Auteur : Michmak.

Traduction : Andeor.

Disclaimer : J.K. Rowling pour les personnages et l'univers, Michmak pour l'histoire.

NdT : La version originale de ce chapitre est disponible sur ce site sous le nom de Michmak. N'hésitez pas à me faire part de vos impressions quant à l'original et à la traduction.

Cette histoire est dédiée à mon cher Fossile Mirabelle P., qui nous a réconciliés, l'Anglais et moi, et a fait la publicité de la version originale de cette fic.

Pray for the people inside your head,

For they won't be there when you're dead...


Chapitre 1 : Nettie.

Cela fait maintenant plus d'un an qu'elle est comme ça, et il vient la voir tous les jours. Jours de soleil ou jours de pluie, je pourrais presque régler ma montre en fonction de ses agissements. Il arrive toujours juste après le dîner. J'en arrive à reconnaître le son de ses pas, tandis qu'il traverse le hall, sa robe sombre ondulant à sa suite. Je fais toujours en sorte qu'il y ait une tasse de thé à sa disposition quand il arrive. Il s'assied toujours sur la même chaise, juste à côté d'elle. Il ne m'adresse jamais la parole, ni à moi ni à aucune des médicomages, d'ailleurs. Mais parfois, il lui parle à elle.

La première fois, j'avais été avertie de son arrivée. Ma sœur Poppy était venue par poudre de cheminette, afin de me prévenir qu'il arrivait, et qu'il était de fort méchante humeur. Je dois reconnaître que je ne savais pas grand-chose de lui, à part ce que j'en avais lu dans les journaux et les infos que j'avais réussi à extorquer à Poppy , pendant les rares moments où elle parlait de lui.

C'était un héros, bien sûr. Il semble qu'un grand nombre de héros aient vu le jour au sein de la société à cette époque, grâce à la chute de Voldemort. Harry Potter était là en personne le jour où on l'a amenée ici, et personne ne pouvait prétendre avoir fait preuve de davantage d'héroïsme que lui.

M. Potter m'avait demandé si elle avait mal, et si elle bénéficiait du confort nécessaire. Il avait les yeux les plus tristes que j'aie jamais vus, d'une couleur de trèfle flétri, et les nombreuses ombres qui les traversaient me donnaient envie de le consoler. Il en avait vu des vertes et des pas mûres, entre la guerre, la perte d'un de ses meilleurs amis au cours de la bataille finale, et le fait de savoir l'autre en prise avec un maléfice incurable qui semblait avoir volé son esprit. Avant de partir, il m'a donné une bouteille d'un produit moldu pour les cheveux, et m'a demandé d'en pulvériser sur ses cheveux avant de les coiffer, il disait que cela me faciliterait la tâche avec les boucles et les nœuds, quand ils auraient repoussé.

Quand je lui ai dit qu'il fallait qu'elle garde les cheveux courts durant son séjour ici, pour nous faciliter la tâche, il m'a semblé ravagé. Il a essayé de me dire que ce n'était pas une patiente ordinaire, qu'il s'agissait d'Hermione, et qu'Hermione avait des cheveux, beaucoup de cheveux. Il a tiré de sa poche une photo de Miss Granger plus jeune, qui souriait et agitait la main à l'intérieur de la photo, alors qu'un jeune homme aux cheveux roux, que je supposai être Ron Weasley, tâchait d'écarter de leurs deux visages les mèches folles de la jeune fille. La photo avait apparemment été prise lors d'un jour de grand vent.

Je lui ai expliqué, gentiment mais fermement, que ce n'était pas moi qui faisais les règles ici, mais que j'étais obligée de les respecter. Même si j'avais envie de faire une entorse à la règle pour lui, le docteur Bechtel, le directeur de Sainte-Mangouste, ne m'y autoriserait jamais. M. Potter garda un visage stoïque à l'annonce de cette nouvelle, mais je me rendais bien compte qu'elle le ravageait. Il est parti quelques instants plus tard, après avoir à peine jeté un second regard dans ma direction.

Le lendemain, Poppy arriva par cheminette avec un air paniqué : le Professeur Rogue, que je n'avais encore jamais vu, allait arriver d'une seconde à l'autre. Je me souviens encore des paroles de Poppy : « Il peut sembler un peu déconcertant, Nettie-Chou. Ce n'est pas quelqu'un de gentil, mais lui aussi a eu sa part d'épreuves, alors devant lui, tâche de contrôler ta langue ».

Même si j'avais fini par m'habituer au fait que Poppy me traitât toujours comme une gamine en jupette, je fis de mon mieux pour ignorer son ton condescendant. C'était la plus âgée de mes sœurs, et de loin celle que j'admirais le plus, même si elle me traitait encore comme un bébé. Donc, j'étais avertie de la venue imminente du Professeur Rogue. J'aurais aimé que l'adage « savoir, c'est prévoir » s'appliquât, mais même si je l'attendais, je sursautai tout de même légèrement quand, venu de nulle part, il transplana juste en face de moi, tel une grande chauve-souris noire.

Il regarda d'un air furieux quelques jeunes médinfirmières qui avaient sursauté à son arrivée, avant de se tourner vers moi, un air renfrogné et furieux sur le visage.

« Bonjour, Pomfresh. »

J'étais un peu éberluée qu'il connût mon nom, mais tâchai de ne pas le montrer.

« Professeur Rogue, » répondis-je.

« Poppy vous embrasse. » Bien sûr. La source d'information « Poppy » coulait dans les deux sens.

« Merci, monsieur. Dites-lui que je l'embrasse aussi, s'il-vous-plaît. »

Je pouvais entendre des murmures d'excitation autour de moi, alors que les infirmières prenaient conscience de l'identité de la personne qui se tenait à la porte de la chambre de Miss Granger. Il y en eut même une assez folle pour lui demander s'il portait toujours la marque des ténèbres, et si oui, si elle pouvait la voir.

L'homme lui sauta presque à la gorge. Pas qu'il ait tort, à mon sens. Stupide gamine, il était évident qu'elle n'était jamais allée à Poudlard. Je poussai un soupir en la voyant s'enfuir en pleurant à l'autre bout du hall, suivie de près par les autres infirmières, et me tournai à nouveau vers lui.

Son regard renfrogné était rivé au regard compatissant que j'avais tenté d'empêcher d'apparaître sur mon visage. Je tournai les talons et le conduisit à l'intérieur de la chambre d'Hermione. Je me doutais bien qu'il n'était pas le genre d'homme à aimer attendre.

Une fois entrés, je me tournai vers lui et l'observai regarder ma jeune patiente en fronçant les sourcils. J'étais presque contente pour elle qu'elle ne fût pas consciente de ce regard.

« Voyez-vous, Miss Granger, même privée de vos sens comme vous l'êtes, vous me causez tout de même des ennuis, » murmura-t-il en sortant délicatement une longue boîte blanche de sous sa cape pour la poser sur le lit. Il se tint là à l'étudier intensément pendant un moment, sans rien dire. Il avait l'air de nous avoir totalement oubliées, moi et les fleurs (fleurs ou autre présent contenu dans la boîte). Finalement, après un silence interminable, il haussa un sourcil en se tournant vers moi.

« Vous comptez rester là jusqu'à quand ? » me lança-t-il d'un ton sec.

Quel homme insupportable. Je sortis précipitamment de la chambre en essayant d'avoir l'air sûre de moi.

Quand je suis revenue une heure plus tard, il était parti. Miss Granger reposait sur son lit, tout comme quand je l'avais quittée, ou presque. Son regard vide était toujours tourné vers le mur, ses yeux étaient toujours mornes et sans vie, ses mains étaient toujours posées, pâles et immobiles, sur ses genoux. Mais ses cheveux ! Ses cheveux courts, en bataille, qui avaient tant impressionné le jeune Potter la veille, ondoyaient à présent en boucles incontrôlables tout autour de son visage et tombaient en cascade dans son dos.

J'ai honte de l'avouer, mais j'ai bel et bien essayé de les couper. Je n'avais pas menti à M. Potter quand je lui avais dit que les cheveux longs sont interdis par le règlement. C'est un pensum pour les médinfirmières de s'en occuper. Surtout quand ils tombent en boucles incontrôlables, comme les cheveux de miss Granger. Malgré cela, toute tentative pour les couper fut un échec. Le Professeur Rogue avait en quelque sorte enchanté les boucles. Je ne sais combien de ciseaux se désintégrèrent dans mes mains avant que je ne m'avoue vaincue. C'était une héroïne de guerre, après tout, et ça la flattait beaucoup plus d'avoir les cheveux longs.

Poppy et moi eûmes une grande discussion au sujet de Rogue, ce soir-là. Elle avait transplané pour prendre une tasse de thé, mais après avoir examiné Miss Granger, elle haussa simplement un sourcil en me regardant.

« Il lui a jeté un sort, non ? »

Je haussai les épaules. « On dirait. En fait, je ne peux pas les couper, les ciseaux se cassent tout le temps. Et je te réponds avant que tu ne poses la question : je ne peux pas non plus les couper en utilisant la magie. »

Poppy fit une moue pensive, se tapotant les lèvres du doigt. « Il t'a dit quelque chose ?

- Non. Il est juste apparu, il a fait pleurer quelques unes des médinfirmières et m'a ordonné de quitter la chambre. Quand je suis revenue un peu plus tard, il était parti. » Je remplis la tasse de Poppy avant de me verser une autre tasse pour en siroter une gorgée. « Qu'est-ce que ça peut lui faire, qu'elle ait les cheveux longs ? »

Poppy haussa les épaules, « M. Potter est venu nous rendre visite à l'école, hier. Il était assez bouleversé, le pauvre garçon. Tu sais, c'est très dur pour lui, tout ça. D'abord il perd Ron, et maintenant, malgré toutes les tentatives, il perd aussi Hermione. Il était surtout bouleversé par ses cheveux.

- Oui, c'est bien ce qui m'a semblé quand il a quitté l'hôpital », acquiescé-je, « mais quel rapport avec le Professeur Rogue ?

- En fait, Harry est venu à l'infirmerie. Hier soir, j'ai autorisé Rogue à sortir. C'était la première fois depuis… ce jour. Bref, Harry est entré en coup de vent, les larmes aux yeux, en demandant à lui parler. Ca n'a jamais été le grand amour entre eux, tu sais, mais avant même que je puisse trouver un prétexte valable pour lui dire non, j'ai entendu Rogue crier que c'était bon, qu'il pouvait entrer.

- Et alors ? » J'essayais de ne pas m'impatienter, je le jure. Poppy prend tellement de plaisir à raconter ses histoires que j'ai horreur de la presser, mais je me demandais bien où elle voulait en venir avec tout cela. Elle devina mes pensées et me sourit.

« Tes biscuits sont délicieux, chérie. Je peux en avoir un autre ? » Elle me sourit tandis que je poussai un grognement et lui mis l'assiette pleine entre les mains. « Bref, qu'est-ce que je disais ? Harry est venu voir Rogue. Remarque, c'était pas la première fois qu'il venait lui rendre visite à l'infirmerie, mais la dernière fois, il y avait eut un effroyable désastre. Je ne peux que remercier Dumbledore d'avoir été là pour empêcher Harry de tuer l'autre. »

Elle prit un autre biscuit, en grignota un petit bout et sourit en me voyant me tortiller d'impatience. « Hé oui, car si Dumbledore n'avait pas été là… bref, cette fois-là, Harry est entré en coup de vent dans l'infirmerie avec l'intention d'envoyer Rogue rejoindre le pays de ses aïeux. Que le pauvre homme souffre déjà le martyr ne semblait pas le perturber, il était décidé à le faire souffrir davantage. Vois-tu, Nettie, il reproche à Rogue d'être responsable de ce qui est arrivé à Hermione.

- Mais pourquoi ?

- Hermione a été frappée par un sort destiné à Rogue. D'après ce que j'ai compris, elle a vu Lucius Malefoy en train de le lancer et a réussi à s'interposer avant que le sort n'atteigne Rogue. Si elle n'avait pas fait cela, Rogue serait le seul à être à Sainte-Mangouste aujourd'hui, et Dieu sait qu'il en est conscient. Tout le monde en est conscient.

- Mais on ne peut pas dire que ce soit la faute de Rogue, si ?

- C'est exactement ce que Dumbledore a dit à Harry quand il a arraché la baguette des mains du garçon. Rogue ne pouvait pas savoir qu'Hermione ferait une chose pareille. C'a été dur pour nous tous de le reconnaître, il n'avait jamais vraiment été agréable avec elle, après tout, alors pourquoi se serait-elle sacrifiée pour lui ? En tous cas, le pauvre homme était là, alité, désarmé, avec Harry en train de lui jeter à la figure qu'il ne méritait pas le sacrifice d'Hermione, que s'il disparaissait de la surface du globe, ce ne serait une perte pour personne, que personne ne le regretterait. C'est Rogue qui aurait mérité de mourir, pas Ron, c'est lui qui aurait mérité d'être frappé par un sort irréversible, pas Hermione. Il a été incroyablement cruel, Nettie. Et tu sais ce que Rogue lui a répondu quand il s'est enfin calmé ? »

Je secouais la tête. Bien sûr que non, je ne le savais pas. Mais Poppy ne sembla même pas le remarquer. Elle soupira. « Il a regardé Harry droit dans les yeux et lui a dit « Je sais ». Tu y crois, toi ? « Je sais ». Ca a calmé instantanément Harry, je peux te dire. Il est resté à regarder Rogue bouche bée pendant quelques minutes, avant de s'effondrer en pleurant dans les bras de Dumbledore. Donc, tu comprends pourquoi je ne voulais pas laisser Harry voir Rogue hier soir, hein ? Mais je n'ai pas vraiment eu le choix.

- Alors, il s'est passé quoi, hier ? » demandai-je.

« Harry et Rogue ont parlé. Pas de combat, pas de hurlements. Harry est venu, s'est assis sur son lit, et ils ont parlé comme des êtres humains civilisés. Harry a raconté à Rogue sa visite à Hermione, l'état de ses cheveux, et lui a dit qu'elle ne ressemblait plus du tout à Hermione. Il a dit à Rogue qu'ils ne pourraient pas repousser tant qu'elle serait à Sainte-Mangouste, et que lui ne le supporterait pas de la voir si frêle et si maladive, si étrangère à elle-même. Plus il parlait, plus Rogue semblait en colère, pas contre Harry mais contre la situation en règle générale. J'ai regardé chaque mot le blesser davantage, avant de l'entendre me dire qu'il quittait cette infirmerie de tous les diables, et que rien ne pourrait l'arrêter. Puis il s'est tourné vers Harry et lui a dit « qu'il s'occuperait personnellement d'arranger la situation de Mss Granger ». Mot-à-mot.

- Mais si tout cela est arrivé hier, pourquoi n'est-il pas venu avant aujourd'hui ? »

Poppy haussa les épaules, « Je ne sais pas. Je sais juste qu'il n'est pas venu la nuit dernière. Je pensais qu'il y était, pourtant, jusqu'à ce qu'il annonce au petit-déjeuner, encore plus en rogne que d'habitude, qu'il allait rendre visite à Hermione à Sainte-Mangouste aujourd'hui afin de corriger un petit problème. Je t'en ai averti immédiatement après. J'imagine qu'à présent qu'il lui a rendu visite et qu'il a fait ce qu'il avait à faire, tu n'auras plus à t'inquiéter à son propos. Il n'a jamais aimé les hôpitaux, quels qu'ils soient, et ce n'est pas le genre d'homme à rester assis au chevet de quelqu'un durant des heures. Je pense qu'il n'a pas assez de patience pour ça. »

Nous étions toutes les deux bien loin d'imaginer à quel point Poppy faisait fausse route en disant cela. Aujourd'hui, plus d'un an après, il lui rend encore visite. Il est le seul à le faire.

(A suivre...)