Chapitre suivant ! Désolée pour le retard! J'espère que vous aimerez! Bisou bisou !


Sa couverture étant parfaite, comme toujours, Duo n'eut aucun mal à s'infiltrer dans la base en tant que gardien. Sa tête n'était certainement pas assez pleine pour qu'il ose prétendre être scientifique et, de toute façon, il était hors de question qu'il participe directement aux tests sur les… sur les cobayes.

Il avait été rattaché à la surveillance des laboratoires, principalement de nuit pour commencer. Cela compliquait un peu le plan des Mads puisque ainsi il ne pouvait constater par lui-même les travaux en cours, mais cela lui convenait mieux, du moins pour l'instant. Une incursion trop rapide dans ce monde affreux l'aurait probablement trop chamboulé émotionnellement, allant peut-être même jusqu'à nuire à sa mission. Se réhabituer à l'atmosphère étouffante du lieu, se créer un masque à l'effigie d'un type froid que rien des monstruosités perpétuées dans cet endroit ne répugnait… tout cela s'annonçait pénible, mais néanmoins réalisable.

C'est en revenant dans l'antre du diable qu'il s'apercevait à quel point il avait évolué, mais ironiquement également combien il était resté le même, à l'intérieur. Les premiers jours passés entre ces murs gris et vides l'avaient trouvé sursautant au moindre murmure et chaque fois qu'il entendait quelqu'un prononcer son nom, il craignait qu'on ne l'ait reconnu.

132

« Je me suis amélioré, se dit-il ironiquement en tournant dans un corridor vide. Je suis 02, maintenant.»

Toujours un putain de numéro. Et une longue traînée de sang derrière.


Deux semaines plus tard, on lui annonça qu'il serait désormais en charge des laboratoires. Jonglant avec satisfaction et horreur, Duo en informa secrètement Heero lors de l'une de ses sorties en ville par le biais d'un ordinateur, dans un petit café. Ils avaient convenus que c'était la solution la moins périlleuse pour sa couverture – et sûrement pour sa propre sécurité également, même si cela n'avait pas été mentionné par 01 -, surtout en vue de la surveillance dont lui-même était l'objet. Effacer toute trace de ses démarches, même si le message qu'il envoyait était redirigé vers une messagerie tout ce qu'il y avait de plus normale, était facile. Toujours écrire sous mots couverts, bien entendu, annoncer à un vieil ami de la Fac que les enfants de sa sœur grandissaient très vite, qu'ils étaient en bonne santé mais que la tante Minerva, elle, était toujours en convalescence et que les visites à son chevet étaient toujours impossibles à l'heure actuelle… Les autres pilotes comprendraient là qu'il avait eu une promotion mais que de Monsieur, nulle trace encore.

Pas besoin de leur raconter ce qui se murmurait entre les membres du personnel, de combien Monsieur pouvait, même en brillant par son absence, inspirer la crainte à chacun, même aux gardiens les plus costauds et durs. À côté d'eux, Duo se sentait légèrement larve, mais il se savait capable de tous les battre en un tour de main. Quand même, il était un putain de pilote de Gundam, pas un simple freluquet sans cervelle !

- Eh, petit !

Ce qui ne l'empêcha pas de sursauter comme un enfant en réentendant entre ces murs ce surnom dont on l'avait autrefois affublé, lorsqu'il n'était encore que 132. Il se retourna vivement, tentant tout de même de se contrôler, et offrit un sourire forcé à l'homme qui venait vers lui.

- Ted, fit-il en le reconnaissant.

Le quinquagénaire, bourru et quelque peu hirsute, lui donna une grande tape dans le dos lorsqu'il l'eut rejoint.

- Grandes mais mauvaises nouvelles, petit, dit-il encore. Le patron devrait v'nir bientôt faire son inspection.

Le jeune pilote s'efforça de contenir un frisson de panique. Il s'assura que sa voix ne lui ferait pas défaut avant de parler.

- Ah oui ? Je croyais qu'il était ici, moi…

-' L'était pas venu depuis quelques mois… en grande discussion avec les nouveaux associés, sans doute.

- Des nouveaux associés ? répéta Duo.

- Bah, des bruits de corridors, tu sais ce que c'est… Mais il parait qu'ils veulent agrandir, voire ouvrir d'autres labos sur quelques colonies. Et puis… ben ya de plus en plus de…

L'homme se tut et sa bouche se fit un pli amer. Duo le regarda de côté alors qu'ils marchaient.

- Vous êtes un type bien, Ted, fit-il doucement, craignant sa réaction.

C'était vrai. Il était l'un des seuls à l'avoir accueillit correctement à son arrivée. Pas d'effusions, bien entendu, mais il lui avait appris les trucs du coin, lui avait dit ce qu'il devait faire et ne pas faire pour plaire aux superviseurs et surtout, il l'entourait, consciemment ou non, d'une sorte de chaleur amicale dont Duo avait cruellement besoin.

Il ressemblait à un gros ours, Ted, avec sa taille imposante, ses grosses mains à la poigne de fer et sa barbe brune qui lui mangeait le visage. Il était le genre de gars à pouvoir vous écrabouiller avant que vous n'ayez eu le temps de déguerpir mais ça n'inquiétait pas 02 outre mesure.

Parce que dans les petits yeux noirs de Ted, il y avait cette culpabilité profondément ancrée mais dissimulée qui était venue l'agripper de l'intérieur, et ce dès le premier jour.

- Ma femme dit ça aussi, répondit le plus âgé, fixant toujours droit devant lui. Mais elle croit que je suis gardien de sécurité dans un immeuble à bureaux. Elle… elle pourrait pas supporter que je couvre toutes ces…

Il se tut, craignant d'en avoir trop dit soudainement. Duo ne devait techniquement pas savoir. Il était encore débutant et non inclus dans le secret.

- Dégueulasseries ? proposa-t-il tout de même. Je sais bien c'qui s'passe ici, Ted, ajouta-t-il plus bas.

- Alors qu'est-ce que tu fiches encore ici ? s'énerva l'autre. Attends pas d'être dedans jusqu'au cou parce qu'après ils ne te laisseront plus r'partir.

- Ça a été comme ça, pour vous ? devina Duo.

Ted ne répondit pas. Ce n'était pas la peine.

- Ne vous en faites pas pour moi, continua le natté. Je sais bien ce que je fais.

- Ouais, on dit tous la même chose, au début. La salaire, eh ?

Duo fit mine de sourire en haussant les épaules.

- N'empêche, essaie de raser les murs si jamais tu vois un homme habillé tout en blanc, dit encore Ted.

- En blanc ?

- Il porte toujours un grand manteau de cette couleur alors… et puis si tu veux prendre du galon rapidement, tiens-toi à carreau pendant quelques jours, obéit bien et tout le reste… quelques types sont partis, au niveau des labos alors y'a des places de libres… 'va y avoir des transferts.

- Je viens à peine d'arriver alors ça m'étonnerait, vous savez.

- T'as une bonne gueule.

- … Quoi ?

- Une gueule honnête. Et même si tu m'souris en c'moment, t'es doué pour cacher tes émotions, alors c'est bon pour toi. Tu verras bien, de toute façon.

Il y eut un instant de flottement pendant lequel le jeune homme vit bien que son aîné semblait nerveux. Sans doute craignait-il d'en avoir trop dit, ce qui était totalement compréhensible. Nombreux auraient été ceux qui, face à l'attitude et aux paroles de Ted, se seraient empressés d'aller tout raconter à un supérieur, ne serait-ce que pour gagner un peu de galon.

- Je dirai rien, Ted, assura-t-il d'un ton plus bas. Même si ça m'arrangerais franchement de monter rapidement les échelons, je 'vous ferai pas d'emmerdes.

L'homme lui sourit.

- Vous êtes là depuis longtemps, non ? Continua Duo sur le ton de la conversation.

- Une dizaine d'années.

- Et vous n'êtes jamais allé au niveau des labos ?

- Si, soupira-t-il. Mais j'ai demandé à redescendre ici.

- C'est si horrible que ça ?

- Je pense toujours à mes enfants à moi... Quand ils étaient petits et que j'espérais que jamais il ne leur arrive rien... J'ai voulu arrêter parce que c'est absolument immoral... Mais ils ne nous laissent pas partir. Tout le monde sait bien ce qu'il arrive à ceux qui font des problèmes.

- Ils...

- Ouais.

- Y'a jamais eu de fuites, depuis tout ce temps ?

- Pas que je sache. Quelques tentatives, sans doute, mais...

- Mh, ni vu ni connu.

Il était tard et fort heureusement personne ne traînait dans les corridors, ce qui arrangeait bien Duo. Ted s'avérait un allié, même si lui-même n'en avait pas conscience. Si jamais les Mads parvenaient à démanteler le réseau, le jeune homme tenterait de faire en sorte qu'il n'ait pas trop de problèmes. Les Vieux lui devaient bien ça...

- Ça a faillit tout foirer, une fois, se souvint Ted.

Duo fronça les sourcils.

- Comment ça ?

- Un des enfants est parvenu à sortir avec l'aide d'un des scientifiques.

Un frisson parcouru l'échine du pilote infiltré alors qu'il tentait désespérément de ne rien laisser paraître.

- Ils sont parvenus à rattraper le type. L'enfant était déjà disparu dans la nature et malgré les équipes à sa poursuite, ils n'ont pas retrouvé sa trace. Alors on a dû déménager le labo en vitesse. J'ai cru qu'ils cesseraient leurs expériences, du coup, mais apparemment c'était pas assez. Sans doute qu'ils ne croyaient pas qu'un môme parviendrait à se faire entendre des autorités si jamais il parvenait à trouver sa route. C'était un sacré gamin, si j'en crois ce qu'on en a raconté. Le pire meurtrier qu'ils soient jamais parvenus à former ici, même s'il en connaissait déjà pas mal à son arrivée.

- Ah ouais, fit simplement Duo.

Pire Meurtrier...

Si tu savais, Ted, que tu es en train de lui parler, à ce môme aux mains sanglantes...

- Ils ont tué le scientifique, je suppose ?

- Ouais, sûr. Mais pas immédiatement. Il était amoché lorsqu'ils l'ont retrouvé et ils lui ont pas arrangé son cas en lui tirant encore dessus, mais ils l'ont amené au labo avant... Ça va, petit ? T'es d'venu tout pâle...

- Vous inquiétez pas... Mais pourquoi ne l'ont-ils pas tué...

- Parce que Monsieur voulait tenter de le faire parler... Mais il a jamais réussit... Le pauvre type voulait juste sortir l'enfant d'ici, il 'avait pas réellement de plan.

- Et... Ensuite ?

Ted soupira. Il lui sembla que les rides sur son visage se faisaient plus prononcées encore alors qu'il soufflait ;

- Il l'a tué. Et plus jamais personne n'a tenté quoi que ce soit contre le Centre après ça.

Tsuzuku