Bonjour tout le monde ! Non non, je n'ai pas abandonné cette fic, loin de là... Je suis juste passée du lycée à l'université. Ce n'est pas le manque de temps qui m'a empêché d'écrire puisque ça doit bien faire trois ou quatre mois que ce chapitre est au bord de la finition... A vrai dire c'est plus l'ambiance même de l'université '^^, ne rien faire... Bref, maintenant il est fini, malheureusement sans correction de ma bêta qui a disparu dans la nature... Cat si tu vois ça, s'il-te-plaît, laisse-moi un petit mot, juste pour me dire que ça va !

Sinon que dire ?... Encore un chapitre en co-écriture pour une bonne partie puisque Mynd nous quitte (enfin XD) dans ce chapitre ! Je remercie donc également Clo qui a fait apparaître son auguste, malfaisant, sadique et tout ce que vous vous voulez, personnage dans ma fic...

J'en profite par la même occasion pour vous dire que certains passages seront classés rating M pour violence, torture... Je ne suis absolument pas pour ce genre de pratiques, bien entendu, et elles n'interviennent que parce que la façon d'être et de faire des démons, comme leur nom l'indique, n'est pas toute jolie, toute rose et bisounours... Loin de là.

De même, si Bella accepte ce genre de pratiques, cela la pétrifie de voir avec quel nonchalance Mynd peut faire du mal à un homme de façon aussi vicieuse... Simplement elle ne voit pas d'autres moyens de tirer des renseignements du vampire, jusqu'à ce qu'elle trouve son point faible...

Et voilà un petit mot de Clo ! :

A vous les studios, Thérie Chérie...? Non, j'espère pas. mais passons. Ce chapitre, en effet, verra partir Mynd. Et c'est bien dommage parce qu'il va falloir que je trouve une autre manière de pervertir... eeuh, d'INSPIRER l'auteur de cette fanfic... Mais n'ayez crainte, joyeux compagnons, j'y arriverais.

Bref, où en étais-je...? Ah oui. Ce chapitre a pris du temps. Je plaide en partie coupable. Parce que la première fin était pourrie. La seconde, moyenne. La troisième, celle que vous allez lire, est bonne. Je plaide en partie coupable. Parce que je n'ai pas assez fouetté/menacé, tout ce que vous voulez, Thériel, pour la motiver et la forcer à travailler. Aah, l'ambiance fac...

Ensuite, comme d'habitude, tout ce qui vous apparaitra cru, violent, sadique, c'est de moi... Et j'espère bien que ça continuera. Fini, les histoires à l'eau de rose ! DU SANG, DE LA TRIPAILLE, DES LARMES, DES MORTS, DES FLAAAAMMMMMMEEEEEEEEEEES ! HA ! HA ! HA ! HA !

... Pardon. Mais oui, ici, vous verrez du sang, des larmes, des morts, des flammes. Pas de tripaille, malheureusement, je n'ai pas pu convaincre Thériel d'aller jusque là. Mais il y a de la torture. ça, j'ai pu la convaincre... 'fin, c'est moi qui m'en suis chargé, en vérité. Si je la laissais faire, ç'aurait été de la torture sans art. (Mynd, à mes côtés, approuve avec un hochement de tête)

De la torture sans goût, sans douleur. Mais l'intérêt de la torture, c'est la souffrance. (Mynd approuve encore et prépare divers instruments que vous n'imagineriez même pas... Je commence à flipper). Et puis Mynd a été trèèèès gentil avec Bella. Beaucoup trop. Mais si je le laissais faire, elle se serait retrouvée crucifiée à l'envers dans une église, Eden serait morte, les Cullen avec...

Le monde serait entré dans une nouvelle apocalypse... Heureusement que j'arrive un peu à le tenir en laisse, celui là. (Mynd hausse un sourcil et marmonne une grivoiserie)

Brefons... les démons ne sont pas gentils. Les démons sont cruels. Sadiques. Font mal par pur plaisir, et Mynd plus que tout autre. Les démons peuvent être sexy, mais les démons, c'est pas COOL DU TOUT ! Même si moi j'aime bien. Mais je suis connue pour mes goûts de déviante (Mynd ricane et approuve une fois encore. Je regarde par dessus mon épaule et vois... eeuh... ... J'ai peur.)

Le mal, quand on le fait à un trop haut degré, devient une habitude. Et ça, c'est pas bien les enfants. ne faites pas ça chez vous. Etre torturé, ça fait mal. Sauf quand on est un démon et qu'on est masochiste.

... Je ne le suis pas, nuance. Moi, je suis sadique.

... Pour ça que je vais continuer de martyriser Thérie Chérie pour qu'elle écrive. Et essayer encore de corrompre cette fanfic.

Pour vous offrir tout plein de douleur, de larme, de la peur, de la mort, des trucs glauques et pas joli-joli. Voyez comme je suis gentille et aimable, et serviable, et attentionnée !

... Oh, encore une chose...

Enjoy :)

(Je regarde une fois encore par dessus mon épaule, et déglutis. Malepeste. SI jamais... je... enfin... Je... Je tenais à dire que... que... [la suite se perd])

Réponses aux reviews !

helimoen : Un peu plus de Cullen pour ce chapitre, sans tomber dans l'excès ! XD J'espère que tu lis toujours ma fic malgré le temps de publication ! ^^ Bonne lecture !

clo : Bon, tu vois que cette fois j'ai un peu moins censuré Mynd... J'aurais peut-être du mais bon... Je crois que j'ai fait de mon mieux pour rendre tes passages de tortures un peu moins... sanglants ? flippants ?... Bref, les rendre accessibles à mes lectrices ! XD A part ça... Mynd quitte l'aventure ! Yeeeah ! A quand le prochain personnage qui s'invite au pays des vampires ? :p

cathyouchka : Si si ! Il est aussi horrible qu'il en a l'air ! (A) Et si tout d'un coup, et là pareil parce que je saurais pas du tout où couper sinon Tu me fais un petit coucou pour me dire que tout va bien ?... Bizoux bizoux...

x8-twilight-8x : Non pas très vite du coup ! '^^ Bonne lecture...

mimicam : Ok, je dis à Clo que son Mynd est mignon ! XD Et félicitations pour ton bac très très en retard !

Sabrina : Alors euuuh... Oui bien sûr que c'est moi qui invente l'histoire même si Clo vient parfois y mettre de sa graine surtout concernant ses personnages... ^^ Et merci pour le compliment ! Désolée de t'avoir fait attendre si longtemps mais tu vois, ça finit par arriver ! ^^ Bonne lectuuure !

Eleanora : Moi ? Poster régulièrement ?... Hihi la bonne blague ! XD Et puis non, pas envie de couper mes chapitres, il faudrait trouver encore plus de titres Et puis ça casserait la suite logique du chapitre... Non c'est pas pour tout de suite que je serais régulière XD En tout cas, merci pour ta review ! Et dis-moi quand tu rentres, je m'occupe aussi de la Bimbo de Lili ça fait beaucoup ! :p Bonne lecture !

edgounette :Merci ! ^^

aussidagility : Bouh ! XD Si tu voulais une réponse au moment de ta review, il faudrait que tu t'inscrives pour que je puisse te répondre ^^ Donc voilà le chapitre ! Bonne lecture !

kccb : Euh... Voui vais essayer de faire ça ! ^^

wesker101 : Je suis contente que ça te plaise ! ^^ Bonne lecture !

Spies85 : Ouuups... Pas si vite que ça, c'est pas mon genre ! ^^ Bonne lecture quand même !

Résumé :

Mfff... Même moi j'ai du mal à me souvenir de ce qui s'est passé avant alors vous... -'
Bella trouve une petite fille attaquée par un ours, au milieu de la forêt. Elle lui sauve la vie, et rencontre Carlisle par la même occasion.
Bref...
Alors... Grâce à un de ses pouvoirs, Bella a fait venir d'un monde parallèle Mynd, le roi des démons. De façon tout à fait involontaire... Celui-ci veut repartir mais elle ne sait pas comment s'y prendre, alors il est forcé de l'accompagner partout où elle va...
Elle décide d'adopter la petite Eden en apprenant qu'elle est orpheline. L'orphelinat où elle vit se trouvant être un garde-manger de vampires, elle décide d'aller y faire un petit tour pour le grand ménage...

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Chapitre 22 : Pseudomonarchia daemonum

Mon cœur battait violemment alors que les démons se ruaient sur le bâtiment déjà enflammé. Les idiots ! N'avais-je pas précisé que les enfants devaient à tout prix être sortis de l'édifice avant que la bataille ne commence ?

Furieuse, ignorant le vent qui continuait à souffler avec rage, je marchai vers Mynd, un air amusé collé à son visage divin. Il aimait ça. Ça l'amusait. Il avait envie de participer à la bataille. Mais qu'il y aille s'il en mourrait tant d'envie ! Et qu'il y meure même s'il le voulait !

- Qu'est-ce que tu as fait ? lui hurlai-je sans qu'aucune faiblesse ne paraisse dans ma voix. Et les enfants ? Ne t'avais-je pas dit de les protéger ? Leur envoyer une horde de démons assoiffés de sang est pour toi la meilleure façon de les maintenir vivants ?

Il me jeta un regard à faire froid dans le dos.

- J'ai chargé quelques-uns de mes hommes de les sortir par derrière. Les plus humains, précisa-t-il alors que je me figurais une bande de gamins terrifiés par un monstre à trois têtes, griffu, ventru avec une gueule pleine de crocs acérés. Es-tu prête à me ramener ?

Je lui jetai un regard aux yeux exorbités :

- Toi peut-être mais certainement pas toute ton armée… Mais comment peux-tu faire venir autant de démons ici et être incapable de te renvoyer toi-même dans ton monde ? Il n'y a rien de logique là-dedans.

- Je ne te demande pas d'y trouver quelconque logique, car tu es incapable de nous comprendre. Je suis le roi. C'est ainsi. Le sang régalien qui coule dans mes veines me permet d'invoquer mon peuple. En quantité limitée, bien sûr. C'est Eileiss'Tan'Qa, l'un de mes Ghaerniths – seigneur de guerre, si tu préfères – qui a inventé ce sort.

Voyant mon air, il rajouta, après une pause.

- Le premier homme qui m'a parlé. Il s'est renommé lui-même ainsi. Un véritable fanatique.

- Désolée de ne pas parler ta langue couramment, rétorquai-je.

- Eileiss'Tan'Qa, le servant du Givre-né, murmura quelqu'un à côté de moi, du venin dans la voix. Je vous prierai de ne point parler sur ce ton à mon seigneur et maître. Il vaut bien plus que tous les êtres de votre espèce.

A côté, il cracha.

- Des vampires ! Ha ! Des démons déchus, oui ! Je me demande pourquoi vous infestez chaque recoin de nos mondes, buveurs de sang. Vous êtes une honte pour notre glorieuse race !

- Retiens ta langue, Ghaernith Ôuu, ou je te la gèle. Il paraît que cette demoiselle est leur reine.

- Ssecketh Aquiaz, siffla le seigneur de guerre en me regardant avec fiel.

- Naka'Tan Varastoth, murmura son roi d'un ton polaire.

- Dizkalte, marmonna Eileiss'Tan'Qa tout en continuant de me fixer d'un air mauvais.

Je fronçai les sourcils, agacée de ne rien comprendre.

- Qu'est-ce que vous dites ? demandai-je alors que je mourrais d'envie de me défouler sur son crétin de serviteur.

- Rien qui ne te concerne Ahlravja.

Je sentis mon sang bouillir dans mes veines mais je me contins.

- Très bien... Je vais aller voir ce qu'il se passe un peu là-dedans...

- Je t'accompagne, Ssecketh Ahlravja, je tiens à te garder vivante. Morte tu ne me seras plus d'aucune utilité.

Haussant les épaules, je continuai mon chemin vers la porte battante de l'orphelinat.

- Je vous supplie de me laisser m'en charger, Seigneur. Je... Je veillerais sur cette cat... dame.

Mynd eut une réaction qui ne m'étonna que moyennement :

- Je pense, Ghaernith Ôuu, que je peux me charger seul de cette... broutille. Ou bien ne me crois-tu pas capable de protéger une simple femme...? Ton devoir, Eileiss'Tan Qa, est, pendant mon absence, de retenir la passion qui anime notre peuple. Que fais-tu là ?"

Le seigneur de guerre pâlit, ouvrit la bouche, la referma. Hey ! C'était moi ou il était au bord des larmes ?

- Di... Dizkalte, Suzerain du Blizzard. Je... Je... Dizkal. Mais... mais vous... Je. Il faut que je vous dise quelque chose. Après la bataille... C'est que... Je... Dizkalte. Je vais faire mon devoir.

Eileiss'Tan Qa releva le menton, déglutit, s'inclina profondément devant son roi qui le toisait de toute sa taille, avant de partir, hurlant des ordres aux démons.

Sentant l'imposant seigneur sur mes pas, je pénétrai la bâtisse prise d'assaut par les démons. Les flammes commençaient déjà à lécher les murs lambrissés et les rideaux. La toile brûlée dégageait une violente fumée âcre qui prenait à la gorge et piquait les yeux dès la première inhalation.

Mynd était encore plus fermé que d'habitude... J'ignorai que c'était possible jusque-là…

- Que cherches-tu ?

- Une bonne prise de vue pour commencer. Et ensuite un vampire pas trop amoché et suffisamment terrifié à… questionner. Tu me prêterais un de tes hommes euh… démon ? Pas trop humain de préférence.

J'eus un sourire carnassier. J'avais envie de venger Elizabeth et tous ces enfants… Et je n'allais pas m'en priver.

- ... Il s'agit de ton peuple. Pas du mien. Interroge le toi-même, terrifie-le toi-même. Je ne fais que t'accompagner. De plus, mon peuple est déjà occupé à massacrer tes renégats.

- Ça m'aurait étonné que tu dises oui aussi, marmonnai-je dans ma barbe.

Sans un mot de plus, je plongeai profondément en moi pour retrouver le lien qui me rattachait à Elizabeth. Et elle vit à travers mes yeux. Le massacre qui s'y déroulait. Les enfants qui pleuraient à l'extérieur, soulagés de ne plus être aux mains de ces monstres. L'orphelinat de l'enfer qui disparaissaient, assailli de toute part par des créatures inimaginables mais pourtant bien réelles. La fin d'une époque. Le début d'une nouvelle ère.

Je la sentis sourire, heureuse. Et je repris pieds avec la réalité alors qu'un vampire se jetait sur nous. Simultanément, Mynd et moi attaquâmes…

Nous réagîmes sans nous consulter du regard. Moi, plongeant la main pour saisir le vampire au cœur et l'arrêter en plein vol, le Seigneur-Roi démoniaque le décapitant d'un revers souple du poignet, ses doigts longs et fins enroulés autour de la Claymore du Saigneur. Le vampire n'eut pas la moindre chance. Que l'un de nous deux l'eût raté, et l'autre rattrapait le geste. Mais aucun de nous deux ne rata sa cible.

La tête vola, le corps s'effondra, et, même si les vampires avaient une incroyable capacité de régénération, je savais qu'il était mort. Avec un frisson désagréable, je compris que l'arme de mon démon de roi avait... bu l'âme du vampire. Jamais ce dernier ne se relèverait. Je jetai mine de rien un coup d'œil à Ara'Akhtah. Elle me sembla plus... brillante. Et plus avide de sang.

Un frisson me parcourut l'échine lorsque je croisai le regard de celui qui la maniait avec tant d'adresse. Sauvage. Délectable. Aussi avide de faire couler le sang que son arme guerrière…

Ensemble, nous entamâmes une danse funeste alors que les vampires ne semblaient plus vouloir attaquer que nous. Sa lame valsait autour de notre duo infernal, créant des brèches dans la peau de marbre des vampires, faisant sauter leur tête avec délectation.

La Claymore du Saigneur brillait, victorieuse. Moi je me contentais de mon corps pour les abattre les uns après les autres. Mais je n'étais pas moins redoutable que mon compagnon d'un jour… Mes dents, redoutables crocs immuables, tranchaient net le marbre qui s'offrait à moi. Je combattais en silence, concentrée, mes sens décuplés par l'adrénaline déferlant dans mes veines.

Cependant s'adapter aux rythmes, rapide et furtif des vampires et celui, plus lent mais empreint de puissance du Seigneur-Roi demandait une concentration extrême et nécessitait de s'adapter en moins d'une seconde au temps de celui qui combattait avec moi ou à celui qui cherchait ma mort.

J'y arrivais. J'avais été conçue pour ça. Me battre et faire régner l'ordre. M'ajuster à mes ennemis et à mes alliés. C'était assez exultant de sentir cette force pulser dans ses veines… Le combat contre les deux autres vampiresses de mon cœur était tellement… fade à côté de cela.

Le temps n'était pas le seul obstacle cependant. Je devais également éviter les attaques des vampires dotés de pouvoirs et les assimiler de grès ou de force tout en combattant. Et ce genre de vampires était incroyablement nombreux. Je me faisais violence pour encaisser le choc et ne pas me faire expulser à l'autre bout de la pièce à chaque effleurement de peau. Elizabeth m'aidait dans cette entreprise, faisant pour moi la moitié du travail interne, détournant les pouvoirs reçus dès leur réception, m'empêchant ainsi de me déconcentrer.

Mais combien de vampires y avait-il dont ? Il en venait de partout, tout le temps… Et pourtant les démons faisaient leur part de travail… Il y avait quelque chose de louche là-dessous, à n'en pas douter.

De temps à autre, un pouvoir échappait à l'emprise d'Elizabeth et rejaillissait sur moi ou sur les attaquants, provoquant irrémédiablement un effet de surprise chez mes assaillants. Mynd lui restait stoïque, comme s'il avait compris ce qu'il se passait en moi. Même quand les vampires n'arrivaient plus à s'approcher de lui comme repoussés par un champ magnétique. Même quand sa vitesse fut doublée. Et même quand il se dédoubla… Plusieurs fois. Voir dix Mynd en pleine action était une vision assez troublante… Comme les soixante-dix vierges du Paradis mais d'un point de vue plus féminin…

Il était très doué pour utiliser à son avantage le terrain et toutes les armes qu'on lui offrait. Et ma foi… Il avait plutôt l'air de s'amuser. Les vampires de la Terre ont l'air d'être plus rapides et plus féroces que ceux d'He'lltyl… Le défi devait être plaisant pour un être comme lui. Surtout qu'il ne semblait pas vouloir user de sa magie.

Une vampire blonde s'approchant de moi, je lui lançai un vicieux coup de pied, l'empalant directement sur l'épée de Mynd qui en profita pour offrir son cou à mes dents destructrices. Une vampire en moins, une !

Relâchant déjà notre prise, nous reprîmes notre ballet dévastateur. Un d'entre eux attira cependant mon attention. Il semblait plus vieux et plus expérimenté que les autres et avait déjà fait quelques victimes parmi les démons. Ce qui n'était pas forcément chose facile, avouons-le. Face à un humain il était facile de trouver les points les plus sensibles… Mais avec un être munis de tentacules, de griffes et rond comme un ballon, c'était un peu plus compliqué…

J'en conclus donc aisément qu'il était celui qui menait la danse ici. Le chef. Donc celui qu'il me fallait, de toute évidence… Il ne semblait pas vouloir s'approcher cependant. Plutôt vouloir fuir à vrai dire.

Lâche. Abandonner ainsi tout ces jeunes vampires… Il allait en baver.

Légère comme une plume, je me projetai en l'air, me rattrapant à la poutre encore intacte au-dessus de moi, avant de me jeter de toutes mes forces sur le beau vampire aux cheveux poudre et sel.

Nous roulâmes par terre entre les corps étêtés de ses compagnons. J'eus du mal à prendre le dessus, gênée dans mes mouvements par le manque de place au sol. J'avais l'impression désagréable de me trouver dans une position similaire à celle quelques heures auparavant… La différence étant les mains refermées sur mon cou qui essayaient de m'arracher la tête. Bonne chance vieux… je suis plus difficile à avoir qu'un simple vampire.

D'un habile mouvement du bassin, je me retrouvais en position de force, repoussant les grandes mains qui m'empêchaient de respirer. C'était vraiment douloureux même pour une pseudo-vampire comme moi… Je sentis plus que je ne vis Mynd derrière moi. Il avait probablement eu peur que je ne meure déjà. Oh, pas pour mon propre bien-être je n'en doutais pas.

Laissant le soin à mon partenaire d'ouvrir le passage jusqu'à l'extérieur, je traînais le vampire par la gorge sur le sol marbré de l'établissement. Une fois rendue à l'air libre, je le soulevais d'une main et le projetai violemment contre le mur de pierre de la grande bâtisse. Il n'avait pas eu le temps de se relever que j'étais déjà sur lui…

Mon poing s'abattit avec force sur son visage, et je sentis quelque chose exploser sous l'impact. Un bref coup d'œil me permit de vérifier : sa pommette était salement amochée…

Le Seigneur-Roi jeta un coup d'œil par-dessus mon épaule. Il eut un reniflement dédaigneux.

- Amatrice.

Je haussai les épaules.

- Je ne fais pas tout un art de la torture. Mais fais mieux si ça t'amuse…

Il se détourna :

- Il s'agit de ton objet. Bon. Je te quitte pendant quelques instants, le temps d'enlever tes frusques de gueux et de mettre des vêtements convenables. Ne te fais pas tuer ou je serais capable de te faire transformer en Revenante.

- A ta guise. Et ne doute pas autant de moi c'est agaçant...

Il se contenta d'un sourire qui voulait tout dire. Enfoiré.

Bon… Par quoi commencer ? Ah oui… Rattraper le crétin qui avait cru bon de s'enfuir pendant que je discutais.

Trois secondes. Voilà c'est fait. Et ensuite ? Le faire souffrir. Le faire parler.

Avec un sourire gracieux, je lui retournai le genou d'un violent coup du tranchant de la main sur sa Ô si délicate rotule… Il hurla de douleur.

Ah oui… Le genou est une articulation particulièrement sensible… Je m'étais suffisamment fais mal durant mon… humanité, dirons-nous, pour repérer les endroits clés du corps humain. Et celui-ci se retrouvait indéniablement en tête de liste.

Le nez était assez sympa dans le genre aussi… On s'inquiétait toujours du devenir de son nez. Même aux portes de la mort, c'était étrange…

Nouveau coup. Un nez brisé. Un vampire en pleurs. Mauviette. Qui aurait dit qu'il me devançait de plusieurs centaines d'années ?

Alors que je me demandais quoi faire d'autre, Mynd revint à ce moment-là. J'avais complètement oublié qu'il avait emmené ses anciens vêtements avec lui. Le retour d'un Mynd non plus habillé comme un jeune et riche directeur, mais comme un guerrier, un roi barbare, me rappela l'abîme qui nous séparait, lui et moi. Il n'était pas originaire de la Terre. C'était un être sans aucune pitié.

Je ne voulais pas devenir comme ça. Régner, était-ce devenir immanquablement impitoyable, insensible ?

Non. Je ne deviendrai décidemment pas comme cela. Mynd était un exemple à prendre, oui. Non pas pour l'imiter, mais pour éviter de devenir comme lui. Un être au sang glacé. Un... Givre-né. Je me demandai fugacement quelle était son histoire. Dans le même instant, je plaignais ses amis - si jamais il en avait.

Pendant qu'il renfilait l'un de ses immenses brassards de cuir noir, il jeta un coup d'œil dédaigneux au vampire que j'étais censée faire parler.

- Eh bien ? Toujours pas ?

- Apparemment non, rétorquai-je, sarcastique.

Le vampire avait beau pleurnicher, il ne disait rien. Oui, ça faisait mal. Mais non, il ne parlait pas.

Mynd me toisa de haut en bas, de bas en haut. Ses yeux fendus se posèrent par la suite sur le vampire. Il poussa un long soupir.

- Je suppose que tu ne me renverras pas avant que tu l'aies interrogé ?

- Et bien... Il risque de partir pendant que je te renvoie... Et ça m'embêterait...

Il m'observa encore un long moment, puis me lança un regard des plus dédaigneux. Je me sentais comme la boue qui aurait osé effleurer son pied.

- Soit, insecte. S'il faut que je te fasse tout...

Il pencha la tête sur le côté, comme écoutant quelque chose, puis hurla, d'un coup, me faisant sursauter :

- Eileiss'Tan Qa !

Dans l'instant suivant, le Ghaernith vint aux côtés de son seigneur, les yeux emplis d'adoration, même si Mynd l'avait mis au bord des larmes.

- Sire ?

- Nos troupes ont-elles terminé le nettoyage ?

- Quasiment, Seigneur Dok'tan Ôuu. Les enfants sont sous la garde de quelques succubes et incubes. J'ai dû leur rappeler que ce n'était que des enfants, car comme ils avaient froids, les succubes se proposaient de les... réchauffer. À la place, je leur ai dit de leur donner des couvertures.

Mynd leva les yeux au ciel et secoua la tête. Moi, j'écoutais l'échange, les yeux ronds.

- Les cadavres des vampires brûlent déjà. Nous sommes en train de traquer le reste des survivants.

- Très bien. Tu t'es bien débrouillé, Eileiss'Tan Qa. Attends-toi à une récompense.

Je vis les prunelles du démon briller. Le Ghaernith aimait son roi. Il s'imaginait déjà quel genre de récompense il aurait. Mais Mynd était resté volontairement évasif. Je me sentis presque triste pour Eileiss'Tan Qa. Avant de me souvenir qu'il me sortait par les yeux.

À partir de là, cette partie peut être considérée en rating M pour « violence ». Les passages dits seront mis en italique et pourront ne pas être lus sans entacher la compréhension du texte. La fin du passage sera soulignée de la même façon.

Le Seigneur-Roi reprit :

- Va me chercher une table. Et prête-moi l'un de tes... instruments. Celui à dents. Tu t'en es servi pour tuer ?

- Oui, mon seigneur. Il a fait couler le sang.

- Parfait.

Eileiss'Tan Qa sortit du fourreau qu'il portait à la ceinture une lame parfaitement sale. Rouillée, dentelée, encore dégoulinante de sang, l'arme me donna des frissons rien qu'à la regarder. Ce n'était pas le frisson magique et, ma foi, un peu effrayant de la Claymore de Mynd, mais un frisson... malsain. L'arme était vicieuse. Elle était faite pour faire mal. Déchirer plutôt que trancher proprement. C'était un outil de torture. À partir de là, le doute s'insinua en moi. Avais-je bien fait ?...

Le Ghaernith tendit à son roi la lame, garde en avant. Mynd s'en saisit rapidement, et entailla la paume de son seigneur de guerre. Eileiss'Tan Qa eut un petit cri de surprise et de... plaisir...? Houlà... Sacrément tordus ces démons…

Mynd lécha le sang sur la lame. C'était d'un suggestif... Eileiss'Tan Qa en avait les joues brûlantes. Moi aussi, pour le coup.

- Qu'attends-tu, Ghaernith ? LA TABLE ! aboya Mynd.

Eileiss'Tan Qa parut reprendre ses esprits et détala. Je le devinais à son aura, il avait des pensées... plus que brûlantes. Un instant, j'entraperçus un Mynd à moitié nu qui le torturait. Ah... Euh... Oui. Bon ! Reprenons, hein ? Les fantasmes d'un masochiste ne m'intéressaient pas vraiment…

Le vampire attaché, lui, regardait fixement son futur bourreau. Des yeux emplis d'effroi, de fascination morbide. Moi aussi, j'avais goûté à une séance de torture à la Mynd. Sauf que, si j'analysai bien le sourire cruel du démon, c'était la version très, absolument, extrêmement, infiniment... soft. Et très plaisante.

- Mon... assistant a un peu de retard. Mais il va vite revenir. En attendant...

Mynd prit la main de Karl dans la sienne, entrelaça ses doigts aux siens. Il se pencha, comme s'il avait voulu embrasser le vampire. Il pencha sa paume pour tordre la main de Karl, appuya de son index sur le métacarpe du vampire.

La pression entre la paume et le doigt du démon fut telle que l'on entendit bientôt un craquement sec. Et sans aucun conteste, douloureux. Karl hurla. Mynd le fit taire d'une gifle de l'autre main.

- Et ce n'est là qu'un début, Karl. Songe que tu pourrais arrêter toute la souffrance qui va s'ensuivre, par un simplement mouvement de la langue et de la gorge... Parle.

Un autre craquement, un autre hurlement, une autre gifle.

Le temps qu'Eileiss'Tan Qa trouve enfin sa table, Mynd avait brisé tous les métacarpes et s'attaquait aux phalanges.

Le Ghaernith posa la table derrière son roi, la cala le plus possible. Il jeta un coup d'œil à Karl, puis à moi, qui observais, horrifiée, la douleur du vampire. J'avais l'impression de la ressentir moi-même. Inconsciemment, je frottai ma main, comme pour m'assurer qu'on ne me l'avait pas cassée.

- Tu as pris ton temps, Eileiss'Tan Qa.

- Dizkalte, mon seigneur. J'ai eu du mal à en trouver une suffisamment en bon état. Et assez solide. Qui plus est, j'ai cherché aussi une chaise. Et des chaines.

- Je te passe ton retard parce que tu as ramené tout ce qu'il me fallait.

Mynd lâcha la main du vampire, arracha ses liens. Karl voulut s'enfuir, mais le Ghaernith s'y attendait. Eileiss'Tan Qa le frappa violemment. Les deux démons attachèrent le vampire sur la chaise, avec les chaines et le reste de corde, puis Eileiss'Tan Qa se posta derrière Karl pour le dissuader de vouloir s'enfuir.

De toute manière, il n'aurait pas pu. J'observais le roi et son seigneur de guerre agir comme des... professionnels. Ils avaient l'habitude de torturer des gens, apparemment. Constater ce fait fit courir sur mon échine un frisson des plus désagréables.

Eileiss'Tan Qa se saisit de la main brisée de Karl et la posa à plat sur la table. Le vampire piaula de douleur. Mynd se tourna vers son Ghaernith.

- Non, l'autre main, Ghaernith Ôuu. J'ai déjà travaillé sur cette main.

"Travaillé sur cette main". C'était quoi, ce qu'il faisait ? Un travail comme un autre ? Je voulus intervenir.

- Je... On... Vous... Vous êtes sûr que ?...

J'avais perdu tous mes moyens, j'étais incapable de formuler la moindre phrase tellement l'horreur de ce qu'il s'apprêtait à faire me glaçait d'effroi.

Mynd me jeta un regard glacé de ses yeux fendus.

- Tu veux le faire parler ou pas ?

- Oui... Mais... Euh... Fais-le pour moi d'accord. Je... ne peux pas assister à ça.

Il haussa un sourcil, et ses prunelles se durcirent un peu plus lorsqu'il me contempla.

- Ssecketh Aqhiaz, c'est que j'ignore ce qu'il faut lui faire dire, à ton vampire. Ferme les yeux, si cela te répugne tant.

Il eut un sifflement étrangement vipérin.

- Âme faible. Si tu dois prendre la vie d'un homme, fais-le toi-même. Avoir un bourreau pour interroger tes opposants te ramollira encore plus.

Je baissai les yeux, comme honteuse. La vérité c'était qu'il n'avait qu'à moitié tort. J'étais encore trop faible malgré ma constitution vampirique. Mais je ne voulais pas de tant de souffrance. Même si elle semblait malheureusement nécessaire.

Lentement je me retournai et élevai la voix, fixant la bâtisse en flamme.

- Tu peux encore parler Karl... Dis-moi ce que tu viens faire ici, qui te donne tes ordres.

Je repris, la voix tremblante :

- S'il-te-plaît.

La voix acérée de Mynd brisa tout ce que j'aurais pu construire. Si Karl avait voulu parler, le tranchant de cette voix basse, gutturale, l'arrêta immédiatement.

- Faut-il vraiment qu'elle te supplie de parler ? Pitoyable insecte. Tu aurais pu le faire plus tôt et ainsi éviter à ta reine l'humiliation de s'abaisser à t'implorer.

- Je... Je...

- PARLE ! lui cria Eileiss'Tan Qa dans l'oreille.

- Non ! Je ne les trahirai pas ! Jamais ! Pas pour... Pour des soi-disant démons !

Mynd plissa les yeux. Eileiss'Tan Qa gronda.

- Je crois qu'un cours d'histoire s'impose, Karl, siffla le Seigneur-Roi. Les vampires sont issus des démons. Tu devrais respecter un peu plus tes illustres cousins, qui sont d'un sang ô combien supérieur au tien.

Je déglutis sans rien dire, attendant juste la suite des festivités. Karl avait ouvert grand les yeux. Pour lui, les vampires étaient issus d'autres vampires. Même moi, j'avais du mal à digérer que j'étais seulement la descendante du peuple de Mynd. Certes, depuis le temps, nous avions grandement changé, et nous étions différent des vampires de l'He'lltyl, et même bien plus que les démons, mais savoir que j'avais un très, très lointain cousin en la personne du Givre-né avait de quoi... perturber.

- Tu ne sembles pas décidé à parler, à ce que je vois, Karl, murmura, venimeux, le Seigneur-Roi. Eileiss'Tan Qa, plaque sa main sur la table. Et tiens-le bien. Il va vouloir s'enfuir.

- Votre serviteur, Sire.

Mynd tira la lame que son Ghaernith lui avait donné peu de temps auparavant. Je fermai les yeux très fort, malgré l'inutilité de cet acte et m'empêchais de presser mes mains contre mes oreilles. Je devais tout entendre, même si c'était dur pour moi. Moins que pour lui, cependant.

- Tu vas hurler comme une fillette, Karl.

- Comme une FILLETTE ! cria Eileiss'Tan Qa.

- Tout ce que je t'ai fait jusqu'à présent, un chaton aurait pu le faire.

- Un chatooooon, chantonna le Ghaernith. Tu vas voir, ô cher Karl, tu vas sentir, tu vas hurler de douleur, là où nous hurlerions de plaisir. Sois heureux ! Notre bien-aimé Givre-né va te lacérer. Profite de cet honneur et ce bonheur indicible !

Grrr... Il arrivait même à m'énerver alors que j'étais morte de peur celui-là... Mynd ne pouvait-il pas simplement dire à son roquet de se la boucler pour qu'il puisse « travailler » en paix ?...

Le Seigneur-Roi leva les yeux au ciel, quelque peu agacé semblait-il.

- Eileiss'Tan Qa. Si tu continues, c'est toi que je ferais hurler. Et comme tu es un démon, je ferais en sorte que tu ne cries pas de plaisir, mais bel et bien de douleur.

Mynd, tu es mon héros.

- Dizkal, Sire. Je me suis laissé emporter par mon enthousiasme.

- Cela passera pour une fois, Eileiss'Tan Qa. Réfrène la passion qui nous anime.

- Oui, seigneur Dok'tan Ôuu.

- Nous n'avons que trop tardé, Karl. Il est temps de passer aux choses sérieuses, veux-tu ?

Le cri strident du vampire me vrilla les oreilles, et je faillis ouvrir les yeux. Faillis seulement. S'il criait de la sorte, c'était pour une bonne raison. Et je n'osais imaginer ce que lui faisait Mynd.

Un coup sourd, le bruit d'une lame dérapant sur une surface dure. Un second cri surpassa le premier par son intensité en souffrance.

- Seigneur ? Pourquoi n'y a-t-il pas beaucoup de sang ?

- Je suppose que c'est une particularité des vampires de la Terre. Je crois qu'il s'agit à la fois d'un mélange entre nos vampires et nos Revenants.

- C'est un blasphème supplémentaire ! Cela voudrait dire qu'un vampire est revenu sous forme de Revenant, et a engendré ? Mais les Revenants sont stériles ! Leur seule manière de ne pas disparaitre, c'est d'en faire se lever d'autres ! Et si ces vampires étaient vraiment les descendants des Revenants, comment se fait-il qu'ils ne se décomposent pas ?

- Je l'ignore, Eileiss'Tan Qa, fit sèchement Mynd. Il serait intéressant de connaître l'histoire de ces vampires terriens. Ils se cachent et possèdent d'étranges caractéristiques.

Ils discutaient de cela comme s'ils n'étaient que devant un étal de fruits. J'entendis de nouveau le sifflement de la lame et cette fois-ci me bouchait les oreilles. Puis réécoutai.

- Tu ne souhaites toujours pas parler, toi ? feula, mauvais, le Seigneur-Roi. Je dois peut-être te mutiler encore un peu plus la main ?

- Seigneur, je crois qu'il est en état de choc. Et il commence à cicatriser.

- Fais c**** ! Utilise un sort. Verse de l'acide dessus.

C'était la première fois que j'entendais Mynd jurer ainsi. Mais savoir ce qu'ils faisaient ne m'amusait pas tant que cela.

Je me retournai d'un coup, et ouvris les yeux me concentrant sur le visage déformé par la souffrance de mon condisciple, et non pas sur ce qu'il pourrait y avoir plus bas.

- Parle Karl. Je suis ta reine et je te l'ordonne. Si tu ne le fais pas ta souffrance ira crescendo. Et je lui fais confiance pour te briser à jamais. Fais honneur à ta reine et stoppe ce jeu stupide.

- Je... jamais ! je ne les trahirai... Ja... Jam...

Schtak ! La lame s'abattit une nouvelle fois et un long frisson remonta le long de ma colonne alors que je sentis un courant d'air caresser le bas de mon dos dénudé..

- Ils ne sont rien par rapport à moi, répondis-je posément -ou prétendument posément - une fois que son cri eut franchi sa gorge. Abandonne. Lâche prise. Dis-moi tout et je te garantis la vie sous mon règne.

- N... N...

Le couteau trancha net, cette fois... Je vis un bout de quelque chose valser près de moi. Je fermai les yeux et posai mes mains sur ma bouche pour réfréner cette envie de vomir.

À partir de là, plus de torture.

- Cet imbécile commence franchement et m'énerver, Eileiss'Tan Qa. J'y suis allé un peu fort.

- En effet, seigneur. Souhaitez-vous que je vous remplace ?

- Non.

J'avais répondu à sa place. Hors de question que cet imbécile se mêle à ça. C'était mon problème. Qu'il serve d'assistant encore… je pouvais le supporter. Mais qu'il s'immisce ainsi et que je le laisse prendre du plaisir dans une chose aussi infâme que la torture d'un être était absolument hors de question.

- Mynd… S'il-te-plaît… repris-je. Arrête deux minutes le temps de te calmer… Je vais voir s'il est… à point.

Cela me répugnait de parler comme ça. Mais c'était le seul langage qu'il semblait réellement comprendre...

Le Seigneur-Roi se contenta de ma fixer. Ses yeux s'étaient assombris en me voyant.

- Ne t'inquiète pas, j'aurais trouvé autre chose pour le faire souffrir. Parfois, il faut laisser de côté la délicatesse...

Ce qu'il faisait était... délicat...? Je n'avais aucune envie de savoir ce qu'il pouvait faire d'autre. Surtout pas. Après une de ses pauses habituelles, il reprit :

- Il s'agit de ton prisonnier. Fais en ce que tu veux. Eileiss'Tan Qa, continue de le tenir.

- Oui, Sire.

J'hochai vaguement la tête dans sa direction en guise de remerciement.

- Sa phalange repousse, annonça le Ghaernith avec intérêt.

- La ferme, répondîmes-nous en chœur.

Il trembla légèrement. De colère ? De peur ? Que sais-je…

- Karl… Tu vas bien m'écouter. Je suis Isabella Marie Swan. Une des trois réelles royautés de notre monde. Tu me dois fidélité. À moi. Tous les autres ne sont que de simples fantoches face à ma supériorité et à mes pouvoirs. Ils ne sont rien.

- Vous vous trompez, lâcha-t-il dans un soupir. Ils seront plus forts que vous… Ils… en ont une aussi.

Je souris. Il était au courant de tout. Et il commençait à se livrer.

- Tu parles d'Elizabeth n'est-ce pas ? Comment pourrait-elle me faire du mal ? Ne suis-je pas sa sœur après tout ? Et sans aucun pouvoir offensif elle ne pourra pas me faire plus de mal qu'une mouche…

Il ouvrit de grands yeux tout en tirant violemment sur ses chaînes.

- Comment pouvez-vous être au courant de ça ? Seules quelques personnes privilégiées connaissent l'existence de la Reine !

Mynd intervint, sombre. Plus le temps passait, plus j'avais l'impression de le trouver... anxieux. Préoccupé. Et surtout de plus en plus glacial et fermé.

- Tu n'as pas à le savoir, insecte. Seul compte le fait que ta reine... ta deuxième reine soit au courant, siffla-t-il.

Dans le même mouvement, il me jeta un regard d'avertissement. Un coup d'œil qui me fit presque me ratatiner sur moi-même tellement il était dur. Ok, message compris, ne pas citer mes sources. Mais ce n'est pas la peine de me regarder aussi méchamment.

- Karl… Il n'est pas question de moi présentement mais de ceux pour qui tu commets ces meurtres. Je veux tout savoir d'eux. Leur nom pour commencer.

Il baissa le regard, refusant de me regarder droit dans les yeux.

- Les trahir est synonyme de mort.

Je haussai les épaules :

- Ne pas me répondre est synonyme de mort et de souffrance.

Il croisa furtivement mon regard et j'y vis briller une haine farouche. Croire qu'il voulait collaborer était utopie.

- Pourquoi vous ferais-je confiance ? Vous ne valez pas mieux qu'eux. De quel droit vous déclarez-vous Reines, minables hybrides que vous êtes, mi vampires mi humaines. Vous n'êtes rien de plus que des usurpatrices !

Mes yeux brillaient de colère contenue et je m'apprêtai à une réplique cinglante lorsque la main d'Eileiss'Tan Qa qui avait abandonné pendant un instant son rôle, s'abattit sur sa joue.

- Pauvre imbécile ! Si elles sont vivantes elles sont plus proches des vampires de l'He'lltyl et donc de nous ! C'est toi, l'usurpateur ! Comment oses-tu te donner le nom de vampire, résidu de Revenant ?

J'étais franchement choquée que le Ghaernith prenne ma défense. La raison vint après.

- Et en quoi un hybride n'aurait pas le droit de régner sur un peuple, maudite goule ? Mon roi a beau être un demi-sang, il n'en est pas moins le plus méritant des souverains que notre peuple ait jamais eu ! Il a plus compris notre vision des choses qu'aucun autre démon !

Eileiss'Tan Qa avait tilté sur le "hybride". Même si l'insulte s'adressait à moi, il l'avait prise pour son roi révéré. J'étais aussi surprise d'apprendre que Mynd était lui aussi un hybride. Je n'aurais jamais cru. Il s'était certes présenté comme un prince de ne je sais plus quoi, mais je pensais que c'était un titre honorifique. Je lui jetai un coup d'œil. Les yeux plissés, les lèvres pincées, il semblait hésiter entre décapiter son seigneur de guerre et ou lui écraser le crâne contre le mur. Finalement, il s'avança tandis qu'Eileiss'Tan Qa, plein de fougue, continuait à vanter les mérites de son roi bien-aimé. La gifle l'envoya à terre.

- Eileiss'Tan Qa, articula Mynd froidement, j'ai un peu de mal à voir le rapport encore moi et l'insulte destinée à la Ssecketh Nephdat. Si je m'étais senti insulté, j'aurais réagi seul. Je prends sans problème le fait d'être un hybride.

Menteur. Cela se voyait, la tirade d'Eileiss'Tan Qa l'avait troublé. Surtout le passage avec le "demi-sang". Intéressant... Il n'aimait pas qu'on dise qu'il n'était pas entièrement démon.

Je reportai mon attention sur le vampire qui arborait un rictus vainqueur. Il croyait avoir semé la pagaille parmi ses ennemis. Il allait voir ce qu'il allait voir. Plus aucune pitié pour cet infâme personnage.

- Karl, attirai-je son attention. Je suis persuadée que tu as une âme sœur parmi les Volturi.

Il cligna des yeux et, s'il l'avait pu, il aurait pâli. Son aura le fit à sa place. Il venait de me donner la preuve qu'il avait bien été envoyé par eux.

- N… Non, mentit-il pitoyablement.

- Donc tu as un homme que tu aimes là-bas. Tu ne me sembles pas tellement porté sur la gente féminine.

Il tressaillit. Oh oui, j'étais capable de discerner certaines choses, je n'étais pas complètement dépourvue de sens de l'observation… Les enseignements de Mynd allaient m'être au moins un peu utiles… L'art de la menace était quelque chose à manipuler avec considération…

Je me penchai sur lui, jusqu'à coller mon front contre le sien, puis pris une intonation particulièrement envoûtante.

- Il est brun ? Oui. Il est brun, je le vois dans tes yeux… Grand et fort. Proche de ceux que tu sers… Dis-moi son nom.

Ma description était exacte, je le sentais au plus profond de moi. Et Elizabeth m'offrit son image avec précision.

- Je ne dirais rien ! souffla-t-il paniqué.

On me souffla un mot.

- Dimitri… Il s'appelle Dimitri n'est-ce pas ? Et bien ce cher Dimitri pourrait avoir quelques ennuis si tu ne te dépêches pas de me donner toutes les informations que je te demande…

Sa réaction fut intense. Violente et rapide. Trop rapide pour que les deux démons – ou plutôt le démon et le demi-démon – puissent l'en empêcher. Dans un sursaut de volonté il s'était jeté sur mon cou, plantant profondément ses crocs dans ma gorge. Je gémis de douleur mais le repoussai aussi tôt alors que le sang dégoulinait sur mes vêtements neufs.

- C'était incroyablement stupide, grognai-je en observant le désastre de ma tenue. Ce n'est rien, indiquai-je à l'intention des deux autres. Juste un peu douloureux.

Je jetai un œil au nouvel homme qui s'offrait à moi.

- Au moins il ne pourra plus se régénérer sous cette forme-là, murmurai-je en indiquant du doigt l'humain qui nous faisait face.

Eileiss'Tan Qa, toujours au sol, n'avait d'yeux que pour son dieu vivant, mais Mynd m'observait avec intérêt. Je le devinais, il était en train de réfléchir, de voir s'il pourrait utiliser cette propriété de mon sang. Cela se voyait rien qu'à la couleur de son aura qui pointait de ci, de là : une couleur calculatrice. Il prenait conscience que j'avais peut être plus de pouvoir qu'il n'avait cru. Mais pour autant, il n'allait pas se mettre à me traiter en égale, cela je le savais.

Il toisa Karl, qui s'observait, regardait l'environnement alentour avec des yeux proprement nouveaux.

- T'a-t-il dit ce que tu souhaitais ?

- Hum… Non, répondis-je en essuyant négligemment le sang avec ma manche. Je voudrais savoir un peu à quoi m'attendre quand je serais là-bas. Le nombre de vampires, leurs pouvoirs… La situation des lieux… Des cachots. Ce genre de choses.

Mynd eut un soupir las et une moue ennuyée qui le fit paraitre plus jeune.

- Ne me dis pas qu'il risque de t'échapper sous cette forme, persiffla-t-il.

Je haussai les épaules :

- À vrai dire je ne sais pas trop combien de temps est-ce que ça dure… Tout dépend de la quantité de sang ingérée je pense… Mais bon… Si on reste ici pour faire ça je pourrais le surveiller en même temps… Cela te convient ?

- Il faudra bien.

Il se tourna vers Eileiss'Tan Qa.

- Va chercher nos troupes. Regroupe-les. Cela me sera plus facile de les renvoyer dans notre patrie. Je suis... fatigué. Et par les évènements, par la magie utilisée, et par l'air insalubre de cette planète.

- Sire, vous allez bien ?

- Je vais très bien ! rugit-il agacé.

Eileiss'Tan Qa haussa un sourcil, dubitatif. Il était vrai qu'à bien regarder, le Seigneur-Roi avait l'air épuisé.

- Pour pouvoir nous ramener, il va falloir que vous ayez un petit remontant. Prenez.

Un peu choquée, j'observais le Seigneur-Roi piocher dans le sachet et inspirer profondément. Aussitôt, il sembla avoir un regain d'énergie. Il remarqua mon regard et m'en renvoya un peu amène.

- Quelque chose à dire ?

- Euh... Non !

J'étais juste intriguée quant à la nature de cette poudre…

- Ah ! Seigneur, il faut que je vous dise... je... vous savez qu'entre cette terre et la nôtre, le temps n'est pas... stable.

Mynd stoppa tout mouvement, son regard déjà étincelant plongé dans le mien.

- ... Combien de temps suis-je parti ?

Si j'avais été une souris, je me serais cachée dans mon trou pour ne plus jamais en sortir…

- T... Trois jours, Sire. Cela fait trois jours que vous avez disparu de l'He'lltyl. C'est Fenrir, votre Acanthe, qui nous a prévenus. Il s'est détaché de ses chaines. Les dieux nordiques ont une fois de plus paniqué. Ils ont cru que le Ragnarok avait commencé. Enfin, c'est surtout Odin qui a paniqué. Il nous a envoyé des agents divins pour voir ce qu'il se passait. Si Fenrir n'avait pas hurlé à la mort et s'était débattu comme un fou pour se libérer et partir à votre recherche, nous aurions juste pensé que vous étiez parti pour l'une de vos habituelles excursions.

(nda/ Vous ne comprenez rien ? Moi non plus… Je laisse la parole à Clo…

ndc / M'oui, je pense qu'il y a besoin de quelques explications... Dans l'He'lltyl, les dieux des différentes mythologies sont présents, mais sont considérés comme des divinités mineures, des cultes mineurs sans grande envergure ni importance. Mais certaines prophéties faites par ces cultes mineurs ont des répercussions sur eux-mêmes.

Ainsi, Fenrir, un loup géant, plus ou moins un Dieu, fils de Loki, également un Dieu qui s'est mis un peu tout le monde à dos, se libèrera à un moment donné. Quand cela sera fait, il déclenchera le Ragnarök, la fin du monde dans la mythologie nordique. Maintenant, on passe à l'application sur l'He'lltyl. Fenrir est devenu l'Acanthe de Mynd.

Un Acanthe, c'est une sorte de familier qui aide à canaliser la magie d'un sorcier quand il est trop puissant. Tous les sorciers suffisamment puissants en ont un. Bref, par certaines... manipulations génétiques non volontaires, notamment à cause d'un dieu qui se cherchait un hôte et qui ne l'a au final pas trouvé en la personne de Mynd, ce dernier est devenu... assez puissant magiquement parlant.)

Mynd avait pâli. Brusquement. Puis une colère immense remplaça la surprise et l'horreur. Il se tourna vers moi, écumant de rage.

- MAUDITE FEMELLE, DÈS QUE J'AURAI RÉVOQUÉ MON PEUPLE, TU AS INTÉRÊT À ME RENVOYER CHEZ MOI IMMÉDIATEMENT ! QUANT À TOI, EILEISS'TAN QA, REGROUPE TOUT DE SUITE NOS TROUPES, EST-CE CLAIR, CHIEN ?

Je prenais d'un coup conscience que ce "cher" roi démoniaque avait été... étrangement attentionné envers moi. Mynd était roi, il protégeait son peuple. De lui-même, surtout, mais aussi des autres, qui n'appréciait pas tellement que cela les démons (en même temps, qui aurait aimé des types à la fois attrayants et monstrueux ? Ah... Ce genre de qualificatif pouvait aussi s'employer pour des vampires). Je n'avais pas perçu jusque-là cette agitation, cette nervosité. Mynd agissait avant tout par devoir envers sa race, mais aussi... par amour ? Non. On ne pouvait employer ce terme pour le Seigneur-Roi. Il n'aimait pas. Il ne pouvait aimer. Il n'avait pas le temps. Car il dirigeait un royaume, un peuple fougueux, sanguin, et il luttait lui-même contre ses sombres instincts. Mynd... il voulait à tout prix revenir dans sa patrie.

Trois jours ? Il devait être inquiet. Que s'était-il donc passé pendant ce temps-là ? Avait-on profité de son absence pour miner son pouvoir ? Pour attaquer son pays bien-aimé ? Ils allaient le payer. Mynd se gorgerait de leur sang. Il était fou de rage... et d'inquiétude. Son peuple. Son pays. Rien d'autre ne comptait. Il avait beau trainer dans la boue ses sujets, ces derniers l'adoraient, le craignaient, le haïssaient. Mais ils étaient tenus en laisse. Sans lui, les démons étaient incontrôlables. Insatiables. Le Seigneur-Roi était là pour les restreindre. Leur donner un objet à révérer. Pour que les démons déchargent leur trop plein d'émotions instables. Il était essentiel pour les démons. Et les démons lui étaient essentiels. Inconsciemment, je l'avais privé de cela, et il m'en vouait une grande rancœur, qu'il n'avait jugulée que parce que je pouvais le renvoyer chez lui plus vite. Il aurait voulu m'égorger parce que je m'étais servi de lui. Il aurait voulu me voir brûler sur le bûcher dressé pour les autres vampires parce que j'avais attendu d'être satisfaite pour daigner le renvoyer chez lui. J'étais sonnée par une telle charge de fiel. Et je m'aperçus de tout cela alors qu'il dardait sur moi ses prunelles glaciales.

Et quand son fidèle roquet lui avait annoncé que le temps s'était distordu pendant la journée qu'il avait passé ici, et qu'en réalité trois jours s'étaient écoulés chez lui... Tout ce venin avait jailli.

Je me rendis compte que régner, ce n'était pas batifoler à droite à gauche pour rendre la justice quand je m'ennuyais. J'étais devenue Enreïka, mais seulement d'apparence. Pas de rôle. J'étais partie suivre mes propres affaires, retrouver ceux que je considérais comme mien, par pur égoïsme. Je ne régnais pas. Et c'était pure coïncidence de massacrer des vampires renégats. Je l'avais fait pour Elizabeth, me disais-je. Mais avant tout pour moi. Pour avoir l'impression de... faire mon devoir. Mais faire mon devoir, ce n'était pas cela. C'était... me consacrer toute entière à mon rôle d'Enreïka. Ce que jusqu'alors, je n'avais pas fait. Je me sentis nauséeuse.

Je n'avais pas demandé ça pourtant mais je me sentais… obligée d'être ce que j'étais. J'avais besoin d'un moment seule avec moi-même pour réfléchir à tout ce que cette nouvelle vie représentait. Je devais apprendre beaucoup de choses. Mais ce n'était pas le bon moment.

Je vérifiais machinalement que Karl était bien attaché avant de lui asséner un violent coup pour lui faire perdre connaissance. Une fois fait, je m'assis à même le sol, en tailleur, mains sur mes genoux, fixant d'un œil impénétrable le Seigneur-Roi.

- Je pense qu'il me sera plus facile de te renvoyer en même temps que ton peuple. Je puiserais dans le sortilège déjà existant et je te lierais au sort que tu lanceras. J'y ajouterais ma propre énergie et mon propre pouvoir. J'essaierais de retrouver en moi les mots de nos ancêtres. Sinon j'utiliserais les miens.

- Tu as oublié la langue originelle, Enreïka. Parle dans ta langue, je traduirai après toi. Je n'ai pas envie que tu te trompes une fois de plus, fit Mynd, de sa voix la plus glaciale.

C'était bien la première fois que le démon utilisait mon titre. Le lui avais-je dis ? Je ne m'en souvenais plus.

- Je n'en suis pas aussi sûre que toi. Mais je ferais comme tu voudras.

Ma voix était froide. J'avais peur. De moi. De ce que je devenais. De lui et de ses réactions. De ne plus savoir ce que je voulais réellement. De devenir une mauvaise Enreïka. Comme pour me conforter dans mes idées, la voix d'Elizabeth ne résonnait plus dans mes pensées. J'étais terriblement seule face à toute l'armée de démons qui m'entouraient, debout, me contemplant d'un air méprisant. Ces démons qui me détestaient de leur avoir enlevé leur roi.

J'avais presque envie de pleurer mais je me retins. Il était hors de question que je leur montre ma faiblesse maintenant. Après, quand tout serait fini, je pourrais me laisser aller.

- Nous sommes tous là Seigneur, informa le Ghaernith.

Il hocha la tête puis commença dans sa langue, que j'identifiais comme mi-chemin entre une langue sacrée que je comprenais parfaitement et une langue courante qui m'était totalement étrangère :

- Mon peuple, mes bien-aimés, mes sujets, mon sang... je vous révoque. Mes fils, mes pères, mes frères... Vous êtes venus. Vous m'avez brisé. Vous m'avez lacéré pour la gloire de notre Père, le Séditieux, pour la grâce de la Déesse aux Mains Sanglantes. Vous avez déchiré les corps de nos ennemis pour ma gloire, vous avez répondu à mon appel, ô mes adorés, mes amants, mes bourreaux, mes victimes. Il est maintenant temps de revenir en notre royaume maudit, ô mon sang. Votre tâche est accomplie. Vous m'avez contenté au-delà des espérances. Retraversez les Plans, les mers, le Néant, car je vous révoque. Je vous révoque en attendant le prochain massacre, et, plus tard, nous dresserons la forêt de pals, et ferons couler des rivières vermeilles. Mes aimés, je vous révoque.

L'incantation était moins passionnée, plus douce dans ses intonations, mais tout autant chargée en magie.

Me concentrant, je visualisai cette magie, à travers ses gestes, son aura. Une fois que je l'eus nettement discernée, filament bleu et brillant comme un serpent, je tendis la main vers elle pour qu'elle s'enroule autour de mon poignet et entre en moi.

Cette opération était assez étrange. Elle vous réchauffait de l'intérieur mais amenait une pellicule glacée sur votre peau. Simultanément, je tendis vers lui ma propre magie, couleur sang. Les deux se mêlèrent, formant ainsi un lien presque noir, pulsant entre nos deux corps.

Inconsciemment, j'avais marmonné des mots qui n'étaient pas fait pour ma bouche. Des mots démoniques. Des mots que notre lien me soufflait. Notre lien de sang et de magie.

« Ramène chez lui notre père, notre frère, notre fils. Ramène chez lui mon ancêtre, ma descendance, mon créateur. Prends-le-moi. Arrache le moi. Fais le tien. Ramène-le sur notre terre originelle. Abandonne-moi. »

Dieu seul savait à qui je parlais réellement... Le tout était que je ressentais cette présence à mes côtés. Je sentais son souffle froid caresser ma nuque, ses mains griffues effleurer mes vêtements. Je détestai ça. Mais il devait repartir.

Mynd et moi mêlâmes nos incantations jusqu'à ce que leur puissance résonne dans notre corps, dans notre cœur, dans notre souffle saccadé. Je sus alors que c'était le bon moment.

Je me relevai, légère, et m'approchai de Mynd, comme si le lien se rétrécissait, me forçant à me coller à lui. Blottie contre son corps chaud, je posai mes lèvres sur les siennes. Ce n'était pas par amour. Ni même par désir. Cela faisait partie du rituel. Je devais tout lui donner pour qu'il puisse repartir. Ma magie. Ma chair. Et du sang.

Mynd me rendit mon baiser avec une force qui me déstabilisa, tandis que ses ongles s'enfoncèrent dans ma peau, la griffèrent, me faisant saigner. Il était en train de me déchiqueter, et j'eus l'impression que ces mains qui me lacéraient gagnaient en intensité, et dépeçaient même l'intérieur de mon corps.

Pourtant, je n'avais pas peur, je n'avais pas mal. Même, je trouvais cela plutôt plaisant.

Je compris bientôt que c'était... lui qui me donnait ces sensations. J'avais sa propre perception de la douleur. Il y eut une grande explosion d'ombres vives et de lumières sépulcrales, et j'entraperçus un homme au sourire sardonique, les cheveux d'un roux tellement flamboyant que sa chevelure paraissait de flamme. Ses yeux de safran se posèrent sur moi, et son sourire s'élargit.

- Simulacre de démon, enfant des morts, tu oses me dire de prendre celui qui est déjà à moi ? Tu oses me dire de te l'arracher alors qu'il n'a jamais appartenu qu'à moi ? Tu oses me dire de le faire mien, alors qu'il l'est depuis sa naissance, depuis même qu'il était dans le ventre de sa mère ? Tu es ma foi bien ridicule. Tu es indigne de ma présence, indigne de toucher celui qui appartient à la lignée que j'ai autrefois chéri, qu'autrefois j'ai adoré au point de vouloir me sacrifier pour elle ? Tu es indigne de lui, indigne de ses lèvres sur les tiennes, indigne de ses mains qui te font mal. Pauvre femelle. Meurs ici-bas, tandis que j'élèverai cet homme pour le plaisir de le voir retomber au plus bas niveau.

D'où sortait-il celui-là ? Mais qu'il m'insulte autant qu'il voulait cet inconnu pourvu qu'il ramène son pseudo fils dans sa patrie…

L'homme aux cheveux roux caressa l'arête de la mâchoire de Mynd, qui ouvrit les yeux d'un coup, brûlant de haine. L'homme rit, et lui susurra.

- Oh, Mynd, l'histoire se répète. Rappelle-toi ce qui s'est passé à Qhori et Astar, à Dok'tan, ou Ara-Anan, tes ancêtres. Ils m'ont rejeté. Et tu l'as fait aussi, Prince des Aquilons. Et tu seras toi aussi encore plus maudit, Givre-né.

Mes yeux se remplirent de larme. Pour lui. Il ne méritait pas le funeste destin qui l'attendait.

Avec un rire aussi doux que de la soie, et en même temps aussi désagréable qu'un ongle sur un tableau noir, l'homme roux se retourna vers moi.

- Maudite femelle, tu n'aurais jamais dû toucher à un Dok'tan Ôuu. Il le payera par ta faute. Mais qu'importe. J'ai déjà sa mère. Le fils attendra encore un peu pour devenir mon instrument.

Il lâcha Mynd, me prit la main et la baisa.

Lorsque ses lèvres effleurèrent ma peau, la douleur fut intense, plus grande encore que tout ce que j'aurais pu imaginer.

- Au plaisir de ne jamais te revoir, résidu de démon.

Il me saisit la gorge et me sépara du Seigneur-Roi. Puis, me soulevant d'une seule main, il me murmura, avant de me délaisser.

- Apprends à me craindre, enfant des morts. Ta vie... est une simple seconde pour la mienne. Et toute ta puissance... n'est que l'insecte qui se consume dans mon brasier. Meurs. Et ne remet jamais les pieds ici.

Après ça, il me relâcha, me laissant tomber au sol comme une vulgaire marionnette. Je sentais le regard de Mynd posé sur moi. Pitié ? Colère ? Je ne savais pas trop… Mais moi je savais ce que je ressentais. Une colère foudroyante envers ce dieu tout-puissant.

Je relevai la tête vers lui, plantai mon regard de chat dans ses prunelles safran :

- Pour ne savoir rien faire d'autre de votre vie que faire souffrir et manipuler vos âmes, vous devez être terriblement seul. J'espère que vous souffrez. Et que vous souffrirez tout le long de votre éternité.

Le dieu eut un sourire condescendant, comme si mes paroles ne l'atteignaient pas. Après tout, j'étais à peine plus qu'un insecte, pour lui, et il ne m'accordait attention que parce que j'étais entrée en contact avec son... "protégé", si l'on pouvait dire ça.

- Pourquoi accorder attention à une poussière ?

J'eus un sourire éclatant.

- Vous avez raison. Pourquoi vous prêterai-je attention ?...

L'homme roux haussa un sourcil, et une grimace de rage déforma son visage.

- Pauvre folle, tu ne sais pas qui tu défies !

Il s'élança vers moi, avide de pensées meurtrières, mais je tombai, tombai... et il ne parvenait pas à m'attraper. Je croisai une dernière fois le regard de Mynd.

Et, pour la première fois, il me fit un sourire éclatant, lumineux, qui le fit paraitre beaucoup plus jeune. Il éclata de rire, d'un rire qui m'aurait fait froid dans le dos s'il m'avait été destiné. Un rire de revanche. Il avait apprécié que l'homme roux perde son self-control de divinité.

Je grimaçai en retour. J'étais ravie de le voir partir mais en même temps, je sentais le lien de nos peuples se briser à jamais et c'était… étrange.

- Adieu Mynd, murmurai-je du bout des lèvres, sans le lâcher une seconde du regard.

Je vis ses lèvres bouger à son tour, et malgré la distance, je l'entendis.

- Si jamais je te revois, je te tue, maudite femelle.

J'éclatais de rire, une euphorie naissant dans ma poitrine pour se disséminer dans chaque parcelle de mon corps.

- On fait ça comme ça ! répondis-je en retour, ma voix se perdant dans l'infini de l'espace.

J'étais persuadée de ne jamais le revoir. Et je n'étais pas sûre qu'il soit capable de faire mourir ce corps…

Puis je retombai lourdement sur le sol, comme rattrapée par la gravitation qui me faisait durement payer mon absence passagère.

J'étais seule. Le bâtiment en flamme me réchauffait tout le corps, me rappelant douloureusement la présence de mon dos lacéré et de ma main comme brûlée, un étrange cercle d'un violet sombre s'étendant sur la moitié de ma main.

En grimaçant je me levai, attendant simplement que la douleur s'estompe avec mes blessures. Karl était toujours inconscient. Tant mieux. Je ne voulais pas qu'il me voie dans cet état déplorable.

Un gémissement m'échappa quand je me relevais complètement. Merde il m'avait bien amochée ! Prudente, je détachai les lambeaux de mes vêtements de ma peau glacée avant d'expirer à fond et de me concentrer. Mon sang, chaud, me brûlait presque le dos, gelant sur place en glissant le long de mes blessures… Très vite, une croûte se forma, stoppant ainsi l'hémorragie. Ce n'était pas du beau boulot. Mais au moins je cessai de perdre ce liquide vital qui s'écoulait, goutte à goutte hors de mon corps.

La soif me brûlait la gorge. Mon sang, celui du nouvel humain, celui des enfants que je sentais si proche de moi… Tout cela était fait pour faire éclater le monstre qui était en moi et révéler ma nature aux humains… Je serais les dents. Quand donc devrais-je cesser de me nourrir si fréquemment ? L'avantage des vampires normaux était leur lente consommation du sang qu'ils absorbaient… Moi j'avais toujours besoin de renouveler ce précieux liquide pour maintenir mon corps en vie… Ou du moins le maintenir en état de marche.

Sauf que dès la première blessure, je devais réitérer la démarche. Et mon propre sang me rendait folle de désir. Avide. Sanguinaire. Si j'avais pu, si cela n'était pas en totale contradiction avec mes principes, j'aurais plongé mes dents dans le corps palpitant de l'ex-vampire et me serait abreuvée à la source de mes tourments.

Mais bien sûr je ne pouvais pas faire ça. Déjà des humains arrivaient. Ils allaient entendre les enfants et le personnel leur raconter la présence de gens étranges, de monstres qui pour les uns avaient massacré la moitié d'entre eux, et pour les autres leur avait sauvé la vie en détruisant leur assassins… Cela allait faire du raffut. Si quelqu'un établissait le moindre lien entre cette pseudo-fable et l'étrange attitude des Cullen, ceux-ci devraient partir.

Alice. Alice devait déjà avoir été prévenue par son don. Elle allait arriver. Seule peut-être. Plus probablement accompagnée. Je la sentais jusqu'a plus profond de mon âme se rapprocher de nous, elle qui aurait pu être à ma place.

Je réagis au quart de tour. Elle serait bientôt là. Mais j'avais d'autres choses à faire, liée à ma nature d'Enreïka. Tant pis pour mes désirs personnels. Ceci devait passer avant tout le reste.

Fulgurante de vivacité malgré mes forces qui s'amenuisaient, je lançai les « outils » de mon collaborateur dans la bâtisse désormais bien attaquée par les flammes. Rapidement, je fis place nette, détachant Karl de sa chaise, l'allongeant sur le sol enneigé, faisant disparaître les traces de sang sous une illusion devenue réalité.

Alice était proche. Elle était seule aussi.

Furtive, j'observais les enfants terrorisés qui se bousculaient loin des flammes, entourées d'adultes à peine plus vieux qu'eux qui tentaient de mettre de côté leur frayeur pour les protéger.

« Si seulement je pouvais leur faire oublier ça, soupirai-je intérieurement.

- Tu le peux, me souffla Elizabeth revenue hanter mes pensées. Un des vampires contre qui tu as combattu faisait partie de la garde rapprochée des Volturi. Yoan. Il possédait le pouvoir de modifier la mémoire des hommes. Ils m'ont toujours bien gardé de l'approcher mais toi tu l'as assimilé. Laisse-moi le faire pour toi…

- Comment ?

- Laisse-moi ton corps quelques secondes, abandonne-le. Fais-moi confiance, je te le rendrais.

J'avais confiance en elle. Vraiment. Mais j'avais peur qu'une fois libre de ses mouvements, elle ne refuse de me laisser reprendre ma place, même si actuellement ses intentions étaient bonnes.

- Non. Explique-moi.

Je l'entendis presque soupirer, rire et abdiquer. Sa soif de liberté était tellement intense qu'elle me submergeait presque de douleur. Mais il était hors de question de lui laisser la voie libre. Elle risquait de devenir pire reine que je ne l'étais.

- Tu as raison… Ma demande est irraisonnable. Suis-moi…

Et elle m'entraîna dans les méandres de mon esprit, me montrant encore et encore de nouveaux lieux, des contrées inexplorées, parfois inexplorables. Elle m'emmenait dans des cryptes secrètes, des souterrains, des lieux emplis de magie. La nôtre et celle de nos ancêtres qui perdurait en nos corps. En nos cœurs. En nos esprits d'hybrides.

C'était une nouvelle facette de nos vies que j'entrevoyais. Il y avait tellement de choses à découvrir rien qu'en nous-mêmes. Presque plus que ce que l'on trouvait à l'extérieur… je comprenais mieux sa douceur et sa survie sans sombrer dans la folie. Lentement, sûrement, elle avait appris à se perdre en elle, à intégrer dans sa proche mémoire des secrets enfouis depuis la nuit des temps.

Enfin, elle me mena à la porte secrète de notre spiritisme. Là où notre magie prenait source et où nos trésors étaient enfouis. Je saisis l'Oubli et repartis, remontai, réintégrai mon corps, munie de mon précieux joyau. Celui-ci explosa avec violence hors de mon corps, englobant la cour emplie d'enfants qui s'apaisèrent brutalement, tombèrent, s'endormirent dans un sommeil profond entre les bras de leurs protectrices. Ils ne se souviendraient plus de rien. N'auraient pas de cauchemars atroces tout le long de leur vie d'orphelins. Ils vivraient simplement.

Mais déjà elle était derrière moi. Froide présence qui réchauffait mon cœur. Petit corps empli d'amour et de fierté. D'inquiétude. Ma sœur. Ma sœur d'âme. Celle qui aurait dû être ici à ma place. J'étais heureuse de lui avoir épargné ça. Tant d'égarement, de douleur, de combats… Elle était faite pour aimer et être aimée, pas pour régner sur un peuple violent, instable, empli de haine, de passions sanguinaires et de désirs de pouvoir. Mynd avait raison. Nous étions des démons.

Ils m'avaient bien choisi. Je pouvais souffrir. J'avais appris à souffrir sans être malheureuse. Je connaissais la douleur comme si elle était née de mon sein. Elle était ma mère, ma fille, ma sœur. Elle avait toujours vécu près de moi. Elle ne me faisait plus peur.

Je ne me retournai pas, la laissant entourer ses petits bras autour de ma taille, coller son corps froid au mien. Je soupirai de bonheur, malgré la lourde décharge électrique qui nous secoua toutes les deux un bref instant. Pendant quelques secondes encore j'étais la Bella qu'elle avait toujours connu. La Bella fragile, naïve. L'humaine. Celle que l'on devait toujours protéger…

Elle allait bientôt découvrir combien j'avais changé. Elle allait être surprise, peut-être même me rejeter… Mon odeur était différente… Ma taille même était différente. Elle avait déjà dû se rendre compte de ces menus détails. Pourtant… On aurait pu les attribuer à mon humanité. J'aurais pu avoir grandi et mon voyage, mes nouveaux sentiments auraient pu avoir modifié ma senteur…

- Alice, murmurai-je de ma nouvelle voix, plus pure, moins humaine. Alice… Tu n'auras pas peur de moi ?

Elle rit dans mon dos, comme si j'avais dit une aberration.

- Peur de toi ? Comment pourrais-je avoir peur de ma sœur, aussi changée soit-elle ? Je l'ai senti tu sais… Quand tu es devenue quelqu'un d'autre. Pas comme une vision cependant… Tu n'y es plus. Ça m'inquiétait au début mais je sentais que tu ne craignais rien… Alors j'ai préféré attendre et te laisser du temps…

J'esquissai un sourire, posant mes mains tièdes sur ses bras froids qui m'enlaçaient fermement :

- Je ne suis plus la même. Peut-être que les choses seront différentes de ce qu'elles ont été… Est-ce que ta famille et toi ne préfèreriez-vous pas que je m'en aille ? Je vous connais pour avoir vécu avec vous… Vous cherchez avant tout une vie de calme et de tranquillité… Si je reviens… vous la perdrez à jamais. Vous êtes trop loyaux pour laisser l'une d'entre vous se battre sans rien faire. Vous risquez de ne plus être une famille mais une armée. Mon armée. Vous pouvez tout perdre. Vous pouvez vous perdre. Carlisle se bat pour la vie, moi avec la mort. Je ne suis plus celle que vous avez connue…

J'étais volontairement dure dans mes paroles. Je voulais qu'elle prenne conscience de tout ce que ma nouvelle forme impliquait pour eux. Même si je ne faisais que le réaliser.

- J'ai beau vous aimer plus que ma vie elle-même, vous souffrirez de ce que je suis. Vous me trouverez cruelle. Vous aurez peut-être même peur de ce que je suis capable de faire. Vous finirez par me haïr et moi j'en souffrirais. C'est un cercle vicieux qu'il vaudrait peut-être mieux rompre avant son commencement…

Derrière moi je la sentis frémir.

- Comment peux-tu dire des choses pareilles Bella ? Combien de temps te faudra-t-il pour comprendre que nous souffririons bien plus de te perdre à jamais que de te voir devenue une autre personne ! J'ai compris depuis longtemps que tu changeais en profondeur, mais ça ne fait pour autant pas de toi une personne moins méritante d'être aimée. Bien au contraire. Ton cœur est noble et tu te sentes prête à assumer une charge qui ne devrait pas être la tienne. Même si je n'ai pas compris l'ampleur de ce qui t'attendait, je sais que sans nous tu dépériras. Tu n'es pas faite pour être seule Bella !

D'un geste brusque, elle me retourna face à elle, prête à continuer sa diatribe. Mais comme je m'y attendais, elle se stoppa en plein mouvement.

Il était plus difficile de parler quand on voyait la réalité en face…

- Wow… murmura-t-elle. C'est… Impressionnant. Tu es tellement… magnifique. Bella… Tu n'as jamais aussi bien porté ton nom qu'aujourd'hui…

J'eux un léger sourire en coin.

- Aujourd'hui on m'a dit que mon prénom était laid.

Elle ouvrit de grands yeux.

- Qui ?

- Nos ancêtres… Les démons. Tu ne les as pas vus arriver dans tes visions ?

La petite brune secoua la tête frustrée et estomaquée.

- Depuis que tu as été… transformée – d'ailleurs il va falloir que tu m'expliques un peu ce qui se passe, je suis perdue, et je DÉTESTE ne pas comprendre… - mes visions sont très floues…

Je hochai simplement la tête.

- C'est normal… Je suppose que cela fait partie de mes… pouvoirs. Sans compter qu'il n'y a pas vraiment de raison pour qu'une simple vampire puissent observer les faits et gestes de sa Reine… Et les démons doivent être protégés contre ce genre de tours.

Elle cligna des yeux :

- Simple vampire ? Reine ? Et toujours ces démons ? Décidément, tu as BEAUCOUP de choses à me dire.

Mes lèvres s'étirèrent en un fin sourire amer.

- Plus que tu ne l'imagines. Mais ce n'est ni le lieu ni le moment. Nous devons partir d'ici avant que des humains ne débarquent. Et j'ai encore une multitude de choses à faire.

Je me rendis compte de la sécheresse de mon ton et tentai de me rattraper :

- Tu peux m'aider si tu veux… Cela ne présente rien de dangereux…

Elle posa en silence son regard sur Karl. Puis elle s'intéressa de nouveau à moi, les yeux noircis par le désir de sang que je sentais monter en elle depuis son arrivée.

- Cela a-t-il un rapport avec cet humain ? Je sais que tu es une nouvelle-née Bella, et que tu as probablement une intense soif de sang, mais je ne cautionnerai pas pour autant un meurtre de sang-froid.

Je laissai échapper un rire amer, autant à cause de son jeu de mot involontaire que parce que ses paroles me blessaient profondément :

- Quelle confiance tu places en moi… Ce type est un ex-vampire assoiffé de sang qui a massacré des dizaines d'êtres humains, Alice. Je ne boirais jamais un sang aussi impur que le sien, ne t'inquiète donc pas… Je veux juste lui soutirer des informations pour aller m'attaquer à nos copains les Volturi. Tu n'as donc aucuns soucis à te faire. Par contre je ne te promets pas que je n'irais pas massacrer la moitié de la population animale de cette forêt.

Tout en parlant, je soulevais le corps qui me semblait plutôt léger du vampire inconscient et me dirigeai vers la forêt, effaçant mentalement mes traces au fur et à mesure que j'avançais.

- Tu me suis ?

Je ne lui en voulais pas vraiment… Elle ne voulait pas me blesser, juste s'assurer que je n'étais pas devenue un monstre…

Sans vraiment attendre sa réponse, je m'élançai à travers la forêt enneigée. Pour ne pas aller bien loin cependant… Il était évident que mon corps avait besoin de sang et je ne pouvais décemment l'ignorer.

Très vite, je trouvai un arbre aux branches épaisses et hautes où je déposai mon fardeau. Il serait ainsi à l'abri des animaux sauvages susceptibles de passer par là et incapable de redescendre au cas où il se réveillerait. Ou alors il ne descendrait pas sans dommage.

Mes instincts de chasseur prirent vite le dessus et je ressentis presqu'immédiatement la présence de ma sœur à mes côtés. Un sang chaud et épais pulsait non loin de moi, sur ma droite. Un cœur aux battements précipités. Des bruits de feuillage que l'on foulait. L'animal était déjà en train de mourir.

Je me déplaçai lentement vers l'arbuste pour découvrir le corps malmené d'un mâle dans la force de l'âge. Un loup noir, exclu par ses pairs. Un roi détrôné par sa descendance… Une belle bête agonisant, sa patte coincée dans l'étau de lourdes mâchoires de fer.

Moi qui croyait que poser ce genre de pièges était interdit…

Alice derrière moi soupira et je compris sa pensée. C'était triste pour lui de finir comme ça… Après une vie de chef de meute, après une vie intense, de chasses et d'amour, le voilà ramené à la vile réalité de la cruauté de l'être humain qui l'emprisonne, le fait souffrir.

Ma main flatta sa fourrure encore brillante et noire. L'animal n'avait même plus la force de se rebeller, de grogner, de claquer des dents. Mes mains écartèrent les dents de métal, libérèrent la patte déchirée de l'animal qui resta allongé dans la neige, la respiration lourde et sifflante de celui qui agonise, ses yeux jaunes plantés dans les miens semblant m'interroger « Vas-tu mettre fin à mes jours ? Que veux-tu de moi ? ». Cet animal me touchait au fond du cœur, et je consentis à couper court à ses souffrances en buvant les quelques gouttes de sang qu'il lui restait.

Ce loup était un animal qui ne méritait pas la mort. Un animal au sang pur. Un animal qui ressemblait à ce que j'aurais dû être. Une femme libre par sa force et sa puissance mais emprisonnée par les tâches et les responsabilités qui reposaient sur ses épaules… Il avait été trahi par sa meute comme je le serais par mon peuple vampire. C'était inéluctable. C'était mon destin… Et ce serait à jamais celui de toutes les Enreïkas qui peupleraient cette planète.

Je flattai tendrement l'encolure du loup qui gémissait absorbé sans le vouloir dans le néant. Courage… Cela ne dure qu'un temps. Après viendra ton apogée et tu vivras dans la mort pour l'éternité… J'achèverais bien maintenant tes souffrances mais ton sang me serait fatal si j'en buvais plus… J'ai déjà raccourci ta vie de quelques heures. Je ne peux faire plus…

Derrière moi, je sentais Alice vibrer de réprobation contenue. Elle avait beau dire que rien ne changerait entre son amour entre moi humaine et moi inhumaine humaine, je la sentais déjà se braquer face à ce nouvel aspect de ma personnalité. Je n'étais plus cette Bella douce et modulable à souhait, cette Bella qu'on aimait manipuler avec délicatesse comme une poupée de porcelaine.

Mes prunelles vertes se tournèrent vers elle. Je ne savais pas quoi dire. Je ne pouvais rien dire. D'un côté, je la voulais à mes côtés mais de l'autre je ne voulais pas d'elle si c'était pour qu'elle vive avec le souvenir d'un moi différent d'aujourd'hui. Si elle devait m'aimer c'était pour ce que j'étais maintenant et pas pour ce que j'avais été. Rien de ce que je pouvais dire ne devait influencer son jugement. Son choix, leur choix, ils devaient le faire seuls. C'était à eux de choisir s'ils voulaient l'unité de leur famille avec le danger que cela représentait ou la tranquillité et la paix que leur apporteraient mon absence.

Doucement, je me relevai, m'éloignai d'Alice et m'enfonçai dans la forêt, à la recherche de l'animal qui emplirait bientôt mes veines de sa puissance. Je m'arrêtai rapidement sur un caribou, encore… La nourriture était peu variée dans ce pays… Je bus sans plaisir, dans le seul but de me sentir plus vivante. Et si les lacérations de mon dos allaient en s'amenuisant au fur et à mesure des gorgées avalées, la brûlure de ma main refusait de s'estomper, laissant cette tâche violacée transparaître sur la blancheur de ma peau.

L'animal suivant me rendit toute ma force et je le laissai partir après m'être assuré qu'il ne se transformerait pas. Alice trouvait ça étrange. Que je ne tue pas mes proies. Mais puisque ce n'était pas nécessaire, et puisque leur mort me faisait souffrir, pourquoi les tuerai-je ?...

Elle semblait jalouse du contrôle que je possédais. Même si elle l'avait voulu, jamais elle ne pourrait s'empêcher de boire jusqu'à la dernière goutte le sang de sa proie. L'avantage que j'avais c'est que j'y étais obligée si je ne voulais pas endurer la mort de l'animal avec lui... C'était comme avec le sang de Timofey, il m'empoisonnait aussi tôt que le cœur de l'animal avait cessé de battre. Une manière comme une autre de m'interdire de prendre du plaisir dans la mort d'autres êtres vivants.

Mes pas me ramenèrent jusqu'au loup dont le dernier battement venait d'expirer, d'Alice et de Karl qui n'avait toujours pas repris conscience. Alice s'occupait à dissimuler le cadavre pendant que je vérifiais que Karl n'était pas encore mort de froid. Je le saisis aussi délicatement que possible et demandai :

- La maison est vide ?

- Oui. Tu veux y aller ?... me demanda-t-elle tout en s'affairant.

Je réfléchis quelques secondes avant de hocher la tête en signe d'assentiment :

- Ce serait bien… Les pompiers ne vont pas tarder à envahir les lieux et il vaudrait mieux que nous évitions la forêt pendant quelques temps… D'autant que maintenant que Karl est humain, il est plus vulnérable et l'interroger ici serait risquer de le voir mourir de froid. Si nous sommes seuls, chez vous, ce sera bien.

Ma sœur réassura sa prise autour du corps de Karl et ferma brièvement les yeux avant de secouer fermement la tête :

- La maison est libre jusqu'à demain matin. Jasper, Rose et Emmett sont partis chasser un peu plus loin là où il y a un grand nombre de grizzlis et comme Carlisle est de garde cette nuit Esmée a décidé de travailler sur un chantier pendant deux jours. Elle passera à l'hôpital mais ne reviendra pas à la maison… Quant à… Edward… on ne l'a pas vu depuis plusieurs jours, il ne reviendra pas ce soir…

Je pris une large inspiration. Ce nom… Personne ne l'avait prononcé devant moi depuis si longtemps… J'évitais d'y penser, cela faisait toujours moins mal. Et même si mon cœur m'élançait douloureusement, je ne laissai rien paraître.

- Très bien… Allons-y dans ce cas.

Je la laissai partir devant afin de suivre son rythme et de ne pas la dépasser. En moins de temps qu'il ne faut pour le dire, nous arrivâmes devant la magnifique maison bordée de stalactites. Je la suivis dans le salon où un magnifique feu flambait réchauffant l'atmosphère.

Je Karl sur le canapé devant le feu crépitant. Il grogna légèrement dans son inconscience : il se réveillerait bientôt.

- Vous avez de l'alcool fort ici ?

En fait je savais qu'il y en avait… Je sentais à travers l'odeur des Cullen celle douceâtre du Whisky qui provenait d'un meuble en acajou au coin de la pièce. Mais faire l'exposition de mes talents n'était pas ce que je recherchais pour l'instant. Ils apprendraient tous bien assez tôt à quel point je pouvais être dangereuse.

Elle esquissa un petit sourire jovial :

- Oui, jamais ouverte même… Vas donc prendre une douche pendant que je m'occupe de ce bonhomme là… Première étage sur la gauche. Mais tu le sais déjà…

J'eus un léger sourire :

- À vos ordres petit lutin…

Et avec plaisir même…

J'escaladai rapidement les marches des escaliers et trouvai sans difficulté la salle de bain attenante à la chambre d'Alice et Jasper. Ce fut avec délice que je me glissai sur l'eau brûlante de la douche… Rapidement, une tâche rouge s'étala à mes pieds alors que tout le sang séché sur mon corps s'évacuait dans les canalisations.

Je poussai un soupir d'aise, glissant mes doigts dans mes cheveux mouillés, me massant le cuir chevelu puis la nuque et les épaules. À regret, je finis par sortir de la douche, enroulant une serviette autour de moi et saisissant une paire de ciseaux de coiffeur dans les affaires de ma meilleure amie.

Mes boucles tombèrent au sol et se désintégrèrent presque aussitôt, me laissant une coiffure plus aérée, moins lourde, coupée juste au-dessus des épaules. Ils auraient tôt fait de repousser…

J'enfilai les vêtements propres déposés sur le lit, soit un jean et un pull angora blanc, avant de nouer mes cheveux sur ma nuque en une simple queue de cheval. Puis je dévalai les escaliers avec un grand sourire pour rejoindre ma meilleure amie et les autres personnes que j'avais entendu arriver durant ma toilette…

J'arrivai par derrière, contemplant les épaules musclées de mon beau-père qui tenait dans ses bras mon petit ange qui regardait dans ma direction. Il discutait activement avec Alice et aucun des deux ne semblait avoir ressenti ma présence.

Je posai un doigt sur mes lèvres et adressai un clin d'œil complice à ma petite Eden qui en retour eut un grand sourire de petite fille.

Parfaitement silencieuse, je me glissai dans le dos de mon futur beau-père et déposai un baiser sur le bout du nez de la petite fille avant de murmurer à l'oreille de Carlisle un léger « Bouh ! ». Ce dernier eut une réaction bien au-delà de mes espérances en se projetant avec violence contre le mur du salon, un bras protecteur enroulé autour d'Eden, jambes fléchis, crocs sortis et les yeux devenus d'un noir total.

Je ne peux alors pas m'empêcher d'éclater de rire face à sa posture animale. Alice elle-même souriait de toutes ses dents, se retenant à grande peine de rire à son tour pour ne pas heurter la fierté de son père qui tirait à présent une tête de six pieds de long…

Il redescendit au sol et lissa ses vêtements toujours impeccables, tentant tant bien que mal de nous faire oublier son visage tellement vampirique pour l'image du médecin policé et gentleman et recouvrer un peu de sa dignité. S'il avait pu, aucun doute que ses joues auraient pris une teinte rosée très révélatrice de son état de honte.

- Hem… Re-bonjour Bella, moi aussi je suis content de te voir…

J'eus un sourire plein de dents et répondis, carnassière :

- C'est amusant, on n'aurait pas dit il y a quelques secondes…

Alice se mordit la lèvre, les yeux pétillants, alors que Carlisle me fusillait du regard.

- Je… J'aurais pu faire du mal à ta fille, est-ce que tu t'en rends compte ?

Je lui adressai une petite moue moqueuse :

- J'ai confiance en vos réflexes Carlisle…

Alice intervint avant qu'il ne puisse répliquer :

- Attendez deux minutes… J'ai l'impression d'avoir ENCORE loupé un épisode là… Depuis quand tu as une fille Bella ?... Blonde de surcroît, ajouta-t-elle en jetant un coup d'œil à Eden. Et qui est le père ?

Je lui jetai un coup d'œil surpris :

- Ça non plus tu ne l'as pas vu ? J'aurais pourtant cru que l'arrivée d'une humaine chez vous marquerait tes visions…

Elle secoua la tête, faisant voler ses mèches de cheveux dans tous les sens :

- Je savais qu'elle viendrait… C'est le fait qu'elle soit ta fille qui m'était inconnu !

Je hochai lentement la tête :

- Je comprends… Et bien… Eden n'est pas ma fille biologique bien sûr… Mais j'ai décidé de l'adopter. Elle fait partie des enfants qui habitaient dans l'orphelinat de… tout à l'heure.

Alice fronça les sourcils, tentant de comprendre.

- Tu l'as connu où ?

- Je l'ai trouvée blessée dans la forêt, je l'ai amenée à l'hôpital, j'ai découvert ce qui se tramait dans son orphelinat et j'ai décidé de l'adopter.

C'était vraiment résumé mais... ça ferait l'affaire pour le moment. Alice me comprit à demi-mot :

- D'accord, tu m'expliqueras plus en détail plus tard. Dis-moi plutôt ce que tu comptes faire de cet humain, me demanda-t-elle en pointant Karl du doigt.

Je hochai doucement la tête alors que Carlisle, prévenant, montait Eden dans sa chambre pour la coucher. Je commençai mes explications, persuadée qu'il entendait tout de là où il était :

- Karl est un des soldats à la solde des Volturi, la famille de vampires qui soumet l'Italie et même l'Europe entière. Ceux-ci ont fait de l'orphelinat d'Eden un garde-manger pour vampires de passage dans les contrées du nord... C'est tout simplement inconcevable. Nous ne pouvons pas leur laisser tant de pouvoir. Tant qu'ils ne nuisaient à personne et contribuaient à maintenir un certain ordre sur les vampires, nous pouvions les tolérer. Cependant, cela fait déjà un siècle ou deux que leur soif de pouvoir semble s'être décuplée jusqu'à organiser des massacres d'une telle cruauté et tellement manifestement inhumains que nous nous devons de les stopper. De plus, ils ont soumis l'une d'entre nous, dès son apparition. C'est un crime contre-nature. Détenir son pouvoir, la forcer à commettre des actes qu'elle n'est pas censée faire c'est comme maintenir une épée de Damoclès au-dessus de notre tête à tous, vampires, humains ou autres créatures peuplant notre planète.

Je récitai le tout comme si c'était un discours que je lisais, préparé à l'avance depuis des jours et des jours. Pourtant, tout se mettait peu à peu en ordre dans ma tête, comme les pièces d'un puzzle trouvant soudainement leur place dans un tableau aux dimensions extravagantes. Je repris non sans réfléchir et analyser attentivement chacun des mots qui sortaient de ma bouche :

- Nous devons les détruire. Tous. Non seulement les chefs Volturi mais aussi leurs bras droits, leur garde, leurs soumis. Tous ceux qui pourraient un jour vouloir répandre la parole des Volturi et de nouveau créer un royaume parmi notre empire... Pour cela, nous devons recueillir des informations auprès de Karl... Leur nombre, leurs pouvoirs, leurs façons de penser, leurs relations, ceux qu'ils haïssent plus que tout, la disposition du château, et surtout, la situation d'Elizabeth...

Alice me coupa :

- Attends deux minutes, je ne comprends pas tout... D'abord, qui est-ce « nous » ? Et ensuite, qui est cette Elizabeth ?

Je soupirai et m'effondrai dans un fauteuil, prête pour un long interrogatoire, avant de répondre, les paupières closes :

- « Nous », les Enreïkas, reines, maîtresses du monde vampirique, justicières, juges, bourreaux, trois anciennes humaines aux pouvoirs hors-normes, avec en nous quelque chose de vampirique et d'humain à la fois... Choisies pour empêcher les vampires de prendre le pouvoir et d'anéantir la race humaine entre autre. Nous sommes trois. Je suis la dernière-née. Quand l'une des trois meurt, elle est remplacée aussi vite que possible par une nouvelle, ce qui veut dire qu'une Enreïka a récemment été détruite.

J'ouvris un instant les yeux pour voir qu'Alice m'écoutait très attentivement, et que Carlisle nous avait rejointes puis repris :

- Je ne sais pas encore exactement qui sont les deux autres Enreïkas qui règnent à mes côtés, ni pourquoi l'une d'entre elle n'a rien fait ces derniers siècles pour empêcher certaines guerres vampiriques particulièrement dévastatrices, ni la nouvelle hégémonie des Volturi. Cependant, Elizabeth est la deuxième Enreïka, celle que je connais un tant soit peu, en quelque sorte mon mentor, et également la prisonnière des Volturi.

- Comment peux-tu faire confiance en son enseignement si elle est auprès des Volturi ? Comment peux-tu être certaine qu'elle n'est pas passée dans leurs rangs ? m'interrompit Alice, curieuse et quelque peu méfiante.

Je hochai la tête songeuse :

- C'est une bonne question. Je dirais que c'est viscéral. Elizabeth a été autrefois orpheline ici. Avant même sa transformation, elle et sa sœur ont été sous le joug des Volturi. De plus, ils possèdent sa sœur comme moyen de pression... Elle ne peut pas me tromper. Je le sentirais, tout comme je sens la haine qu'elle éprouve lorsqu'elle évoque les Volturi. J'ai autant confiance en elle qu'en toi Alice. C'est... ma sœur.

Elle hocha la tête, à peine convaincue par mon beau discours. Alice était pourtant quelqu'un qui faisait facilement confiance... Peut-être était-elle simplement jalouse que je considère quelqu'un d'autre qu'elle comme une sœur... Ou peut-être son sixième sens l'avertissait-il d'un quelconque danger. Allez savoir...

D'ailleurs... En parlant de sixième sens... Alice se raidit brutalement, les yeux grands ouverts alors qu'une drôle de sensation me traversait moi-même le corps. Brusquement, le décor autour de moi disparut, faisant place à un paysage extérieur, où deux créatures courraient, toutes deux empreintes d'une grâce et d'une puissance inhumaine. Je ne distinguais pas vraiment leurs traits, seulement leurs chevelures, d'un rouge sang pour l'une et plus blanche pour l'autre. Ils courraient côte à côte, avec plus ou moins d'urgence. Soudain apparut une grande maison dans leur champ de vision et elles s'arrêtèrent simultanément. Là, le visage de la belle vampire aux yeux violets apparut, tandis que celui de l'homme à ses côtés restait flou, ce qui ne m'empêcha pas de le reconnaitre... Un couple de vampire et d'elfe, je n'en connaissais qu'un. Tess et Ventag sans aucun doute. Mais que faisaient-ils donc ici ?

Je revins soudainement à la réalité alors qu'Alice me fixait d'un œil interrogateur. Elle n'avait pas remarqué mon absence, contrairement à Carlisle qui fronçait les sourcils sans comprendre. Elle hésita sur ses mots puis nous décrit l'objet de sa vision :

- J'ai vu deux personnes. Un homme et une femme. Leurs intentions sont pacifiques, mais ils veulent parler à Bella. Ils te connaissent apparemment... Par contre je ne parviens pas à voir le visage de l'homme, comme s'il portait un... masque. La femme est une vampire. Et ils seront là d'ici un quart d'heure.

Bon bah j'avais des progrès à faire niveau précision de vision... Je hochai la tête et répondis à sa question muette :

- Ce sont des amis. Mais je ne sais pas pourquoi ils veulent me voir... A priori ils sont fort capable de se débrouiller seuls, quel que soit le problème.

Mon instinct me disait cependant que ça ne les concernait pas personnellement mais qu'ils venaient plutôt en messagers m'annoncer quelqu'insatisfaisante nouvelle. Mes lèvres s'étirèrent en une moue agacée et je soupirai :

- On verra bien quand ils seront là. En attendant... Parlons à Karl.

Nous eûmes tôt fait de le réveiller, même s'il refusa encore une fois de livrer toute information... Avec étonnement, j'appris cependant que Carlisle avait vécu un temps avec les Volturi et qu'il pouvait lui-même me renseigner sur mes ennemis, bien qu'il n'approuve absolument pas l'attaque d'un clan si puissant. J'aurais très certainement une longue voire très longue discussion avec lui à leur sujet... Je savais parfaitement que par-dessus tout, il ne voulait pas mettre sa famille en danger, et de toutes les manières, je ne le forcerai jamais à prendre parti dans la bataille. Mais il devait savoir que dès à présent ma vie ne m'appartenait plus vraiment et que j'étais quelque part gouvernée par une main plus puissante qui m'interdisait d'ignorer les problèmes, les souffrances et les massacres qui s'organisaient autour de moi. Même s'il ne le voulait pas, il serait confronté tôt ou tard au problème. On le forcerait à choisir son camp. Et cela risquait fortement de diviser sa famille... Alors s'il désirait que je parte, je partirais... Mais pas avant de lui avoir demandé de choisir la voie qu'il voulait suivre. Danger, sang, douleur, dilemmes, vie nomade et... moi. Ou vie pacifique, simple, tranquille, au sein d'une famille aimante. Même pour moi, le choix n'était pas difficile...

Karl finit par parler, en échange de ma promesse de garder Demetri en vie, nous fournissant des renseignements que Carlisle n'avait plus en sa possession, son contact avec les Volturi n'étant plus aussi fort qu'il y a quelques années...

Je rangeai soigneusement toutes ces informations dans ma mémoire, évitant autant que possible de les partager avec Elizabeth... Je ne voulais pas qu'elle en sache trop au cas où les Volturi fassent pression sur elle pour me contrer. Plus j'avais de cartes Joker en ma possession, plus mes chances de démanteler ce réseau de vampires psychopathes, sanguinaires et un peu tablés – l'aperçu que m'avait donné Carlisle de Aro Volturi me faisait me poser des questions sur sa santé mentale – étaient grandes...

Les Volturi avaient apparemment plus ou moins déménagé depuis l'époque où Carlisle les côtoyait. Même s'ils résidaient toujours au même endroit, ils avaient tout réorganisé, s'étendant dans la ville, s'installant dans les sous-sols, créant un véritable monde sous-terrain dans lequel ils avaient fondé une seconde ville évoluant parallèlement à la première... Les soubassements de la cité recueillaient un bon nombre de cachots qui renfermaient ennemis encore utiles, secrets enfouis, trésors, créatures peu connues des humains, et une grande réserve de nourriture fraîche, élevée en captivité parmi les vampires, dans l'ignorance de leur fin première.

Se déplacer dans cette ville sous-terraine était chose aisée quand on y avait vécu plusieurs années, mais pour un non-initié, même avec des sens surdéveloppés, c'était impossible sans une aide intérieure. Le caveau où était enfermée Elizabeth se situait dans les profondeurs de la ville, dans un endroit surveillé constamment par une patrouille des vampires les plus puissants de la garde volturienne. Sans laisser-passer, et sans montrer patte blanche, il était chimérique de penser pénétrer dans les cachots. Mais lui savait comment s'y rendre, et était l'un des rares vampires auquel Aro avait toute confiance. Raison pour laquelle, moi je ne pourrais pas lui faire confiance.

La ville comportait en général entre mille et mille cinq-cent vampires qui allaient et venaient de Volterra. C'était la capitale vampirique, la ville qui regroupait au monde le plus de vampires. De ci de là, certains avaient tenté de copier le procédé pour faire naître d'autres villes de cet ampleur, mais sans succès. C'était à peine si on atteignait une centaine de vampires dans la ville de Moscou, ou encore dans d'autres grandes capitales. Etrangement, c'était dans cette petite ville de Volterra que les vampires parvenaient à faire oublier leur existence...

Depuis dix minutes déjà, je discutai avec Carlisle pour étoffer ma vision des Volturi, mais il me faudrait probablement plus qu'un interrogatoire et les renseignements d'un ex-ami des massacreurs en chef pour fomenter un plan d'attaque contre la famille de vampire la plus puissante de la planète. Alice, Carlisle et moi, avions totalement occulté la présence de l'ex-vampire, nouvel humain traumatisé, jusqu'à ce que celui-ci se mette à se balancer d'avant en arrière en murmurant un mantra genre « Ils vont me tuer... me tuer... me tuer... », avec un air fanatique, petit sourire en coin exultant... Flippant.

Alors que je m'apprêtai à contrecœur à le rassurer sur son misérable sort, Tess et Ventag débarquèrent comme une tornade dans la villa Cullen...

J'eus tôt fait de remarquer le regard blasé de l'elfe alors qu'il laissait parler la belle vampire, affolée. Ça ne le concernait pas véritablement mais... il était quand même là. Parce qu'il n'avait rien de mieux à faire sans doute.

- On a un problème Bella, un GROS problème. Les Volturi. Ils sont venus au manoir. Ils ont capturé Timofey et Mathanaël. Et... Ils ont emmené tous les autres vampires... Les Sans-Âmes.

Ma respiration se bloqua dans ma poitrine alors que j'entendais ces nouvelles, pétrifiée. Comment avaient-ils pu déjà préparer une riposte ? Être au courant du massacre à l'orphelinat ?... Et de mon « amitié » avec Mathanaël et Timofey ?...

Il devait y avoir là-dessous quelques pouvoirs vampiriques dont je ne connaissais pas l'existence. Et qui pouvaient percer la carapace d'une Enreïka. Ou alors ils avaient simplement mis Elizabeth à contribution... Ce n'est pas comme si elle était en mesure de leur refuser quoi que ce soit.

Mon cerveau fonctionnait à toute allure. Non seulement ils avaient trouvé de quoi faire pression sur moi, mais ils s'étaient constitué une petite armée de vampires encore plus impitoyables que les Unici pouvaient l'être, puisque dépourvus d'un semblant de conscience humaine. Ce n'était que des animaux. Un troupeau de bêtes sauvages. Qu'ils s'apprêtaient à jeter sur moi, mes amis, ma famille, et tous ceux qui s'opposeraient à eux.

Ô joie.

Cette fois la bataille sera équilibrée...

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Et voilà ! Reviews ? ^^