« Depuis aussi longtemps que l'on s'en souvienne, l'alchimiste au sang noir a toujours apporté le malheur sur cette terre. Son apparence même rappelle les profondeurs de l'enfer : ses yeux rouges luisant comme des braises derrière son masque de mort, sa haute et mince taille tout enveloppée de noir laisse entrevoir la fin toute proche. »
« Nii-san ! »
« AH ! »
La personne qui avait poussé ce cri sembla émerger d'un rêve. Ses paupières papillonèrent, et ses mains gantées de blancs frottèrent un instant des prunelles couleur soleil.
« Bon sang Al, tu m'as foutu la trouille ! Qu'est-ce qu'il y a ? » questionna Edward Elric, ledit propriétaire des yeux or et originaire du cri.
« Il faut qu'on se rendre au Q.G. C'est aujourd'hui qu'arrive le nouvel alchimiste d'Etat tu te souviens ? » répondit l'armure en désignant du pouce le vide par-dessus son épaule.
Le FullMetal soupira. Il avait complètement oublié. Ce que son armure de petit frère semblait avoir compris.
« Désolé, j'y pensais plus. Je me suis penché sur ce livre et j'ai pas vu l'heure. » reprit le blond en refermant son livre.
« Elle est pourtant accrochée à ta ceinture, l'heure. » rappela Alphonse.
L'aîné replaça le livre, puis se dirigea vers la sortie. Le soleil au-dehors lui fit cligner des yeux, et c'est machinalement qu'il prit la direction du Quartier Gonflant, euh Général. Quoique pour certains il doit bien être gonflant en général. L'air au-dehors était doux, le soleil apaisant. Le chemin jusqu'à la base se fit en silence, Ed étant perdu dans ses pensées.
Il se rappelait quelques passages du livre qu'il était en train de parcourir. Une histoire fascinante sur un très puissant alchimiste ayant vécu il y avait de ça deux cent cinquante ans. Si le FullMetal s'y était penché, c'était parce qu'il aurait été un des rares alchimistes à avoir créé la Pierre Philosphale. Et le jeune voulait tout naturellement savoir s'il existait une autre recette que celle des vies humaines. Mais hélas, cent fois hélas pour lui, c'était la seule possible visiblement.
L'imposante silhouette du Quartier Général de Central se dessina au bout de la rue. Entouré de hauts murs, le bâtiment faisait davantage penser à une forteresse imprenable. Ed leva un regard inexpressif vers ce qui était pourtant le centre du pouvoir du pays. Arrivé devant le garde, il sortit sa montre en argent. Le soldat fit un salut et le laissa passer. Quelques instants plus tard, lui et Al arpentaient le couloir menant au bureau du colonel Mustang.
Le FullMetal toqua à la porte, et attendit que la voix grave de son supérieur lui donne la permission d'entrer. Quand il la perçut, le jeune inspira un coup avant d'entrer. De cette manière il espérait garder son calme, bien qu'il sache que ce serait parfaitement inutile. Les orbes d'or rencontrèrent leurs opposées : celles aussi noires et profondes que la nuit de Roy Mustang.
Des mèches d'un noir tout aussi profonds retombaient devant ces mirettes qui en hypnotisaient plus d'une. Un sourire sarcastique étiraient les lèvres du colonel, et Edward sentait déjà la moutarde aller voir s'il y avait une belle vue depuis son nez. Le brun appuya son menton sur ses mains, se délectant d'avance du spectacle qui allait suivre.
Le reste de l'équipe avait temporairement suspendu son travail, sachant qu'il était impossible de l'exécuter quand le FullMetal faisait des vocalises. Ce dernier était arrivé en face du colonel, et tous deux se défiaient du regard, tels deux fauves prêts à se sauter dessus.
« Bonjour FullMetal. Je suis surpris que tu aies pu trouver la porte, déjà que j'ai du mal à te voir. » commença Roy.
Début des hostilités. Messieurs-dames, à vos boules Quiès. Edward serra les poings si fort qu'il aurait pu briser son automail.
« Ben mettez des lunettes. » répliqua-t-il entre ses dents.
« Ce serait plutôt un télescope qu'il me faudrait. » soupira Mustang.
« QUI EST ENCORE PLUS PETIT QU'UN GRAIN DE POUSSIERE D'ETOILE ??? »
Question à mes chers lecteurs : quelqu'un connaitrait-il le volume de décibels maximum autorisé en ville ? Parce qu'à mon avis, Edward l'a largement dépassé. Le colonel sourit de cette façon si narquoise que l'adolescent détestait tant.
« Ce n'est pas de ma faute si tu ne bois assez de lait. » continua-t-il.
« Mais vous commencez sérieusement à mes les briser, savez-vous ? » fit le blond en s'appuyant sur le bureau.
« Veux-tu bien reculer je te prie ? Tu es peut-être verticalement contrarié, mais je ne suis ni sourd ni aveugle. »
« JE NE SUIS PAS PETIT ESPECE DE VIEUX SCHNOK SENILE !!! »
Les mèches de Mustang voltigèrent sous le courant d'air.
Bien loin de tout ce raffut, une jeune fille demandait son chemin.
« Exusez-moi, pourriez-vous m'indiquer où se trouve le bureau du colonel Mustang ? »
« Alors : en partant d'ici, vous suivez les cris et normalement il est au bout. » lui répondit le soldat en tendant le bras.
« Euh ... merci. » reprit la demoiselle, assez surprise par cette indication.
Elle prit toutefois la direction qu'il lui avait montrée. Et effectivement, elle perçut des hurlements lointains. Suivant alors le conseil qu'on venait de lui donner, elle marcha vers la source de ce bruit. Au fur et à mesure qu'elle tournait dans les couloirs, les cris devinrent plus distincts. Ainsi, elle put déterminer qu'il y avait deux personnes. Deux hommes. Mais que diable se passait-il pour que l'un d'eux hurle à en faire trembler les murs ? Elle frappa à la porte, se demandant si on l'entendrait avec tout ce tintamare.
Pourtant il y eu un silence, et on lui demanda d'entrer.
« Bonjour, je suis la nouvelle alchimiste d'Etat. Mon nom est Sacha Holloway. » dit-elle en entrant.
Roy détailla la jeune fille avec un air impassible. De la même taille qu'Edward, et sûrement du même âge, voilà qui serait sûrement amusant si elle était chatouilleuse sur ce sujet. Ensuite, elle arborait une chevelure châtain clair nouée en deux nattes assez longues, et de grands yeux bleus. Sacha était habillée avec un jean et un petit haut assortit à ses yeux. Elle arriva devant le bureau de son nouveau supérieur, non sans avoir noté l'air blasé du reste de l'équipe.
« Quelle motivation ! » se dit-elle.
« Soyez la bienvenue miss Holloway, je suis le colonel Roy Mustang. » dit-il en lui tendant la main.
« Oui j'ai entendu parler de vous, comme tout un chacun. Enchantée. » fit Sacha.
Roy eut un imperceptible sourire, avant de convier la jeune fille à s'asseoir et de prendre son dossier. En se tournant vers Ed pour prendre place, elle constata avec surprise son air mi-choqué mi-horrifié. Elle fronça les sourcils, avant de faire face à Mustang, pendant que les frère Elrics s'asseyaient à leur tour.
« Donc : d'après votre dossier vous êtes ... la Water Alchemist, l'alchimiste de l'eau. » commença Roy avec un moue légère.
Sacha hocha la tête, et Ed se permit un petit sourire. L'eau contre le feu ... à voir.
« Hon hon. Voilà votre licence ainsi que la montre d'argent qui prouve votre titre. Maintenant, je dois vous faire part d'un détail important, qui te concerne aussi FullMetal. »
Edward détacha enfin ses yeux de Sacha, qui sortait sa licence de son enveloppe, pour les reporter sur le colonel.
« Je ne sais si tu es au courant, mais récemment une circulaire est parue concernant les nouveaux alchimistes d'Etat. Elle indique notamment qu'ils devront désormais être formée par un membre de leur équipe lui-même alchimiste. Ce qui veut dire ... que tu devras former Sacha. » annonça-t-il.
Le concerné écarquilla les yeux.
« Q... Koa koa koa ? »
« Il pleut il mouille, c'est la fête à la grenouille ... tu as très bien compris. La Water alchemist te suivra désormais dans toutes tes missions. » reprit Roy.
« Mais ... mais enfin vous savez que ce n'est pas possible ! Et puis d'abord pourquoi moi et pas vous ? »
« Parce que j'ai trop de travail, et aussi parce que j'en ai décidé ainsi. Tu es bien plus souvent sur le terrain que moi. »
Edward en avait la chique coupée. Le voilà obligé de se trimballer une novice. Ca ne l'arrangeait pas du tout, pour une bonne raison : sa quête de la Pierre Philosophale. Certes il n'avait plus les homonculus aux trousses, puisqu'une fille nommée Violine, créée par la Porte de la Vérité au passage, les avait éliminé avec leur maître. Elle avait également tenté de tuer Hohenheim, mais les frères ainsi que les militaires s'étaient interposés et l'avait enfermée.
M'enfin, là n'était pas le problème. La voix de Mustang le sortit de ses songes.
« Tu veux bien aller lui montrer ses appartements ? »
« En fait j'ai déjà un logement merci. » intervint Sacha.
« Comme tu le souhaite. Edaward te fera visiter le Q.G, et te montrera où se situe la bibliothèque nationale. »
Sur ce, l'entretien fut clos. Les trois jeunes se levèrent et quittèrent le bureau. Havoc prit la parole dès que la porte claqua.
« On dirait bien que notre petit blond a le coup de foudre pour la nouvelle venue. » sourit-il.
« Oui il ne la quittait pas des yeux. » enchaîna Breda.
« Ca m'étonnerait beaucoup que ce soit la raison de sa fixation sur elle. » dit le colonel.
Ses hommes tournèrent un regard étonné vers lui.
« Ah bon ? Qu'est-ce qui vous fait penser ça colonel ? » questionna Kain Fuery, un petit brun à l'air timide.
« Parce que cette fille est le portrait craché de Nina Tucker, en plus âgée bien sûr. »
Tous connaissaient cette malheureuse histoire de l'alchimiste Shou Tucker, qui avait transformé son enfant de quatre ans en chimère, en la croisant avec son chien. La chimère avait ensuite croisé Scar, qui l'avait explosée. Ed et Al ne s'en était vraiment jamais remis. Pas étonnant alors, lorsqu'il avait vu Sacha, qu'il l'aie fixée de la sorte.
« Hmm. Ceci explique cela. » dit Falman.
« Il a dû avoir un choc. » reprit Kain.
« Ah ben ça ! T'as pas vu la tête qu'il a fait quand elle est entrée ? On aurait dit qu'il venait de voir un mort-vivant, sans jeu de mots. » dit Havoc.
« Mort ou pas, je vous rappelle que vous avez encore du travail, messieurs. » intervint le lieutenant Hawkeye, seul membre féminin de l'équipe, et terreur de ces messieurs.
Les hommes en question eurent la sagesse d'obéir à cet ordre, bien que l'envie de disserter sur la ressemblance de Sacha avec Nina les intéressaient davantage.
Pendant ce temps-là, les frères Elric avaient raccompagné leur nouvelle collègue jusque chez elle. Sacha les salua amicalement, et rentra dans son immeuble.
« Dis Ed ? Tu as vu ... comme elle ressemble à Nina ? » fit Alphonse après quelques minutes de silence.
« Quand on connait Nina on ne peut pas ne pas le remarquer. Pendant un instant j'ai cru que c'était elle, alors que je sais très bien que d'une : elle est morte, et de deux Sacha est plus vieille. » répondit Edward.
Il regarda encore un instant le bâtiment où habitait Sacha, soupira et s'en alla. Dire qu'il la voir souvent ... ses souvenirs de la mort de Nina allaient le hanter un moment.
« Alors vous l'avez vu ? » fit une voix un peu anxieuse.
« Oui. Il va bien je vous rassure. Mais n'oubliez pas pourquoi vous êtes ici. » en répondit une putôt froide.
« Je ne risque pas. C'est déjà tellement incroyable d'être là dehors. Même si ... même si c'est provisoire. »
Le ton était cette fois m-i incrédule mi-étonné. La voix froide reprit :
« Certes. Vous avez pu tester votre alchimie ? »
« Oui, tout fonctionne comme avant. J'ai d'ailleurs du mal à y croire : même mon apparence est la même. »
« Je ne vois pas ce qu'il y a de surprenant. Souvenez-vous d'où vous venez. »
« Justement. Combien d'après vous ont déjà vécu pareille expérience ? »
« En effet vous êtes unique. C'est d'ailleurs pour ça que je vous interdit formellement d'avoir des contacts avec des gens si ce n'est pas absolument nécessaire. »
« Je le sais très bien, ne vous en faites pas. »
« J'espère. Bien, je ne dispose pas de beaucoup de temps. Je vous contacterais en temps voulu pour ce qui nous intéresse. »
« Entendu. »
En début d'après-midi, Sacha fut de retour au Q.G. En la voyant, Ed ne put réprimer un sursaut nerveux. Conformément aux attentes de son supérieur, il lui fit visiter ce qu'il connaissait du vaste bâtiment, puis il lui montra la bibliothèque nationale réservée aux alchimistes d'Etat. Même s'il s'acquittait de sa tâche avec une certaine courtoise, qu'on n'aurait pas attendue de lui d'ailleurs, Edward restait étrangement silencieux et surtout préoccupé.
« Ca ne va pas Edward ? » finit par lui demander Sacha.
« Euh si si ! Je suis juste un peu stressé : je ne sais pas si j'arriverais à te former correctement. » répondit le blondinet.
« Ah ! Bah ne t'en fait donc pas pour ça ! Soit toi-même et ça se passera très bien. » lui sourit Sacha.
Elle parvint à le faire sourire, et du coup à le détendre un peu. Du reste, Sacha s'intégra vite et bien à l'équipe. Toujours souriante et amicale, les soldats l'appréciaient. Mais la demoiselle était assez sensible sur le sujet de sa taille, ainsi que le remarqua rapidement Mustang. Celui-ci fut ravi d'avoir un nouveau défouloir, cependant il s'avéra que Sacha était plus patiente qu'Edward, et surtout plus fine en matière de répartie. Un jour qu'elle revenait de mission avec les frères Elric, et qu'elle alla remettre leur rapport à Mustang, Sacha fut accueillie par ces paroles :
« Tiens, les petits alchimistes sont de retour. »
« Oui bonjour à vous aussi Colonel. Mais dites donc, vous travaillez alors qu'il pleut ? Comment ça se fait ? » lança Sacha.
Roy plissa les yeux, pendant que Ed souriait avec suffisance. Il devait admettre qu'il aimait bien Sacha pour ça : sa manière de clouer le bec au colonel sur un sujet fâcheux pour eux deux.
« Ici je suis au sec. Voyons ce rapport ... vous n'aviez pas plus gros, évidemment. Quoique pour celui-là vous avez dû vous y mettre à deux pour le transporter j'imagine, car il vous dépasse allègrement. » reprit Mustang.
« Moi ce qui me dépasse, c'est de savoir que vous pouvez lutter contre une dizaine d'ennemis, mais qu'une petite pile de dossiers suffise à vous terrasser. Alors en plus avec la pluie ... » rétorqua la Water alchemist.
Roy émit un claquement de langue agacé. Y'avait pas moyen d'avoir le dessus sur elle. Et le FullMetal laissait courir, se contentant de suivre le spectacle avec délectation. Car même si Mustang s'avisait de se moquer de lui, Sacha répondait à sa place.
« En parlant de pluie, vous ne vous êtes pas noyés dans une flaque tous les deux ? C'aurait fait mauvais effet que le FullMetal rouille, remarquez. »
« Voyons colonel, l'eau est mon amie, à moi ... elle ne suffit pas à m'arrêter. » sourit Sacha.
Ed comprima un rire. Ouh la fine allusion à son impuissance sous la pluie ! Roy lui lança un regard noir que Sacha soutint avec un sourire faussement angélique. Le colonel parcourut une page du rapport, avant de le poser dans un coin.
« Bref ! Puisque vous êtes là, je dois vous avertir qu'on nous a confiés une mission. » dit-il.
« On ? C'est-à-dire ? » fit le FullMetal redevenu sérieux.
« Toi, ton frère, Water et moi. D'après ce que j'ai compris, divers entrepôts d'armes auraient été attaqués et rasés, et toutes les armes disparues. » annonça Mustang.
« Ils appartenaient à l'armée je suppose. » dit Sacha.
« Exact, d'où l'importance de cette mission. »
« Sait-on ce qui a causé ces dégâts ? » reprit Edward.
« Non, personne n'a rien vu, les entrepôts sont tenus à l'écart des civils. Nous allons nous rendre dans la première ville qui a subi une attaque de ce genre. » continua Mustang.
« Et pour quand serait le départ ? Je dois d'abord aller voir mon mécano. » prévint Ed en montrnant son bras cassé.
« J'avais pensé à demain, mais vu la situation je dirais dans trois jours, ça ira ? »
« Oui très bien. Je vais y aller de ce pas. » répondit le FullMetal en se levant.
« Je peux t'accompagner Ed ? » questionna Sacha.
« Pourquoi pas ? »
« Alors on se retrouve à la gare dans trois jours à huit heures précises. » conclut Mustang.
Les jeunes acquiescèrent, et s'en allèrent. Ed passa chercher son petit frère pour lui dire qu'ils se rendaient à Resembool, avec Sacha. Al était content que la jeune fille vienne. Il l'appréciait, et trouvait agréable d'avoir une autre personne à qui parler. Même Ed paraissait penser la même chose. Il faut dire que Sacha était optimiste et détendait l'atmosphère. Et sa façon d'utiliser l'alchimie l'intéressait beaucoup.
Sacha portait des cercles tracés sur la semelle de ses chaussures, ce qui lui permettait de faire jaillir l'eau du sol.
Ceux gravés sur des bracelets plats à ses poignets lui servaient à manier le liquide et lui donner diverses formes. Sacha possédait également un style de combat original : des mouvements d'arts martiaux combinés à sa spécialité, technique qui s'avérait très efficace.
« C'est quel genre d'endroit Resembool ? » demanda Sacha.
« La campagne désertique, mais chaleureuse et accueillante. » lui répondit Alphonse;
« Accueillant accueillant, ça dépends de quel point de vue on se place ! » fit Edward.
Al rit, pendant que Sacha haussait un sourcil.
« Tu va vite comprendre Sacha. » reprit Al en réponse à son air étonné.
Le train s'arrêta, et les jeunes mirent pieds à terre. Direction : l'atelier d'automails Rockbell.