Titre: Beech Hall

Auteur: Aucta Sinistra (vous trouverez le lien vers la fic en anglais sur ma page de profil)

Pairing: Harry/Severus

Rating: M

Avertissements: ceci est un slash, donc réservé aux amateurs.

Disclaimer: les personnages appartiennent à JK Rowling et l'histoire à Aucta Sinistra.

Notes: Merci à Aucta Sinistra de m'avoir autorisée à traduire sa fic ! J'en suis fière comme un paon qui fait la roue... Merci à ma beta-reader Zazaone sans qui cette fic serait moins agréable à lire ! Son immense talent s'exprime encore mieux dans ses propres fics...

Aucta Sinistra est une des grandes spécialistes du snarry dans le fandom anglo-saxon. Elle a écrit d'excellentes fics, outre celle-là, que je vous encourage à lire si vous vous débrouillez en anglais !

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Beech Hall

By Aucta Sinistra

« La souris-couineuse est un des nuisibles les plus ardus à éliminer. Cette habitante des vieux manoirs sorciers se cache dans les murs, les sols et les plafonds. Elle résiste à la plupart des sorts et des envoûtements. Seule l'utilisation prudente et raisonnée des poisons cités ci-dessous éliminera ce fléau de votre demeure. La souris-couineuse est parfois accompagnée de moustiques-vampires et de mites-harpies. »

Harry poussa un soupir. Souris-couineuses, moustiques-vampires et mites-harpies. Trois pour le prix d'un.

- Autoscribe.

La plume magique se mit à recopier les ingrédients des poisons tels qu'il les lui dictait. Un début de crampe à la main l'avait conduit à utiliser ce gadget. Il se redressa sur sa chaise et s'étira pendant que la plume courait sur le parchemin.

Lançant un coup d'œil par la fenêtre, il vit deux sorciers franchir le perron. La bibliothèque n'était qu'au second étage, ce qui permit à Harry de reconnaître Albus Dumbledore et Drago Malefoy. Surpris, il suivit des yeux leur lente progression. Dumbledore parlait et Drago semblait l'écouter avec réticence.

Harry sentit remonter sa vieille animosité. Voldemort avait quitté ce monde. Lucius Malefoy avait disparu en compagnie d'une poignée de Mangemorts qui s'étaient soustraits au sort de leur maître. Harry avait cessé depuis longtemps de se complaire dans sa rancune puérile, mais la vue de Drago lui tordait toujours l'estomac. Il se demanda ce que Drago faisait à Poudlard, après tout ce qui s'était passé. L'enquête poussée du ministère avait conclu que Drago n'avait eu aucun rôle actif dans la renaissance de Voldemort et le garçon s'était promptement réfugié derrière les portes du manoir familial. Harry n'avait plus entendu parler de lui depuis des mois.

Les deux hommes s'arrêtèrent, Dumbledore faisant face à Drago. Celui-ci refusa de le regarder dans les yeux. Petit connard arrogant et stupide.

Harry réalisa que la plume s'était arrêtée. Il soupira et retourna à ses notes. Malefoy n'était pas son problème, pour une fois. Il en avait d'autres de natures bien différentes. Il se pencha sur son livre, retrouva la ligne et reprit sa lecture.

HPHPHPHP

- Harry.

Harry releva la tête et cligna des yeux pour se déshabituer de la petite écriture noire qu'il lisait depuis des heures.

- Professeur Dumbledore…

Le directeur se tenait derrière la table, les mains jointes, les yeux pétillant de malice.

- Es-tu tellement en retard dans tes devoirs de vacances, Harry ?

Harry rit un peu puis grimaça en s'étirant une nouvelle fois.

- Je t'ai vu arriver, dit Dumbledore en s'asseyant sur le coin de la table. J'aurais aimé te saluer plus tôt mais j'avais des obligations. Quel bon vent ramène à Poudlard notre célèbre ancien élève ?

Harry indiqua les piles de livres qui l'entouraient.

- Des devoirs, comme vous disiez.

Dumbledore approcha de lui un des ouvrages pour en lire le titre : « Sorts domestiques : les vieilles demeures sorcières pour les nuls. »

Il regarda Harry.

- La rumeur prétendait que tu avais acheté une maison. Il s'agit d'un vieux manoir sorcier, n'est-ce pas ?

- Beech Hall, dans le Devon, acquiesça Harry. Il a été construit vers 1600. Le dernier héritier est mort il y a plusieurs années et la maison était à vendre.

Il fit une grimace.

- Maintenant je comprends pourquoi personne n'en voulait. La famille qui y vivait a placé toutes sortes de barrières magiques, de sortilèges, d'envoûtements, et tout le bazar. Et moi qui croyais que ce serait une bonne chose !

Dumbledore sourit.

- Je devine, par l'accumulation de livres autour de toi, que tu rencontres quelques difficultés d'installation.

Harry s'enfonça dans sa chaise.

- C'est un bel endroit, très intime (Il n'avait pas besoin d'expliquer à Dumbledore pourquoi c'était important). Les terres sont magnifiques, il y a un ruisseau et même un vieux moulin. Mais la maison semble être un peu trop, comment dire… attachée au souvenir de la famille Beech.

- La maison s'en prend à toi ?

- Non, il y a une clause magique dans le contrat. J'ai vérifié avant de signer, vous pensez bien. Elle stipule que la maison doit accepter son légitime propriétaire, quel qu'il soit. Mais la maison n'est pas obligé de l'aimer et elle le montre bien. Ce sont des petites choses : des portes qui refusent de s'ouvrir ou de se fermer, les cheminées qui ne s'allument pas, des bruits, des odeurs, des animaux indésirables, des escaliers envoûtés… Rien de grave, mais c'est très agaçant. Alors je suis venu pour trouver des sorts, des charmes, n'importe quoi qui convaincrait la maison de se calmer.

- Bonne chance, l'encouragea Dumbledore. Si mes souvenirs sont exacts, Beech Hall est une vieille maison isolée. Tu ne t'y sens pas trop seul ?

- Oh non, répondit Harry en souriant. J'ai offert à Ron et Hermione le gîte et le couvert s'ils m'aidaient à dompter la maison. Ils sont tous les deux en formation chez les Aurors et la Bitch… (1) Pardon, ma maison est proche de Londres. Ils sont ravis de vivre loin de leurs parents, je crois. Il y a quelques mois, ils ont rencontré deux Aurors, légèrement plus âgés que nous, qui cherchaient un logement. Alors je suis loin d'être seul !

- Est-ce que je connais ces deux jeunes gens ? demanda Dumbledore.

- La fille s'appelle Shelagh O'Bannon. Elle était à Beauxbatons.

- Je regrette de ne pas avoir fait sa connaissance. Et l'autre ?

- Kenneth Torrey.

- Ah.

- Oui… Après ce qui lui est arrivé, le ministère lui a donné une pension, mais… Il n'avait nulle part où aller. Shelagh et lui sont de bons copains et elle m'a parlé de lui, donc…

Harry haussa légèrement les épaules. Dumbledore lui dit :

- Tu as bon cœur, Harry.

- Ken est sympa. Il m'aide beaucoup. Il connaît une foule de sorts pour repousser les nuisibles et il est le seul d'entre nous qui réussit à cuisiner. Allez savoir pourquoi, la Bitch ne laisse pas les elfes… Pardon, monsieur, s'interrompit Harry, gêné.

- Je constate que la maison a gagné un surnom, dit Dumbledore en retenant un sourire.

- Un surnom bien mérité, dit Harry avec force. J'essaie d'être patient, mais je ne trouve rien qui m'aide à accélérer les choses…

- Je comprends et je te souhaite bien du courage.

- Merci. Et… quoi de neuf ici, monsieur ?

- Pour résumer, Poudlard change très peu au fil des ans.

Harry sourit, reconnaissant l'invitation implicite à poursuivre.

- Je vous ai vu parler avec Drago. Que fait-il ici ?

- Il s'est produit un malheureux incident, il y a quelques jours.

- Cela a quelque chose à voir avec son père ?

Avisant l'air surpris de Dumbledore, Harry expliqua :

- Je partage ma maison avec une Auror, un ancien Auror et deux futurs Aurors. Même s'ils ne disent pas grand chose, je sais lire entre les lignes.

Il savait, évidemment, que Lucius Malefoy faisait partie des quelques Mangemorts ayant pris la fuite après la destruction de Voldemort. Mais il n'y avait aucune certitude sur ses faits et gestes depuis lors.

- Lucius Malefoy a refait surface, lui apprit Dumbledore. Il a convoqué une réunion de Mangemorts survivants.

- Comment ça ? s'étonna Harry. Sans le pouvoir de la Marque Noire…

- Il y a d'autres moyens de contacter secrètement des proscrits. Severus s'est porté volontaire pour se rendre à cette réunion, dans l'espoir de tuer dans l'œuf les plans de Lucius, quels qu'ils soient. J'étais réticent car il existait un grand risque que Malefoy ait découvert son véritable rôle pendant la guerre… Mais nous n'avions pas d'autre alternative. A présent, je sais que des choses terribles seraient arrivées, s'il n'avait pas été là.

Dumbledore tomba dans une songerie attristée.

- Quoi donc ? le pressa Harry. Lucius Malefoy ne cherche pas à ramener Voldemort quand même ? Pas encore ?

- Je crains que si. Pire encore, il avait l'intention d'utiliser Drago dans l'incantation pour ressusciter Voldemort.

- Par quel moyen ? balbutia Harry.

Les seuls sortilèges qu'il connaissant pouvant ramener à la vie un homme aussi mort que l'autre salaud étaient… Dumbledore vit l'horreur se peindre sur son visage et hocha la tête.

- Son propre fils ? dit Harry, saisi.

Il n'avait jamais aimé Drago, et son propre père, James Potter, était loin d'être parfait, mais quand même…

- Il voulait sacrifier son propre fils ?

- Je crois que personne n'avait réalisé à quel point Lucius était enchaîné à Voldemort. Même mort et enterré, son pouvoir sur Lucius est tel que cet individu est prêt à donner la vie de son fils en échange de celle de Voldemort.

Dumbledore secoua la tête, tandis que Harry pensait que même Drago ne méritait pas ça.

- Comme Drago est ici, ça n'a pas marché, visiblement, reprit Harry. Que s'est-il passé ?

- Nous étions en chemin pour le lieu de la réunion. Mais il était si bien caché et si bien protégé que nous avons été retardés. Quand le professeur Snape a compris ce que projetait Lucius, il a agi comme il fallait. Il a gagné du temps en provoquant une diversion. Puis il a pris Drago sous son bras et il a fui. Du moins, il a essayé.

- Quoi ? s'écria Harry, se penchant en avant. Il n'est pas…

Dumbledore leva une main apaisante.

- Il est vivant. Encore que son état ne soit pas forcément plus facile à endurer. Il n'est pas chose aisée d'esquiver les sorts d'une demi-douzaine de Mangemorts tout en portant un homme inconscient. Ils l'ont stupéfixé et s'apprêtaient à le tuer quand je suis finalement arrivé.

- Bon, Drago n'a pas l'air mal, dit Harry avec une certaine rancœur. Dans quel état est Snape, cette fois ?

Durant les mois précédant la bataille finale, Snape était revenu plus d'une fois d'une réunion de Mangemorts blessé, en sang, meurtri. Jamais il ne s'était plaint. Tous ces faits s'ajoutant aux preuves avaient finalement forcé Harry à respecter le déplaisant Maître des Potions.

- Il survivra, dit Dumbledore, mais il ne sera guère facile à vivre durant quelques semaines.

- Cela ne le changera pas beaucoup, grogna Harry à voix basse.

Dumbledore sourit en se levant.

- Je te laisse à tes recherches.

- Mais, monsieur…

Dumbledore l'interrompit fermement.

- J'aimerais rester bavarder, Harry, mais des affaires urgentes m'attendent. Pourquoi ne viendrais-tu pas dans mon bureau pour prendre le thé, une fois que tu auras épuisé ton stock de livres ou ton stock d'énergie ? Disons à 16h30 ?

Réalisant qu'il n'obtiendrait pas d'autres détails dans l'immédiat, Harry ravala ses questions. Tu as choisi de ne pas devenir Auror et de te retirer à la campagne. Tu n'as plus aucun droit de t'immiscer dans ces histoires.

- Merci, monsieur. J'aimerais beaucoup.

HPHPHPHP

Une heure plus tard, Harry se leva, se dégourdit les jambes dans le couloir principal jusqu'à la salle des professeurs, puis retourna vers la bibliothèque. Il réussit à éviter les élèves mais ni leurs regards curieux ni leurs chuchotements.

- Oui, c'est bien moi, le garçon qui a survécu, murmura-t-il pour lui-même. Héros des sorciers, sauveur de l'humanité, tueur de Voldemort, alors maintenant foutez-moi la paix !

Les derniers mots, prononcés un peu trop fort, furent suivis d'un hoquet. Harry leva les yeux du sol de pierre pour voir un Poufsouffle de dernière année à côté de lui, les yeux écarquillés. Harry étouffa un grognement.

Son regard tomba alors sur Snape, qui montait laborieusement les dernières marches, une main agrippant la rampe de pierre, le visage blême et crispé.

- Professeur !

Harry contourna une grappe d'élèves de première année – Seigneur, mais c'étaient des enfants !— et s'élança pour lui prendre le bras. Snape releva vivement la tête.

- Monsieur Potter, que diantre faites-vous là ?

Il ouvrit la bouche, probablement pour un des commentaires sarcastiques dont il avait le secret. Mais ses yeux parcoururent le visage de Harry et s'écarquillèrent. Plus tard, Harry se dit que le choc de voir Snape si fragile avait dû se révéler dans son expression. L'homme ne dit rien, autorisant la main de Harry sur son bras.

- Ils ont annulé mon diplôme, monsieur, dit Harry avec une gaieté feinte tout en conduisant Snape à la bibliothèque, et par égard pour sa fierté, sans donner ni aux autres, ni à Snape lui-même, l'impression de l'aider. Vous avez toujours dit qu'ils le feraient !

Deux préfets de Serdaigle les bras chargés de livres les croisèrent, les suivirent du regard et se mirent à chuchoter frénétiquement en quittant la bibliothèque.

Snape s'arracha de l'étreinte de Harry dès qu'il fut assez proche d'une chaise pour s'y laisser choir.

- Je suis parfaitement capable de marcher seul, monsieur Potter.

- Monsieur le directeur m'a dit ce qui était arrivé. Sans entrer dans les détails, ajouta Harry devant l'air menaçant de Snape. Par exemple, il n'a pas cru utile de dire que vous étiez blessé à ce point.

Snape ricana :

- Il craignait certainement de heurter vos tendres sentiments pour moi.

Harry eut un sourire forcé.

- Je m'inquiète vraiment. Vous êtes blanc comme un spectre. Si vous vouliez de la lecture, vous auriez pu envoyer un élève. Ou un elfe de maison. Ou vous léviter jusqu'ici.

- Ce ne sont ni mes pouvoirs magiques, ni celui de donner des ordres qui ont besoin d'exercice, répliqua Snape, mais moi-même.

Il toucha son front et sembla consterné de le trouver moite.

- Toutefois, je me vois contraint d'admettre que j'ai peut-être surestimé mes forces…

Harry s'efforça de ne pas sourire.

- Quels livres voulez-vous, monsieur ?

Snape le fusilla du regard mais débita sa liste :

- Vous les trouverez tous…

- Dans la réserve ? compléta Harry d'un air innocent.

- Cinq points pour Gryffondor, commenta Snape en arquant un sourcil. Oh, quel dommage ! Vous n'êtes plus un élève, je ne peux donc plus vous accorder de points.

Harry ne dissimula plus son sourire.

- Vous êtes diabolique, professeur. Reposez-vous, je reviens tout de suite.

Un quart d'heure plus tard, Harry déposa la haute pile d'ouvrages devant le professeur et la considéra avec une grimace.

- Je devrais peut-être les porter jusque chez vous.

Le sourcil s'arqua de nouveau, mais le ton était presque dépourvu de sarcasme.

- Il me sera facile de les léviter. Ma jambe est peut-être cassée mais certes pas ma baguette.

- Une jambe cassée… énonça calmement Harry, en proie à un mélange de colère et de peur rétrospective. Que vous ont-ils fait d'autre ?

- Vous dressez un inventaire, Potter ?

Harry ne se laissa pas intimider par le ton sec.

- C'est pour le livre que j'écris, monsieur, dit-il avec un sourire acide.

Snape le considéra avec un brin de surprise.

- La vengeance est un motif indigne d'un Gryffondor.

- C'est mon côté Serpentard, rétorqua Harry.

Snape posa les deux mains à plat sur la table pour se lever.

- En aucun cas je ne renoncerais à ma vengeance si l'opportunité se présentait. Et je n'ai nul besoin de votre aide.

- Je n'ai jamais prétendu le contraire, monsieur.

De nouveau, Snape le regarda avec surprise, comme s'il reconsidérait son opinion et lui attribuait finalement quelques qualités. Harry avait déjà croisé ce regard lorsque tous deux travaillaient pour l'Ordre du Phénix. Il devinait alors qu'il avait dit ou fait quelque chose de valable ; quelque chose incitant Snape à le mépriser un peu moins, même temporairement.

- Que faites-vous à Poudlard ? s'enquit Snape.

- Vous me manquiez, répondit instantanément Harry. J'avais envie de voir votre visage jovial, monsieur.

- Sale gamin. Gardez donc vos secrets. Je vous assure que ça ne m'empêchera nullement de dormir !

- Rien d'intéressant, en fait. Je fais des recherches sur les fléaux domestiques.

Snape lança un coup d'œil aux lectures du jeune homme et son expression devint très sceptique. Il se redressa et saisit sa baguette.

- Merci pour les livres, Potter, dit Snape avant de lancer un wingardium leviosa sur la pile.

- Tout le plaisir fut pour moi, monsieur.

HPHPHPHP

Harry s'attendait plus ou moins à retrouver Drago lors de son entrevue avec Dumbledore. Par un sixième sens ou une simple conviction, il était persuadé que le directeur manigançait quelque chose. Il se doutait qu'il s'agissait bien plus que d'un tête-à-tête avec thé et biscuits.

Cependant, il n'y avait personne hormis Dumbledore et lui-même. Ils bavardèrent un moment à propos de l'école, du dernier professeur de Défense (qui avait quitté Poudlard pour un climat plus clément et une prétendue romance avec une sorcière d'origine méditerranéenne) et des affaires courantes du monde sorcier. Puis la conversation dériva sur Beech Hall. Les soupçons de Harry grandirent en voyant le directeur porter grand intérêt aux protections dont la maison était dotée.

- Elle semble presque aussi bien gardée que Poudlard, dit Dumbledore. Je ne devrais pas en être surpris. Anastasius Beech, le constructeur, était un sorcier puissant, un des meilleurs qu'ait connu Serpentard.

- Serpentard, répéta Harry, noyant son murmure contre le bord de sa tasse.

Dumbledore sourit.

- Si la maison correspond tant à tes souhaits, c'est qu'elle a l'ensemble des protections que seul un Serpentard paranoïaque pouvait penser à installer.

Harry approuva de la tête et commença :

- Il y a même un truc appelé élimination…

- J'ai une faveur à te demander, Harry.

Dumbledore n'était plus que gravité, à présent. Harry posa sa tasse.

- Allez-y.

- Une grande faveur. A présent que Lucius Malefoy sait qu'il a été trahi, il va se mettre en chasse aidé des autres Mangemorts. Poudlard est bien protégé, mais pas inaccessible. L'école est en outre le premier lieu auquel il songera.

Harry se doutait de la conclusion de ce discours. Drago Malefoy, hébergé à Beech Hall ? Il se demanda comment refuser sans passer pour un môme égoïste et capricieux. On frappa à la porte.

- Ah, fit Dumbledore lorsque la porte s'ouvrit.

Harry se retourna et vit Snape entrer en boitant ; celui-ci s'arrêta net. Les deux hommes se regardèrent.

- Severus, asseyez-vous, je vous en prie.

- Monsieur le Directeur. Potter.

Ses salutations étaient presque accusatrices. Harry ébaucha un geste pour l'aider mais s'interrompit alors que Snape prenait appui sur l'autre chaise et s'y asseyait.

- Je suis ravi que vous ayez pu vous joindre à nous, dit Dumbledore en faisant apparaître une seconde tasse de thé (Ce vieux rusé ne l'avait pas préparée à l'avance ; il détestait ruiner ses surprises, songea Harry.) Un biscuit au chocolat ?

- Non merci, répondit Snape en acceptant uniquement le thé.

- Je crois avoir la solution à notre petit souci, Severus.

Snape tenait la tasse sur ses genoux. Harry se dit qu'il l'avait acceptée, non parce qu'il en avait envie, mais parce que c'était une part du rituel d'une discussion avec Dumbledore.

- De quel souci parlez-vous, Monsieur le Directeur ? demanda Snape.

Le regard incrédule qu'il jeta à Harry indiquait qu'il ne voyait absolument pas en quoi il pouvait être concerné. Harry prit un biscuit. Il aurait souhaité s'habituer à être traité de la sorte par Snape. Il se demandait pourquoi cela l'irritait encore après toutes ces années. S'il était aussi mature qu'il faisait semblant de l'être, il passerait outre. Après tout, qu'est-ce que ça peut me faire qu'il m'ignore la plupart du temps ? Qu'est-ce que ça peut me faire qu'il m'insulte quand il ne peut pas m'ignorer ?

Il saisit un biscuit et le mastiqua férocement. Un de ses souvenirs les moins heureux était l'instant où il avait réalisé qu'il voulait l'estime de Severus Snape.

- Harry a acheté une maison, dit Dumbledore.

Harry faillit s'étrangler avec son biscuit.

- C'est en effet ce que j'ai cru comprendre, dit Snape, la voix lourde de soupçon.

- Beech Hall, dans le Devon, est un vieux manoir sorcier, à l'écart et bien entouré de barrières magiques.

Snape se raidit sur sa chaise. Harry, mal à l'aise, interrogea :

- Vous voulez que je cache Drago pendant quelques temps, monsieur ?

Dumbledore secoua la tête.

- Non. Drago est bien mieux ici. C'est le dernier endroit où son père le cherchera. En revanche, le professeur Snape…

Harry regarda le directeur fixement.

- Vous avez perdu la…, siffla Snape, avant de s'interrompre, se rappelant soudain à qui il parlait. Entre toutes les personnes à qui vous pouviez demander ça…

- C'est exactement mon raisonnement, Severus, affirma tranquillement Dumbledore. Qui songerait à vous chercher là-bas ?

Ses yeux pétillaient.

- Personne, répliqua Snape, les dents serrées. Pour la bonne raison que je n'y mettrai pas les pieds. Même si j'étais d'accord, jamais Potter…

- Je connais parfaitement vos relations houleuses, l'interrompit Dumbledore. Mais si vous n'êtes pas amis, vous êtes alliés. Beech Hall est un endroit discret, bien protégé, où vous pourrez vous remettre en relative sécurité.

- Impossible, dit Snape. Jamais Potter…

- Harry sera…

Harry se racla la gorge.

- Puis-je parler pour moi ?

- Qu'est-ce que je vous disais ? triompha Snape. Je vous en prie, faites, Potter.

- Toutes nos excuses, Harry, dit Dumbledore. Je t'en prie, nous t'écoutons.

- Je serais heureux de recevoir le professeur Snape à Beech Hall, pour aussi longtemps qu'il lui plaira.

Harry contint son sourire, jetant un coup d'œil de côté pour voir l'expression sidérée de Snape ; celle-ci se mua bientôt en un rictus suspicieux.

- Qu'est-ce que vous manigancez, Potter ?

Harry posa la main sur son cœur.

- Moi ? Rien du tout. Je n'ai rien à voir là-dedans. Vous vous trompez de responsable.

Snape rejeta la tête en arrière, yeux mi-clos.

- En effet. Vous avez raison sur ce point. Monsieur le Directeur ?

- Severus ? demanda Dumbledore innocemment.

- Qu'est-ce que vous manigancez ?

Harry songea, en passant, que la voix de Snape lui faisait maintenant beaucoup d'effet.

- Je ne songe qu'à préserver votre vie et votre santé, cher ami. Rien de plus, assura Dumbledore en vidant sa tasse et en la replaçant sur la soucoupe. Vous devriez faire vos valises dès maintenant. Les examens sont terminés et les vacances commencent la semaine prochaine. Plus tôt vous serez en sécurité, plus tôt je serai tranquillisé. J'imagine que Harry a sans doute hâte de rentrer chez lui.

- Je ne veux pas bousculer le professeur Snape, dit Harry. Je peux parfaitement trouver une occupation le temps qu'il prépare ses affaires. Ou bien je peux vous aider.

Il regarda Snape, qui cligna des yeux.

- Non. Merci.

Snape se tourna vers Dumbledore. Harry haussa les épaules et sourit. Cela lui semblait une revanche délicieusement perverse de montrer la plus grande courtoisie au désagréable professeur. Pourtant la proposition de Dumbledore l'avait également pris par surprise.

- Excellent, conclut le directeur.

Il se leva et épousseta les miettes tombées sur sa robe.

- Je laisse l'organisation entre tes mains compétentes, Harry. Et entre les vôtres également, Severus. N'hésitez pas à venir me voir si vous avez besoin de quoi que ce soit.

C'était une invitation à prendre congé mais Snape, debout, déclara :

- Je voudrais vous dire un mot en privé, Monsieur le Directeur.

- Certainement. Harry, je suis sûr que madame Bibine serait très désappointée si tu n'allais pas la saluer pendant que tu es ici. C'est l'occasion rêvée.

Harry se leva avec un grand sourire.

- J'y vais de ce pas. A plus tard, Monsieur le Directeur, professeur.

Il bondit hors de la pièce, se sentant inexplicablement heureux. Il lui semblait avoir remporté une victoire.

(à suivre)

(1) Jeu de mots sur Beech transformé en Bitch, c'est-à-dire "salope" en anglais... Bitch peut aussi se traduire par d'autres termes tout aussi sympathiques. Si certains ecteurs veulent entamer une discussion linguistique, je suis toute ouïe...