Secrets

Une « vie normale »?

Harry montait l'escalier avec un plateau. Il était tout juste 6h15 du matin. Il faisait encore sombre dehors. Il ouvrit la porte. Elle était là, bien au chaud dans son lit en profond sommeil. Ses magnifiques cheveux couleur de feu étaient étalés sur son oreiller tels des fils de soie. Il déposa le plateau sur la petite table près du lit et il s'assit dans le vieux fauteuil à côté d'elle. Il la regarda, pensif.

Il se rappela la dernière fois où il avait dormi aussi profondément. C'était le lendemain de la grande bataille. Il était tellement épuisé. Il s'était endormi pratiquement au contact de son oreiller, tout sale, tout habillé. Il ne s'était réveillé que tard dans l'après-midi. À sa grande surprise à son réveil, Ginny était couchée avec lui dans son lit dans le dortoir des garçons. Il compris alors pourquoi il avait aussi bien dormi. Elle était venue se blottir contre lui en recherche d'un peu de réconfort, elle aussi s'était endormie tout habillée.

Depuis, cependant, les nuits n'étaient pas toujours aussi calmes. En fait, elles l'étaient rarement. Il ne dormait plus beaucoup non plus. Il préférait les choses ainsi finalement. Plus les nuits étaient courtes, moins les rêves étaient dérangeants. Les réveils en sursauts, tout en sueur, étaient choses courantes. Il revoyait sans cesse le visage de ceux qu'il aimait et qui était mort à cause de lui lors de la grande bataille. Mais il n'avait pas le goût d'y penser aujourd'hui. Il ne devait pas y penser, surtout pas aujourd'hui. C'était un jour spécial pour Ginny et lui.

Ginny se retourna. Sa respiration indiquait qu'elle était toujours endormie. Même endormie, Harry pensait qu' elle était magnifique.

Sauf pour les nuits tourmentées, le retour à la vie normale…

- Hmmm…. « vie normale »…, marmonna-t-il avec un sourire ironique.

Harry n'avait jamais eu une vie « normale » et il se demandait s'il en aurait une, un jour.

- Sûrement…, pensa-t-il. « Ce sera peut-être long, mais ça viendra! », lui avait dit une fois Mme Weasley, lors d'une de leurs nombreuses conversations nocturnes causées par leur insomnie.

Enfin, il espérait que sa vie normale serait étroitement liée à elle…à Ginny. Elle avait toujours la bonne façon de voir les choses. Elle était toujours si forte, si courageuse, si joyeuse, si positive, si … Ginny. Il avait passé un été merveilleux avec elle chez les Weasley. Il sourit.

Il sortit enfin de sa rêverie. Il souriait toujours. Il regarda Ginny, ses cheveux recouvraient une partie de son visage. Il se leva de son fauteuil et se pencha pour l'embrasser délicatement sur le front.

-Bon matin mon amour, lui murmura-t-il doucement à l'oreille.

-Hmmm… bonjour, répondit Ginny encore tout ensommeillée.

Depuis qu'elle était arrivée au Terrier, il y a 3 jours pour les vacances de Noël, Harry se levait avant tout le monde pour préparer le petit déjeuner. Il en profitait pour apporter le petit déjeuner au lit à Ginny pour pouvoir bénéficier de quelques moments seul avec elle.

-Tu me gâtes vraiment trop Harry, dit Ginny en se redressant dans son lit. Je vais en prendre l'habitude et tu seras obligé de me servir le petit déjeuner au lit tous les jours, lui dit Ginny en lui caressant la joue.

Harry déposa le plateau devant Ginny et s'allongea sur le lit tout près d'elle. Il prit une rôtie.

-Ça n'a rien de nouveau dans ma vie tu sais. J'avais l'habitude de faire le petit déjeuner chez les Dursley. Au moins, maintenant, j'ai un énorme plaisir à le préparer et, honnêtement, la compensation que je reçois est beaucoup plus intéressante que ce que j'avais avant, dit-il en l'embrassant longuement et tendrement.

Ginny le regarda la mine triste et prit le visage de Harry entre ses mains.

-Ce sont vraiment des gens horribles ces Dursley. C'est difficile d'imaginer que ta tante est réellement la sœur de ta mère. C'est étrange parfois comment les membres d'une même famille peuvent être si différents, dit-elle et l'embrassa de nouveau.

-Hmm, ouais. Heureusement, si je suis chanceux, je ne les reverrai plus jamais. Je suis plutôt contente que cette partie de ma vie soit derrière moi. Mais si tu veux bien, j'aimerais revenir à mon sujet préféré, c'est-à-dire, toi. Tu as bien dormi? dit-il avec un grand sourire.

-Merveilleusement bien, dit-elle en bâillant. Et toi?

-Ah ça, oui! Ron n'était pas là, alors aucun ronflement ne m'a réveillé, dit-il en riant.

-Ah c'est vrai. Lui et Hermione arrivent aujourd'hui je crois? demanda-t-elle avant de prendre une autre bouchée de sa rôtie à la confiture.

-Oui, ils vont arriver pour le souper avec les parents d'Hermione, répondit Harry.

Après la grande bataille, Hermione et Ginny étaient retournées à Poudlard en septembre pour entamer leur 7e année. Ron et Harry avaient commencé à travailler pour le département des Aurores après seulement quelques semaines de répit. Ils habitaient au Terrier tous les deux en attendant que la maison de Harry soit prête. Ron et Hermione étaient maintenant un couple, tout comme Harry et Ginny. Lors des sorties à Pré-au-lard de Ginny et Hermione, Harry et Ron allaient passer la journée avec les deux filles.

Ron et Hermione trouvaient encore le moyen de se quereller. Ils se querellaient d'ailleurs encore assez souvent, mais maintenant ils ne boudaient plus aussi longtemps qu'avant. Harry aimait penser qu'ils avaient pris goût à leur rituel de réconciliation. Harry et Ginny, quant à eux, avaient une relation beaucoup moins houleuse. Harry n'aimait pas contredire Ginny et vice versa. Ils avaient toujours été un peu moins exubérants dans l'expression de leurs opinions que Ron et Hermione. Harry était trop heureux d'avoir retrouvé Ginny, il ne voulait pas gâcher une seule seconde en se querellant avec elle. En pensant à tout ça, il ne s'était jamais senti aussi heureux de toute sa vie.

Au retour des deux filles de Poudlard pour les vacances, Ron et Hermione avaient quitté King's Cross avec les parents d'Hermione. Le ministère de la Magie n'avait pas mis trop de temps à les retrouver. Ils étaient revenus au pays à la fin du mois de juin, sains et saufs. C'était la première fois que Ron allait passer quelques jours chez Hermione et il était plus qu'emballé à l'idée de se balader en voiture. Le fait qu'ils allaient partager le même lit, soit dit en passant, n'avait rien à voir du tout avec son empressement à aller chez Hermione. Les parents d'Hermione, étant moldus, étaient un peu plus ouverts d'esprit sur ces choses-là que bien des familles de sorciers. Harry et Ginny, eux, n'ayant pas vraiment d'alternative, étaient rentrés directement au Terrier.

C'était la veille de Noël et toute la grande famille élargie des Weasley, c'est-à-dire tous les amis aussi, se rencontrait au Terrier pour la soirée. C'était le premier Noël des Weasley depuis la mort de Fred et Mme Weasley faisait tout en son possible pour organiser une soirée parfaite. « Tout le monde en a bien besoin » disait-elle tout le temps, comme pour se convaincre elle-même qu'elle faisait ce qu'il fallait.

Après la mort de Fred, les Weasley se sont relevés avec une force impressionnante. Même George a fait preuve d'une force de caractère inimaginable. Il avait perdu encore plus que les autres. Il avait perdu sa moitié. Mais tout le monde savait que Fred n'aurait pas voulu que sa famille soit tout en pleure pendant des mois.

Aux funérailles de Fred, George avait réussit, par on ne sait quel moyen à faire exploser des feux d'artifice et à mélanger des pastilles de gerbe et des nougats néansangs avec les petits chocolats servis aux invités pendant l'hommage qu'il rendait à son frère jumeau. Même Mme Weasley n'avait pas pu se retenir de hurler après Fred, en pleurant et en riant en même temps, en l'accusant d'arriver à ruiner ses propres funérailles avec ses blagues. C'était un peu troublant au début, pensait Harry, mais on a senti la présence de Fred quand George s'est mis à rire pour ensuite faire comprendre à tout le monde que son frère ne serait jamais oublié tant et aussi longtemps que les gens continueraient à se faire des blagues. Après les sérieuses pertes que tout le monde avait subies, on avait effectivement bien besoin de rire.

Le mot fut bien compris. C'était difficile au début, mais la vie sans Voldemort était tellement agréable, que le sourire, bien que timide au début, est revenu de lui-même. De temps à autre, la folie de Fred s'emparait de quelqu'un. Il arrivait même à Mme Wealsey de jouer des tours aux autres. C'était hilarant. Lors d'une des nombreuses cérémonies auxquelles Harry avait dû assister pendant l'été, elle avait échangé en douce sa baguette. Quand on lui a demandé de la sortir pour la photo protocolaire avec Kingsley, elle s'est changée en poulet de caoutchouc. L'assistance, bouche bée, avait été saisie d'un fou rire nerveux qui avait durée près de cinq minutes.

Harry souriait en se souvenant de cette journée. Mme Weasley avait vraiment surpris tout le monde. Depuis, elle s'était affairée à prendre encore plus soin des autres. Elle était plus affectueuse avec tout le monde. Elle prenait le temps, encore plus qu'avant de parler avec tous les membres de sa famille. Elle ne cessait de remercier Harry, Ron et Hermione pour ce qu'ils avaient fait.

Quand Harry n'arrivait pas à dormir, il se levait souvent la nuit pour boire quelque chose ou pour aller prendre l'air. À ce moment là, il tombait souvent sur Mme Weasley qui souffrait comme lui d'insomnie causée par la bataille avec Voldemort. Ils se racontaient leurs cauchemars ou parfois discutaient simplement de tout et de rien. Il avait appris à la voir d'une autre manière. Il savait qu'elle souffrait, mais elle ne voulait pas inquiéter tout le monde avec sa peine. Ils gardaient leurs petites conversations nocturnes entre eux pour ne pas alarmer personne. Il lui en était énormément reconnaissant.

Elle avait des émotions très contradictoires à l'approche de Noël. Elle voulait que ce soit une fête très joyeuse pour souligner le premier Noël après Voldemort. Mais elle avait la gorge nouée en pensant que c'était le premier Noël qu'ils passeraient sans Fred. Harry aussi était nerveux en pensant à cette situation mais il avait tout de même très hâte à la soirée, car il avait une surprise pour Ginny. Mais par dessus tout, il voulait passer les moments avant la fête seul avec elle. Aujourd'hui était leur journée.

-Tu as le goût d'aller sur le Chemin de Traverse aujourd'hui? lui demanda-t-il doucement.

-Oh Harry! Tu sais que j'adorerais aller là-bas avec toi, mais je dois participer aux préparatifs de la soirée pour aider maman, lui dit-elle l'air désolé. En plus, elle ne le dit pas mais elle est si bouleversée à l'idée que c'est le premier Noël sans Fred. Je ne crois pas qu'elle sera d'accord.

-Tu sais, j'ai parlé avec ta mère tout à l'heure et elle ne voit aucun inconvénient à ce qu'on aille se balader tous les deux jusqu'au souper. Harry la regardait d'un air coquin.

Ginny faillit s'étouffer avec sa rôtie. Elle n'en croyait pas ses oreilles. Depuis qu'elle était arrivée au Terrier, sa mère la harcelait avec ces préparatifs.

-Vraiment?… Comment ça… Tu me fais marcher! Arriva-t-elle à dire entre deux étranglements les yeux remplis d'eau.

Harry souriait malicieusement.

- J'ai demandé à Kreattur de venir ici pour les préparatifs de la journée, dit-il en riant. Il est tout heureux de pouvoir aider, attend de le voir, c'est vraiment comique.

-Vraiment? …Ah… ok, là je comprends. Ginny pris une gorgée de jus de citrouille pour faire passer sa quinte de toux.

-Alors si on fait vite, on pourra partir dans une heure. Je dois passer chez Gringotts et ensuite j'ai quelques courses à faire pour mes cadeaux de Noël. On pourrait même aller à Londres dans les magasins moldus. Et puis, si tu le veux, dit-il en la regardant du coin de l'œil, on pourrait se faire un petit dîner à Godric's Hollow.

Ginny resta interdite, la bouche entrouverte.

-Godric's Hollow? Mais Harry, tu veux vraiment m'inviter dans la maison de tes parents? demanda-t-elle, incrédule.

-Bien sûr que oui, Ginny.

-Wow! Ça alors!, dit-elle surprise.

-Qu'est-ce qui te surprend autant? demanda Harry.

-Eh bien! Disons que tu es généralement assez privé avec la maison de tes parents. Tu n'as jamais voulu que j'y mette les pieds, en fait personne d'autres que toi et Kreattur n'y est jamais allé. J'ai voulu y aller avec toi tout l'été et tu as toujours refusé.

-En fait, Ron a vu la maison. Il a été d'une grande aide avec tous les travaux à faire. Mais maintenant j'ai vraiment envie que tu voies cette maison. J'aimerais beaucoup aller là-bas aujourd'hui avec toi pour te la montrer. Elle est prête. Je pourrais y habiter dès maintenant, si tu pouvais venir avec moi. Mais puisque c'est impossible, je vais attendre la fin des vacances. Par contre, rien ne nous empêche d'y aller dans la journée, dit-il une lueur de douce malice dans les yeux.

En fait, Harry n'avait jamais osé demander cette permission à Mme Weasley de peur de se faire mettre à la porte. Ne voulant pas prendre de chance, il restait au Terrier et dormait docilement dans la chambre de Ron.

Ginny le regarda, les yeux brillants de joie. Elle mit ses bras autour de son cou.

-Merci Harry, dit-elle puis l'embrassa doucement. Bien sûr que j'aimerais aller avec toi voir la maison de tes parents. C'est comme si tu allais me les présenter. J'ai vraiment hâte d'y être, dit-elle toute souriante.

Ginny termina rapidement son petit déjeuner et elle se leva d'un bond pour se préparer. Harry était vraiment heureux. La journée s'annonçait plutôt bien.