Titre : Faux sourire

Auteur : Aznara

Fandom : Manga – Naruto

Pairing : Naruto/Sasuke

Rating : NC-17

Warnings : Yaoi, AU, angst, violence

Disclaimer : J'adorerais pouvoir dire que Sasuke m'appartient mais nous savons tous que c'est l'esclave personnel de Naruto… pardon de Masashi Kishimoto. Et puis vous me voyez faire de l'argent avec cet ersatz de roman policier ? Soyons sérieux deux minutes, ok ?

A/N : Ceci est un AU, qui se passe aux Etats-Unis, à New York plus précisément. J'en avais envie et puis tout bon roman policier se passe aux States, vous avez remarqué ?

Au cas où vous vous poseriez la question, oui, Itachi est 'gentil' ici. (encore que cet adjectif ne correspond pas du tout à la caractérisation que j'ai faite) J'ai trouvé ça amusant d'inverser les rôles pour une fois. J'en avais marre des Itachi à l'esprit tellement dérangé qu'il est capable de violer et massacrer tout ce qui bouge dans les fics. Donc oui, il est OOC et cette fiction accorde une part très importante à la relation complexe entre Itachi et Sasuke. (et non, il ne sera pas question d'ItaSasu !)

Dernière chose : j'ai mis NC-17 comme rating principalement pour la violence : il n'y aura pas de lemons avant un bon moment. En plus, les lemons ne seront pas postés sur FFnet mais sur mon LJ de fics en post public. (les liens figureront dans mon profil, promis)

Spoilers : L'identité du père de Naruto est évoquée… J'en avais vraiment besoin, et c'est l'une des raisons pour lesquelles j'ai changé le nom de famille de Naruto. Tout cela sera expliqué plus tard. Sinon pas d'autres spoilers si ce n'est l'apparition de personnages qui n'ont pas encore pris place dans les volumes publiés en France.

Empty spaces - what are we living for
Abandoned places - I guess we know the score
On and on, does anybody know what we are looking for
Another hero, another mindless crime
Behind the curtain, in the pantomime
Hold the line, does anybody want to take it anymore
The show must go on
The show must go on
Inside my heart is breaking
My make up may be flaking
But my smile still stays on

Queen – The Show Must Go On

Faux sourire

La sonnerie agaçante d'un réveil s'éleva dans la pièce. Une main s'abattit brusquement sur l'objet, ne cherchant pas réellement à éteindre l'appareil mais plutôt à l'envoyer au diable. Le réveil chancela, manqua de tomber par terre mais resta en équilibre précaire sur la table de nuit et eut finalement le bon goût de se taire.

Dix minutes plus tard, ce fut la sonnerie stridente d'un téléphone portable qui résonna dans la chambre. Le blond couché dans le lit s'enfouit un peu plus sous la couette, espérant ainsi ne plus subir le bruit énervant mais ce fut peine perdue. Soupirant, il se leva et se mit à chercher frénétiquement parmi le désordre qui régnait dans la pièce. Ayant finalement localisé l'objet, il grogna un élégant « Va te faire, Kiba » avant de décrocher et de se laisser retomber lourdement sur son futon.

-Naruto ? s'inquiéta une voix douce. Tu es encore au lit ?

Le blond fronça les sourcils avant de se tourner vers son réveil. Les chiffres rouge vif lui indiquaient qu'il était exactement sept heures douze.

-Je suis réveillé, maintenant. Pas besoin de prendre cette voix maternelle.

Un rire fut la seule réponse qu'il obtint. Bâillant, Naruto repoussa à contrecoeur la chaleur confortable de sa couette et se leva de nouveau, titubant légèrement. Tirant violemment sur la ficelle qui se balançait à gauche de la fenêtre, il ouvrit le store et regarda pensivement les voitures qui circulaient dans sa rue.

-C'est Kiba qui t'a demandé d'appeler ?

-Non. Il a dit que si tu arrivais en retard dès le premier jour, peut-être que ton transfert serait annulé et que tu serais obligé de revenir.

Naruto grogna, traversant le couloir avant d'ouvrir la porte de sa cuisine. Il inspecta les placards, le réfrigérateur, puis finit par se rabattre comme à son habitude sur des ramen. Chaque matin, il observait toujours la même routine : il faisait semblant de chercher un menu différent pour son petit-déjeuner alors qu'il savait pertinemment qu'il ne pourrait résister à l'appel des ramen. De toute façon, ce n'était pas comme s'il voulait y résister.

-Mange des fruits, ordonna soudainement l'interlocuteur de Naruto, devinant les intentions de celui-ci.

Le blond leva les yeux au ciel et attrapa un bol pour mettre ses ramen malgré le conseil.

-Oui Maman.

Gloussements de l'autre côté du téléphone.

-On se voit ce soir ? reprit le correspondant de Naruto. Et n'arrive pas en retard pour ta première journée, c'est impoli.

-D'accord. Dis à Kiba qu'on se retrouve tous ici en fin de journée.

-Fais attention à toi, murmura la voix douce.

Dans le combiné, Naruto entendit le son lointain et étouffé d'une sirène. Le souffle de son interlocuteur se raccourcit légèrement avant de reprendre un rythme normal. Naruto supposa que la situation devait probablement être sous contrôle malgré les bruits familiers d'ambulances.

-Tu me connais, Haku, sourit le blond.

-Justement, fit le jeune homme avant de raccrocher.

Laissant son téléphone sur le comptoir, Naruto regarda l'heure affichée sur la porte du four. S'il prenait une douche rapide, il était encore dans les temps. Presque.

- - -

Le blond ouvrit la porte du septième district avec énergie et se dirigea vers l'accueil, un grand sourire sur le visage.

-Bonjour ! Je m'appelle Naruto Namikaze et j'ai rendez-vous avec Kakashi Hatake.

-Vous êtes en retard, fit la réceptionniste d'une voix glaciale.

Naruto essaya d'arborer un sourire penaud en remettant de l'ordre dans ses cheveux en bataille mais la jeune femme se contenta de décrocher son téléphone pour l'annoncer.

-Deuxième étage, bureau du fond.

Il remercia vivement la réceptioniste d'un geste de la main avant de foncer vers les escaliers.

Le deuxième étage consistait en fait en une salle immense remplie de bureaux, presque tous occupés par des policiers en uniforme ou non. De petites cloisons avaient été érigées pour permettre aux propriétaires des bureaux d'avoir une relative intimité. Naruto trouvait que tout cela faisait minuscule. On aurait dit des boîtes à chaussures, d'autant plus que la température de la pièce était déjà incroyablement élevée malgré l'heure matinale. Haussant les épaules, il se dirigea instinctivement vers le mur du fond, orné d'une porte en verre qui mentionnait « K. Hatake ». Il frappa deux fois avant d'entendre une voix lui ordonner d'entrer.

Naruto pénétra dans une pièce de taille moyenne et fit une rapide inspection des lieux. Une des premières choses que Zabuza lui avait apprise était de toujours détailler la pièce dans laquelle il entrait. Avec de petits coups d'œil successifs, il observa donc les murs couleur jaune sale, la bibliothèque bancale qui croulait sous les documents de toutes sortes et enfin la table jonchée d'objets en tous genres qui semblait servir de bureau.

Derrière ce même bureau se tenait un homme aux cheveux étrangement gris mais qui pourtant semblait assez jeune. Peut-être même un peu trop jeune pour diriger tout un district. Une longue cicatrice s'étendait sur son œil gauche et son regard était présentement plongé dans un livre à la couverture orange familière. Tout dans l'attitude de cet homme montrait que c'était un original. Un peu comme ces personnes qui restent tranquillement dans leur coin, prêtes à se faire marcher sur les pieds pour ne pas avoir d'ennuis mais qui, le moment venu, s'avèrent être d'une redoutable efficacité. Cela allait souvent de pair avec une véritable aura de danger mais ici il était trop tôt pour le dire au sujet de ce Kakashi.

-Namikaze Naruto, je présume ? demanda celui-ci sans lever les yeux.

Le blond hocha la tête, étudiant toujours son nouveau supérieur. Habillé simplement d'un tee-shirt gris provenant de l'Académie de police qui avait visiblement connu des jours meilleurs et d'un pantalon noir, Kakashi Hatake respirait l'ennui et l'indifférence. Lorsque le regard de Naruto s'arrêta une fois de plus sur le livre que lisait l'homme en face de lui, il ne put s'empêcher de sourire.

Décidément, Jiraiya pervertissait plus de personnes qu'il ne le pensait.

-Le paradis du batifolage, hein ? Mon parrain en est l'auteur. Je ne comprends pas comment il peut avoir autant de succès avec ce torchon.

En un clin d'œil, Kakashi fut devant lui. Cette fois, il le fixait dans les yeux, toute son attitude prouvant qu'il était même prêt à se mettre à genoux devant Naruto s'il le fallait.

-Est-ce que je peux le rencontrer ? Je lis ses livres depuis le début, je suis son plus grand fan, je ferais ce que tu…

-Kakashi.

Naruto se retourna brusquement en entendant une autre voix. Comment avait-il pu ignorer qu'une autre personne se trouvait dans la pièce ? Et pourtant, il y avait bien un homme assis en retrait au fond du bureau, presque dans l'ombre, l'air profondément ennuyé par l'attitude de son supérieur. Peut-être était-il arrivé discrètement dans son dos ?

En regardant cet homme pour la première fois, Naruto sentit sa bouche s'ouvrir sans qu'il ne puisse rien y faire. L'inconnu était sans conteste le plus beau spécimen mâle qu'il ait jamais vu. Il sentit son ventre se contracter légèrement tandis qu'il l'étudiait de plus près, s'attardant sur chaque détail de l'homme qu'il avait sous les yeux.

Brun avec des cheveux assez longs, un visage étonnamment régulier, presque féminin, des yeux noirs bordés de longs cils et un corps qui semblait véritablement parfait : ni trop musclé, ni trop fin. Sa peau était pâle et sa carrure faussement fragile. Naruto était assez observateur pour savoir que ce fantasme ambulant ne devait pas avoir de problèmes pour se défendre. Vraiment, cet homme était la perfection incarnée.

Naruto se mit à prier pour que ce soit son nouveau partenaire. Pour un peu il se serait mis à genoux comme Kakashi quelques minutes auparavant.

-Tu as fini ? demanda sèchement l'inconnu d'une voix ô combien seduisante du point de vue de Naruto.

Douce mais ferme. Parfaite.

Kakashi laissa échapper un petit rire.

-Allons, allons, Itachi, pas la peine de montrer les dents si vite. Naruto est ton nouveau partenaire, après tout.

C'était vraiment son fantasme devenu réalité : brun, presque androgyne, froid et distant…

Une minute.

Partenaire ?

-Je… quoi ? balbutia intelligemment Naruto.

Itachi leva les yeux au ciel. Kakashi reprit son livre.

-Itachi sera ton nouveau partenaire. Je suppose que tu n'y vois pas d'inconvénient ?

Bon Dieu, non !

-Aucun, répondit Naruto en essayant de réfréner son sourire grandissant.

Sans un bruit, Itachi se leva de sa chaise avec grâce. Il s'avança vers le bureau, fixant férocement son supérieur, toujours plongé dans sa lecture.

-C'est moi qui ne veux plus. Je n'ai pas envie de travailler avec un ahuri comme lui.

Le visage de Naruto arbora une moue indignée. Il ouvrit la bouche pour répliquer mais fut devancé par Kakashi.

-C'est le meilleur, Itachi. Il n'y a que lui qui peut t'aider.

Même si Naruto appréciait d'être qualifié de « meilleur », il eut soudain un mauvais pressentiment. Il avait été distrait par Itachi, au point d'en oublier un court instant qu'il ne raffolait pas de l'idée d'être muté au départ.

Son ancien supérieur l'avait plus ou moins forcé à quitter son district, sous le prétexte qu'il fallait prêter main forte à ceux du septième qui manquaient d'effectifs. Pourtant, la salle du deuxième étage qui grouillait de flics était là pour témoigner que ce n'était sûrement pas le cas.

Il avait même fallu qu'il abandonne son partenaire, Kiba. Tous deux ne l'avaient jamais dit, mais implicitement cela avait été assez rude. Ca allait faire cinq ans qu'il travaillait avec Kiba et ils se connaissaient tellement bien que chacun était capable de déterminer ce à quoi pensait l'autre avant qu'il ne le formule tout haut.

Sans oublier que Kiba et lui étaient meilleurs amis. Ils avaient le même humour, les mêmes goûts, les mêmes opinions politiques, les mêmes projets. Ils se complétaient et formaient une équipe véritablement soudée et efficace.

Non vraiment, tout cela n'augurait rien de bon.

-…quoi tu es là ?

Naruto regarda Itachi d'un œil vide. Pendant qu'il analysait la situation, ou du moins le peu qu'il en avait tiré, il n'avait pas écouté ce qui se disait.

Itachi lui jeta un regard méprisant.

-Est-ce que tu sais pourquoi tu es là ? répéta-t-il.

Le blond haussa les épaules.

-Tu veux la raison officielle ou mon opinion personnelle ?

Un court instant, Itachi parut désarçonné par la réponse mais son visage reprit bientôt son air de profonde indifférence.

Les yeux de Kakashi montraient qu'il était clairement amusé par la situation.

-Les deux.

-Officiellement, vous manquez de flics assez gradés qui peuvent s'occuper d'enquêtes délicates. Officieusement, je pense que vous avez besoin de moi et si vous avez besoin de moi pour ce que je pense, alors la réponse est non, je ne veux pas travailler ici.

A ses côtés, Naruto sentit Itachi se raidir. Tant pis s'il perdait un partenaire aussi excitant, il n'était absolument pas question de retourner dans cette galère. Il avait donné pour le restant de sa vie au moins.

Si cela avait pu être possible, Naruto aurait donné son rôle à n'importe qui d'autre. Un agent comme lui, qui avait tout appris de l'un des meilleurs enquêteurs du FBI et dont le CV était plutôt impressionnant était le premier à morfler dans les coups durs. Il était aussi le premier sollicité.

Sauf que Naruto ne voulait plus de missions comme ça. Il voulait mener des enquêtes en tant que flic, il n'en pouvait plus d'inventer des histoires, des identités différentes, des enfances et des anecdotes diverses quand lui-même se posait des questions à propos de sa propre identité, de ses propres parents. Jouer la comédie ne faisait qu'accentuer cette sensation de perte et de solitude. Il avait vraiment l'impression de se noyer lentement mais sûrement.

Et tant pis s'il se retrouvait à la circulation. Au moins il n'aurait pas à regarder dans son dos jusqu'à ce qu'il meure. Il pourrait peut-être même arrêter de dormir avec son flingue sur la table de nuit.

-Quelle que soit la mission, je refuse, dit-il, et sa voix avait perdu tout amusement.

Kakashi se replongea dans Le paradis du batifolage.

-Peut-être devrais-tu écouter ce qu'Itachi a à dire avant de prendre une décision.

Le blond secoua la tête.

-J'ai promis à mon ancien coéquipier de ne pas m'engager une autre fois dans une infiltration. Je tiens mes promesses.

Le visage indifférent d'Itachi ne laissa paraître aucune émotion. Enlevant une poussière invisible de sa chemise, il prit la direction de la porte sans un mot. Naruto entendit le très léger claquement du battant et un tiraillement indéfinissable se fit ressentir au fond de son ventre.

Kakashi tourna une page.

-Cela va faire trois ans qu'Itachi poursuit cette… cible. Il a rassemblé un dossier conséquent, et planifié toute l'opération pour que l'agent infiltré soit en sécurité.

Naruto contint à peine sa rage à ses mots.

-Vous savez que ce sont des conneries ! Jamais un agent n'est en sécurité dans une mission d'infiltration. Jamais, ok ? Une infiltration implique une nouvelle identité, un nouvel environnement, pas d'amis pour ne pas les mettre en danger, des mensonges sur notre propre vie, il faut apprendre par cœur des histoires plausibles qui collent parfaitement à un étranger mais cet étranger, ce n'est pas vous ! Il faut savoir réagir à toutes les nouvelles menaces, et il y en a, qui s'imposent dans votre nouveau job. Vous ne vous rendez pas compte des efforts qu'il faut produire pour simplement rester en vie.

Sans regarder Naruto, Kakashi ferma son livre avec délicatesse avant de le poser sur un coin de bureau. Il se pencha en avant afin de fixer le blond, toujours furieux, qui se tenait devant lui.

-Naruto Namikaze, le fils de Minato Namikaze. Tu as bien grandi.

Le blond le fixa, stupéfait par la réponse à son monologue colérique.

-Je… vous connaissiez mon père ?

Kakashi haussa les épaules et observa distraitement une circulaire qui arborait un rond de couleur marron qui avait dû appartenir au fond d'une tasse de café.

-Ca ne t'intéresse pas de toute façon. Tu refuses la mission, donc je doute qu'on ait l'occasion de se recroiser.

Naruto serra les dents.

-C'est du chantage ?

Cette fois, Kakashi le regarda avec un air véritablement surpris.

-Ne jamais forcer un agent à accepter une mission. Leçon numéro trois de Minato.

-Quelle est la leçon numéro un ?

Les yeux de l'aîné brillèrent d'amusement contenu.

-Toujours écouter en détail le compte-rendu de la situation avant de prendre une décision.

Les épaules du blond s'affaissèrent. Kakashi était sournois. Intelligent, mais sournois.

-Où est Itachi ? demanda finalement Naruto après une bonne minute de silence.

- - -

Naruto trouva Itachi sur le toit de l'immeuble qui abritait les forces de police de New York. Le regard du brun semblait perdu dans le vide, observant sans la voir la ville gigantesque. Une tasse de café au logo vert familier était posée à ses côtés, sur la rambarde faisant le tour du toit.

Le blond se demanda soudainement si le septième district avait déjà eu des cas de suicides.

-Hey, fit-il en s'installant à gauche d'Itachi.

Le brun lui jeta un regard en coin avant de revenir à sa contemplation de New York. Naruto fixa un moment un taxi, suivant le point jaune jusqu'à ce qu'il disparaisse dans une autre artère.

-Qu'importe ce que Kakashi t'a dit, ce n'est pas la peine, déclara Itachi d'une voix monotone. Je ne peux pas me permettre d'envoyer quelqu'un qui doute.

La colère que Naruto avait ressentie plus tôt sembla revenir avec tout autant de force. Qu'est-ce qu'ils avaient tous, à lui faire des compliments pour ensuite le provoquer ? Quelques années auparavant, Naruto aurait cédé à ce genre de tentations, acceptant la mission sans même y réfléchir avant.

Comme l'avait dit Kakashi, Naruto avait grandi.

-J'ai dit à Kakashi que j'écouterai ce que tu as à me dire.

Les doigts fins agrippèrent la tasse de café et Itachi hocha la tête avant de boire une gorgée. Naruto ne se gêna pas pour l'observer, la courbure de son cou, ses cheveux très bruns et les yeux distants et indifférents même si le blond était persuadé qu'à l'instant-même le cerveau de son futur coéquipier était en train d'analyser toute la portée de sa propre réponse.

-La mission consiste à intégrer Hebi, l'organisation de…

-Sasuke Uchiwa, compléta Naruto dans un souffle.

Comme tout flic de cette ville, Naruto avait entendu parler de Sasuke Uchiwa. On murmurait que ce-dernier possédait tout New York et le blond devait bien admettre que c'était la stricte vérité. Vous arrêtiez un dealer ? Si vous aviez la chance de remonter la piste, vous trouviez Sasuke Uchiwa tout en haut de la pyramide. Des caissons d'armes avaient été retrouvés ? Idem. Sasuke Uchiwa. Un homme politique important était surpris dans la chambre d'une prostituée de luxe ? Vous pouviez être sûr qu'elle travaillait pour Hebi et que l'homme en question gênait le patron de l'organisation.

Le seul problème était que les preuves et les témoins disparaissaient sans que n'importe quel policier, aussi puissant et incorruptible soit-il, puisse rien y faire. Sasuke Uchiwa était intouchable. Impliqué dans le trafic de drogue, la prostitution, la vente d'armes à feu, les milieux financiers, personne ne savait rien sur lui. Toutes les informations disponibles à ce jour n'étaient que des rumeurs, des légendes susurrées d'un flic à un autre. Et il fallait ajouter à cela tout le système politique et judiciaire corrompu par Hebi. Sasuke Uchiwa avait la main sur le plus intègre des politiciens. Ou juges.

Itachi fixait à présent Naruto, étudiant sa réaction. Il eut le plaisir de constater que ce n'était pas la peur qui s'était peinte sur le visage du blond mais plutôt un mélange d'impuissance et de colère. Les doigts de Naruto s'étaient crispés sur la rambarde. Les dents serrées, le regard furieux, le blond arborait à présent un air déterminé qui plut à Itachi.

La réputation de Naruto n'était peut-être pas si surfaite, finalement. En allumant une cigarette, Itachi décida qu'il était temps de se faire sa propre idée sur son futur partenaire.

-L'objectif de l'agent infiltré serait de se rapprocher le plus possible de Sasuke. Plusieurs missions ont déjà été mises en place mais aucune n'a abouti car les agents envoyés n'ont jamais réussi à entrer dans le cercle privé de Sasuke. Ca ne sert à rien d'avoir un agent qui décharge des caissons d'armes à partir du moment où on ne peut pas les relier à Hebi.

Naruto hocha la tête. Il savait mieux que personne qu'Itachi avait raison. S'il fallait infiltrer une organisation comme Hebi, un agent ne pouvait se contenter d'être un sous-fifre. Cela ne servait strictement à rien.

-Il faudrait parvenir à gagner sa confiance, commença le blond en réfléchissant à haute voix. Un homme pour se charger de planifier les opérations, peut-être ? Quelqu'un qui s'occupe de ses comptes en banque ? Ou un homme qui le met en relation avec des clients potentiels… quoique non, ce n'est pas possible. Ca demande une préparation bien trop importante, avec peu de chances de réussite au final.

Itachi recracha la fumée de sa cigarette en secouant la tête.

-Sasuke a déjà des personnes à ces postes et il ne les remplacera certainement pas par un inconnu. Il est bien trop prudent et calculateur. Les gens autour de lui sont des amis, si tant est qu'on puisse parler d'amis lorsqu'il s'agit de Sasuke.

Naruto faillit interrompre Itachi pour lui demander d'expliciter ses propos obscurs, puis se ravisa. Il n'avait pas l'intention d'accepter cette mission donc ce n'était pas la peine de rentrer dans les détails. Mais quand même, c'était une réflexion plutôt bizarre venant d'un flic qui se devait de penser rationnellement, sans sentiments. C'était aussi étrange que cette façon qu'Itachi avait d'appeler Sasuke Uchiwa juste « Sasuke ». Lorsque Naruto en avait parlé avec d'autres policiers, il avait toujours été question de « cet enfoiré d'Uchiwa », « Uchiwa » ou encore « le boss d'Hebi ». Pas de Sasuke.

-En supposant que l'agent arrive à avoir une position proche de Sasuke, poursuivit Itachi sans remarquer le débat intérieur de Naruto, il faut qu'il arrive à rassembler des preuves sur ses activités sans trahir sa couverture. Il n'est pas question de dates d'opérations mais vraiment de charges contre Sasuke. Je veux des photos ou des enregistrements de lui avec d'autres gros bonnets, des preuves de son implication dans un meurtre, des perquisitions pour trouver de la drogue ou des armes, pas comme toutes ces fois où le tuyau était sensé être bon mais où on a rien trouvé chez lui.

-J'ai compris, acquiesça le blond qui commençait à entrevoir l'objectif. Pas de captures d'hommes de main, tu veux Uchiwa sur un plateau, avec le plus de charges possibles.

Itachi se tendit à la mention du nom mais hocha la tête distraitement tout en écrasant sa cigarette sous son pied. Le geste était un peu trop ferme pour être contrôlé, cependant.

-Je suppose que tu as entendu parler des fiascos précédents à propos de Sasuke, reprit Itachi. A chaque fois qu'on a essayé de l'avoir, miraculeusement il n'y avait plus de témoins, plus de preuves. L'avocate de Sasuke a même failli gagner le procès qu'il avait intenté contre la police.

Naruto se souvenait vaguement de cette histoire. Plusieurs policiers, déterminés à faire tomber Uchiwa, avaient lancé un raid dans la maison occupée par le patron d'Hebi. Ils avaient réussi à obtenir un mandat de l'un des rares juges pas encore effrayé par le patron d'Hebi et avaient mis sur pied une opération, pensant trouver des preuves suffisantes pour le faire plonger pour meurtre et malversations financières.

Une fois sur place, les agents de la police n'avaient absolument rien trouvé. Pas même une simple facture impayée. Comme tout bon truand, les comptes de Sasuke Uchiwa étaient trop propres pour être honnêtes. Quelqu'un avait vraisemblablement averti le boss d'Hebi avant l'opération, pourtant connue d'une poignée de flics et organisée en secret. Toutefois, même si un espion était une explication plausible, Naruto avait toujours pensé que la perquisition dans la maison du boss était une erreur. Toute personne ayant des choses à cacher gardait une façade respectable : Naruto doutait fortement de la présence de preuves dans la villa même d'Uchiwa. Non, si on voulait couler l'organisation, il fallait trouver le lieu où le patron cachait tous ses secrets. Il ne pouvait pas faire chanter autant de monde sans avoir des arguments convaincants en poche et qui disait arguments disait preuves.

Les policiers avaient donc subi une humiliation sans précédent après cet échec cuisant, traînés dans la boue par leurs collègues en général et Uchiwa en particulier qui s'en était donné à cœur joie. L'affaire avait trouvé son point d'orgue lorsque le juge qui avait délivré le mandat déclara qu'il n'avait jamais signé un tel papier pour cette opération. Le patron d'Hebi avait alors lâché son avocate la plus redoutable, Sakura Haruno. Naruto se rappelait avoir vu sa photo sur le Net : il avait admiré le physique agréable de la jeune femme avant de lire la légende du cliché qui la désignait comme étant l'avocate attitrée du patron d'Hebi. Soudainement, elle ne lui était plus apparue comme aussi désirable.

Après des mois de procédures juridiques, de mises à pied pour les policiers de l'opération, l'affaire se tassa suite à un étrange rebondissement : Sasuke Uchiwa avait demandé à son avocate de cesser les poursuites contre les agents. De nombreuses rumeurs avaient alors vu le jour, toutes plus invraisemblables les unes que les autres. Pourquoi le plus grand truand de tous les Etats-Unis avait-il laissé tranquilles des policiers alors que leurs sorts étaient entre ses mains ? Tout le monde savait qu'Uchiwa contrôlait la police, alors pourquoi ? Pendant quelques mois, tous les policiers de New York s'étaient interrogés sur cette fin en queue de poisson, c'était devenu l'enquête la plus excitante de leur carrière, chacun pensait avoir trouvé l'explication avec un grand E. Naruto se souvenait que Kiba avait participé aux théories, paris et débuts d'analyses avec d'autres collègues. De son côté, le blond n'avait rien dit : il était trop en colère contre le système pour prendre part à de telles stupidités. Il avait juste espéré que les agents de l'opération s'en étaient sortis sans trop de casse.

Quelque part, il en doutait.

-Je ne savais pas que tu faisais partie de l'opération, dit-il doucement.

A côté de lui, le brun haussa les épaules, les yeux dans le vague. C'était visiblement une période assez sombre de sa carrière et Naruto ne pouvait que le comprendre. Voilà pourquoi il voulait bien parler de cette nouvelle mission avec Itachi mais ce serait tout ce qu'il ferait : en parler. Il n'était pas question qu'il se lance dans une opération aussi délicate et périlleuse. Plus jamais.

-J'ai déjà prévu les contacts, les points de rapports et le passé de l'agent. La nouvelle identité sera créée selon ses critères, c'est lui qui décidera des éléments pour son personnage. Je sais où il peut rencontrer Sasuke pour une première prise de contact.

Naruto eut l'impression qu'Itachi lui tendait une perche longue d'au moins cinq mètres de long. Il n'était cependant pas prêt à l'attraper.

-Pour quels motifs tu veux le faire tomber ?

Si Itachi nota le subtil changement de sujet, il n'en dit rien.

-Drogue, armes à feu, meurtre, prostitution, même fraude à l'impôt, je m'en moque.

Naruto lui adressa un grand sourire à l'allusion. Sasuke Uchiwa, le nouvel Al Capone ? Pourquoi pas. Le titre lui allait plutôt bien, il fallait l'admettre.

-En gros, c'est à l'agent infiltré de trouver ? reprit plus sérieusement le blond. Désolé, mais ça me paraît mal ficelé comme opération. Tu ne peux pas lâcher un de tes hommes dans la nature comme ça, avec pour mission de trouver quelque chose. J'ai pas l'impression d'en avoir appris beaucoup sur Uchiwa, là.

Lorsqu'il se tourna vers Itachi, Naruto eut l'impression qu'il venait d'échapper de peu à la mort. Le brun tremblait imperceptiblement, son gobelet de café broyé entre ses doigts, le regard meurtrier. Le pire dans tout ça était qu'il fixait Naruto comme s'il était une tache sur sa chemise impeccable.

-Sasuke Uchiwa. Vingt-sept ans. Son garde du corps s'appelle Juugo, ils se sont rencontrés au lycée. Il déteste les sucreries et a un goût prononcé pour tout ce qui est amer. Il a tué à ce jour quatorze personnes et fait tuer au moins le double. Son film préféré est Il était une fois dans l'ouest, car la scène de tuerie au début du film lui rappelle sa propre histoire familiale. En dehors de Juugo, il est proche d'un homme appelé Suigetsu et de son avocate, Sakura, qui a toujours été amoureuse de lui. Ils ont essayé un moment mais cela n'a pas marché. Elle l'aime toujours et se ferait tuer pour lui. Sa chambre est dans les tons bleus foncés et contient peu de mobilier parce qu'il a besoin de très peu de choses pour vivre et qu'en plus il change souvent de maison. Il déteste la télévision mais il suit l'actualité avec attention. Il ne se trompe jamais dans ses placements. Lorsqu'il se met en colère, il n'élève jamais la voix et il est capable de tuer la personne en face de lui sans ciller. Ses associés sont…

Naruto était resté bouche bée devant cet étalage de connaissances. Itachi avait récité tout cela d'une voix monocorde, presque indifférente, pourtant les informations divulguées montraient à quel point il s'était renseigné sur la cible. Le fait que certaines données étaient même inutiles à l'enquête prouvait qu'Itachi avait vraiment étudié le cas de Sasuke Uchiwa. Ca frisait l'obsession, nota mentalement le blond.

-D'accord, d'accord, coupa vivement Naruto. Je m'excuse d'avoir sous-entendu que tu ne connaissais pas bien ton sujet.

-On va peut-être enfin pouvoir passer aux choses sérieuses alors, grinça Itachi.

Le regard de Naruto se reporta sur la rue en contrebas. Ca n'allait pas être facile de dire non à Itachi. Il aurait aimé l'aider, vraiment, mais là c'était impossible. C'est vrai que cette mission avait l'air d'être importante pour le brun mais Naruto ne pouvait plus retourner dans cet enfer.

-Pourquoi moi ? Pourquoi pas la DEA ? Ou l'ATF ? Ou… ou même le FBI !

-Pourquoi pas le SWAT, tant qu'on y est ? rétorqua sèchement Itachi.

Naruto soupira et le brun sembla se calmer. Il reposa son gobelet de café écrasé sur la rambarde.

-C'est moi qui connais le mieux le dossier. Je travaille depuis trois ans sur Hebi, je connais toutes les ramifications, tous les prétendus amis de Sasuke, ses ambitions, tout. La DEA et l'ATF ont tenté des opérations, aucune n'a fonctionné. Quant au FBI… aux yeux de la loi, Sasuke n'a rien fait et n'a donc pas violé les lois d'un autre état.

-Et puis on sait tous que le FBI n'intervient que pour récolter les honneurs à la fin de toute façon, marmonna Naruto en acquiesçant.

Il soupira de nouveau et dévisagea Itachi. Derrière ce masque d'indifférence, il voyait une faible lueur d'espoir. Il savait qu'il avait passé le test du brun haut la main.

Il secoua la tête. Il ne pouvait pas.

-J'aurais aimé t'aider, vraiment, commença-t-il, mais…

Le visage du brun se ferma. Il attrapa son gobelet en piteux état et se dirigea vers la porte qui menait aux étages inférieurs.

-Laisse tomber. Comme je l'ai dit, je ne peux pas envoyer quelqu'un qui n'est pas motivé.

-Tu crois que c'est facile, hein ? cria Naruto en voyant Itachi lui tourner le dos. Vous vous imaginez tous que c'est tellement simple de gagner la confiance de quelqu'un, de l'amener à vous parler et puis ensuite de le trahir ! Ce n'est pas toi qui aura besoin d'une protection à vie après ça !

Itachi s'était arrêté dès que Naruto l'avait interpelé. Lentement, il se retourna, la tristesse se peignant finalement sur son visage, première émotion que le blond découvrait enfin.

-Je suis conscient des risques que tu prendrais, Naruto. Crois-moi, je le sais.

-Alors pourquoi est-ce que tu n'y vas pas, toi, puisque tu es si malin ! hurla Naruto.

Il avait conscience d'agir comme un gamin stupide mais il n'arrivait pas à contrôler sa colère. Il en avait marre d'être celui sur lequel on pouvait compter, celui qui prenait les risques. S'il menait cette mission à son terme, d'accord, il en récolterait de la fierté, il serait content d'avoir contribué à redorer l'image défraîchie de la justice américaine. Il savait que ses supérieurs le féliciteraient, que pendant quelques semaines, quelques mois peut-être, il serait un héros au sein de la police mais il savait aussi qu'après un certain temps, il se retrouverait tout seul, la tension retomberait, on oublierait son exploit.

Et ce serait à ce moment-là que les ennuis lui tomberaient dessus. On ne s'attaquait pas au boss de New York sans en subir les conséquences. A quoi bon avoir sa photo accrochée dans le hall du commissariat s'il n'était pas là pour profiter de son heure de gloire ? Naruto avait toujours détesté l'hypocrisie du concept des médailles posthumes.

-Je ne peux pas, répondit faiblement Itachi.

Pour la première fois depuis leur rencontre, il refusa de croiser le regard de Naruto. Dans sa poche, ses doigts se refermèrent sur son paquet de cigarettes, tripotant nerveusement le plastique qui l'entourait.

-Pourquoi ? croassa difficilement le blond, notant inconsciemment que l'atmosphère venait de changer radicalement.

Le brun releva finalement la tête et le fixa, un air de défi dans ses yeux noirs masquant ses véritables sentiments à propos de toute cette affaire.

-Je m'appelle Itachi Uchiwa. Sasuke est mon petit frère.

(à suivre)

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Notes :

DEA : Drug Enforcement Administration. Service de police américain qui lutte contre les trafics de drogue.

ATF : Bureau of Alcohol, Tobacco, Firearms and Explosives. Autre service de police américain qui s'occupe entre autres des exportations/importations illégales d'armes à feu.

SWAT : Special Weapons And Tactics. (je pense que c'est l'équivalent américain du GIPN français, si vous voulez…) Section d'assaut qui s'occupe des prises d'otages, des détournements d'avions, des braquages de banques, ce genre de choses. Ils opèrent dans l'urgence, c'est-à-dire dans une situation ponctuelle bien précise, voilà pourquoi Itachi se moque en proposant d'intégrer le SWAT à l'enquête : ce n'est pas du tout le rôle de cette section.

Pour ce qui est du reste, je suppose que tout le monde connait le FBI…

Dans le prochain chapitre : Sasuke fait son apparition, on en apprend un peu plus sur Itachi et Naruto prend finalement une décision.

Je m'excuse si ce premier chapitre est un peu barbant, ça risque de continuer encore un peu sur les prochains mais j'ai besoin de tout mettre en place avant d'attaquer les choses sérieuses.

Je sais ce que vous pensez : encore un AU pas original pour un sou, Naruto va infiltrer Hebi, coucher avec Sasuke et donc trahir Itachi. Mais en fait c'était une ruse et Sasuke n'était pas méchant du tout et tout le monde est content.

Faux. Il va y avoir des morts, du sang, de la drogue, des trahisons et encore des meurtres. Croyez-moi, je vais tout faire pour éviter les clichés, donc vous seriez adorables si vous donniez une chance à cette fiction… Please ? Un petit mot ?