Ici, je dois faire rejoindre certaines choses avec le Grand Délire. D'une certaine manière, ça rejoint aussi mon ancienne fic sur Rufus, "Petit Ange". Dolly, t'auras peut-être la réponse à quelques questions que tu te posais.

Angst, angst, angst...


Les jours passèrent, mais ma rage ne diminuait pas. Tout était inutile, toutes les bonnes choses de ce monde n'étaient que des illusions s'effritant comme des cendres devant la cruauté et le mal. J'avais cru pouvoir rester pur et pouvoir purger cette terre du mal au moins un peu. Je m'éveillais les mains tachées de sang dans un monde horrible qui ne changeait que pour empirer.

Pourtant, je n'arrivais pas à me résoudre à mourir. Que je sois là ou non ne changerait rien, mais… je savais qu'il me restait encore une tâche à accomplir. Laquelle, je ne savais pas. J'attendais. Je mangeais et buvais mes repas, ne goûtant plus aucune saveur. Les autres Turks venaient régulièrement me voir, mais je refusais de communiquer avec eux. Leurs regards chargés de pitié faisaient bouillir le sang de mes veines.

Tetsuyo me dit que Shotgun, la seule que j'aurais voulu voir ne serait-ce qu'un peu, l'évitait et repoussait toutes les demandes de visite pour moi qu'on lui faisait. Elle était apparemment très touchée par la mort de Lydia, plus qu'elle ne se laissait affecter par les choses en général.

J'aurais simplement voulu lui demander pourquoi ses dernières paroles pour Lydia furent des mots de haine… mais je me doutais bien pourquoi : elle la haïssait de s'être laissée mourir, de lui laisser la responsabilité de sa petite sœur, elle la haïssait parce qu'il ne restait rien d'autre en elle qui ne soit pas une illusion ou une vanité. Et elle le savait très bien.

On me mit sous calmants et on me garda à l'hôpital après la guérison de mon corps. Les visites cessèrent peu à peu ; j'étais abandonné par les Turks, Verdot avait envoyé Tseng pour me faire signer ma démission. Cela m'importait peu, sur le moment, mais par la suite je le regrettai vivement. J'aurais voulu faire quelque chose, j'aurais voulu retourner au repaire de Don Cornéo et cesser de faire semblant, j'aurais voulu tuer, tuer des hommes et des encore des hommes, jusqu'à ce que je m'écroule pour de bon.

Choc post-traumatique ? Pourquoi enfoncer ma réalité dans un cadre si contraignant ? On parlait autour de moi de thérapies, de médicaments, et je savais déjà que je ne voulais pas être guéri.

Je voulais brûler – cautériser – les choses. Le feu déchirerait l'obscurité, mais les ténèbres envahissaient mon cœur.

J'en étais à ces sombres pensées depuis un temps que je ne pouvais mesurer – ma perception des choses était floue à cause des antidépresseurs que je prenais à la pelle pour supporter la condition du monde et des choses – quand soudain, un homme que je ne connaissais pas vint me visiter.

De taille moyenne, il paraissait néanmoins plus grand à cause des vêtements immaculés dont il était entièrement vêtu. Ses cheveux blonds étaient soigneusement coiffés vers l'arrière. Soudain, je me souvins l'avoir déjà vu : il s'agissait de Rufus Shin-Ra, le Vice-président de la Compagnie !

À peine entré dans ma chambre, sans même me lancer un seul regard, il me jeta un carnet et un stylo à la figure, puis il alla à la fenêtre pour fermer les rideaux. Enfin, alors que seules quelques lueurs artificielles baignaient la pièce, il m'adressa la parole, me tournant toujours le dos.

-Alors, tu as prévu de croupir ici encore longtemps ? Les Turks t'ont viré, tu n'as plus aucune raison de traîner dans cet hôpital militaire. Je devrais te faire faire des papiers de transfert pour la pire clinique des Taudis… C'est pathétique, tu ne trouves pas ? Raphaël ?

Il se tourna vers moi et me sourit tristement. Je crois que mon propre visage devait simplement avoir l'air surpris.

-Bon, voyons ce qu'il y a là-dedans, le résumé qu'on m'a donné était loin d'être complet, expliqua-t-il en prenant mon dossier au pied de mon lit.

Je fis un geste futile pour l'arrêter, mais il l'avait déjà ouvert et en feuilletait les pages. La faible lueur restante ne lui suffisant pas, il se mit près de moi et alluma la lampe de chevet. Je n'avais qu'à lever la main pour le toucher.

-Alors… un cas d'apathie, choc post-traumatique, nervosité, refuse de communiquer. Peut avoir des idées suicidaires ou meurtrières – sujet à surveiller, récita-t-il d'une voix indifférente avant de se tourner vers moi. Tu es d'accord avec ça ?

Je fis lentement signe que oui de la tête. Ils pouvaient bien dire ce qu'ils voulaient, ça m'était égal. De toute façon, c'était probablement vrai, puisque la vérité ne pouvait qu'être mauvaise et indéchiffrable.

-Hé bien, que fais-tu encore là ? Qu'est-ce qui te retient encore ?

Je pris une moue dédaigneuse et je lui pointai les médicaments sur ma table de chevet.

-Je vois. Tu as envie que je te donne d'autres drogues ? De celles qui te réveillent au lieu de t'endormir ?

Pour la première fois depuis mon hospitalisation, je pris le stylo qui m'était offert et j'écrivis une réponse.

« Je n'ai pas besoin de quoi que ce soit. Laissez-moi tranquille. »

-Tu as besoin de tuer, n'est-ce pas ?

Je fus surpris, non par sa réponse, mais par son ton nonchalant. Je compris alors quel genre d'homme était Rufus Shin-Ra : un homme prêt à tout pour parvenir à ses fins. J'écrivis :

« Qu'attendez-vous de ma part ? »

-Bien sûr. La raison de ma venue.

Il s'assit sur mon lit et se tourna vers moi. Je ressentis une sorte de malaise à le sentir si proche, alors que je ne portais qu'une chemise d'hôpital, comme si son seul regard suffisait à me transpercer, comme si sa seule présence me faisait frissonner. Je crois que si j'avais été une femme, j'en aurais aussitôt été amoureuse. Il dégageait un charisme incroyable ; il était digne d'être le Vice-président de la Shin-Ra, il méritait les sommets.

-Je cherche de bons combattants pour une force spéciale de SOLDIER. Des combattants silencieux utilisant les techniques wutaiennes, dit-il tranquillement. Je crois que ce poste sera parfait pour toi.

« À quoi bon ? » écrivis-je.

-On dirait que tu n'as toujours pas saisi la réalité. La tienne. Tu ne pourras pas demeurer ici éternellement. On ne peut pas s'isoler totalement et indéfiniment du monde. Que feras-tu alors ?

Il avait raison, mais je ne voulais pas l'envisager. Je pris ma tête entre mes mains et restai prostré durant quelques instants mais Rufus me prit par les épaules et me força à le regarder. J'aurais voulu fuir son regard, mais il était si près et si insistant qu'il était impossible de lui échapper.

-Vivras-tu dans un monde de mort ou bien resteras-tu comme un mort toi-même ?

Plongé dans son regard bleu, je compris alors qu'il était comme moi. Il avait noirci son cœur et rougi ses mains. Et il s'était relevé.

Je hochai légèrement la tête. J'étais prêt à le suivre ; à quitter ces murs, ces draps et ces drogues. Un monde de mort m'attendait, je le savais. Et je savais aussi que plus de morts et de sang m'attendraient. Il n'y avait rien d'autre, de toute façon. Je soutiendrais la guerre de Rufus Shin-Ra contre le monde, sang contre sang, jusqu'à ce qu'il ne reste plus rien qui ne soit pur et monstrueux.


Honnêtement, je ne sais pas si c'est une bonne ou une mauvaise fin pour Raphaël. À vous de juger.

Je vais poster le dernier Arc à partir de demain: l'Arc de Shotgun. J'espère que vous me suivrez jusqu'à la fin!

Un grand merci à Zephyree et à Yukira Shiroi pour la lecture fidèle, ça me touche beaucoup, honnêtement je ne pensais pas que personne pourrais s'intéresser à une fic sur les Turks de Before Crisis... Alors merci encore, et à demain!