Catégorie : Tokio Hotel

Paring : Bill/Tom.

Genre : Friend-ship, romance, humour (ouais, y paraît XD)

Rating : M.

Résumé : « Deux frères que la vie à séparé mais que le hasard va réconcilier. Peut être même un peu trop. Bien trop différents l'un de l'autre, la cohabitation risque d'être dure. Chacun à ses problèmes, chacun à sa vie. L'un dans un quartier riche, l'autre dans un quartier pauvre.
Petit à petit, passant au-delà des différences, un rapprochement se fait. Tout se complique quand Tom commence à se poser beaucoup trop de questions. Pourquoi ressent-il se besoin d'être près de lui ? Pourquoi cette envie de le protéger ?
Et Bill dans tout ça ? Qu'en pense-t-il ? »


Deux frères, deux mondes

Chapitre 33 : Grandir

Les heures avaient défilé sans même qu'il ne s'en rende compte. Allongé sur le sol de son salon, Mikka pour seule compagnie, Tom ne pensait plus à rien, se contentant de fixer son plafond comme s'il s'agissait de la chose la plus intéressante au monde. Son esprit était vide de toute pensée, comme s'il avait décidé de fuir la réalité pour se plonger dans un monde entièrement blanc où rien ne pourrait plus jamais l'atteindre, où rien ne lui ferait plus jamais mal.

Il y avait pourtant cru, l'espace de quelques secondes. Il avait tenté sa chance, embrassé celui qui occupait son cœur depuis des mois et n'avait pas été repoussé. Bêtement il avait commencé à croire en un possible futur. Parsemé d'embuches et de disputes, certes, mais un futur quand même.

Il y avait cru comme jamais et aujourd'hui il n'avait plus rien. Plus personne pour le comprendre d'un seul regard, plus personne pour lui faire se sentir chez lui rien qu'en le prenant dans ses bras. Plus personne pour chasser ce froid dérangeant qui l'avait envahi l'année de ses dix ans sans qu'il ne comprenne pourquoi. Plus personne pour le faire se sentir enfin complet, entier. Plus personne pour lui donner le sentiment d'enfin exister.

La sonnerie de son portable brisa le silence qui l'entourait depuis des heures, le ramenant à cette réalité qu'il ne voulait plus que fuir sans se retourner. Il savait que ce n'était pas Bill, alors pourquoi prendre la peine de répondre ? Non, ça ne pouvait définitivement pas être lui. Il n'aurait plus ce privilège à présent. La lassitude le gagna lorsqu'il comprit que son correspondant n'avait apparemment pas l'intention de le laisser tranquille. Les yeux toujours désespérément fixés sur le plafond, il décrocha, porta son cellulaire à son oreille et attendit :

« - Tom ? »

Il ne répondit pas, comme s'il avait soudain perdu la capacité de parler, comme s'il n'était plus capable d'assembler des mots de façon à former une phrase cohérente. Mais son interlocuteur ne s'en formalisa pas, ou peut-être comprenait-il son envie de silence, puisqu'il continua :

« - Tom, je suis désolé mais on ne l'a pas trouvé. Jezz et les autres sont aussi à sa recherche, mais personne ne sait où il peut être. On a fait tous les coins qu'il fréquente habituellement mais ça n'a rien donné.

- Alors je m'étais dit que peut-être ... peut-être vous aviez un endroit à vous dont vous ne nous auriez pas parlé. »

Il ne voulait pas y réfléchir, préférant se contenter d'observer la situation de loin, comme s'il n'était pas l'un des personnages principaux de cette étrange histoire, comme s'il ne faisait que regarder un mauvais film à la télévision un soir de pluie. Et pourtant un paysage se dessinait doucement dans son esprit, remplaçant peu à peu cette étendue de blanc où régnaient le calme et la sérénité qu'il savait factices mais qu'il appréciait quand même. Il voyait d'anciennes maisons construites avec énormément de boiserie comme on n'en faisait plus depuis des décennies, des rues pavées inégalement mais authentiques, une église désœuvrée ou plus personne n'allait, une grande fontaine au centre d'une petite place. Et avant qu'il ne s'en rende compte, les mots avaient déjà franchis ses lèvres :

« - Son endroit secret ...
- De quoi tu parles ? »

Il se maudit d'avoir pensé tout haut. Il ne pouvait pas en dire davantage à Gustav. Lui parler de ce lieu dont personne ne connaissait l'existence s'apparenterait à une trahison. Encore. Il ne pouvait pas lui faire ça une seconde fois. Mais à l'autre bout du fil, le batteur ne semblait pas décidé à renoncer :

« - Dis-moi où c'est et j'irai voir.
- J'peux pas.
- Quoi ? Comment ça tu peux pas ? Bordel Trümper, j'essaie d'arranger les choses alors fais un effort, s'il te plaît !
- Si ... si je t'en parle je vais encore tout gâcher. Personne ne sait où c'est parce qu'il voulait un endroit rien qu'à lui. Un endroit qui lui parle, qui l'apaise lorsqu'il ne va pas bien. Si je te mets dans la confidence, je le brise encore une fois. »

Bien que le guitariste n'ait fait que murmurer, Gustav avait parfaitement entendu. Et surtout, il avait compris. Si même les personnes qu'ils considéraient comme sa famille n'étaient pas au courant, cela voulait forcément dire quelque chose. Il ferma les paupières, cherchant un moyen de trouver ce fameux endroit sans que Tom n'ait à dire quoique ce soit, même si une toute petite voix au fond de lui lui soufflait que c'était tout bonnement impossible. Et puis l'évidence le gagna, s'insinuant doucement mais sûrement en lui :

« - Alors vas-y.

- ...

- Tu es le seul à savoir où c'est.
- Il va refuser de me parler. Si ça se trouve, il refusera même de me regarder en face. Et il aurait de quoi. Je ne pourrais pas le blâmer si la simple vue de mon visage le fait vomir.
- Si jamais c'est le cas, je sais que ça va te faire mal mais ... Bordel Tom, Georg et moi on a assisté à toute votre histoire. On sait tout de toi, de lui, de tes sentiments. On sait que tu l'aimes à en crever. On sait que tu serais prêt à te jeter sous un train si ça pouvait le faire sourire. On sait ... on sait que tu ne supporteras pas un autre rejet de sa part, mais il faut que tu comprennes que c'est ta dernière chance. »

Les mots tournaient en boucle dans sa tête, encore et encore, ne semblant jamais vouloir s'arrêter. Il savait qu'il ne pouvait pas renoncer aussi facilement, qu'il n'avait pas le droit d'abandonner comme ça. Il prétendait l'aimer et pourtant il baissait les bras au premier obstacle. Est-ce que c'était vraiment ça l'amour ? Se battre pour se faire entendre ? Tout donner pour avoir en échange une toute petite chance de se faire pardonner ?

Son corps se mit à trembler. Peut-être d'anticipation ? L'envie d'obéir à son ami le démangeait, se propageant dans tout son être, et pourtant il était toujours allongé sur le sol comme s'il n'attendait plus rien, comme s'il espérait simplement rester là et voir sa vie continuer sans lui. Il ferma les paupières, tentant de calmer le rythme fou des battements de son cœur. L'espoir était décidément une chose bien difficile à tuer. La voix chevrotante il demanda :

« - Je fais quoi s'il s'enfuit ? »

Parce que finalement, c'était bien là qu'était le nœud du problème. Si Bill ne l'écoutait pas, s'il ne lui laissait pas une chance de s'expliquer, ... Il se retint de se traiter de tous les noms lorsqu'il comprit que seule la peur l'empêchait réellement d'agir. Gustav avait raison, il ne supporterait pas un autre rejet, mais ce fichu espoir qui ne voulait décidément pas mourir lui soufflait qu'il ne pourrait pas vivre toute une vie en se disant que les choses auraient pu être différentes si seulement il avait eu le courage d'aller le voir.

« - Tu lui cours après. Tu le suis partout où il ira, tu lui montres que tu refuses d'abandonner aussi vite, tu ... Tu lui prouves à quel point tu l'aimes. »

Il était vrai que tout cela n'avait été que des mots, au final. Des regards, des gestes tendres, des étreintes, de belles paroles, ... Mais pas d'acte ni de réelle preuve. Il osait prétendre l'aimer alors qu'il n'avait jamais rien fait pour le lui prouver, se contentant d'attendre en silence que vienne sa chance. Il entendait souvent dire que par amour on ferait n'importe quoi et lui se contentait de rester bêtement au beau milieu de son salon à se morfondre sur son sort, à renoncer avant même d'avoir tout tenté. Il n'était pas digne d'éprouver de tels sentiments. Et pourtant son cœur s'emballait à chaque sourire, son estomac semblait abriter une colonie de papillons à chaque fois que leurs lèvres se rencontraient. Ses journées lui paraissaient plus belles depuis que le brun était à ses côtés. Sans parler de ses rêves. Jusque là il n'avait écouté que sa peur, refusant de prendre le risque de gâcher leur amitié, mais perdant par la même occasion la possibilité de voir ses sentiments lui être retournés favorablement. Il n'avait pris aucun risque et s'il continuait à simplement attendre, il allait finir par laisser passer sa toute dernière chance.

« - T'as plus rien à perdre, mec. »

Ces paroles étaient on ne peut plus vraies. Il avait déjà tout gâché et il savait qu'une amitié n'était plus possible désormais. Pas après tout ce qu'il s'était passé entre eux, pas après tout ce qu'ils s'étaient dit. Que risquait-il dans cette histoire ? Rien. Rien à perdre, tout à gagner. Cette fois, il n'avait plus rien à mutiler ni à détruite. Son cœur l'était déjà, de même que son âme. Alors pourquoi était-il encore là ?

- B & T -

Il ne sentait même pas le vent froid sur sa peau, pas plus qu'il ne faisait attention au ciel étoilé qui doucement prenait place. Bousculant les passants qui se trouvaient sur son chemin, il courait à en perdre haleine, ignorant le point de côté qui le tenaillait depuis près de trois cents mètres. Le souffle court, il avait l'impression que son cœur allait cesser de battre à chacun de ses pas s'il n'arrêtait pas rapidement sa course folle. Pourtant ses jambes continuaient encore et toujours d'avancer, comme s'il ne les contrôlait plus, comme si son corps avait décidé pour lui de ce qu'il devait faire. La petite flamme de l'espoir qu'il avait autrefois enfermée derrière un mur de glace éternelle était désormais ravivée et semblait se propager dans tout son être.

D'aussi loin qu'il se souvienne, il n'avait jamais vraiment été quelqu'un d'égoïste. Il voulait bien admettre qu'il ne pensait pas vraiment à ses partenaires toutes ces fois où il avait ramené une fille entre ses draps, ne songeant qu'à assouvir avant tout ses propres désirs, mais il ne s'agissait pas pour autant d'égoïsme à ses yeux. Il avait souhaité la présence de sa mère à ses côtés mais il ne voyait rien d'anormal là-dedans. Il n'avait jamais pensé à lui sans songer au bien-être de ses plus proches amis, il n'avait jamais fait le moindre caprice dans son enfance pour avoir quoique ce soit. Mais aujourd'hui tout était différent. Aujourd'hui il voulait vivre et ne plus se contenter de survivre en faisant semblant d'aller bien. Il voulait sourire pour de vrai, se réveiller sans se dire que la journée allait être atrocement longue avant qu'il ne puisse à nouveau fermer les yeux, et surtout se sentir enfin important pour quelqu'un. Il voulait avoir le sentiment d'être l'unique responsable du bonheur d'un autre que lui et dépendre tout autant de cette personne, même si cela devait le rendre faible aux yeux des autres. Il voulait Bill. Alors pour une fois qu'il voulait réellement quelque chose, il pouvait bien y croire de toutes ses forces. Il allait se montrer désespérément égoïste en imposant une nouvelle fois ses sentiments à l'androgyne, peut-être même allait-il lui faire encore plus de mal en revenant à la charge, mais il était hors de question que leur histoire se termine ainsi.

Bill avait changé sa vie d'une manière qu'il n'aurait pas cru possible. Il s'était remis à imaginer un avenir, lui qui ne voyait plus que du noir depuis des années. Il avait recommencé à croire en l'humanité, lui qui avait fini par en vouloir au monde entier. Il avait compris que même si l'amour pouvait faire mal, il était aussi capable de vous donner le courage d'affronter tous les obstacles. Il avait à nouveau ressentis des choses, il s'était senti vivant ! Sans même le savoir, son Honey avait chassé la noirceur de son âme et lui avait appris que la vie pouvait être belle du moment que l'on avait la bonne personne à ses côtés. Maintenant qu'il lui avait offert tout ça, il était hors de question qu'il le lui reprenne. Une seule journée sans pouvoir plonger dans ses iris noisette le rendait dingue. Il n'osait pas imaginer ne plus le voir sourire, l'entendre rire. Ne plus pouvoir le taquiner, passer sa main dans ses cheveux. Ne plus le sentir se blottir contre lui à n'importe quel moment. Il allait se battre s'il le fallait, lui crier tous ces mots qu'il retenait en lui depuis des mois, lui décrocher une étoile si cela pouvait lui faire plaisir, ... Il ne resterait pas les bras croisés à attendre que sa vie lui échappe encore une fois.

- B & T -

C'était bien la première fois qu'il agissait aussi lâchement. D'habitude il était fier d'arriver à boucler ses enquêtes et aimait voir la reconnaissance et parfois même l'admiration, dans les yeux de ses clients. Son égo aimait particulièrement ce petit moment où il dévoilait enfin toute la vérité, démontrant sa supériorité sur le reste du commun des mortels qui avait été incapable de résoudre ce mystère. Mais pas cette fois.

Lorsqu'il avait enfin commencé à avoir une piste, il avait d'abord cru à une erreur administrative. Après tout, ça n'aurait été ni la première ni la dernière. Mais les jours avaient défilé et les preuves s'étaient accumulées. Plus le temps avait passé et plus il se disait qu'il n'aurait définitivement pas du accepter cette affaire. Il avait cédé face à la détresse de ce gamin et se maudissait pour ce moment de faiblesse qui ne lui ressemblait pas.

Alors il était là, en ce soir de printemps anormalement doux, dans cet appartement qui abritait depuis le début les réponses que cherchait Tom Trümper. Y entrer avait été un jeu d'enfant, comme d'habitude. Il avait craint l'espace d'un instant que le gamin ne soit pas sortit, l'obligeant à lui annoncer la nouvelle en face, mais sa chance insolente semblait être de nouveau de son côté. Debout au beau milieu de ce champ de bataille qui ressemblait autrefois à un salon, une simple lettre dans la main droite, Lothar Müller se demandait ce qu'il avait bien pu se passer entre ces murs. Chaque meuble semblait avoir été renversé, chaque objet avaient apparemment fait une rencontre fracassante soit avec l'un des murs, soit avec le sol. Tout indiquait une dispute mais rien ne lui permettait d'en connaître le sujet. Obligeant son esprit à cesser d'interpréter tout ce qu'il voyait devant lui, il se concentra sur ce qu'il allait bien pouvoir faire. Les résultats du test ADN qu'il avait demandé étaient enfin arrivés et n'avaient fait que confirmer ce qu'il savait déjà. Il n'avait pas le courage de tout lui révéler de vive voix. Il ne voulait pas voir son monde s'écrouler par sa faute, parce qu'il avait trop bien fait son travail. On avait beau l'accuser de ne pas avoir de sentiment, la vérité était tout autre, même s'il cachait bien son jeu.

Poussant un soupir de lassitude, le détective prit sa décision. Il se contenterait de faire ce qu'on attendait de lui, rien de plus, rien de moins. Il redressa la table du salon avec plus ou moins de facilité et y déposa son enveloppe bien en évidence avant de sortir une feuille blanche quelque peu froissée de l'une de ses poches pour y écrire quelques mots à l'attention de son client. Il lui disait qu'il avait enfin trouvé les réponses qu'il cherchait, que sa mission s'arrêtait là, et qu'il ne fallait pas qu'il essaye de le revoir pour quelque raison que ce soit. Il s'apprêtait à écrire qu'il était désolé que cette histoire n'ait pas la fin qu'il avait espéré mais se ravisa, préférant rester en dehors de tout ça. Il n'était que le détective, il trouvait ce qu'on lui demandait de chercher, il ne s'impliquait pas et ne jugeait pas.

Il déposa sa lettre à côté de l'enveloppe et tourna les talons, prêt à quitter cet appartement. Il ne put néanmoins se résoudre à avancer et sortit un épais dossier de sous son manteau, le fixant comme s'il pouvait lui dire ce qu'il devait faire. Passant une main sur son visage pour en chasser la lassitude, Müller déposa finalement le dossier sur la table et se dirigea vers la porte avant qu'il ne change encore d'avis. Ce n'était pas son genre de laisser au client les indices et les preuves qu'il avait récolté durant son investigation, mais celui-là il ne pouvait pas le garder. Il n'en avait tout simplement pas la force. Parce que pour la première fois un mystère lui faisait ressentir de l'injustice, parce qu'il aurait voulu que les choses se terminent différemment. Parce que pour la première fois une enquête lui rappelait qu'il était humain et que lui aussi éprouvait des sentiments.

Plongé dans l'obscurité du couloir de la résidence de Malmedy, Lothar Müller referma derrière lui le verrou de l'appartement 221 et s'apprêtait à quitter le lycée en se disant que des vacances ne lui feraient peut-être pas de mal, pour une fois. Dans la cour de l'école, il jeta un dernier regard en direction des fenêtres de Tom Trümper et tenta de se convaincre qu'il avait eu raison d'agir ainsi. Il sortait de vie comme il y était entré, sans faire de bruit.

- B & T -

Les mouvements autour de lui semblaient ralentir, il n'entendait plus aucun son à part le martèlement de son organe vital dans sa poitrine. Son cerveau semblait s'engourdir, ses pensées se mélangeaient bien qu'elles ne tournaient qu'autour d'un seul être. Il savait que son souffle court n'était pas dut qu'à sa course effrénée. Parmi les battements bien trop rapides de l'horloge folle dans sa cage thoracique, il n'y avait pas que l'adrénaline, mais aussi la peur de faire face à la réalité, de tout perdre en un fragment de seconde. Il lui semblait que le temps défilait à une vitesse folle, le rapprochant de plus en plus de ce qui l'effrayant tant. Il eut l'impression que son cœur allait imploser lorsqu'il arriva enfin sur cette place que les hommes avaient presque fini par oublier avec les années. Il stoppa sa course et tout revint brusquement à la normal, comme s'il venait de toucher terre après une chute vertigineuse.

Assis au bord de cette fontaine qu'il avait appris à connaître, Bill lui tournait le dos, la tête baissée vers ce faible mouvement d'eau qui le fascinait tout autant qu'il l'apaisait. A ses côtés, Tom remarqua la présence d'une paire de santiag et conclut rapidement que l'androgyne n'avait pas su résister, encore une fois. L'espace d'un instant, il se demanda combien de temps est-ce qu'il faudrait au brun avant de lui jeter ses chaussures à la figure. Après tout, c'était lui qui les lui avait offertes, elles ne pourraient que lui rappeler de mauvais souvenirs. Conscient qu'il ne cherchait qu'à se concentrer sur les détails pour mieux fuir ce qui était réellement important, le musicien reporta son attention sur son colocataire et étouffa le cri qui lui montait à la gorge face à la détresse qu'il dégageait en ce moment-même. Les mots restèrent bloqués alors qu'il sentait son cœur et son corps tout entier le faire atrocement souffrir de désespoir. Il savait qu'il était responsable de tout cela mais ignorait comment tout arranger. S'il lui en avait parlé plus tôt, tout aurait été différent. Peut-être que son silence n'aurait pas paru comme une trahison. Peut-être que la situation ne serait pas aussi désespérée. Il savait que même s'il remaniait leur histoire encore et encore dans son esprit, cela ne changerait rien à la réalité et pourtant il ne pouvait se résoudre à lancer le premier mot qui ferait enfin bouger les choses.

« - Je ... je suis désolé. »

L'androgyne sursauta légèrement avant de se retourner brusquement. La surprise passée, les traits de son visage se durcirent à nouveau, comme un peu plus tôt dans leur appartement. Debout au milieu de cette fontaine qu'il adorait, Bill donnait sans le vouloir un tout autre aspect à cet endroit. Il n'était plus question de calme et de sérénité, comme si la magie de ce lieu était brisée. Il ne lui fallut que peu de temps pour que sa colère se transforme à nouveau en haine.

Il serrait les poings, tremblant de rage, le cœur brisé, et ce même s'il refusait de l'admettre. Il se sentait profondément trahit à tous les niveaux. La fureur qui s'accumulait rapidement au fur et à mesures des évènements qui lui revenaient en mémoire finit par avoir raison de lui. Avant que Tom n'ait pu esquisser le moindre geste, il bondit hors de la fontaine pour asséner à celui qu'il considérait auparavant comme un ami un violent crochet du droit et dans lequel il mit tout son ressentiment. Le guitariste chancela légèrement sous le coup et porta rapidement sa main à sa mâchoire comme pour en apaiser la douleur même s'il savait que son geste ne servirait pas à grand chose, tout en poussant un gémissement étouffé. Il reprit ses esprits tant bien que mal, se demandant s'il ne devait pas mettre un genou à terre afin de montrer qu'il savait qu'il méritait amplement sa punition. Lorsqu'il releva les yeux, ce fut pour constater que Bill avait baissé les siens. Il voyait son corps être parcouru de soubresauts qu'il supposa dus à la colère mais il ne semblait pas vouloir le frapper à nouveau.

« - Je voudrais ... je voudrais que tu m'écoutes. S'il te plaît. Je sais qu'en ce moment tu me détestes et que tu donnerais sans doute n'importe quoi pour me voir rayé de la surface de la Terre. Mais s'il te plaît, laisse-moi te donner ma version de l'histoire. »

Le brun releva la tête et tout en le fixant d'un regard noir, sembla peser le pour et le contre. Après un silence qui semblait ne plus vouloir finir, il se recula finalement et se rassit sur le bord de la fontaine, tourné cette fois vers son interlocuteur. Tom le remercia silencieusement et se laissa tomber à même le sol, son corps ressentant finalement le contre coup de ses derniers efforts trop poussés. D'une voix tremblante, il poursuivit :

« - Pour que tu comprennes bien mon point de vue, j'aimerais te raconter une histoire. Celle d'un lycéen à qui tout semblait réussir et qui pourtant aurait donné n'importe quoi pour que les choses soient différentes. Celle d'un petit garçon solitaire, perdu dans un monde de grands. »

Le brun se mura dans son silence, ses lèvres résolument scellées, bien décidé à ne pas lui facilité la tâche. Ne voulant plus ressentir le poids de la culpabilité sur ses épaules face à ses prunelles noisette qui lui rappelaient ce qu'il avait fait, le guitariste ferma les paupières et entreprit finalement son récit :

« - Cette histoire commence il y a une dizaine d'année. Presque du jour au lendemain, dans la ville de Magdeburg, un petit garçon perdit son sourire et toute sa joie de vivre. Il avait le sentiment qu'on lui avait arraché une partie de lui-même alors que rien n'avait changé. Sa mère s'inquiétait, l'emmenait voir une multitude de docteurs et finit par décidé de déménager. Le petit garçon ne savait toujours pas d'où venait le problème, mais il avait rapidement compris que cela faisait souffrir sa mère. Alors pour ne plus la voir pleurer, il lui mentit pour la première fois en lui disant que tout allait mieux. Mais la vérité c'était qu'au fond de lui il y avait toujours ce vide immense, ce trou béant que rien ne semblait pouvoir combler. Ni les attentions de celle qui l' avait mis au monde, ni l'amitié, aussi sincère soit-elle, ni l'acte d'amour. Il était perdu sur l'autoroute de la vie mais n'osait pas en parler pour ne pas briser ce fragile équilibre d'existence qu'il avait réussi à construire. Une vie basée sur le mensonge et la dissimulation, mais il se persuadait que si ses proches étaient heureux, c'était finalement tout ce qui comptait. Ce petit garçon mentait tellement bien qu'il finit par y croire lui-même. A lui les joies de l'adolescence, les filles, les fêtes en tout genre. Il était tellement bon dans son jeu d'acteur, que même lui s'y laissait prendre. Mais ce qu'il n'avait jamais avoué, c'était que pour supporter tout ça, toute cette hypocrisie, ce mensonge permanent, il était devenu dépendent à cette saloperie qu'on appelle héroïne. Il n'en était pas fier, mais il n'y avait que dans ces moments-là qu'il était vraiment heureux. Du moins le croyait-il. Parce qu'un jour, tout a changé. Un jour, il a rencontré la véritable joie de vivre et s'est rendu compte de combien la sienne était factice. »

Les paupières toujours closes, il ne vit pas l'androgyne froncer les sourcils. La nonchalance dans la voix de son interlocuteur avait quelque chose d'effrayant. Il parlait de son passé comme s'il n'avait jamais vécu tout cela, comme s'il lui racontait l'histoire de quelqu'un d'autre. Sa volonté de mettre son récit à la troisième personne montrait qu'il voulait prendre le plus de distance possible avec tout ça, bien que cela fasse entièrement partie de lui, et Bill n'en était que plus mal à l'aise. Il était celui qui avait tout fait basculer en entrant dans sa vie et ne le réalisait que maintenant, même si Tom le lui avait déjà fait plus ou moins comprendre au cours de quelques unes de leurs nombreuses discussions nocturnes.

« - Un jour d'octobre, ce petit garçon a rencontré un être comme il n'en avait jamais vu jusque là. Cet être pouvait éclairer une pièce par sa simple présence, par son envie perpétuelle de vivre pleinement chaque seconde comme si c'était la dernière. C'était quelque chose que le petit garçon ne connaissait pas. Pire encore, c'était quelque chose qu'il ne comprenait pas. A ses yeux, vivre n'avait pas d'intérêt particulier. C'était simplement une étape, certes un peu longue, entre la naissance et la mort. Si les choses s'étaient arrêtées là, il aurait sans doute pu les maîtriser. Il aurait repris le contrôle de son monde et tout serait redevenu comme avant. Mais comme le tournesol désespérément attiré par le soleil, le petit garçon se sentait fasciné par cette personne complètement désaxée qui avait fait irruption dans sa vie parfaitement réglée. La terreur à l'état pur commença à le gagner lorsqu'il réalisa que cette personne pourtant inconnue semblait combler légèrement ce vide qui faisait partie de lui depuis des années. Il a essayé de le repousser en se montrant particulièrement infecte, et pourtant cet être un peu étrange aux nombreux pierçing et tatouages et aux idées parfois un peu folles s'est installé dans sa vie sans même qu'il ne s'en aperçoive. Le petit garçon avait érigé d'immenses barrières autour de lui, repoussant le monde extérieur pour mieux se protéger, mais il n'avait fallu qu'une seconde d'inattention pour que le nouvel arrivant se retrouve avec lui dans sa forteresse de solitude. Il avait suffit d'une main tendue et d'un peu d'espoir. »

L'androgyne esquissa un sourire et ne put s'empêcher de penser que les choses avaient été loin d'être aussi faciles que Tom le prétendait en ce moment. Il ne lui fit cependant pas part de ses pensées, bien trop curieux de savoir où tout cela allait les mener. Il se fit la réflexion qu'il fallait néanmoins qu'il reste sur ses gardes où le musicien allait finir par endormir sa colère avec de belles paroles, et ça, il n'en était pas question.

« - Le petit garçon ne voyait pas tout ce qui était en train de changer. Il savait seulement qu'il n'était désormais plus dépendant de la moindre drogue et que la présence de cette personne comblait maintenant entièrement le vide qui avait autrefois pris possession de son âme. Il était heureux, réellement heureux, et ce sans doute pour la toute première fois de sa vie. Et puis un jour il a regardé son existence en face et il s'est rendu compte que quelque chose n'allait pas. Un jour, il a finalement compris qu'il était tombé amoureux. En quoi était-ce mal ? Déjà parce qu'il était un garçon, et que la personne que son cœur avait choisi en était un aussi. Et ensuite eh bien ... parce qu'il avait peur. Il se sentait vulnérable, pris au piège sans savoir comment s'en sortir. Il aura suffit d'une nuit pour que sa vie de nouveau précaire ne bascule encore une fois. L'alcool aidant, il a touché le bonheur du bout des doigts en s'égarant entre les draps de la personne que son cœur avait choisi, mais ce que Dieu donne, Dieu le reprend. Au petit matin, rien de tout cela n'avait jamais existé aux yeux de son amour. Il s'est refusé à lui dire la vérité pour ne pas le perdre, pour ne pas le faire fuir. Égoïstement, il ne voulait pas retrouver une vie fade et dénuée d'intérêt. Pas après avoir connu tout ça. Il savait que sans cet être désaxé, la vie ne valait pas la peine qu'il reprenne sa comédie. Alors par crainte il a muré son cœur, par peur il a enfoui au plus profond de lui ce merveilleux souvenir et il a prié pour que l'autre ne s'en souvienne jamais. Le petit garçon avait cet espoir fou qu'un jour il aurait droit lui aussi à sa fin heureuse. Il voulait conquérir l'élu de son cœur, le courtiser, faire se dérouler les évènements comme ils auraient du l'être dès le départ. Mais on ne lui en n'a pas laissé le temps. Il n'avait pas prévu qu'il jouerait de malchance, que les souvenirs reviendraient. Il n'avait pas prévu que sa vie basculerait dans le chaos parce qu'il n'avait pas su aimer comme il le fallait. »

Lorsque le musicien se tut, Bill sut qu'il avait terminé son récit. Il n'y avait plus rien à dire, à présent. Le petit garçon se tenait désormais devant lui et attendait son verdict. Le brun avait la désagréable sensation de tenir la vie de Tom entre ses doigts, comme s'il savait que son colocataire ne supporterait pas le rejet. Il était néanmoins hors de question qu'il se laisse avoir aussi facilement. Il se sentait toujours trahi et avait une multitude de questions à lui poser mais aucune ne semblait vouloir franchir la barrière de ses lèvres.

« - Cela n'empêche pas que tu m'as menti. »

Malgré sa crainte, le guitariste se résolut à ouvrir les yeux. Il pensait faire face à une rage sourde, ce qu'il jugeait d'ailleurs justifié, mais dans ce regard qui lui faisait face, il n'y avait désormais presque plus que de la déception, et après réflexion, c'était encore pire que tout.

« - J'ai essayé de te le dire plusieurs fois. Parce que même si je voulais y croire, je savais que je ne pourrais pas te cacher ça toute une vie. Je voulais te le dire avant que tu l'apprennes d'une autre façon, pour essayer de minimiser un tant soit peu la douleur de ce que tu verrais forcément comme une trahison. Je me sentais incapable de te parler de mes sentiments avant d'avoir été entièrement franc avec toi, mais je savais que même en étant honnête j'avais quatre-vingt dix pour-cent de chance de te perdre et ça je ne pouvais m'y résoudre. Avant j'étais incapable d'imaginer mon avenir, que ce soit pour mes projets dans dix ans ou ceux du lendemain. Mais depuis toi je n'imaginais pas le futur sans toi à mes côtés, même si nous ne devions rester que de simples amis. Crois-moi quand je te dis que je regrette tout ce qu'il s'est passé. Si j'en avais le pouvoir, j'écrirais l'histoire différemment. Je t'inventerais une vie merveilleuse où tu ne connaitrais jamais la souffrance, où tu serais heureux, même si ce n'était pas avec moi. »

Bien qu'il paraisse calme, le brun savait que Tom luttait contre une panique intérieure. Il était probablement au bord du désespoir et ses yeux le suppliaient de lui pardonner ce qu'il avait fait. Les mots qu'avait prononcés le musicien trouvaient un écho en lui et pourtant il ne parvenait pas à se résoudre à simplement oublier toute cette histoire. Il ferma les paupières quelques secondes avant d'encrer son regard dans celui de son vis-à-vis :

« - Tu sais ... je ne sais pas si c'est le fait d'avoir été trahi par la personne en qui j'avais le plus confiance au monde ou bien celui d'avoir été trahi par l'être que je considérais comme mon meilleur ami, qui me fait le plus mal. J'en viens à me demander avec qui est-ce que j'ai réellement passé les derniers mois de ma vie. On vit ensemble presque vingt-quatre heures sur vingt-quatre et je me rends compte que finalement je ne te connais pas. Je réalise que tu es capable de me mentir sans que je ne me rende compte de rien. Comment est-ce que je pourrais te faire confiance après ça ? Comment est-ce que tu as pu me faire ça ? Si tu m'aimes vraiment, si tu m'aimes autant que tu me le dis, comment est-ce que tu as pu faire une chose pareille ... »

L'androgyne ferma les paupières lorsque ses yeux commencèrent à picoter. Il n'était pas question que Tom le voit pleurer. Il n'était pas question qu'il le laisse voir combien cette histoire l'affectait. Il ne fut cependant pas assez rapide puisque ces larmes difficilement contenues, le musicien les vit et sentit aussitôt son cœur se serrer. Sa propre vue commençait à devenir trouble tandis que son corps tremblait malgré tous les efforts qu'il faisait pour se contrôler.

« - Si cela peut te réconforter un tant soit peu ... sache que malgré toute ta haine, tu ne me détesteras jamais autant que moi je me hais. Après tout, j'en ai l'habitude. Avant toi, le monde était froid et n'avait pas de sens. Avant toi, je refusais de croiser le moindre miroir et je multipliais les drogues pour fuir la réalité. Je cherchais à me détruire parce que je ne supportais pas ce que j'étais. Et c'est encore pire aujourd'hui. Tu as réveillé en moi quelque chose que je croyais mort à jamais. Tu m'as rappelé que moi aussi j'avais droit au bonheur. Tu n'imagines même pas tout ce que tu m'as donné. »

Un sourire sincère prit place sur ses lèvres malgré les larmes qui déferlaient doucement sur ses joues. Il ne s'était jamais autant ouvert à quelqu'un et il lui semblait que rien ne pourrait plus l'arrêter.

« - Tu m'as appris l'espoir, tu m'as rendu ma dignité. Tu m'as donné toute l'affection que je cherchais depuis toutes ces années. Tu m'as même enseigné l'amour, moi qui ne voyais ça que comme une futilité. Je ne peux pas t'en vouloir de me détester. J'ai beau me dire que pour faire ... ce que nous avons fait cette nuit-là, il faut être deux, je sais que je suis le seul responsable de ce qu'il se passe maintenant. Si cette nuit-là je t'avais résisté ou bien si je t'en avais parlé le lendemain matin plutôt que de m'enfuir, ... Mais il y a une chose que je veux que tu sache. C'est vrai, je t'ai caché tout ça et je ne mérite pas ta confiance, mais il y a une chose sur laquelle je ne t'ai jamais menti et sur laquelle je ne te mentirai jamais. Je t'aime. Je t'aime pour ta douceur et ta tendresse mais aussi pour tes excès de colère et ton caractère pas toujours facile à supporter au quotidien. Je t'aime pour m'avoir appris à vivre, pour ce bonheur que j'éprouve quand je te vois, pour toutes ses étranges sensations que tu me fais ressentir quand tu souris. Je t'aime pour tous nos éclats de rire, pour ton grain de folie. Je t'aime pour ce que tu es, pour ce que tu fais de moi. Je t'aime. »

Bill se recroquevilla sur lui-même, incapable d'en entendre davantage. Il ne voulait pas de cette déclaration, pas maintenant, pas dans ces conditions. Parce qu'elle atténuait sa colère, parce qu'elle faisait vibrer en lui la corde du pardon alors qu'il ne voudrait ressentir que rage et haine en cet instant. Même s'il savait que Tom avait raison, qu'il fallait être deux pour avoir commis leur erreur, il trouvait beaucoup plus simple de reporter entièrement la faute sur l'autre. Parce que comme ça, il n'avait pas à avouer que sur le moment, ce qu'il s'était passé, il le voulait aussi. Il ne voulait pas admettre que son corps avait compris avant lui ce qu'il désirait réellement. Il s'était promis de ne plus jamais se laisser prendre au piège et pourtant il avait plongé la tête la première sans même s'en rendre compte. Comment était-il possible d'être aussi stupide ? Mel lui avait pourtant dit que personne n'était capable de contrôler ce genre de chose, mais il ne l'avait pas écoutée. Peut-être que s'il ne s'était pas cru invincible, il n'aurait pas si obstinément fermé les yeux. Peut-être que s'il avait laissé une chance à Tom, il ne serait jamais allé se jeter dans les bras de Sam, il n'aurait jamais été désespéré l'idée de la savoir dans d'autres draps, et toute cette histoire ne se serait jamais passée. Peut-être. Ça n'avait jamais été facile pour lui de reconnaître ses torts, et visiblement cela n'allait pas commencer aujourd'hui. Mais peut-être que pour Tom il pourrait faire un effort. Après tout, il avait aimé leur amitié comme aucune autre auparavant. Il avait aimé l'idée même de l'aimer. Il lui suffirait juste de faire taire son orgueil et d'admettre qu'il n'y avait pas qu'un seul fautif.

Il plaqua brusquement ses mains sur ses oreilles pour se couper du reste du monde. Il avait besoin de silence pour réfléchir, pour mettre les choses au clair, et les battements de cœur beaucoup trop rapides qu'il entendait l'empêchaient de se concentrer. Il avait d'abord cru que ce son venait du guitariste, mais il dut se rendre à l'évidence lorsque malgré son geste, le bruit se fit plus présent encore. Ce n'était pas le cœur de Tom qu'il entendait mais bel et bien le sien qui martelait sa poitrine comme pour se faire comprendre. Après quelques minutes d'un silence pesant, le brun prit la parole mais se refusa à croiser le regard de son interlocuteur, préférant fixer un point invisible :

« - Je n'ai qu'une envie, c'est de partir en courant en te hurlant que je te déteste et que je ne veux plus jamais te revoir. Je voudrais pouvoir tourner la page sans un remord, sans me soucier des conséquences, comme le ferait un gosse ou bien quelqu'un de foncièrement cruel. J'ai vraiment envie de le faire. Parce que j'ai mal, horriblement, mal, et que même si j'ai dix-sept ans et que je suis censé être mâture, je veux pouvoir m'enfuir comme un enfant sans regarder derrière moi. Le problème c'est que tu m'as pris au piège, Trümper. Je voudrais partir mais je sais que cela me ferait tout aussi mal qu'à toi, peut-être même plus, et ce n'est définitivement pas ce que je veux. Je ne veux plus souffrir, je voudrais juste avoir une adolescence normale, sortir en boîte, cumuler les filles, faire des conneries, ... Mais je peux pas. Parce que je t'ai toi et que ça me suffit amplement pour être heureux, même si en ce moment je suis loin de l'être. Je ne vais pas te mentir, je ne te pardonnerais pas tout de suite. Je ne te pardonnerais peut-être même jamais ce que tu m'as fait. Tu peux penser que c'est complètement injuste, et tu en aurais parfaitement le droit, mais c'est comme ça. Je ne te pardonnerais peut-être pas, mais je sais que je peux apprendre à vivre avec. Je ne peux pas te garantir que j'en serais réellement capable, que mon ressentiment ne finira pas par se retransformer en haine ... Je suis incapable de te garantir quoique ce soit pour le moment. Tout ce que je sais, c'est que je tiens à toi. Sincèrement. Ca ne fait que quelques mois que l'on se connait, mais j'ai l'impression que cela fait toute une vie. Maintenant que j'ai connu ça, je sais que je ne pourrais plus vivre sans. Tu es mon ami, mon confident, ... presque une partie de moi. Je sais que je ne supporterai pas de perdre tout ça. Je ne m'en relèverai pas. Je ne veux pas non plus souffrir toute ma vie parce que j'aurais fait preuve d'immaturité en fuyant loin de toi au lieu d'essayer de nous donner une chance. »

Bill s'arrêta, incapable d'en dire davantage. Son cœur se serrait dans sa poitrine au point de lui faire mal et les larmes qu'il retenait jusque là eurent finalement raison de lui. Il cacha ses yeux de ses mains et la voix brisée par les sanglots, il demanda :

« - Mais je t'en supplie, Tom ... je t'en supplie de tout mon être, ne me mens plus jamais. Même si la vérité doit me faire mal, peu importe. Je ne veux plus de mensonge. Je veux pouvoir avoir confiance en toi en toute circonstance. Sinon je ne pourrais pas le supporter. »

Doucement, le musicien s'approcha de l'androgyne et écarta ses mains pour pouvoir effacer ces perles salées qui s'échappaient de ses yeux même si lui-même ne pouvait retenir ses propres larmes, de soulagement cette fois, à l'idée que son Honey n'allait pas le quitter. Lentement, il rapprocha son corps de celui de Bill et l'entoura de ses bras, comme pour se prouver que toute cette histoire était bien terminée et que les choses allaient enfin pouvoir rentrer dans l'ordre.

« - Je te le promets. Je te le promets sur ce que j'ai de plus cher. J'aurais trop peur de te perdre. »

Le brun savait qu'il pouvait le croire lorsqu'il lui disait qu'il ne mentirait plus. Il le sentait au plus profond de lui, même s'il ne se l'expliquait pas. La peur que Tom avait ressentie à l'idée de le perdre grondait en lui comme si c'était la sienne. Chassant cette étrange sensation loin de son esprit, il se décolla doucement du corps de son ami et posa ses lèvres sur les siennes pour partager un baiser aussi passionné que désespéré. Il voulait lui faire comprendre que tout était désormais terminé, qu'il voulait laisser toute cette histoire derrière eux, qu'il était là et qu'il ne s'enfuirait pas. Cette douce chaleur qu'il ressentait chaque fois que leurs lèvres se touchaient s'insinua doucement dans tout son être et cette constatation lui démontra que même s'il en voulait à Tom pour tout ça, il n'avait rien perdu des sentiments qu'il pouvait éprouver pour lui.

Il ignorait ce que l'avenir pouvait bien leur réserver mais il préférait faire comme à son habitude et se concentrer sur le présent, sur leur premier vrai baiser, sur cette force qui les unissait et qui les avait poussés à tenter de continuer une relation qui avait autant d'importance pour l'un que pour l'autre. Cette force que tous deux ressentaient de tout leur corps et de toute leur âme lui donnait l'impression de pouvoir se dresser contre le monde entier tant qu'ils étaient ensemble.

A suivre ...


Oui, j'ai conscience d'avoir merdé en délaissant cette fic depuis tout ce temps. Mais j'ai toujours dit que je terminerais cette histoire et je m'y tiendrais, même s'il n'y aura plus personne pour la lire.