Bonjour tout le monde !

Tout d'abord, je vous souhaite à tous un très joyeux Noël, en espérant qu'il fut joyeux et agréable, plein de rires, de joie, de complicité et de cadeaux !

Et en guise de (modeste) cadeau pour chacun de vous, qui me suivez depuis longtemps ou très récemment sur cette fic, voici ce dernier chapitre… J'aimerai le dédicacer à chacun, car tous autant que vous êtes, les habitués, les nouveaux, les anonymes, vous m'avez portée sur cette histoire qui m'a beaucoup marquée, et qui, je l'espère, vous aura laissé quelques souvenirs…

Merci de tout cœur d'avoir suivi cette aventure, d'avoir frémi, été ému, été en colère ou desespéré, peut-être même d'avoir pleuré, avec et pour nos héros… Merci d'être resté jusqu'au bout, malgré le temps qu'a pris cette histoire, malgré son ton souvent sombre… Et merci par-dessus tout de m'avoir encouragée, et d'avoir été touché par cette histoire. Ca, c'est mon plus beau cadeau de Noël !

Rarement une de mes fics ne m'aura apportée autant d'émotions et de partage, sincèrement, alors je tenais à vous remercier pour cela ^^ Et même si elle se finit ici, j'espère qu'elle restera longtemps, même en infime bribe de souvenir, quelque part… Et à bientôt, peut-être, pour d'autres aventures…

Disclaimer : la plupart des personnages et lieux appartiennent à J.K. Rowling, le reste est à moi.

Rating : K

Je vous laisse avec la fin de Fallen angels


Fallen angels

Chapitre 50 : Another shadows night in your arms

La nuit tombe, s'illuminant de points, épars… nous enfermant, ne nous laissant comme repères que ces étoiles diffuses, vacillantes.

La nuit tombe, mais ne m'effraie plus. Parce que maintenant, quand je ferme les yeux, je ne me retrouve plus face au vide d'une mémoire en lambeaux, et ce ne sont plus mes cauchemars qui s'impriment sur mes paupières.

La nuit tombe, nous enveloppant, nous laissant avides et pantelants, de ce lendemain qui signifiera tant pour nous.

La nuit tombe, et elle peut bien durer éternellement ou s'entrecouper d'autant de matins qu'elle le voudra. Je n'ai plus peur.

Je n'ai plus peur, car j'ai maintenant une certitude au cœur.

Toi.

Les pas de Draco résonnaient avec force dans les couloirs vides de Poudlard. L'école ne s'était pourtant pas encore vidée de ses élèves, qui ne regagneraient leurs familles pour célébrer Noël avec elles que le lendemain. En cette veille de fête, le château brillait de ses plus beaux atours, non avec ostentation, mais avec le charme et la discrétion que seule peut offrir la magie d'un vrai Noël…

L'adolescent blond tourna à un angle, et emprunta un escalier, quittant l'aile des Serpentards. Il parcourut en silence une bonne partie du bâtiment, avant d'arriver au pied d'un autre escalier. Un couple d'élèves, enlacés en avance sous une branche de gui, eut un sursaut en entendant le jeune homme arriver, et quand ils l'aperçurent qui montait, ils se reculèrent instinctivement contre le mur.

Draco passa devant eux sans leur accorder le moindre regard -les avait-il seulement vus ?-, puis se trouva face à une intersection. Il hésita une seconde : l'un des corridors, très large et interminable, était désert. Au bout de l'autre, plus court, montait déjà un brouhaha joyeux et animé. Les deux chemins le mèneraient à sa destination, le premier serait certes plus calme mais également plus long. L'autre, rapide, mais fréquenté.

Il reprit sa route, sans plus attendre. Empruntant le second chemin, il remonta les quelques dizaines de mètres qui le séparaient de la Grande Salle, ignorant les regards furtifs ou pleinement inquisiteurs que lui jetaient les adolescents présents dans le couloir ; et s'arrêta une seconde sur le seuil. La porte close n'étouffait qu'à peine la musique et les exclamations enthousiastes des gens qui faisaient la fête. Il prit une brève inspiration et tendit la main pour repousser le battant, quand celui-ci s'ouvrit avec fracas pour laissait s'échapper un groupe de quatre élèves hilares et bruyants, se tenant par les épaules, brillants dans leurs robes de bal et leurs cravates en soie, des bulles de champagne pétillant de leurs yeux jusqu'au bord de leurs lèvres…

Draco se décala d'un pas pour les laisser passer, et garda son regard dardé devant lui, même quand l'un des garçons du groupe, un Serdaigle, le bouscula avec plus d'intentionnalité que de réelle maladresse. Serrant les lèvres, le blond se passa une main sur la tempe, comme pour se rasséréner, puis pénétra dans la Grande Salle, en même temps que plusieurs autres étudiants, qui prirent toutefois soin de laisser une distance entre eux et lui.

La pièce était magnifique, richement décorée et sublimée par la lumière tamisée que diffusaient les centaines de bougies flottant au-dessus des élèves. Les douze immenses sapins qui trônaient au bout de la salle scintillaient de rouge, bleu, doré et argenté sous les éclairages diffus, et les bijoux des jeunes filles se reflétaient dans les boules de verres qui ornaient les arbres. Les robes et les capes tournoyaient et virevoltaient au son des rires et de la musique, les sourires fleurissaient sur les lèvres et dans les prunelles pleines d'insouciance.

Le jeune homme blond resta un moment sur le seuil, saisi à la gorge par cette vision d'un monde où rien ne paraissait pouvoir s'écrouler. Il sentit un frisson le parcourir, et n'aurait su dire en cette seconde si c'était de l'envie ou du dégoût qu'il ressentait.

Peut-être juste un abyssal et saisissant désespoir, qui dura l'espace d'une seconde, mais suffit à ébranler sa carapace.

Alors, pour se calmer et retrouver son sang-froid, il eut ce geste machinal, qui avait l'étrange et malsain don de lui ramener immédiatement les pieds sur terre : il pressa de sa main droite son avant-bras gauche, et serra du plus fort qu'il le put à travers l'étoffe épaisse de son pull. Quand il sentit son bras s'engourdir sous la douleur, il relâcha enfin la pression, et put reprendre son souffle.

Il balaya alors à nouveau la salle du regard, et sentit son cœur s'alléger un peu en apercevant une tête rousse dépasser des autres, tournoyant maladroitement au milieu de la piste de danse. Il fit un pas dans cette direction, mais se retrouva sans qu'il s'y attende face à un barrage de cinq adolescents, dont le vert dominait largement sur les costumes de soirée.

« Alors, petit prince, on s'est égaré ? »

Draco ne répondit rien, refusant de fixer les Serpentards qui lui faisaient face. Il voulut poursuivre son chemin, mais les autres ne bougèrent pas d'un pouce.

« Tu sais que tu nous as beaucoup déçus… On s'attendait à mieux de ta part, toi qui te prétendais à notre tête. » sussura un autre, mauvais, tout en lui plaquant durement une main sur le torse pour le forcer à reculer d'un pas.

Malgré la force de l'autre, le blond ne bougea pas, et levant enfin les yeux vers son interlocuteur, il lâcha entre ses dents :

« Je n'ai pas de comptes à vous rendre. »

« Oh oh, ça c'est que tu crois, Malefoy ! » s'exclama un autre, mais il ne put continuer, car déjà le ton de Draco se durcissait quand il précisa, repoussant celui qui le bloquait :

« Je ne suis plus un Malefoy. » Il repartit, mais non sans entendre, malgré le brouhaha ambiant, le premier des Serpentards reprendre, crachant son venin comme s'il l'avait encore en face de lui et qu'il venait de lui mettre son poing en plein visage :

« Tu parles ! Tu peux fuir et prétendre être un autre, on sait tous ce que tu es et ce que tu vaux ! Tu n'effaceras pas comme ça ton passé ! »

Serrant son avant-bras à s'en faire blanchir les phalanges, Draco se fraya un chemin comme il le put dans la foule compacte et mouvante des danseurs. Tout tournait autour de lui, la musique lui martelait la tête, faisant battre son sang contre ses tempes. Les larmes qui lui montaient aux yeux et qu'il tenta vainement de refouler lui brouillait le paysage en un magma flou et dérangeant. Bousculé, bringuebalé par la foule, il crut entendre son nom plusieurs fois, et s'efforça d'oublier, d'ignorer ces voix. Il pouvait supporter beaucoup de choses, il pouvait accepter le dégoût, l'horreur, la moquerie ou même cette stupide et incompréhensible admiration dans les voix des autres, mais entendre encore et encore ce nom qui n'était plus lui, il ne le pouvait plus.

Malefoy.

Malefoy…

Malefoy… Qu'est-ce que ça signifiait, encore maintenant ? Qu'est-ce que ça représentait, maintenant que tous ses représentants étaient tombés ? Ses parents… Les deux personnes qui l'avaient mis au monde et portés plus loin qu'eux-mêmes l'auraient sans doute cru possible… Son père et sa mère, qui avaient tout sacrifié, jusqu'à leurs croyances mêmes, pour qu'il vive libre, ne serait-ce qu'un instant de plus… Eux, avec qui il n'avait même pas pu échanger une dernière étreinte, un dernier mot, un dernier regard…

Eux, pouvaient-ils encore prétendre être des Malefoy, de là où ils étaient ? Dans ce lieu où l'âme même des personnes était niée, n'avait plus de valeur ?

Et lui, lui le fils indigne, lui le traître à son sang… de cette famille il ne pourrait plus jamais se réclamer. Il ne le pourrait ni ne le voudrait plus.

Non, il n'était plus un Malefoy.

« Draco ? »

Oui… Oui ! Oui, ça c'était lui ! Oui, là il se reconnaissait encore…

Il relâcha très légèrement la pression sur son avant-bras, se raccrochant à ce prénom comme à une bouée de sauvetage, s'y agrippant, tournant la tête de tous côtés pour enfin trouver son sauveur, celui ou celle qui l'avait reconnu. Lui.

Lui. Juste Draco.

Il tomba presque dans les bras de Ron quand celui-ci lui tapota doucement l'épaule, et sentit son cœur s'apaiser enfin un peu en entendant la voix inquiète mais si rassurante de Hermione couvrir un instant le vacarme des danseurs :

« Draco ? Est-ce que ça va ? »

« Il est très pâle, Mione… » La prise de Weasley sur son épaule se raffermit, tandis que la main chaude de Granger se posait sur son front, pour ensuite glisser doucement jusqu'à sa main et desserrer calmement ses doigts de son avant-bras.

« Tout va bien, Draco. Sors un peu, Harry ne va pas tarder… » Les prunelles grises, qui vrillaient trop rapidement la salle, s'ancrèrent enfin dans celles, posées et bienveillantes, de la jeune fille. Alors Draco hocha la tête, ravala la boule d'angoisse qui s'était logée dans sa gorge, et se laissa entraîner par le Gryffondor, dont le bras s'était fait aussi ferme que protecteur autour de ses épaules.

Confusément, l'adolescent blond sentait bien qu'on faisait place autour de lui, qu'on s'écartait un peu de leur passage -de son passage… Il entendait bien les rires se transformer en murmures… Il percevait bien la chaleur de la fête se refroidir légèrement… Et puis, aussi brutalement que la foule l'avait happé, il sentit la masse d'élèves se refermer en bloc dès qu'il en fut sorti, tous retournant à leur activité, avec cette insouciance qu'il n'aurait plus jamais, lui.

On l'avait déjà oublié. Tant mieux ! Il ne demandait que ça…

S'éloignant des deux amis de Harry, il tituba un peu vers la sortie, puis reprit une démarche assurée, s'enfonçant dans les dédales du château, avant d'accélérer le pas jusqu'à se mettre à courir jusqu'à la sortie.

Il n'avait plus qu'une idée, un seul but. Une seule destination.

Il courut, ignorant les cris de protestation des quelques élèves qu'il bouscula à l'entrée de l'école et sur les marches menant au perron.

Il accéléra, ignorant le froid qui lui cinglait les joues, ignorant les flocons qui lui brouillaient la vue.

Il traversa le parc, longea le lac, s'enfonça dans la Forêt interdite, ignorant les battements frénétiques de son cœur, ignorant cette lame d'angoisse et de détresse qui lui entaillait le ventre, ignorant cette envie presque dévorante de serrer son avant-bras pour enfin se calmer, et oublier…

Il ignora tout cela, parce que justement il ne voulait pas oublier.

Pas oublier celui pour qui tout ça avait un sens. Celui pour qui ça valait la peine de supporter toute cette souffrance.

Celui qui serait bientôt là, parce que comme lui, il n'avait pas d'autre endroit où aller.

Pas d'autres bras dans lesquels se jeter.

oOoOoOoOoOo

La nuit nous enveloppe, le froid nous entoure.

Mais plus jamais ça ne nous fera souffrir.

Parce que nous sommes ensemble. Et qu'à deux, toutes les souffrances se supportent.

A deux, tout prend un sens, enfin.

Même la nuit, et le froid.

Même cette solitude, qui se meurt chaque fois que nous nous rapprochons.

Acceptons la nuit, le froid. Oui. Mais ne nous laissons plus happer par la solitude.

Etreignons-nous encore une fois pour la faire mourir à nouveau, Draco.

Malgré la neige qui tombait abondamment et étouffait tous les bruits alentours, Draco entendit très nettement les pas de Harry, à un mètre derrière lui. Le blond ferma les yeux de soulagement, et ne put réprimer un sourire quand il sentit le jeune homme s'agenouiller derrière lui et l'enlacer doucement de ses bras.

Le Survivant posa sa tête sur l'épaule de son compagnon, et murmura :

« Tu vas attraper froid… Ca fait longtemps que tu es là ? »

« Pas trop. Tes amis m'ont dit que tu ne tarderais pas. »

Harry hocha la tête, et se rapprochant un peu plus de l'autre, demanda :

« Pourquoi ne m'as-tu pas attendu à l'intérieur ? Tu ne portes qu'un pull… Tu vas attraper la mort ! »

Refermant ses bras sur ceux du brun, Draco murmura, fixant d'un regard un peu lointain la neige devant lui, qui traçait un chemin infini, se perdant dans les ténèbres de la Forêt Interdite :

« J'avais besoin d'être un peu seul. Dans un lieu rassurant, un lieu qui… qui me parle. »

Nul besoin pour Harry de regarder autour de lui pour savoir où ils se trouvaient, ni quels souvenirs ils y avaient bâtis ensemble… Partout les échos et les ombres de leurs étreintes, de leurs peurs et de leur passion s'y dessinaient, s'y murmuraient… Partout, en miroir aux secondes qu'ils partageaient maintenant, se confondaient les images de ces moments où ils s'étaient acceptés l'un l'autre au point d'être prêts à se perdre ou se damner, tout, pourvu qu'on ne les sépare pas.

Tout, pourvu qu'on les laisse vivre l'instant. Ensemble.

« Tu ne pouvais pas rester avec les autres ? » demanda d'un ton hésitant le Survivant, n'osant brusquer son interlocuteur.

Les épaules de Draco s'affaissèrent un peu, mais il se reprit tout aussi rapidement, se raidissant tandis que sa voix se durcissait pour répondre d'un ton égal :

« Pas avec ceux qui ne me voient que comme Malefoy. Qui ne retiennent de moi que ce qui les arrange. »

« Laisse-les dire, Draco… Ca ne compte plus. »

« Non, en effet. Mais putain, Harry, je ne suis presque plus rien aujourd'hui, et je m'en fous ! Je m'en fous parce que comme tu dis, tout ça ne compte plus. Mais alors, pourquoi ne peuvent-ils pas juste s'en foutre eux aussi ? » s'écria-t-il, la voix pleine de rage et d'amertume. Il s'écarta de l'étreinte du brun et se remit sur les genoux, commençant à taper du plat de la main sur le sol. « Pourquoi ne nous oublient-ils pas ? Je ne leur demande rien, juste qu'ils m'oublient… »

Se relevant, le Survivant dit d'une voix d'où ne perçait apparemment aucune émotion, et pourtant, le temps ne s'était pas assez écoulé pour qu'il puisse aborder ce sujet avec un recul total :

« Parce que tu sais très bien qu'on ne peut pas oublier. Draco… Laisse faire le temps. Et toi, avance comme tu le souhaites, à ton rythme. Tu es bien revenu ici de ton propre gré, après tout… »

Draco se releva à son tour, et fit face à son compagnon. Il réussit à retrouver son calme, et ajouta, avec assurance :

« Oui, je suis revenu. Parce que Pansy, et mes parents, se sont battus pour que je sois de nouveau un homme libre. Parce que, même si le monde entier me reproche et me conteste cette liberté, je n'ai pas le droit de ne pas en profiter… Parce que, si je suis libre, c'est pour être avec toi. » Il serra les poings, et sous le sourire confiant et encourageant du brun, il dit, plantant ses prunelles dans celles de Harry : « Je n'ai pas le droit de tomber, ni d'abandonner. Je ne veux pas leur donner raison, je ne veux pas leur offrir cette victoire. Je tiendrais, quoiqu'il arrive, pour toi. Parce que sans moi, tu ne te relèveras pas. »

Harry hocha imperceptiblement la tête, et ce simple geste, si infime fût-il, sembla autoriser Draco à admettre, peut-être pour la première fois, à celui qui partagerait désormais sa vie :

« Et parce que sans toi, je ne me relèverai pas non plus. »

Le brun s'avança d'un pas, comblant l'espace qui les séparait, et prenant la main de l'adolescent dans la sienne, il souffla, les yeux brillants :

« Il sera bientôt minuit. Viens, allons célébrer Noël dans un endroit plus agréable… »

L'autre acquiesça, et prenant une grande inspiration, le Survivant les fit tous deux transplaner.

oOoOoOoOoOo

La nuit tombe, s'illuminant de points, épars… nous enfermant, ne nous laissant comme repères que ces étoiles diffuses, vacillantes.

Et dans tes yeux, au-delà de la fatigue, au-delà de la peine, je découvre ce point lumineux. Diffus. Encore un peu vacillant. Mais qui ne disparaît jamais totalement.

Parce que chaque fois que ton regard croise le mien, je sens cette lueur grandir. Faiblement encore, mais c'est distinct. Quand tu me regardes, quand je te regarde, je vois cet espoir en toi qui grandit, qui s'ancre.

Cette lueur nous accompagnera toujours, et je sais que quand la nuit tombera, je n'aurais plus peur.

La neige tombait maintenant en véritable tempête à l'extérieur, et les quelques bougies posées dans la pièce vacillaient de temps à autre, faisant danser les ombres sur les murs de pierre.

Assis au centre de la petite salle déserte, en haut d'une des tours du château, Harry et Draco savouraient, pour la première fois depuis longtemps, leur semblait-il, un moment de calme. Un instant de répit.

Bien sûr, rien n'était fini. Ils avaient même conscience que le plus dur serait à venir… même si ce futur ne leur apparaissait plus aussi impossible à aborder, puisqu'enfin, ils étaient deux.

Ensemble.

« Je suis désolé… » murmura tout à coup le blond, rompant le silence agréable qui les avait enveloppés.

Harry, avalant la bouchée de biscuits à la cannelle qu'il avait englouti, se tourna vers lui et afficha un air étonné :

« Mais… de quoi ? »

« Je n'ai… je n'ai pas eu le temps de te trouver un cadeau. »

Le brun faillit éclater de rire tant l'air dépité et désolé de son vis-à-vis rendait grave une situation qui ne l'était guère. Repoussant plus loin sur le sol son assiette de friandises, il se rapprocha de Draco, et lui caressa la joue avec tendresse. Quand enfin le blond leva les yeux vers lui, le Survivant le rassura, un immense sourire ornant ses lèvres :

« Pas besoin, Draco. Tu me l'as déjà offert. » Il sourit de plus belle face à l'air sceptique de l'autre, et ajouta, cette fois plus sérieux : « Cette promesse que tu m'as faite, il y a quelques temps… Quand tu m'as proposé ce futur à deux… »

« Tu parles ! Beau cadeau ce que je t'offre là ! » fit, amer, l'adolescent blond en détournant le regard. « Un futur incertain, où rien ne garantit qu'on sera heureux… »

Il ne put en dire davantage : les lèvres de Harry étaient venues sceller les siennes, le réduisant au silence. La main du brun, posée avec force et possession sur son avant-bras gauche empêchait tout mouvement de fuite de la part du blond. Mais Draco n'avait nulle part où aller : nul autre foyer que dans les bras de Harry, nul autre refuge que dans son cœur. Nulle autre destination qui vaille la peine d'être visitée.

« Draco, arrête… Je ne mens pas quand je dis que tu m'as offert plus que ce que je pouvais désirer. Je suis seul depuis si longtemps, et tu m'offres d'être là, à mes côtés. Pour… toute la vie, si je le souhaite. Evidemment ! Que pourrais-je vouloir de plus, d'après toi ? »

Il y avait tant de gravité, tant de détresse, tant d'honnêteté dans ses deux prunelles vertes, vacillantes mais si fortes, que Draco ne put que croire Harry.

« Alors… joyeux Noël, petit lion. » conclut le blond dans un sourire encore maladroit, mais si sincère, lui aussi.

Oui, rien ne leur assurait que demain ne serait pas synonyme de ténèbres, lui aussi.

Rien ne leur garantissait un avenir souriant, sans nuage pour venir troubler leurs jours.

Mais ils n'en demandaient pas tant. Ils n'exigeaient aucune promesse, aucune certitude.

Une seule leur suffisait. Et elle était là, naissante mais bien réelle.

La certitude qu'enfin, ils ne marcheraient plus seuls. Ils étaient là, ensemble.

Ensemble, l'un pour l'autre.

L'un avec l'autre.

Tendant à Draco une coupe de champagne, Harry brandit solennellement la sienne, puis souffla, les yeux aussi pétillants que les bulles qui tentaient de s'échapper du breuvage :

« Joyeux Noël… »

oOoOoOoOoOo

Quand je vois tes yeux qui s'illuminent, même faiblement, je sais que tout ce que nous avons vécu n'aura pas été vain.

Tu m'as sorti des ténèbres dans lesquelles je m'étais abandonné. Tu m'as ramené à la vie quand je voulais m'en extraire, me donnant une seule raison de continuer à exister.

Une seule raison, mais si puissante, si évidente, que je ne pouvais qu'avoir envie, de nouveau, de voir un autre jour se lever.

Ta présence à mes côtés.

Voilà ma raison de vivre.

D'un même élan, les deux coupes vinrent tinter l'une contre l'autre dans un son cristallin, vite rejointes par deux autres flûtes à champagne.

« Joyeux Noël ! » répondit la voix enjouée de Hermione, à laquelle se joignit rapidement celle de Ron. Draco se contenta d'un sourire un peu las, mais sincère.

Les quatre jeunes gens burent une gorgée d'alcool, puis Harry déclara avec enthousiasme :

« Bon… Et que diriez-vous d'ouvrir les cadeaux ? »

Hermione et le Survivant retinrent un grand éclat de rire quand Ron poussa un cri de joie tonitruant, faisant sursauter au passage Draco, qui manqua de renverser sa coupe de champagne sur sa chemise.

Laissant leur couple d'amis se rapprocher du sapin au pied duquel trônaient les paquets enrubannés, Harry s'approcha du blond et lui glissa doucement :

« Toujours aussi impressionnable, mon pauvre Draco, mmh ? »

Le blond lança un regard torve à son compagnon, et répliqua, tout en reposant prudemment son verre sur un guéridon :

« Disons plutôt que je ne me ferai jamais aux débordements intempestifs de celui qui te sert de meilleur ami. »

« Draco ! » s'offusqua le brun, tout en lui donnant une bourrade dans l'épaule.

« Mais quoi ? » fit en toute bonne foi l'autre, avant d'ajouter plus bas, tout en désignant discrètement du doigt Ron qui arrachait littéralement le papier doré d'un grand paquet, sous l'œil mi-amusé mi-réprobateur de sa compagne. « A 25 ans, il toujours aussi puéril… Il est irrécupérable, que veux-tu ? Même la guerre ne l'aura pas assagi. » Et pourtant ces mots ne sonnaient pas comme un reproche. Juste comme une constatation douce-amère.

« Et heureusement ! » répondit le brun, en écho aux pensées de son compagnon.

Tandis que les deux jeunes hommes se dirigeaient vers la fenêtre de leur salon pour voir les premiers flocons de l'hiver tomber, Hermione, assise au milieu d'un fatras de papier brillants et de rubans colorés, se pencha vers Ron et lui glissa avec émotion :

« Je suis si heureuse… » Elle sourit, et dit avec plaisir : « Je suis si heureuse que le temps qui passe n'ait pas entaché ce qu'il y a entre eux. »

« Comment est-ce que cela serait possible, Mione ? » demanda Ron, tout en enroulant autour de son cou l'immense écharpe de laine que lui avait tricoté la jeune femme. Il eut un sourire confiant quand il précisa : « Ce qui les unit a toujours été sombre et tortueux. Rien n'est simple avec eux. Mais c'est ce qu'ils aiment, ce qui les rend plus forts. Ils se sont trouvés. » Et comme si cette dernière phrase expliquait tout, il porta de nouveau son attention sur ses paquets, en attrapant un autre avec avidité.

Hermione le regarda un instant, surprise, puis finit par hocher la tête, couvant d'un regard chaleureux leurs amis qui s'enlaçaient doucement devant la fenêtre, seuls au monde.

Dans leur bulle, oubliant tout ce qu'il y avait autour d'eux, s'en détachant comme si plus rien ne comptait.

Seuls, ensemble, oubliant tout le reste, comme cela leur arrivait si souvent à présent, de plus en plus, au fil du temps.

« Oui, ils se sont trouvés. »

Respirant doucement l'odeur des cheveux emmêlés de son compagnon, Draco enlaça un peu plus fortement la taille de Harry et soupira d'aise. Le brun, souriant, cala davantage son dos contre le torse du jeune homme, puis, avisant la montre qui ornait le poignet du blond, cachant quelque peu la Marque striée de cicatrices blanches, il s'exclama :

« Oh, il est bientôt minuit ! Il faut se souhaiter un joyeux Noël… »

En entendant son compagnon, Draco esquissa alors ce demi-sourire, un peu las, mais qui ranimait légèrement le gris terne de ses yeux, et qui le caractérisait depuis quelques années maintenant.

« On s'est déjà souhaité un joyeux Noël, Harry… » fit-il, amusé.

Se retournant pour faire face à son interlocuteur, le brun sourit et murmura, tout en attrapant l'autre par la nuque pour venir coller son front au sien.

« C'est vrai. Avec Ron et Hermione. Mais tu ne m'as pas offert mon cadeau. »

« Oh, et que veux-tu cette année, petit lion ? » demanda alors l'autre, connaissant déjà la réponse, mais ne se lassant pas de l'entendre.

Fermant les yeux, Harry répondit, dans un sourire lointain :

« Une autre nuit de ténèbres dans tes bras, Draco. C'est tout ce que je veux. Toujours. »

Fermant les yeux à son tour, Draco embrassa doucement le front de son compagnon, et le serra dans ses bras :

« Evidemment… Quoi d'autre ? » Il l'enlaça avec un peu plus de force, et murmura pour eux seuls : « Une autre nuit de ténèbres dans tes bras. Moi aussi c'est tout ce que je veux. Une autre nuit de ténèbres… avec toi. »