age adulte. Je ne sais pas non plus ce qui s'y passe… La suivante est juste avant le mariage, puis une autre après la naissance du premier enfant. Il y en a encore une autre à l'entrée dans la vieillesse et enfin la dernière pour se préparer à la mort. Je sais que Shion les a toutes subies…."

"- Attends… Tu veux dire que Shion à eut un gamin ? Et qu'il a été marié ?"

Mu se figea soudain.

Il n'y avait pas réfléchit.

"- Heu…Et bien, oui, probablement…Enfin, toujours est-il que je n'ai passé que les deux premières. Shion m'a expliqué la troisième mais le temps que j'arrive à douze ans…il était… Mort…"

Saga reprit fougueusement mon amant dans ses bras.

Il le cajola longuement contre lui.

"- Je suis désolé…"

Mu lui caressa la joue avec tendresse.

"- c'est du passé mon amour… Enfin… J'ai demandé à Shion de passer les autres. Il a accepté de me faire passer le feu et l'air mais ne veut pas que je passe à l'age adulte…" S'agaça à nouveau le petit agneau, son beau front lisse barré d'une ride verticale.

Saga lui effleura les lèvres du pouce.

"- Il faut le comprendre, Mu. Il ne t'a pas vu grandir. C'est dur pour lui de savoir que son bébé est devenu un homme. J'ai cru qu'il allait faire une attaque quand tu m'as embrassé devant tout le monde la première fois."

Mu renifla avec amusement, les joues roses. Il devait reconnaître qu'il avait adoré la réaction de son maître. Sur le moment, il était presque sur que Shion aurait bien aimé éventrer Saga avec une fourchette à huître rouillée.

Saga l'embrassa encore.

"- Laisse lui un peu de temps mon cœur. Passe ces deux machins d'abord. Quand ce sera fait, je suis sur qu'il te permettra de passer le dernier… Sinon, tu peux bien demander à quelqu'un d'autre non ?"

Mu secoua la tête.

"- Non, il faut que ce soit un adulte de mon propre peuple qui mène la cérémonie. Le principe de la cérémonie est d'emmener physiquement l'enfant de l'enfance à l'age adulte. Je ne sais pas exactement ce qui se passe ni comment, mais il DOIT le faire… Nous sommes les derniers, Saga… il ne reste que lui, moi et Kiki… Avec nous mourra notre peuple." Soupira tristement Mu.

Si Kiki ne se mariait pas et n'avait pas d'enfant, il n'y aurait plus jamais d'Atlante.

"- Kiki et Shion peuvent bien encore produire des rejetons, Mu et tu m'as dit toi-même que ton maître avait eut au moins un enfant. Il doit bien avoir des petits-enfants et des arrière-petits-enfants quelque part. A moins que tu ne sois toi-même de son sang."

Mu rougit, pâlit, puis rougit encore.

"- Ca va pas non !!" S'offusqua le jeune bélier. "Je ne lui ressemble en rien !" Protesta encore Mu, scandalisé.

Saga fronça les sourcils.

Pourquoi Mu réagissait-il comme ça ?

Lui, il aurait adoré avoir un lien de parenté avec un ancien… un père, un grand père, un cousin… Peu importait mais…. juste quelqu'un…

"- Pourquoi dis-tu ça, Mu ? Je sais que tu adores Shion."

L'agneau fit un peu la moue.

Oui, il adorait Shion. Mais Shion n'était pour l'instant pas dans ses bonnes grâces.

"- Pour l'instant, je n'aime personne à par toi, Saga. Je verrais plus tard s'il change d'avis."

Saga embrassa encore son complexe petit agneau.

"- Tu es infernal…"

***

Un verre de cognac dégotter par Camus à la main, Shion soupira.

Il vida son verre d'un trait avant de reprendre la bouteille.

"- Vous ne devriez pas boire autant." Le gronda un peu le français en levant à peine les yeux des listes qu'il collationnait.

Le pope haussa les épaules.
C'était son foie qu'il détruisait, pas le sien.

"- Tu n'as qu'à pas me fournir d'aussi bon alcool."

Camus renifla.

"- La prochaine fois, je vous apporterais de la villageoise."

"- Qu'est ce que c'est ?"

"- Du vin…"

"- Et ?"

"- Vous verrez."

Le pope haussa un sourcil.

Pourquoi cela lui semblait presque menaçant ?

Camus reposa ses listes avant d'ôter ses lunettes et de les poser dans leur boite.

A force de lire, le jeune homme souffrait d'une forte presbytie qui avait finie par lui demander le port de lunettes.

Normalement, un chevalier d'or ne devait pas avoir ce genre "d'imperfection", mais…Bah… Ca donnait une respectabilité au verseau telle que le pope n'hésitait pas à l'envoyer à sa place le cas échéant lorsque la gentillesse maladive d'Aioros n'était pas suffisante pour faire avancer les débats. Camus ne se laissait pas attendrir, lui.

Le verseau était de glace que rien, à part un arachnide à la queue empoisonnée ne pouvait faire fondre.

"- Vous avez l'air pensif, grand pope…" Commença Camus.

Shion ôta son casque qu'il posa sur la table près de lui. Cette chose était lourde, inconfortable et très laide, mais elle faisait partie de la panoplie de sa charge.

"- J'ai eut… Une discussion que je n'attendais pas avec Mu."

"- …"

"- Il m'a demandé de présider à la cérémonie de son passage à l'age adulte.

"- …"

"- J'ai refusé."

"- …"

"- …"

"- Pourquoi ?"

"- … Je…" Le Pope détourna les yeux.

Il savait pourquoi il avait refusé.

Il le savait mieux que n'importe qui après tout.

Il avait refusé parce qu'il se souvenait de la sienne.

"- Je ne crois pas… Que ce soit nécessaire pour un chevalier d'Athéna."

Camus le fixa longuement.

Le verseau savait que le pope mentait, comme il savait que le pope savait qu'il savait qu'il mentait.

"- Soit."

Camus remballa ses affaires.

"- Je reviendrais demain ?"

"- S'il te plait… Nous devrions en avoir finit de tout cela pour l'année."

Camus se permit un rare sourire.

"- Je crois que j'aime encore moins préparer un budget que faire le ménage chez Milo."

Shion ne put retenir un petit rire.

"- Que diable fais-tu donc le ménage chez Milo !"

Camus rosit mais ne dit rien.

Que pouvait-il dire de toute façon ? Amour ? Passion ? Instinct de survie plutôt…

Shion regarda le verseau quitte le bureau. Il se servit un nouveau vers de cognac qu'il prit cette fois le temps de déguster.

Avec un soupir, il se laissa aller en arrière.

La demande de Mu lui ramenait nombre de mauvais souvenirs à l'esprit.

Son mariage qui n'avait été qu'une vaste plaisanterie imposée par son maître.

La naissance du fils de sa femme et de son amant… Ho, il avait adoré le petit garçon énergique. Il avait presque réussit à le considérer comme le sien bien qu'il ne l'ai vu qu'une dizaine de fois.

Et Harukei…

Surtout Harukei…

C'était lui qui l'avait vendu quand il n'avait que cinq ans à une noble famille de sa race pour qu'il engendre un rejeton qu'il n'avait jamais pu produire.

C'était lui qui l'avait détruit pour toute relation avec quiconque.

C'était son maître qui avait battit un a un les murs qui l'empêchait de supporter le moindre contact avec ses semblables…

Et alors que Shion s'étonnait lui-même d'avoir enfin envie d'une relation avec quelqu'un, l'objet de son affection le repoussait définitivement sans même le savoir.

Et à présent… A présent il revenait vers lui pour lui demander quelque chose qu'il ne pouvait lui donner sans qu'il ne comprenne l'amour qu'il avait pour lui.

Shion ferma les yeux.

Il n'avait que trois ans lorsqu'il avait été confié à Harukei.

Petit garçon timide mais heureux de vivre, il avait été présenté au chevalier d'argent par la nourrice qui s'était occupée de lui depuis la mort de ses parents.

Le bout de chou qu'il était était trop jeune pour comprendre qu'il avait été livré au chevalier d'argent pour devenir un chevalier d'or.

Il était trop jeune pour se rendre compte du dégoût que sa petite taille pour son age, ses jambes maigres et la douceur de son caractère avait provoqué chez Harukei.

Il était destiné à devenir le Bélier et le chevalier d'argent ne le lui jamais laissé l'oublier.

Il n'était qu'un mouton bêlant sans cervelle, sans finesse et sans importance.

Harukei le lui avait bien martelé…

Pendant quelques temps, le petit garçon était resté seul avec son maître.

Pendant deux ans, l'enfant n'avait pas remarqué la dureté dont le chevalier d'argent faisait preuve avec lui.

Très vite, il était devenu normal pour le petit Shion d'aller chercher du bois en pleine nuit d'hiver pendant une tempête, du haut de ses quatre ans, avant de se faire jeter contre les murs parce qu'il avait laissé des taches d'eau sur le sol en rentrant le bois désormais inutile sur une décision fantasque de plus de son maître…

Il fallait qu'il s'endurcisse, il fallait qu'il devienne un homme…

Pendant longtemps, il n'avait pas fait attention au sourire méprisant d'Harukei lorsqu'il obéissait sans protester aux pires ordres.

Quand il avait été plus vieux, il avait finit par comprendre que le chevalier d'argent attendait qu'il refuse, qu'il s'énerve, qu'il se mette en colère… Qu'il montre un peu de caractère…

Mais justement, ce n'était pas dans le caractère du petit garçon.

Shion ne cherchait pas le conflit, il ne comprenait pas l'acharnement de son maître contre lui;

Lorsque Yuzuhira était arrivé, le petit garçon avait espéré que son calvaire serait terminé mais ça n'avait été que pire.

Harukei félicitait toujours la petite fille, toujours il l'encourageait.

Lui n'avait jamais réussit à arracher un simple signe de tête satisfait à son maître.

Avant d'avoir huit ans, il en avait prit son partit.

A dix, il avait atteint son niveau de chevalier d'or et aurait du passer son épreuve pour obtenir son armure mais Harukei avait refusé.

Il s'était moqué, l'avait blessé mentalement et physiquement.

Jamais il l'armure n'accepterait une fiotte comme lui, jamais il n'y aurait droit. Il fallait être fort, il fallait être solide.

Pas une fois Shion n'avait pleuré devant lui.

Ca n'en faisait que rire davantage le chevalier d'argent.

A sept ans, le petit garçon avait passé seul son initiation des flammes.

A douze et quatorze ans, il s'était enfuit de Jamir pour gagner le Sanctuaire par ses propres moyens et supplier Sage, qu'il savait être le jumeau de son maître, de bien vouloir l'initier aux épreuves de son age.

Le pope avait accepté.

Pourquoi ce n'était pas le pope qui était son maître ?

Shion s'était longtemps posé la question après avoir rencontré le pope pour la première fois.

Sage était tout ce que Harukei n'était pas : Doux, gentil, à l'écoute, bon professeur…

Shion avait rencontré Manigoldo également.

Le Cancer avait déjà son armure à l'époque.

Du haut de ses vingt ans, le jeune homme avait un humour qui lui rappelait celui d'Harukei à une différence près : Manigoldo n'était jamais méchant.

Son humour était potache et parfois un peu dangereux, mais jamais il ne cherchait à faire mal pour faire mal.

A chaque fois, le lendemain de ses épreuves d'enfant, Harukei était venu le chercher.

Pour ses quatorze ans, Sage lui avait promit qu'il pourrait revenir pour ses dix huit ans, qu'il s'occuperait de son passage à l'age adulte comme il s'était occupé de celui de son élève.

C'était un honneur qu'il avait fait à Manigoldo. Après tout, le cancer n'était pas de la race de son maître mais… C'était un lien affectueux supplémentaire être eux, un lien de tendresse bourrue entre un professeur tranquille et son élève survolté.

Quelque chose que Shion n'avait jamais eut avec son propre maître….

Une fois de retour à Jamir, même à présent, Shion n'avait aucun souvenir des deux ou trois jours qui avaient suivit son arrivée.

Tout au plus se souvenait-il qu'Harukei l'avait battu comme plâtre à chaque fois… Mais la douleur physique n'avait jamais égalée la douleur morale.
Qu'avait-il fait pour que son maître le haïsse à ce point ?

C'était juste après son retour pour ses quatorze ans que son maître lui avait présenté sa femme.

Le mariage avait eut lieu dans la foulée.

Jamais Shion n'avait été capable de le consommer.

Il n'avait jamais ressentit le moindre intérêt pour les filles, il était trop jeune et pire, a force, le moindre contact physique pour lui se traduisait par la douleur.

Il avait repoussé la jeune fille.

Lorsqu'elle était tombée enceinte, Harukei s'était moqué encore et encore de lui;

Il avait seize ans.

Shion s'était contenté de hausser les épaules.
Son désintérêt pour son honneur bafoué avait mit en rage son maître.
N'avait-il aucun orgueil d'homme ? Ne comprenait-il pas qu'il était la risée de tous ?

Le jeune apprenti s'était contenté de hausser à nouveau les épaules avant de se tourner vers la jeune fille. Comme son maître, elle le fixait avec mépris.

Shion s'était demandé si son maître n'était pas le père de l'enfant mais n'avait pas creusé la question.

Il avait juste rappelé à la jeune femme qu'il mourrait de toute façon dans la guerre qui s'approchait, que ses biens se limitaient aux vêtements qu'il portait mais qu'il élèverait quand même avec plaisir cet enfant comme le sien.

Harukei avait faillit le tuer après ça.

Prévenu sans savoir comment, Sage avait exigé la présence de Shion au Sanctuaire pour venir prendre son armure. Enfin… C'était ce que Shion s'était toujours dit, que Sage avait sut, qu'il l'avait sauvé des griffes de son maître… le grand pope avait toujours été gentil les quelques fois où il l'avait vu.

Il savait parfaitement qu'il se mentait à lui-même, le grand pope avait autre chose à faire que s'occuper de l'un des élèves de son frère, mais ça lui avait permit de tenir.

Lorsqu'il était arrivé au Sanctuaire, il était plus farouche qu'une mangouste.

Il ne supportait pas qu'on le touche, sursautait quand on l'approchait et n'attendait pas autre chose de ses pairs que des moqueries et des coups. Mais il devait reconnaître quelque chose à Harukei.

Le chevalier d'argent lui avait bien apprit.

Personne ne s'était rendu compte de rien.

Pour tous, il était simplement le chevalier du bélier au caractère égal, sans jamais un mot ou une action inattendue, mortellement ennuyeux tellement il était normal…

Il avait rencontré Dohko alors…

Et il avait commencé à lentement guérir.

Le chevalier de la Balance, quand il était gamin, ressemblait un peu à Milo dans son caractère : tout fou comme un chiot, éperdument amoureux de la vue, enthousiaste à épuiser n'importe qui, aveugle aux timidités des autres et incapable de comprendre qu'on puisse lui dire nom.

Shion s'était retrouvé irrépressiblement attiré par le caractère si chaleureux de la balance.

Ils étaient devenus amis.

Le premier que Shion avait eut.

Puis…il avait eut dix huit ans.

Il avait rappelé à Sage sa promesse.

Le grand pope avait tout préparé pour le rituel de passage.

Les encens, les drogues, les encres et les pinceaux.

Mais ce n'était pas lui qui s'était présenté finalement…

Shion se força à détourner ses pensées de ses souvenirs.

Son passage à l'age d'homme était probablement le souvenir le plus terrifiant qu'il ait eut.

Enfouit au fin fond de son esprit, il prenait bien garde à ne jamais le réactiver.

Il se força à détendre ses muscles tendus à se rompre.

Même plus de deux siècles après, la douleur physique était presque aussi vive.

Jamais il n'avait eut aussi mal.

Jamais il n'avait autant souffert que cette nuit là.

Il avait cru mourir.

Et Harukei s'était contenté de rire.

***

Rhadamanthe, Eaque et Minos buvaient leur verre de Whiskys à la terrasse du petit café de la grande surface.

A la "mort" d'Hadès, comme les chevalier d'Athéna, ils avaient été libérés de leur maître.

Ils se rappelaient tous êtres des spectres mais cette partie là de leur existence s'était rendormie.

Leur cosmos était toujours là, mais ils n'avaient plus de surplis à revêtir.

Tous les spectres s'étaient finalement séparés pour tenter de retrouver une vie à eux, à part ses trois là…

Pour l'instant.

Eaque allait partir avec Violate pour l'Australie dans l'espoir que l'île-continent lui permettrait d'oublier et de repartir de plus belle avec la belle jeune femme, plus que partante pour passer le reste de sa vie avec son maître et maintenant compagnon.

Minos allait partir pour sa Norvège natale avec Rune dans l'espoir de retrouver ses parents et que son couple pourrait prendre un nouveau départ.

Rhadamanthe, lui ne savait que faire.

A présent qu'Hadès les avait abandonné et que ses frères allaient partir, il allait se retrouver totalement seul.

Lui n'avait pas de compagne ou de compagnon. Il n'avait pas de famille ni de souvenir agréable de son enfance.

Il n'avait….rien…

Lorsque le Wyvern s'était éveillé en lui quand il avait six ans, il n'était qu'un gamin des rues qui luttait comme il pouvait dans les bas fond de Londres pour survivre, éviter les flics et les services sociaux et ne pas tomber entre les pattes de pervers et de pédophiles.

A présent, à l'âge d'homme, il n'avait rien de plus.

Son cosmos ne lui servait plus à rien, il ne savait rien faire d'autre que se battre pour un dieu qui avait finit par les rejeter…

S'il n'avait déjà su que son âme, comme celle des autres spectres, n'aurait d'autre destination que le Cocyte, il aurait déjà probablement mit un terme à sa vie.
Qu'avait-il à perdre ? Il n'avait déjà rien…

"- Et toi ? Que vas-tu faire ?" l'interrogea Minos qui surveillait de loin Rune qui faisait quelques courses avec Violate.

Le jeune spectre semblait déterminé à faire abandonner à la jeune femme ses pantalons déchirés pour une robe qui la mettrait en valeur et adoucirait ses cicatrices.

Eaque surveillait les deux jeunes spectres du coin de l'œil. Il avait hâte de voir sa compagne habillée comme une dame. Il était persuadé qu'elle serait époustouflante. Simplement, il n'avait pas l'optimisme de Rune pour ne pas se faire éventrer avec une pince à cheveux quand Violate en aurait assez de jouer les poupées.

Rhadamanthe finit son verre.
Que faire de sa vie en effet ?

Il ne savait rien faire, était seul….

A quoi pouvaient servir ses talents à présent ? Personne n'avait besoin de son cosmos…a moins que…

"- Je crois…" commença-t-il lentement pendant que son idée prenait forme. "Que je vais aller me présenter au Sanctuaire d'Athéna…." Ses propres mots l'étonnèrent." Ils ont peut-être une place pour un professeur de plus parmi eux…" Finit le Spectre, renversé par la justesse de ses propres paroles.

Eaque et Minos le fixèrent avec stupeur.

Le Sanctuaire d'Athéna ? Qu'est ce que leur frère allait faire là-bas ???

Il avait sûrement mieux à faire, autre chose, enfin….

"- Tu es… sûr ?"

"- … je n'en sais rien mais…. Je ne sais rien faire d'autre que me battre. Je suis seul, je ne sais pas quoi faire de ma vie ni de ma peau…" Il haussa les épaules. "S'ils ne veulent pas de moi là-bas, je n'aurais plus qu'à me mettre au repos."

Les deux autres juges s'entre regardèrent. De pas leur origine, ils avaient tous un rapport à la mort très…personnel, aussi ne se choquèrent ils par trop. Le suicide était une fin comme les autres quand il n'y avait rien d'autre. Et puis… ils se retrouveraient tous une fois de plus quand Hadès reviendrait après tout.

"- Si tu es sûr de toi…"

L'anglais hocha la tête, satisfait de son idée finalement.

***

Assit sur le trône du grand Hall de son temple, Shion avait réunit ses chevaliers d'or.

Comme une fois par semaine, il leur donnait leur planning de garde et de ronde.
C'était sans trop d'importance à présent, mais il était bon de garder un minimum d'ordre;

Il finit de distribuer les missions avant de se tourner vers mu qu'il avait gardé pour la fin;

"- Mu, tu es retiré du service actif pour la semaine."

Immédiatement, les autres chevaliers d'or se mirent à se moquer gentiment.

"- Houu, le chouchou il a des vacances !!"

"- Je suis sur qu'il a gagné ca au dessert !"

"- C'est moi son dessert !" Protesta Saga.

Imperturbable, Shion laissa ses chevaliers faire quelques instants.

"- Tu vas être occupé, Mu. Il te faudra te préparer pour tes passages." Expliqua le pope.

Les yeux du jeune bélier brillèrent.

"- Tous ?"

Shion hésita;

"- Commençons par le commencement."

Mu se renfrogna aussitôt mais Saga le calma.

"- C'est un début mon cœur…. Laisse lui le temps de te voir comme un grand garçon." Insista le gémeau.

Non loin, Kanon regardait le couple avec un mélange de jalousie et de plaisir. Il était heureux de voir son frère avec quelqu'un… Même s'il aurait bien aimé avoir quelqu'un lui aussi…

Il soupira.

Il finirait bien par trouver…

Shion finit par chasser les chevaliers de ses robes mais demanda à Mu de rester.

C'était toujours un crève-cœur pour lui que de voir son élève au bras de Saga.

Toujours un peu boudeur, Mu le suivit dans son bureau.

"- Pourquoi tu ne veux pas que je devienne adulte !" Aboya immédiatement le jeune bélier.

Très calme d'extérieur, Shion se servit un verre de cognac.

Depuis quelques temps, il buvait trop et le savait.

"- Ce n'est…." Il soupira. "Comment expliquer…. La cérémonie de passage à l'age adulte est…. Comment dire… elle affaiblit très largement les frontières entre l'esprit de l'enfant et de l'adulte qui le guide." Commença-t-il. "Toi et moi….pourrions partager plus que tu ne le voudrais."

Mu haussa les épaules.

"- Peuh, ce n'est pas comme si nous avions quelque chose à nous cacher. Tu sais déjà tout de moi !" S'agaça le jeune bélier.

"- Mais tu connais si peu de moi… Je ne voudrais pas… Que mon propre passage influence négativement le mien."

"- comment ça ?"

"- Le mien c'est….assez mal passé… La… personne qui a prit part à ma cérémonie…. Ne m'appréciait pas vraiment…"

Mu haussa encore les épaules.

"- C'était il y a longtemps et j'y tient vraiment !" Insista-t-il. "Ca ne me fera aucun mal ! Je te le promet."

Shion fixa son fils de cœur avec tristesse.

Son fils oui… le fils de son cœur… Qu'il avait apprit à aimer… Qui lui avait apprit à aimer lorsqu'il pensait qu'il ne pourrait jamais plus ressentir quoique ce soi de positif. Ce chevalier qu'il avait abandonné enfant et qu'il avait retrouvé adulte…

Ho comme il l'avait trouvé beau avec son armure. Comme il était bien dans son rôle… Fort, digne, puissant, agressif même… Tout ce que lui n'avait pas été pendant sa propre guerre… Lui l'avait subit, s'était laissé ballotté par le courant des événements sans réellement y prendre part, l'esprit et le cœur encore trop en miette pour être réellement utile pendant la guerre.

Comme il l'aimait son agneau… Comme il l'aimait…

Il n'avait pu retenir son cœur convalescent de choisir cet enfant qu'il avait vu nourrisson.

Après tout, ce n'était pas grave.

Il n'avait que douze heures à "vivre" dans ce corps prêté par Hadès.

Juste douze heures pendant lesquelles, pour la première fois de sa vie, il avait sentit la chaleur envahir son veux cœur fatigué.

Il n'avait pas cherché à y résister. Ce n'était que pour douze heures, juste douze petites heures… lorsque la mort l'avait prit à nouveau, il était partit le cœur léger, simplement heureux d'avoir aimé une fois dans sa vie, même pour quelques minutes, même si Mu ne lui aurait jamais retourné ses sentiments.

Puis… Ils étaient revenus… Tous...

Ils s'étaient tous réveillés dans le grand hall, tous ensemble.

Shion s'était lentement redressé, hébété comme les autres.

Lui n'avait rien qu'une simple tunique, d'a peine meilleure qualité que celle que portaient les apprentis.

Il n'était pas le seul habillé comme ça. Kanon aussi.

Mais Saga s'était jeté au cou de Kanon, l'avait serré contre lui en pleurant, heureux de retrouver son jumeau alors ça n'avait pas d'importance si le cadet des gémeaux ne portait pas ce lui les liaient tous.

Puis il avait vu son élève, si digne et si fort avec son amure

Pendant un instant, pendant une courte minute, Shion s'était prit à rêver que peut-être…. Il avait fait un pas vers Mu.

Peut-être pour le prendre dans ses bras, peut-être pour le serrer contre lui…

Il ne savait pas ce qu'il en aurait ressentit d'avoir un contact physique avec quelqu'un, mais il aurait pu espérer qu'il aurait aimé ça.

Mais l'ébauche de rêve s'était avortée seul, immédiatement foulé au pied par les sabots d'un petit bélier ignorant des aspirations d'un plus grand.

Sans réfléchir, Mu s'était jeté au cou de Saga.

Il l'avait serré contre lui, le regard plein de passion et de possessivité.

Shion s'était figé.

C'était normal.
C'était attendu.

C'était…. Bien…

Qu'aurait-il eut à offrir à son petit agneau avec son cœur flétrit, son corps hors d'atteinte et sa vie trop longue ?

Il s'était lentement détourné, écrasant sans pitié la douleur qui lui oppressait la poitrine.

Il avait renfilé comme un vieux pull sa personna de Grand Pope.

Sans s'occuper plus avant de lui-même, il avait apporté son secours à ses chevaliers.

C'était mieux…C'était ce qu'on attendait de lui.

Mais une fois de plus, comme a chaque fois qu'il faisait quelque chose, il avait échoué.

Harukei avait eut raison à son propos.

Il ne parviendrait jamais à rien…

Pas plus à faire taire son cœur qu'à être un bon chevalier d'or ou un bon pope.

Il n'avait par protégé correctement Sasha, la déesse de son époque. Il n'avait pas vu le dédoublement de personnalité de Saga. Il était juste incompétent… En tout…

Et maintenant, voila que Mu, son élève, l'homme qu'il aimait, lui demander de faire la seule chose pour laquelle il pouvait encore lui être utile.
Et une fois de plus, il refusait…

Ho il ne doutait pas que Mu s'en sortirait très bien.

Il ne doutait pas que Mu n'en aurait aucune séquelle, en tout cas, pas de son fait. Il aimait trop Mu pour que l'expérience lui soit douloureuse…
Seulement… Comment réagirait Mu lorsque leurs esprits se toucheraient ? Comment réagirait son élève lorsque leurs cœurs se mêleraient ? Comment réagirait il lorsqu'il comprendrait l'amour timide et triste que Shion éprouvait pour lui?

Shion ferma les yeux.

"- Mu…. Passe d'abord les trois autres…. Ensuite…. Ensuite, nous verrons…." Soupira le pope.

Mu fit la moue mais finit par accepter.
C'était déjà un pas en avant que Shion accepte d'en rediscuter plus tard.

"- Bon, bon…D'accord… mais qu'est ce que je dois faire alors ?"

Shion eut un pâle sourire.

"- Je vais te donner des livres à lire. Ensuite, tu commenceras ton jeûne. Aussi bien alimentaire que sexuel. Tu dois être pur aussi pur que possible."

Mu rosit doucement.

Il n'avait rien d'un ascète, surtout depuis que Saga était entré dans sa vie.

"- Tu devras te contenter de thé, de lait et de miel pendant cinq jours. Ensuite, tu passera la nuit seul à lire les textes sacrés. Enfin, toi et moi lirons les droits et devoirs que tu devras respecter. Et pour terminer, tu seras tatoué de la marque de ton clan."

"- Tatoué ?"

Shion repoussa le col de sa robe avant de remonter ses cheveux pour lui montrer le minuscule tatouage en forme de fleur à la base de sa nuque.

"- C'est le symbole de ma famille… Comme tu es orphelin et que personne n'a jamais su qui étaient tes parents…. Le symbole que tu auras n'a pas vraiment d'importance. Tu pourras choisir ce que tu veux. Mais… je serais heureux que tu choisisses le mien."

Shion se tut.

Intérieurement, il espérait que Mu choisirait le même que le sien, qu'au moins ce lien existerait entre eux.

Mu sourit à son maître.

"- c'est vrai qu'il est joli ! Juste par curiosité, je peux voir les autres ?"

Shion fouilla dans ses affaires jusqu'à en tirer un vieux parchemin.

"- Voila."

Le jeune bélier jeta un coup d'œil distrait aux différentes armes familiales. Elles étaient toutes sympathique mais sans plus et…

"- HO !!! Shion ! C'est quoi celui là !"

Le pope se pencha près de son élève.

Une seconde, il se gorgea de l'odeur douce de jasmin mêlée de chèvrefeuille qu'il émettait avant de répondre.

"- Celui là ? C'est le clan de la double lune."

"- Il ressemble un peu au symbole des gémeaux tu ne trouves pas ?"

Le pope eut l'impression que son cœur tombait dans ses talons.

"- Oui…"

"- Alors je voudrais celui là s'il te plait !!"

Le sourire du petit agneau était si heureux, si lumineux… Comment diable Shion aurait il pu refuser quelques chose à son petit élève ?

"- Bien sur…"

Mu passa ses bras autour de son cou pendant un instant.

"- Merci."

"- De rien." Murmura encore Shion.

Combien de temps pourrait son cœur saigner avant qu'il ne reste exsangue à la borne, vide et sans vie ?

***

Un sac de sport sur l'épaule contenant ses maigres possessions (une vieille peluche râpée, quelques vêtements, un livre et une bouteille de bourbon), Rhadamanthe jouait les touristes pour la première fois de sa vie.

Il découvrait la Grèce, non plus en agresseur, mais en touriste et peut-être à terme, en demandeur d'emploi.

Avec la disparition d'Hadès, il avait eut un peu de peine à trouver sa place.

Peut-être qu'ici….

Un flic s'approcha de lui, suspicieux.

Le Juge restait sans bouger depuis plusieurs minutes au milieu de la foule.

C'était étrange.

Un peu agacé, l'anglais se fondit parmi la masse compacte des familles et des groupes scolaires pour semer le représentant des forces de l'ordre.

Le pays était beau maintenant qu'il prenait le temps de s'y promener.

Un simple jeans noir sur les reins, des Doc Martens noires 12 trous aux pieds et un simple t-shirt sur le dos avec "hell angel's" dessus avec une mini mort à capuchon installée à califourchon dessus, le Juge était bien loin de l'image effrayante qu'il avait pu donner jusque là.

Pour l'instant, il était simplement….humain…

Humain et affamé, il avait d'ailleurs mal aux pieds parce qu'il n'avait pas un rond pour prendre un taxi jusqu'au plus proche du Sanctuaire. Son estomac vide criait famine et un coup de soleil lui rougissait le bout du nez.

"- Pays de merde !"

Avec sa peau de roux, sans doute hérité d'un de ses parents, il allait cramer s'il ne trouvait pas à s'abriter très vite.

Avec force grommellement, il finit soudain par tourner les talons à la masse des touristes pour suivre les cosmos puissant qui l'appelaient vers le Sanctuaire.

***

Perdu dans ses souvenirs, Shion ne parvenait pas à se concentrer sur la préparation du passage de Mu.

Normalement, la cérémonie des douze ans était une formalité.

Celle à quatorze était plus difficile mais guère, surtout pour un chevalier d'or.

Il n'y avait rien de physique pourtant. C'était juste un passage pour l'esprit.

Mais c'était surtout celle des dix huit ans qui perturbait le pope.

Sa cérémonie avait été un tel cauchemar….

Sage l'avait aidé à se préparer d'abord.

Une semaine de jeûne et de médiation, rien de bien méchant.

Puis une purification du corps dans un torrent glacé avant de laisser le soleil levant le sécher.

Enfin, nu, rejoindre la petite tente qui avait été tendue non loin pour s'installer en tailleur et méditer encore.

Une à une, des bougies étaient allumées, puis des encens précieux et surtout chargés…

Il y était resté plusieurs heures, peut-être même des jours….

La notion du temps était différence pendant cette méditation.

Les encens et les drogues faisaient leur office.

L'esprit s'ouvrait, toutes les barrières que le jeune homme avait mit des années à dresser dans son propre esprit s'étaient écroulées les unes après les autres.

Il s'était sentit flotter, plus conscient de lui-même et pourtant tellement lointain…

Puis son esprit s'était comme dilaté.

Il avait sentit les présences des autres chevaliers du Sanctuaires.

Les gardes qui n'étaient que de petites taches sombres à la frontière de sa conscience, les bronzes, un peu plus brillants, les argents ensuite, comme de petites lucioles qui zozonnaient à la limite de son esprit, puis les chevalier d'or, solides, dur, comme des piliers qui soutenaient le temple d'Athéna…

Pour la première fois de sa vie, le jeune chevalier d'or du bélier s'était sentit bien… Apaisé avec lui-même et avec les autres…

Dans cet état de semi transe mêlé de sommeil et de drogue, il avait laissé des mains rudes l'allonger sur le ventre. Il avait un peu geint sous la brutalité soudain.

Sa peau était tellement sensible… La moindre goûte de sueur roulant sur sa peau lui semblait plus agressive qu'un torrent furieux.

Près de lui, l'officiant avant rassemblé les encres et les plumes.

Un sourire satisfait aux lèvres, il avait plongés la première plume dans l'encre rouge.

Lentement, il l'avait posée à la base de la nuque de Shion puis avait tracé le premier trait, le long de sa colonne vertébrale.

Il avait appuyé, appuyé encore.

Shion avait rouvert des yeux vides.

Incapable de crié, il avait subit l'encre mêlée de belladone et d'autres substance se couler dans ses veines pour imprimer dans son âme chaque lettre, chaque mot qui était écrit sur sa peau.

C'était l'histoire de son peuple, c'était l'histoire des siens qui lui était instillée sous la peau avec cette plume, cette plume métallique là ou un simple pinceau aurait du être utilisé.

Et c'était Harukei qui la tenait, un sourire satisfait au visage. Chaque soubresaut, chaque crampe de douleur de son élève le satisfaisait.

Shion n'avait aucun droit à l'armure qu'il portait. Shion n'avait aucun droit d'atteindre le statut d'adulte. Il n'en était pas digne, il n'y avait pas droit… Shion n'était rien d'autre qu'un incapable, à peine digne de dormir dans la soue des cochons.

Et Shion entendait tout.

Et Shion ressentait tout.

La douleur de sa peau éraflée devenait un torrent de lave sous la morsure des drogues.

Les pensées haineuses de son maître sur sa psyché fragile le marquaient au fer rouge.

Ce qui aurait du être l'éclosion d'un adulte équilibré, ce qui devrait être le soutient d'un adulte à un enfant pour l'ouvrir au monde en le soutenant de son affection et de sa propre stabilité se transformait en torture pure et simple.

Son maître le haïssait.

Son maître le méprisait.

Son maître voulait le voir mort….

Le cœur de Shion ratait quelques battements, il ralentissait dangereusement.

Pourtant, Shion ne lâchait rien.

Avec désespoir, cramponné à sa douleur, il avait résisté.

Là où un autre serait mort, accompagné par les tortures de son maître depuis si longtemps, ce n'en était qu'une de plus parmi tant d'autres.

Le corps assommé par les drogues mais l'esprit emplit de souffrance, le jeune chevalier d'or ne pouvait que subir.

Pourtant, au-delà de la souffrance physique, au-delà de la haine de son maître pour lui, c'était surtout le plaisir malsain, presque sexuel que Harukei ressentait à savourer l'agonie de son élève qui détruisait lentement le jeune chevalier d'or.

Petit à petit, il sentait son esprit se recroqueviller sur lui-même, se protéger comme il pouvait, loin… Loin de son maître, loin de son corps qui n'était plus que le réceptacle de la douleur induite par la plume de fer qui grattait la peau à la faire saigner.

Puis enfin, alors que le jeune homme n'était plus qu'une boule de souffrance, elle s'arrêta.

Une main sans douceur le repoussa ses matelas qui sentaient bout le jasmin jusqu'à ce qu'il tomber sur le sol pierreux.

Harukei lui jeta à la figure une simple tunique de lin comme en portaient les apprentis.

"- Quand tu auras finit de te laisser aller. Retourne à ton temple…"

Sans un mot de plus, il était partit.

Shion s'était recroquevillé sur le sol, l'âme en miette, l'esprit ensanglanté et la peau dégouttante de sang.

Il lui avait fallut longtemps pour que les drogues quittent assez son système pour qu'il puisse rejoindre sa maison.

Sur le pas de la porte, le pope Sage l'attendait, un sourire heureux au visage.

Il était rassuré de voir qu'enfin, son frère et son élève avaient réussit à se comprendre… Il avait été heureux quand Harukei l'avait supplié sur tous les tons de le laisser s'occuper de la cérémonie d'adulte de son élève. Shion était son élève chéri après tout….

Shion ne chercha même pas à le détromper.

Lorsque le pope voulu prendre sa main pour le féliciter encore, Shion échappa a son étreinte.

L'idée qu'une chair étrangère se pose sur la sienne l'horrifiait et le dégoûtait.

Harukei n'avait que trop souligné pendant ces quelques heures de douleur à quel point il n'était pas digne de l'affection des autres.

L'esprit fragilisé et l'âme tremblante, le jeune bélier alla s'enfermer dans sa maison après avoir remercié le pope.

Sur son siège, devant son bureau, le pope soupira.

Il n'avait pas oublié la leçon qu'Harukei lui avait apprit.

Sans le vouloir, sans s'en rendre compte, Mu ne faisait que la lui rappeler, encore et encore…