Dernier chapitre, nettement plus court que les autres et finalement bien différent de la fin difficile que j'avais prévue à la base (ni l'envie, ni le courage...).

En tout cas, merci encore pour les reviews, notamment aux anonymes à qui je n'ai pas pu le dire directement (merci merci !).


CHAPITRE ONZE

ÉPILOGUE

Avachi sur ma chaise en bois, la tête renversée en arrière, je bâille discrètement derrière mon avant-bras. Depuis plusieurs plombes, notre Hokage est partie dans une interminable tirade sur les rapports géo-politico-stratégico-pénibilo-soporifiques du village avec je ne sais plus quelle organisation obscure, et de toute façon ça fait trois heures que j'ai décroché de ce qu'elle me racontait. À mes côtés, Sakura et Sasuke ont l'air pour leur part relativement à l'aise et attentifs, ce qui n'est pas du tout mon cas, parti comme je le suis dans une étude approfondie des légères nuances de blanc de la peinture du plafond. Passionnant... Tiens, ce motif, on dirait le grain de beauté que Sasuke a sur...

Ah ? Un silence inhabituel est en train de régner dans la pièce.

Elle a fini ?

Ramenant lourdement mon menton vers elle dans un regard aussi humide et vaseux que si je venais tout juste de me réveiller, je la découvre en train de secouer nerveusement ses montagnes de paperasses, apparemment clairement agacée de mon absence de réaction, quand-même. Assise du haut de sa grandeur derrière son imposant bureau, elle pose alors ses mains devant elle dans un mouvement massif et sonore, et me regarde avec beaucoup d'attention.

Je croise mes bras sur ma poitrine et ferme les yeux très sérieusement.

- Moi, rien capter.

Sasuke soupire :

- Mais t'as un cerveau de moineau, c'est pas possible... Comment t'expliques que tout le monde a pigé ce qu'elle a raconté et pas toi ?

Je commence à répondre dans un large bâillement.

- Ça m'épuise, c'est tout ! Il n'y a pas moyen de faire pareil avec des phrases simples ? Du genre, pour commencer, c'est qui les gentils et c'est qui les pourris, et puis si on pouvait arrêter de parler de tas de types que je ne connais pas, j'arriverais déjà mieux à me concentrer.

Tsunade avance son menton et me reluque avec des yeux aussi ronds que le fond de sa tasse de thé, boisson qui pique le nez d'ici, d'ailleurs, elle n'y aurait pas versé un peu de saké, par hasard ?

- Enfin, même Sasuke a tout compris alors qu'il a été absent pendant plusieurs années et qu'il recommence à peine à participer aux affaires du village... Naruto ?

- Oh, mais je ne suis pas un génie, moi, ça se saurait, depuis le temps. Non ?

Sakura se passe une main sur le front, affligée, puis décide de me traduire-résumer-répéter dans un langage qui m'est plus adapté le contenu des explications de la vieille. Je l'adore, cette fille...

De son côté, notre alcoolique de cheftaine est en train, lentement mais sûrement, de se décomposer, et quand je me rends compte du sourire mauvais qui s'est installé sur son visage, je me souviens soudainement de ce qu'on a fait ce matin... Ah oui, c'est vrai... Ça va faire mal.

Elle tapote du bout de ses doigts sur son bureau.

- Au fait, Naruto, Sasuke, vous savez que votre comportement ravit la plupart de vos supérieurs ? Apparemment non seulement vous continuez à vous soucier enfin sérieusement de votre santé mais, en plus, on ne vous voit plus batifoler dans tous les recoins de Konoha. C'est que j'avais fini par ne plus y croire...

Je confirme : ça va chauffer.

- Euh... Qu'est-ce qu'il faut dire, là ? On a décidé de prendre de bonnes résolutions, Hokage-sama.

Et je me fends d'une courbette de circonstance.

- Par contre, j'en ai appris une bonne, aujourd'hui.

Plaquant alors ses deux mains l'une sur l'autre devant son menton, elle nous adresse un immense sourire on ne peut plus inquiétant, comme seul un terroriste schizophrène qui aurait oublié de prendre ses cachetons depuis plusieurs jours devrait pouvoir le faire.

- Alors, on va faire bref : si on vous choppe à nouveau ne serait-ce qu'une toute petite fois tous les deux à vous ébattre, même sagement, dans ce qui est encore jusqu'à nouvel ordre mon bureau, je vous promets que tout ce que vous avez vécu jusque là vous semblera être du petit lait à côté du traitement que je vous réserve... C'est suffisamment clair ?

Ouh là...

- Euh...

Là je ne sais vraiment pas quoi répondre... « Avant d'emménager dans un endroit il faut bien l'essayer, non ? » ... Bon, si je lui dit ça elle va me trucider, c'est sûr. Je me tourne alors vers Sasuke et il a pris une si belle expression de déconfiture que je ne peux pas m'empêcher de rigoler dans ma barbe. Je m'incline vivement vers Tsunade et dit avec une conviction digne de la meilleure recrue de son armée :

- Oui, chef ! Promis, chef ! On va essayer de grandir un peu, chef !

Elle soupire, mais en relevant discrètement mon regard vers elle, je découvre ses lèvres tordues dans un micro-sourire en coin, signe que je l'ai décrispée.

Depuis quelques temps, j'ai l'immense honneur de me faire bassiner tous les jours par ses pseudo-cours sur le rôle du Hokage, l'histoire du village, les horribles dangers qui nous guettent dans l'ombre et nous menacent, et toutes les responsabilités que je vais avoir sur le dos. À l'écouter, la situation est tellement catastrophique que je me demande comment est-ce qu'on peut être encore en vie... Mais on va tous mourir demain ! À quoi ça sert, alors, qu'elle me nomme à ce poste ?

Tsunade souffle bruyamment.

- Allez, arrête un peu, Naruto. Ce n'est pas ce que je voulais dire.

Du coup, je traîne la patte autant que possible mais, heureusement, Sakura, qui est vraiment un ange pour moi, m'aide et enregistre à ma place ces informations dont je sature et puis... Sasuke est là aussi.

Risquant une œillade vers lui, je suis touché par la furtive caresse de son regard et m'éblouis de m'en émouvoir toujours autant. Je lui souris et notre patronne fait entendre un nouveau soupir las.

Aujourd'hui, la vie me semble si paisible, si douce, que j'en viens à me demander comment j'ai fait pour supporter si longtemps son absence.

Déjà, incroyable mais vrai, je ne fais plus du tout de cauchemars et la chaleur de sa peau contre la mienne me suffit à dormir comme un bienheureux. Et puis, parce qu'il est là, je me sens prêt maintenant à affronter l'avenir, les difficultés et surtout à me dépasser moi-même. Si certains villageois me regardent encore un peu de travers, je crois que les plus jeunes ont une image complètement différente de moi et mon changement d'attitude par rapport à celle que j'ai eue durant ces dernières années y est pour beaucoup. Il paraîtrait même que je « rayonne », enfin, c'est ce que disent les autres, mais bon, il ne tient qu'à moi de gagner leur confiance et les barrages peuvent faiblir.

Sasuke est auprès de moi et je peux avancer maintenant, parce que quoi qu'il se passe, même si je flanche ou si je craque, je sais qu'il sera à mes côtés et que je pourrais toujours me reposer sur son épaule.

Seul, je n'aurais jamais pu poursuivre ma route et monter si haut.

Quant à lui, peut-être parce qu'il s'est enfermé si longtemps sur lui-même et sa douleur, il n'aspire plus maintenant qu'à donner et à me suivre dans ce rêve de protéger les habitants de notre village. Je sais que les blessures seront toujours présentes, les épreuves nombreuses et l'avenir incertain mais ce n'est finalement que le lot des gens de notre milieu. La menace de l'Akatsuki est encore très vive, pour lui, pour moi, comme pour le village et la vie n'est pas facile, surtout celle que nous avons choisie, et qui sait ce qu'elle nous réserve encore ?


Un puissant souffle de vent s'engouffre sous nos vêtements et la surface de l'eau qui nous fait face se trouble de quelques ondes, modifiant l'aspect des bâtiments du village qu'elle reflète. Resserrant ses doigts dans les miens, Sasuke me délivre un sourire chaleureux tandis que nous sautons du pont vers les berges de la rivière. Nos pieds foulent l'herbe fraîche, le soleil caresse nos peaux et le murmure de l'eau accompagne le glissement de nos pas.

Je m'allonge dans l'herbe et il vient m'étreindre. Le goût de ses lèvres sur les miennes a comme un air de paradis et ses yeux posés sur moi brillent si intensément que je pourrais me noyer en eux. Bercé par sa voix et les paroles douces qu'il m'adresse, je dérive de mon regard sur son visage souriant, la candeur de ses traits et sa chair dénudée que cette espèce de haut en résille laisse deviner... Je me mords les lèvres.

- Ça devrait être interdit, ce type de vêtements.

Il rigole et viens frôler de son souffle ma bouche et geint doucement quand je croque dans la pulpe de sa lèvre inférieure. Je souris.

- J'aime bien t'entendre gémir.

- J'ai remarqué...

Nos regards se croisent sur la même pensée et je me mets à pouffer en me rappelant la tête que notre Hokage faisait tout à l'heure, alors que Sasuke me tire un peu la tronche. Dans une petite moue, les sourcils baissés en signe de mécontentement, il marmonne :

- Il n'y pas à dire : t'es vraiment le roi pour les idées foireuses... On a eu l'air fin, sur le coup, devant Tsunade et Sakura.

Je viens frotter mon nez contre son cou.

- Ben quoi ? Tu n'étais pas contre. Et puis, si tu n'avais pas été si bruyant, aussi...

Je caresse doucement son torse, poursuivant dans un souffle.

- Ça me fait toujours... bizarre que tu puisses aimer ça à ce point.

Il rigole doucement.

- Ça te fait envie ?

- Euh...

Affichant un large sourire avant de me pousser sur le dos, il s'assoit sur moi et me domine de sa hauteur, ses mains posées à plat sur mon ventre.

- Tu voudrais que je te le fasse ?

- Je ne sais pas...

- Moi, j'aimerais bien.

- C'est vrai ?

Il hoche de la tête et l'un de ses doigts vient suivre les reliefs de mon torse, descendant distraitement le long de mes côtes.

- Oui... Ça me plairait que ça se passe avec toi.

Je me laisse griser par la vision qu'il m'offre sur son discret sourire, pudique, et la lueur qui s'est immiscée dans la façade sombre de ses prunelles. Une petite brise effleure la rive de la rivière et vient nous caresser, soulevant doucement nos cheveux.

- Oui, j'aimerais aussi.

Sasuke...

Un intense soupir me prend et soulève fortement mon thorax. Je ferme les yeux, envahi par les sentiments qui pénètrent mon âme et s'emparent de moi...

Si j'ai quand-même fini par me rendre compte de ce que je ressens..., oui, je sais que j'ai mis le temps mais je ne suis débile que jusqu'à un certain point, quand même, je me retrouve incapable de le lui dire. Pourtant, ça commence à me démanger plus qu'un peu. Alors, tandis que ma poitrine se gonfle et que cette seule pensée prend toute la place dans mon esprit, je ne songe plus qu'à prononcer ces mots... mais je n'y arrive pas. D'ailleurs, j'aimerais bien qu'on m'explique pourquoi c'est si difficile de faire quelque chose d'aussi simple, hein ?

Emmêlant mes doigts dans les siens, je rassemble en moi tout le courage dont je suis capable et relève mon regard pour le plonger en lui. J'essaye et j'inspire une grande bouffée, ouvrant mes yeux, mon cœur et mes lèvres et... silence. Rien ne veut sortir et je me retrouve une fois de plus comme un abruti, figé, la bouche ouverte, le cœur battant, complètement affolé, incapable de faire franchir le moindre son de ma gorge, si ce n'est baragouinant un dialecte inconnu façon Hinata à coups de « je... heu... Sas... et... », le tout entrecoupé de beaucoup d'air.

Sasuke éclate de rire et se moque de moi en me disant que je suis mignon.

Et ça me vexe un peu, quand même.

Je ne suis pas... « mignon ». Enfin ! Je suis le futur sixième Hokage du village caché de Konoha, mon seul nom fait trembler jusque dans les continents les plus éloignés, je suis une terreur, un ogre sanguinaire, un tueur froid et sans pitié, je suis l'incarnation même de la puissance du pays du Feu et ma place ici me promet à un avenir des plus grandioses dans le monde des ninjas. Où il voit, lui, que je suis « mignon » ?

Dans un sourire amusé, Sasuke m'incite encore un peu à poursuivre mais, devant mon mutisme et ma petite tête de blessé dans son orgueil, il change d'expression pour me caresser le visage tendrement, effleurant de la pulpe de ses doigts les marques de mes joues et la matière de mes lèvres. Approchant alors son visage du mien, il embrasse délicatement ma tempe et me susurre sa réponse à l'oreille :

- Moi aussi.

Je me liquéfie sur place.

Oui, après tout, rien ne nous presse. Et puis, on n'est pas doués pour les mots, de toute façon.


FIN

Ah là là, guimauve, guimauve... (moi qui voulait esquiver... hum. Raté).

EDIT du 20/12/09 :

J'ai fait quelques corrections qui me démangeaient depuis longtemps mais uniquement sur la forme (et encore, le moins possible) : fautes d'orthographe ou de grammaire, et je me suis juste permis de changer les diminutifs Sasu et Naru en Sasuke et Naruto (ne me demandez pas pourquoi j'aimais bien à l'époque et plus maintenant…) et d'alléger un peu la scène glauque du chapitre sept que j'avais vraiment du mal à supporter.

Ça fait maintenant deux ans que j'ai écrit cette fiction. Je m'étais régalée à l'écrire, marrée plus d'une fois tout en me demandant si on allait me pardonner toutes mes bêtises, creusée la tête pour essayer de rendre au mieux les passages importants et étais passée sans gêne sur tous les passages durs comme si ça ne m'avait absolument pas touchée (alors que j'ai du mal à les relire maintenant, il ne faut pas chercher à comprendre). En la relisant aujourd'hui, ça m'amuse dans un sens parce que j'y trouve une certaine forme de... naïveté, on va dire, presque d'enfance dans la façon d'aborder certaines choses : ça reste une « première fois » en matière d'écriture. Certaines choses ne me plaisent pas vraiment mais je n'y toucherai pas parce qu'elle a plu comme ça et que je me dis que ce n'est pas grave. Certaines choses me plaisent toujours beaucoup. Je voulais vraiment faire une « histoire d'amour » et, dans ce sens, je pense que je suis arrivée à ce que je voulais. C'est ma toute première fiction ! J'ai une affection vraiment toute particulière pour elle.

J'espère que cette fiction vous aura plu et qu'elle vous aura apporté le même plaisir à la lire que moi lorsque je l'ai écrite. Et n'hésitez pas à me laisser un commentaire ! Même maintenant, j'aime toujours énormément les lire. Merci.