Bonjour,
je suis partagée entre la satisfaction d'avoir terminé cette histoire, d'en être venu à bout et un peu de mélancolie à l'idée de mettre le point final. Je suppose que ceux parmi vous qui écrivent pourront me comprendre.
En tout cas, une chose est certaine : j'ai écrit cette histoire avec beaucoup d'amour et de conviction.
Je ne voulais pas que ma fic' donne une impression de « déjà lu » comme on le retrouve dans beaucoup de fanfictions. J'espère que vous l'avez trouvée originale.
Excusez moi pour les problèmes de mise en page pour ce chapitre mais je rencontre quelques problèmes avec mon Document Manager. J'ai été obligée de reprendre mon texte phrase par phrase parce que DM les avait toutes collées les unes aux autres et avait au passage avalé quelques mots. J'y ai passé 2h30.
Je tiens à vous remercier d'avoir suivi cette fanfiction et de m'avoir laissé autant de reviews.
Je pense qu'on se reverra prochainement, j'ai en effet beaucoup de projets dont un qui me plait particulièrement. J'en ai rédigé le plan et j'ai commencé le premier chapitre. Évidemment c'est basé sur Sévy chéri!
Pour finir, je tiens à remercier Lasiurys, l'auteur de la magnifique fanfiction Down in his eyes' heart, que je vous conseille de lire si ce n'est déjà fait. Lasiurys a en effet pris le temps de relire mon épilogue et de me prodiguer ses précieux conseils.
Je vous embrasse tous, je vous remercie d'avoir suivi cette fanfiction jusqu'au bout. Promis, je prendrai, cette fois ci, le temps de répondre à chacun(e )s d'entre vous.
Sur ce, je vous souhaite une excellente lecture…
Votre Ptitegridou.
Epilogue
Bercé par la mélodie nocturne de la forêt endormie, guidé par une puissance mystérieuse, il suivait ce chemin oublié, rongé par les racines, les broussailles, les épines et les mauvaises herbes, sans aucune hésitation…
Il sentait au plus profond de lui que la fin du voyage était proche…
Dès le lendemain de leur nuit d'amour, Hermione était partie chercher ses affaires aux grottes. Le tout tenait en un simple carton. Elle emménagea chez lui.
C'était la première fois que le sorcier entamait une vie de couple. Il était terrifié mais jamais il n'en souffla un mot.
Chaque matin, il se réveillait avec le corps chaud de la jeune femme blottie contre lui, son souffle brûlant sur sa peau pâle et froide.
Il avait résisté à sa demande de lui faire un enfant. Vainement. Mais l'enthousiasme dégoulinant de sentimentalisme de sa chère et tendre n'avait pu être entamé par ses attaques acides. Était-ce la maladie, la fin de la guerre ou l'amour qui l'avait ramolli, mais Severus Snape céda face à ce petit bout de sorcière.
Néanmoins, une chose le contrariait. Comment une femme pouvait-elle élever seule un enfant? C'était indécent. Hermione lui rappela que dans le monde moldu, c'était très répandu. Beaucoup de femmes ou d'hommes célibataires parvenaient à avoir un travail et à élever leur progéniture.
Cette idée gênait Snape. Malgré lui, il attachait de l'importance aux valeurs de la communauté magique. C'était ainsi que Hermione était devenue Mme Snape très rapidement après la nouvelle de sa grossesse. Dans la société sorcière, assez traditionnelle et arriérée en ce qui concerne les mœurs, être une fille-mère était un scandale.
Par pur esprit de provocation et de contradiction, Hermione aurait pu être tentée de refuser la demande de Snape, mais le voir, à genoux devant elle, lui réclamer d'être son épouse n'avait pas de prix. Elle n'hésita pas un instant et le pauvre homme sentit une masse lourde et chevelue lui sauter dessus en hurlant « oui » avec enthousiasme.
Ce fut une petite cérémonie à la fois sobre et poétique.
La sorcière ne devait jamais oublier le visage crispé par l'émotion de son mari, qui avait fait l'effort de se lancer un "Glamour". Des fleurs d'acacia se décrochaient de leurs branches, virevoltaient au gré de la bise et tombaient gracieusement là où elles le désiraient : dans les cheveux, sur l'herbe, dans le buffet, dans le jus de citrouille…
Hermione avait transformé la robe austère de Snape en parure en lin blanc, et ce à l'insu de celui-ci. Elle-même avait revêtu une robe de mariée blanche, à la mode moldue.
Ils avaient choisi de se marier chez eux et n'avaient invité que les proches d'Hermione. Rémus et Harry avaient été leurs témoins, au grand dam du marié.
Mrs Weasley n'avait cessé de tordre son mouchoir en tissu tout en fixant le ventre encore plat de la mariée.
"Tout de même, répétait-elle, tout de même…"
Bien entendu, les jumeaux Fred et George avaient versé un élixir de fou rire dans le jus de citrouille. Snape, qui avait reniflé puis reposé immédiatement son verre, s'était bien gardé de prévenir qui que ce soit.
Charlie était accompagné de Gabrielle Delacour, qui était en vacances chez sa sœur. Ils ne comprenaient pas un mot de ce que disait l'autre mais Hermione comprit en voyant leurs joues s'empourprer dès qu'ils se regardaient et les sourires timides qu'ils s'échangeaient, qu'une amourette naissait entre eux. Le jour du mariage, ils passèrent l'après-midi à cueillir des campanules dans la clairière et à confectionner des couronnes.
L'amour se passe des mots.
Septembre se mourrait et l'été avec lui.
Snape avait un faible pour l'Automne. Il aimait son odeur terreuse, que la pluie avivait, le vent vif, qui soulevait gracieusement les feuilles mortes…C'était la dernière étreinte qu'offrait la Nature avant son hibernation.
Draco était passé brièvement féliciter le marié. Le sorcier attendait son procès qui devait se dérouler en décembre. Néanmoins son parrain ne se faisait pas de souci pour lui, étant donné que le jeune homme n'avait tué personne et, qu'au contraire, il avait sauvé des centaines de vies en coopérant avec lui.
Le blondinet avait salué Hermione d'un hochement de tête et lui avait donné un paquet, sans dire un mot, puis il s'était détourné et avait croisé le regard de Harry.
- Potter
- Draco, avait salué le sorcier en lui tendant la main.
Son vieil ennemi fixa cette main de son regard froid, si longtemps que le binoclard, vexé, commença à la baisser. Au dernier instant Draco l'attrapa de ses longs doigts pâles. Ils s'étaient regardés et aucun mot ne s'échappa de leurs bouches.
- Comment va votre mère? avait demandé Snape.
Le blondinet ricana en tournant son attention vers son parrain.
- Comme une femme enfin libérée de son mari et de la Magie Noire, répondit-il. Quant aux autres, ils enragent et écument les grimoires.
Le visage du jeune homme s'obscurcit et il jeta un coup d'œil à la mariée qui papotait avec Ginny.
- Je crois qu'au fond ils sont soulagés, avoua-t-il. Ils sont vivants, Lui ne les menace plus, ils ont retrouvé leur liberté…
- S'habituent-ils à la vie de moldus? demanda Harry.
- Non et ils n'ont pas l'intention de s'y habituer.
- Je suis certain que ma femme a tout mis en œuvre pour empêcher nos anciens comparses de récupérer leurs pouvoirs.
Les deux hommes frissonnèrent en entendant Snape appeler Hermione « ma femme », tandis que celle-ci se tourna vers lui, un sourire éblouissant aux lèvres.
- Oh mon chéri, cela sonne si bien! s'écria-t-elle, enthousiaste en lui déposant un bisou sonore sur la joue.
Les témoins ricanèrent, le marié rougit et la mariée les ignora.
- Vous restez pour le gâteau, Mr Malefoy? avait demandé Snape, en repoussant un peu les effusions publiques de son épouse.
Deux mois plus tard, Snape était hospitalisé à Sainte Mangouste. Un de ses reins l'avait lâché.
Hermione, enceinte de trois mois, resta à son chevet. Harry, Rémus, Ginny, la famille Weasley au complet, toutes ses connaissances défilèrent dans l'étroite chambre. Chacun apporta ses paroles de réconfort à la sorcière mais personne ne put la contraindre à quitter son époux, ne serait-ce qu'un instant.
- Voyons Hermione, avait insisté Harry. Il n'a pas besoin que tu restes collée à lui pendant qu'il dort.
- Je veux être à côté de lui quand il se réveillera, répéta la jeune femme en essuyant les larmes qui coulaient abondamment sur ses joues.
- Il ne va pas se réveiller tout de suite.
- Cela, tu n'en sais rien! répliqua-t-elle sèchement.
Mrs Weasley vint, chaque jour; lui apporter des petits plats. Lors de la séparation de Charlie et d'Hermione, elle était un peu fâchée contre la sorcière pour avoir brisé le cœur de son fils. Cependant, elle avait été contrainte de ravaler ses sentiments amers devant l'amour ardent et inconditionnel qu'Hermione éprouvait pour Severus Snape.
La situation était vraiment critique et le médicomage qui suivait Snape avertit Hermione, un matin, qu'il était fort possible que la durée de vie du malade touche précocement à sa fin.
La jeune femme pleura toute la journée, allongée sur le lit de son époux, le visage caché entre son cou et son épaule.
Ce fut Neville Londubat qui apporta un peu de baume à son cœur désespéré. Il revenait d'un séjour en Chine où il avait récolté des plantes pour sa collection personnelle mais surtout pour aider son amie à sauver son mari. Ses valises débordaient de plantes et fleurs rares et puissantes.
Il parvint à convaincre Hermione de sortir de l'hôpital pour l'aider à concocter une potion qui, faute de sauver Snape, pourrait au moins ralentir la propagation du poison.
Alors qu'Hermione mélangeait savamment de l'asphodèle, de l'ellébore et de la racine de mandragore, Neville se prit les pieds dans un chaudron et quelques unes des feuilles de houx qu'il portait afin de décorer sa modeste demeure tombèrent dans la mixture verdâtre.
La sorcière émit un cri, à la fois énervé, surpris et apeuré tandis que Neville se mordit les doigts en priant pour qu'elle ne le gronde pas.
Heureusement pour le jeune maladroit, un miracle se produisit et la couleur verdâtre commença à pâlir, de plus en plus, pour prendre une teinte aussi claire que l'eau.
Ils retinrent leur souffle.
- Hermione? souffla timidement Neville en remarquant que les larmes qui perlaient aux coins des yeux de la jeune femme.
Elle leva lentement la main pour lui intimer l'ordre de se taire et tendit son autre main, qui tremblait, vers une fiole.
- Va chercher le cobaye numéro 11, s'il te plait.
- Ernest?
Hermione roula des yeux. Combien de fois lui avait elle dit de ne pas donner de nom aux souris?
Le sorcier revint, tenant au creux de ses mains une petite souris noire. La créature avait perdu la moitié de ses poils et semblait dans un état comateux.
- Pose-le sur la table.
Dès qu'il exécuta sa directive, elle lança à la souris un sort de Vérification médicale. Le corps immobile se couvrit de teintes rouges et bleues. Le rouge recouvrait les trois quarts de la peau et la zone continuait de s'étendre, à mesure que le poison se propageait.
Hermione pâlit, Neville verdit.
Doucement, de sa gestuelle précise, la sorcière versa quelques gouttes de la potion dans le museau de la souris.
Pendant plusieurs secondes, rien de nouveau ne se produisit. Ni dans les minutes qui suivirent.
Hermione resta vingt minutes, debout, à fixer le corps de l'animal. Puis de dépit, elle balança sa louche contre le mur qui lui faisait face avant de sortir en courant du laboratoire.
Neville soupira. Il rapprocha un tabouret de la table et s'assit. Il glissa ses doigts sur les quelques poils de la souris en lui murmurant des paroles réconfortantes.
Effondrée dans le fauteuil, Hermione pleurait. Elle avait l'impression de passer son temps à sangloter ces derniers temps. Son mari l'avait prévenue. Voir quelque un qu'on aime mourir est d'autant plus terrible quand on est impuissant. Elle avait besoin de vaincre la Mort, ne serait ce que pour quelques mois. Elle demandait juste que Snape rencontre son enfant. La vie lui devait bien cela.
- HEEEEERRRRRMIOOOOOOONEEEE ! Hurla Neville à pleins poumons.
La sorcière bondit sur ses pieds et se précipita dans le laboratoire où son ami l'attendait.
- Regarde! Regarde!
- Qu'est-ce qu'il se passe, Neville? Demanda Hermione en se rapprochant de la table.
- Cela ne bouge plus.
- Qu'est-ce qui ne bouge plus? Grogna-t-elle, agacée.
- Les zones de couleur, répondit-il en un murmure.
Elle se pencha sur le corps de la souris. La zone rouge monopolisait toujours la majeure partie de la peau mais comme l'avait dit Neville, elle avait cessé de s'étendre. Le poison avait rencontré une barrière.
Elle ne put retenir les sanglots qui s'échappèrent bruyamment de sa gorge. Mais pour la première fois depuis des mois, c'était de bonheur qu'elle pleurait.
Le mois suivant, la sorcière achetait une vieille bâtisse abandonnée dans une partie déserte de l'Écosse. Son mari l'accompagnait, appuyé sur sa canne en bois, ainsi que Neville. Hermione décrivait le paysage et le bâtiment à son mari. Emportée par son enthousiasme, elle lui parlait de ses projets pour cette ruine. Neville avait accepté immédiatement de devenir leur associé. Ensemble, ils se tenaient devant les pierres qui protégeraient les premiers Laboratoires Spécialisés en Magie Noire du monde sorcier.
Snape regrettait presque Sainte Mangouste.
Sa femme, enceinte de sept mois, était un enfer à elle toute seule. Elle avait constamment faim, elle pleurait, elle faisait des caprices à longueur de journée, elle se levait toutes les deux heures pour aller aux toilettes et le réveillait au passage, elle râlait, elle pleurait, elle piquait des crises quand il ne rinçait pas le lavabo après s'être lavé les dents, elle pleurait, elle ne faisait plus aucune corvée ménagère…Enfin bref, Snape avait hâte qu'elle accouche.
Le 3 juillet 2001, Clélia Snape vit le jour…
Péniblement, il continuait à avancer.
Grâce à Hermione et à l'imbécillité de Londubat, le poison avait stoppé sa course, le laissant survivre avec les dégâts qu'il avait occasionné au préalable. Lors de sa dernière visite médicale, le médicomage qui suivait son dossier lui avait avoué qu'il ne lui donnait pas plus de quelques semaines. Loin d'être en colère, Snape était reconnaissant des années qu'il avait réussi à arracher à la Mort. Ces quelques années lui avaient permis de donner son amour et son attention aux deux femmes de sa vie. Et d'en recevoir aussi.
Épuisé, le sorcier traînait des pieds et il finit par trébucher et tomber. Son corps criait merci et semblait s'accommoder de ce chemin en terre pour lit mortuaire.
- Pas encore, Severus, murmura une voix mélodieuse. Tu n'es pas arrivé.
Le sorcier leva la tête, et malgré son infirmité, vit Lily lui tendre la main.
- Tu es une hallucination, soupira Snape en secouant la tête.
- Non, je suis ton amie et je suis venue te chercher. Tu dois encore marcher. Tu n'es pas encore arrivé.
- Ici ou ailleurs, peu importe. Mon corps finira dans le même état.
Le fantôme lui fit un sourire énigmatique en se penchant sur lui.
- Lève-toi, Severus. Tu n'es pas arrivé à destination.
Puis elle se redressa et ajouta malicieusement.
- Ne m'oblige pas à te pousser jusque là bas à coups de pieds dans le derrière!
- Chipie! Grogna le sorcier en poussant sur ses mains pour se mettre à quatre pattes. Puis il força sur ses muscles pour se redresser entièrement. Son dos craqua et ses jambes flageolèrent.
- Tu devrais avoir honte de martyriser un mourant.
- Arrêtes, tu vas me faire pleurer, répondit-elle en roulant des yeux.
Il avança, courbé, une main crispée sur son cœur.
- Où allons-nous?
- Tu verras bien.
Les années défilèrent à une vitesse alarmante. Ni Hermione, ni Snape ne purent arrêter le temps qui leur volait leurs derniers moments.
Un an après l'acquisition de la bâtisse, le couple inaugurait l'ouverture des Laboratoires. Leur équipe de chercheurs, composée de sorciers experts dans leurs domaines, était au complet. Ils touchèrent des fonds financiers de la part du Ministère de la Magie, de Ste Mangouste et de particuliers. Au final ils n'eurent qu'à vendre leur Ordre de Merlin Première Classe pour finir de payer les travaux.
Basés sur six étages dont trois magiquement créés, les Laboratoires abritaient cinquante employés. Il y avait trois départements magiques qui travaillaient en collaboration les uns avec les autres. Hermione, en plus d'être la propriétaire et la directrice des Laboratoires, avait pris la tête du département des Sortilèges. Elle avait nommé Neville chef du pôle botanique et un éminent sorcier asiatique aux Potions.
Snape se promenait dans les différents départements, partageait son expérience et parsemait ses critiques au gré de ses humeurs. Un jour que le sorcier martyrisait le pauvre Neville avec ses sarcasmes et ses remarques incisives, il s'était fait envoyé paître par son cadet. Celui-ci transpirait tandis qu'il tentait de mettre en pot une plante carnivore particulièrement vicieuse.
- Allez donc voir ailleurs si j'y suis! avait lancé Neville, à bout de nerfs.
Pris par surprise, Snape était resté quelques secondes la bouche ouverte. Une colère noire était montée aussitôt qui fut vite ravalée par une bouffée de fierté devant ce garçon timide et apeuré qu'il avait vu grandir et qu'il voyait aujourd'hui rembarrer l'homme qui avait inspiré son Epouvantard.
- Eh bien Mr Londubat, murmura le sorcier. Il était grand temps…
Le cœur d'Hermione se gonflait d'orgueil dès qu'elle voyait ce qu'elle et son mari avaient créé. Dans les sous sols, ils avaient installé les laboratoires de potions. Au rez-de-chaussée et au premier étage, se trouvaient l'accueil pour la clientèle, les vestiaires et les laboratoires de sortilège. Et enfin, aux deux derniers étages, il y avait les serres. C'était l'endroit que préférait la sorcière. Elles étaient majestueuses.
Dès qu'on rentrait dedans, on avait l'impression de se trouver dans une jungle tropicale. La flore était dangereuse et magnifique. Neville avait importé beaucoup de plantes anciennes et rares. Son département puisait beaucoup dans le budget annuel mais selon Hermione, l'argent ne devait pas être un obstacle à la recherche. Si ses départements avaient besoin de Gallions alors elle en trouverait, coûte que coûte.
Clélia avait maintenant quatre ans.
Bien qu'il ne l'ait jamais vue, Snape savait que sa fille était une vraie beauté. Un ange.
Certaines mauvaises langues avaient douté de sa paternité en la voyant mais avaient vite ravalé leur venin en entendant la petite chipie faire démonstration de son intelligence et de son sens aigu et précoce du sarcasme.
Il n'avait jamais touché un être humain autant que Clélia. Il connaissait son visage par cœur. Sa petite bouche pulpeuse, ses joues chaudes, ses fossettes quand elle riait, ses boucles de cheveux foisonnantes et douces…
C'était un petit ange… ou un petit démon selon ses envies.
Hermione lui avait dit qu'elle avait hérité de ses yeux noirs. Elle pouvait faire plier n'importe qui devant l'intensité de son regard. Ses cheveux étaient aussi noirs que des plumes de corbeau et sa peau aussi pâle que celle d'une poupée de porcelaine.
Snape ne le dit à personne mais il n'avait jamais connu autant de bonheur qu'en ces quelques années.
Dans la nuit opaque qui était le seul champ de vision du sorcier depuis cinq ans, il ne pouvait deviner que le ciel avait délaissé sa parure obsidienne pour se revêtir des lueurs rosées de l'aube.
La fine pluie matinale vint l'embrasser et le rafraîchir, se mêlant à ses larmes de douleur. Ses jambes ne pouvant plus le porter, il avait du se résoudre à ramasser à tâtons deux grands bouts de bois qui lui servaient de béquilles. Tout son corps souffrait et hurlait.
- Courage, Severus! murmura à nouveau la douce voix de Lily.
- Vas au Diable! grogna le sorcier entre ses dents tandis que le rire du fantôme résonnait dans ses oreilles.
La peau d'Hermione était douce et chaude. Son corps était une invitation aux caresses, aux baisers, à l'amour. Très vite, ils s'aperçurent qu'il ne pouvait plus avoir de rapports sexuels mais il faisait de son mieux pour combler les désirs et besoins de son épouse. Elle ne s'est jamais plaint et n'eut jamais l'idée de le faire. Elle adorait son mari. Elle l'aimait de toutes ses tripes, de tout son cœur, de toute son âme…
Elle l'aurait suivi jusqu'au bout du monde et quand Snape le comprit, il fut heureux que Clélia soit là. Qui sait jusqu'où Hermione irait après son décès si leur fille n'avait pas été présente pour retenir sa mère dans le monde des vivants.
La veille, le signe qu'il avait tant attendu et redouté était arrivé.
Clélia et lui étaient dans la salle de bain, à se laver les dents. Hermione derrière eux rouspétait parce qu'elle les avait pris en flagrant délit.
- Les dents, ça se lave tous les jours! Deux fois MI-NI-MUM! Combien de fois vais-je devoir vous le répéter? C'est fou! Vous n'êtes que des cochons, tous les deux! Frotte plus fort, Severus, je n'entends rien! Clélia, brosse aussi derrière les dents. Oui derrière! Aaah donne moi cette brosse à dents!
Agacée, Hermione s'empara de la brosse à dents. Clélia ouvrit la bouche en grand et n'émit aucune plainte tandis que sa maman récurait ses petites molaires.
- Allez, du balai les caries! Grogna la sorcière dès qu'elle eut fini.
- Bonne nuit maman, dit la petite fille en embrassa sa mère sur la joue.
- Bonne nuit ma chérie. Et pense à aller faire pipi avant d'aller au lit.
L'enfant soupira, grogna un « je sais » avant de tirer sur la manche du pyjama gris de son père.
- Papa, c'est ton tour de me raconter une histoire ce soir.
Snape hocha la tête avant de se rincer la bouche.
- J'arrive, lui dit-il en reposant sa brosse à dents dans le gobelet Winnie l'Ourson.
Quand il arriva dans la chambre, Clélia était dans son lit. Les couvertures remontées jusqu'à son menton. Splash, sa peluche hippogriffe était placé à côté d'elle. En tendant l'oreille, le sorcier entendit un bruit de succion. Il soupira.
- Il me semblait que nous avions jeté cette tétine, dit-il en prenant place dans le rocking chair.
- Quelle tétine? Demanda Clélia de sa petite voix enfantine.
- Je suis aveugle, pas sourd.
- Tu n'as aucune preuve, répondit-elle d'un ton insolent.
Snape haussa un sourcil.
- Accio tétine, murmura-t-il dès qu'il eut sorti sa baguette.
Une petite chose en plastique atterrit dans sa main.
- Et maintenant, Clélia, ai-je une preuve?
- Si tu le dis à maman, je lui dis que tu cultives et que tu fumes du cannabis!
Un instant, le sorcier resta abasourdi. Premièrement, comment une petite fille pouvait-elle connaître l'existence du mot "cannabis"? Et deuxièmement, par quels moyens était elle parvenue à glaner cette information? Personne ne connaissait l'existence de sa serre privée. Dans le monde sorcier, cette plante était interdite à cause de ses effets nocifs malgré ses vertus médicinales. Snape en fumait lorsque la douleur devenait trop pénible. Au point où il en était, il n'était pas à un vice près!
- Comment…, commença-t-il avant qu'elle ne l'interrompe.
- Je ne révèle pas mes sources, dit-elle d'un ton hautain.
Il prit quelques minutes pour réfléchir. Cette petite chipie ferait une Serpentarde hors du commun, il en était certain.
- Je crois que nous venons de conclure un marché, murmura-t-il.
- Ma tétine, ordonna-t-elle.
Il tendit l'objet et sentit sa petite main s'en emparer avidement. Le bruit de succion reprit aussitôt.
- Où en étions-nous la dernière fois?
- Tu allais me raconter comment tu as rencontré maman, répondit-elle en lui faisant l'honneur de retirer sa sucette de la bouche pour parler.
- Certes, dit-il avant de commencer son récit.
Il prit soin de retirer tous les détails qui pourraient choquer l'enfant. Snape sut qu'il pouvait cesser son histoire lorsque la respiration de sa fille se fit plus profonde et plus lente. Il se leva doucement et partit rejoindre son épouse dans leur lit. Elle aussi dormait. Ses journées étaient bien remplies et épuisantes.
Lové contre elle, le sorcier laissa le sommeil le gagner.
Ce ne fut que quelques heures après que la voix de Lily s'immisça dans sa tête.
- C'est l'heure, Severus.
Ce n'était qu'un murmure mais il fut instantanément réveillé.
- Lily! appela-t-il dans la nuit.
Et elle lui apparut. Lumineuse, telle un rayon de soleil.
- Que viens-tu faire ici? Demanda-t-il, une sueur froide mouillant son front et son dos.
- Tu le sais, répondit-elle en lui adressant son sourire le plus tendre. Je suis le signe que je t'avais promis.
Snape soupira.
- Déjà? murmura-t-il, la gorge serrée.
Elle hocha la tête, des larmes apparaissant dans ses yeux verts.
- Je suis tellement désolée, Severus.
Quand le sorcier finit par s'écrouler, il était arrivé au bord d'un lac plongé dans la brume matinale. Le fantôme de Lily avait disparu. Il ne restait plus que lui.
Il allait mourir seul, tout comme il avait vécu.
Son esprit refusa de se lamenter sur son sort et trouva du réconfort dans les souvenirs plein d'amour et de chaleur qu'avaient été les cinq dernières années de sa vie. Il entendit les rires de Clélia, les mots d'amour d'Hermione, les caresses, la mélodie de la musique classique, les chants nocturnes de la faune alors qu'il faisait l'amour à sa femme en pleine forêt, les premiers cris de sa fille… une spirale d'amour et de bonheur qui illumina ses derniers instants alors que la vie s'échappait de son corps.
Tandis que sa respiration ralentissait, il déglutit et murmura, tel un adieu, le prénom de son aimée.
Le murmure empli d'amour brisa le silence.
"Hermione"
Et la Mort s'empara de lui.
Hermione se réveilla en sursaut cette nuit là. Le souffle haletant, elle tendit la main vers sa table de nuit et chercha son verre d'eau à tâtons. Elle but bruyamment trois longues gorgées avant de reposer le verre et de s'allonger dans le lit à nouveau. Elle se rapprocha de son mari et fut surprise lorsque son corps ne rencontra que des draps froids et froissés.
Elle se redressa et sortit sa baguette de sous son oreiller.
- Lumos, murmura-t-elle.
Elle sonda la pièce avec le faisceau lumineux de sa baguette mais n'y trouva pas la silhouette de son époux.
Une angoisse indescriptible s'empara d'elle. Elle sentit son cœur se serrer et eut des difficultés à respirer.
- Severus, appela-t-elle en sortant du lit.
Elle commença par la salle de bain, imaginant le trouver courbé devant les toilettes, à vomir son dîner. Il n'y était pas alors elle le chercha dans le salon où il aurait pu s'endormir sur le canapé. Dépitée, elle regarda dans la cuisine en espérant qu'il aurait eu une fringale nocturne. Severus Snape n'était pas dans leur demeure.
Hermione, en nuisette, ouvrit la porte d'entrée en grand et appela son mari.
- SEVERUS! SEVERUS! hurlait-t-elle.
Mais seul le vent lui répondit
Des larmes commençaient à rouler sur ses joues rouges. Sans même y réfléchir une seconde, elle s'aventura dans la nuit froide et humide pour retrouver son mari.
Elle courut, hurlant le nom de son époux. Ses pieds nus furent écorchés et son corps tremblait sous sa tenue légère. Mais peu lui importait. Seul comptait Severus.
- SEVERUS! S'époumonait-elle en vain, face au silence indifférent de la nature endormie.
- Où es tu? Severus, où es tu? Murmurait-elle en passant ses mains moites dans ses cheveux.
Toute la nuit, elle parcourut la forêt. Tantôt elle courait en hurlant, tantôt elle rampait en sanglotant, tantôt elle s'effondrait de fatigue.
L'aube finit par trouver Hermione Snape, évanouie sur un chemin de terre battue. Des feuilles mortes éparpillées dans ses cheveux trempés par la rosée.
Un silence lugubre planait sur le lac. Les brumes, opaques, s'étendaient sur tout le paysage. La Mort rôdait en ce lieu mythique.
Dans l'herbe haute, le cadavre d'un homme ajoutait sa touche sombre au tableau à la fois funèbre et superbe. Une nature morte…
Aucun vivant n'aurait pu voir ce qui suivit.
De ce corps désormais sans vie, qui retournerait à la terre, s'éleva une silhouette lumineuse qui prit les traits du corps qu'elle avait quitté.
L'âme de Severus Snape.
Il resta un instant à contempler sa propre dépouille. Un adieu à un vieux compagnon de route.
Puis il se demanda ce qu'il pouvait bien faire ici. L'âme commença à avoir des réminiscences de ses vies antérieures. Habituellement, il était transféré dans le corps d'un nouveau né immédiatement après la mort de son ancien hôte.
Cette fois-ci, les choses se passaient différemment.
Il se baissa pour toucher les cheveux du cadavre mais ses doigts passèrent à travers lui.
Un son provenant du lac rompit le silence.
L'âme se retourna et tendit l'oreille. Le bruit se répéta, de façon lente mais continue. Puis une forme brisa l'épaisse brume.
Une barque.
Les silhouettes, d'abord floues, se définirent de plus en plus. Assis, dos à lui, une personne encapuchonnée ramait et debout, droite et fière, se tenait une femme. Ils approchèrent de la rive et la femme lui tendit la main en lui adressant un sourire tendre qui contrastait avec son regard intense.
- Montes, mon fils.
Il obéit et se tint à ses côtés tandis que la barque repartait en sens inverse. Un instant il songea qu'il se trouvait sur la barque de Charon et qu'il traversait le Styx.
Il jeta un coup d'œil à la femme qui l'accompagnait.
Elle le regardait aussi.
Elle était de petite taille mais elle dégageait une puissance magique qui le troublait. Ses longs cheveux noirs encadraient un beau visage, orné d'yeux sombres et profonds.
- Tu te demandes où tu es.
Il hocha la tête.
- Les souvenirs vont te revenir au fur et à mesure.
- Ce lieu m'est familier, murmura-t-il tandis que la barque semblait perdue dans la brume.
- Je sais, répondit-elle, un sourire mystérieux aux lèvres. Ta première vie a commencée ici.
Il garda le silence mais une question initiée par la curiosité brûlait de franchir sa bouche. Elle sembla le deviner.
- Ta toute première conception fut la cause de guerres et de haines. Tu étais un être humain empli de fureur, avide de vengeance. Tu as destiné toute cette vie au meurtre.
Le cœur de Severus Snape se serra. Il n'avait été qu'un monstre, de sa première à sa dernière vie.
- Tu n'étais point fautif, mon fils, murmura-t-elle, le chagrin brisant sa voix. Ce sont tes parents les coupables. Ce sont eux et personne d'autre. Surtout pas toi.
Pendant un moment, seul le bruit des rames remuant l'eau calme du lac brisa le silence. Puis elle reprit la parole.
- Cette colère t'a poursuivi dans toutes tes vies. Elle refusait de te quitter. Elle empêchait tout autre sentiment de s'emparer de ton cœur.
Des bribes de souvenirs, diffus et imprécis, lui parvinrent.
- Comment me nommais-je? Demanda-t-il. Dans ma première vie?
La femme prit un instant pour lui répondre, puis se tourna vers lui, les yeux brillants.
- Tu te nommais Mordred… Tu étais le fils du roi Arthur et… et le mien…
Ils restèrent à se dévisager alors que les réminiscences entourant cette femme devenaient plus claires.
- Morgane? Demanda-t-il dans un chuchotement.
Les brumes s'éclaircirent, laissant passer la lumière du jour qui se refléta sur le lac. Pour la première fois, l'âme de Severus Snape regarda l'eau et y vit des visages. Sous la surface, flottaient des corps, qui loin de ressembler à des Imperis, semblaient sereins.
- Ce sont les âmes qui attendent une nouvelle enveloppe. Ils dorment sous l'eau en attendant.
- Pourquoi n'y suis-je pas? Demanda-t-il.
A travers le brouillard, se dessinèrent les contours d'une île.
- Parce que tu as fini ton voyage, répondit elle.
La brume se dissipa lentement, laissant place à une terre verdoyante.
- Tu as enfin compris le message que la vie voulait te faire entendre.
Des rires et des chants retentissaient au loin. Sur la rive, des personnes semblaient les attendre. Il crut reconnaître une chevelure flamboyante parmi ceux qui se trouvaient sur l'île.
- Mordred, Severus, peu importe ton nom, tu as enfin ouvert ton cœur. Tu as compris que la chose la plus belle, la plus pure, la plus importante au monde était…
Des mains et des sourires le saluèrent tandis que la barque touchait la rive. La brume se referma derrière eux, les cachant du monde des vivants.
- … l'amour."
FIN