Sept vies pour mourir
&
Auteur : GabrielleTrompeLaMort
Rating : T
Genre : Action/Adventure – Mystery – Romance
Titre : Sept vies pour mourir
Spoilers : Tous les tomes, le sixième compris !
Disclaimer : Cette fanfiction n'est pas à but lucratif. Tout appartient à J. K. Rowling et la Warnerbross Compagny.
Résumé : Certains appellent ça « jouer avec le feu », mais Harry Potter préfère dire qu'il se sert des mêmes armes que son ennemi pour le vaincre. - Voyage dans le temps – Horcruxes -
Note de l'auteur : Coucou ! Me revoilà pour une fiction, dont l'idée m'a saisie par un dimanche où j'étais toute seule.
Autant le dire tout de suite : j'ai la prétention d'affirmer que vous lirez ici des choses que vous n'avez lues nulle part ailleurs. Je dis pas quoi, parce que je veux surtout pas vous spoiler, mais je suis sûre de mon coup vu que j'ai lu la quasi-totalité des fics sur ce site. Donc bon, hein XD.
Rassurez-vous tout de même : j'ai pas la prétention de dire que ce sera une bonne fiction avec ça, je cherche juste à vendre ma production, et à attirer votre regard : P
Je tiens également à préciser que je dédie ce premier chapitre à Caliméra, pour ses encouragements, ainsi qu'à Andromède, qui est toujours là, toujours... Merci à vous deux les filles.
Trois chapitres de la fiction sont écrits à ce jour.
Sur ce, bonne lecture ! Et si le coeur vous en dit : reviens à la fin ! Laissez vos adresses e-mail, je vous répondrai assurément.
Tagazok, braves gens !
Chapitre premier : Une Vie En Vaut Une Autre
D'aucun prétendent que le talent n'attend pas la valeur de l'âge. Ce précepte, plus vieux que nos arrières-grands-parents, pouvait s'appliquer sans peine à un certain survivant que nous connaissons bien. Cependant, gare ! Nous ne parlons pas ici de puissance, mais de veine et de déveine. Harry Potter est surtout connu pour se trouver dans tous les coups fourrés et s'en sortir avec brio. Habituellement, le jeune garçon brun et décoiffé était emporté contre son gré dans une kyrielle d'aventures dangereuses dont il trouvait la sortie au dernier moment, mais aujourd'hui, c'était lui qui pensait – de plus, tout à fait sérieusement – à provoquer certaines péripéties. Tous les obstacles de sa vie n'avaient été, jusque-là, que la lie d'un vin de grand renom, mais pas encore prêt à être dégusté. Dorénavant, il devait s'employer à faire de sa piquette un vin de grand cru. D'un côté, il se sentait prêt, mais de l'autre il redoutait que ce qu'il a à affronter le soit plus que lui...
Le jeune homme se retourna pour la dixième fois au moins dans son lit avant d'abandonner toute idée de sommeil. L'idée, qu'il avait eu la veille – puisqu'il était près de deux heures du matin – le taraudait plus que jamais. Le Survivant retournait son projet dans tous les sens. Ce n'était pas tant le risque mortel qui l'empêchait de se lancer pour de bon, mais plutôt le côté irréalisable de la chose.
Vivre sans Sirius était difficile, mais pas insurmontable. Quant à vivre sans Dumbledore. Dumbledore... Harry, malgré toute sa fierté de Gryffondor, ne se retenait plus de pleurer dès qu'il pensait à lui. Le vide qu'avait créé la disparition de Sirius s'était transformé en gouffre avec celle de Dumbledore, il ne pouvait pas supporter ce néant en lui. Harry était à demi mort, car la première partie de son coeur avait disparu avec Sirius, la seconde avait été emportée par Dumbledore. Il n'avait plus de coeur, mais il était vivant. À demi vivant. À demi mort...
Sa peine n'était pas infinie, elle était incurable. Harry avait l'impression d'être gangrené de l'intérieur, dévoré non pas par la tristesse, mais par un malaise. Un mal-être latent, qu'il ressentait dans chacun de ses gestes, chacune de ses pensées. Tout le temps.
Harry avait pris sa décision. Se relevant dans son lit, il contempla mornement la chambre de Privet Drive. Les objets qui étaient entassés dans sa valise formaient un tas grossier, et la cage d'Hedwige qui était sortie à cette heure était au dessus de l'armoire. La fenêtre, grande ouverte, laissait entrer un courant d'air nocturne rafraîchissant dans cet été brûlant. Sans quitter des yeux ses affaires, il se chercha du regard les objets qu'il ne pourrait pas quitter. Aussitôt, ses yeux se posèrent sur sa baguette, près de lui, et Hedwige. Son éclair de feu, également, était une possession dont il ne pourrait jamais se séparer, car il était un petit bout de Sirius, une parcelle de son âme encore présente. La carte des Maraudeurs était un objet qu'il ne pouvait pas non plus quitter. Et, dans sa baguette, se trouvait une plume de Fumseck. Dumbledore ne l'avait jamais vraiment quitté non plus. Il pensa soudain qu'il faudrait qu'il emmène aussi deux autres choses : sa cape d'invisibilité... et l'album photo que lui avait confié Hagrid lors de sa première année.
Saisissant sa baguette, le jeune Potter empoigna son balai, au bout duquel il pendit la cage de sa chouette, puis réduisit l'album jusqu'à pouvoir le glisser dans la poche de son jean. Il s'habilla, vérifia que l'objet était toujours dans sa poche arrière, et mit sa cape d'invisibilité. Ses yeux verts brillèrent derrière ses lunettes comme il jetait un dernier regard à la porte d'entrée de sa chambre. Privet Drive ne lui manquerait pas.
« Il faudra que j'aille chercher quelques galions avant de partir. » dit-il, bien que personne ne fut présent dans la pièce. Et, passant une jambe par-dessus le rebord de la fenêtre, il siffla un coup. Aussitôt, il se profila à l'horizon une silhouette bien familière. Hedwige l'accompagnerait dans son vol.
Sans crainte, le jeune homme sauta dans le vide. Son balai s'envola aussitôt vers le ciel. Harry vit les maisons devenir toutes petites, vit Privet Drive se fondre parmi les autres quartiers, et disparaître tant il était haut. Ajustant sa cape de manière à toujours rester invisible, il dit à sa chouette :
« Direction Gringotts, puis nous irons à Poudlard. »
Douée de l'entendement, la chouette fila sans hésitation dans la bonne direction. Le vol donna à Harry un sentiment de liberté fabuleux. Il se sentit prêt à abattre des montagnes, écarter les mers, même. Il ne craignait rien, tant qu'Hedwige était avec lui, qu'il avait sa baguette, son balai, et sa cape. Il ne craignait rien, pour l'instant... parce qu'il ne savait pas vraiment ce qu'il partait affronter.
&
Revenant de Gringotts, Harry savait que le meilleur endroit pour faire ce qu'il avait à faire était Poudlard, aussi se dirigea-t-il vers l'éminent collège dès que les éléments, soudainement fâchés, le lui permirent. Son visage affichait une mine peu amène, mélange d'angoisse, d'excitation, et d'impatience. Plongé en lui même, il ne vit ni n'entendit arriver l'immense objet sur sa droite.
Hedwige hulula si fort près de son oreille qu'elle lui perça les tympans. Soudain reconnecté avec la réalité, il aperçut tout juste devant lui, filant à une vitesse incroyable, un avion mordu. La tête dans les nuages, au sens propre du terme, il tira sur le manche de son balai de manière à le redresser. Hedwige hurlait sa peur et tournoyait autour du balai et de l'appareil. Les moldus non endormis dans leurs sièges crurent halluciner quand ils virent le jeune homme sur le point de percuter l'un des hublots.
Conscient d'avoir presque réussi à se tuer sans l'aide de Voldemort, Harry maugréa contre lui même, puis s'essuya le visage avec sa manche. Il était fatigué, et pressé d'en finir. Il pensait trop, il fallait qu'il se concentre sur l'action. De toutes les manières, penser ne lui servirait pas pour l'instant. Penser ne lui servirait qu'une fois arrivé à la salle-surdemande de Poudlard.
Il était certain de trouver des informations sur les Horcruxes là-bas. Voldemort ne devait pas connaître cette pièce à son époque, Harry lui, avait cet atout en plus. Personne ne serait au courant de ce qu'il allait faire...
Il lui fallut quelques heures encore pour enfin voir la silhouette de Poudlard se découper sur l'horizon. Le ciel se teintait de sang et de feu jaune. Le soleil se levait, et le château se trouvait juste devant. Poudlard resplendissait de la beauté que ses siècles lui avaient conférée. Que ses fondateurs lui avaient donné .
Harry préféra voler à haute altitude, de peur que quelqu'un ne le repère. Puis, arrivé devant les grilles, il posa pied-à-terre.
« Hedwige, monte à la volière, et force les oiseaux à s'affoler. Il faut que le peu de personnes présentes à l'intérieur sortent pour voir, que j'ai champ libre. Tu comprends ? » La chouette hulula à la manière d'un chat ronronnant, puis s'envola droit vers le donjon Ouest. Harry passa la grille sans trop d'appréhension, se disant que les protections ne s'activeraient pas pour lui. Certes, l'Angleterre était en guerre, mais Poudlard accueillait toujours les élèves qui voulaient y pénétrer, et s'y réfugier...
Harry traversa le parc endormi en courant. De petites larmes d'eau perlaient au bout des brins d'herbe. Chacune de ses foulées ramassait un peu de cette pluie, et écrasait le tapis de verdure. Il passa près du grand chêne sous lequel lui et Ginny s'étaient si souvent embrassés. Une certaine amertume l'envahit, mais il se força à l'ignorer. À chaque pas qu'il faisait, c'était un nouveau souvenir qui l'assaillait.
Les rires d'Hermione.
Les ronchonneries de Ron.
Leurs jeux énervants d'amoureux.
Les sourires mystérieux de Dumbledore.
Les boutades de Malefoy.
Les cris du public lors du tournoi des Trois Sorciers.
Le calme du lac au petit matin... comme aujourd'hui.
Harry poussa la grande porte de bois cerclée de fer forgé à deux mains. Récupérant son balai qu'il avait posé pour ce faire, il se faufila sous sa cape d'invisibilité une nouvelle fois puis se dirigea en silence vers la salle sur demande. Poudlard n'était certes pas vide, mais à cette heure matinale, personne n'était encore levé. Circulait seulement dans les couloirs quelques surveillants, et Rusard et sa Teigne...
Les vieilles pierres de Poudlard étaient seules témoins de son passage. Silencieux, Harry osait à peine respirer. L'importance de ce qu'il allait faire allait lui demander toute sa concentration. Son souffle était coupé par le silence pesant des couloirs, habituellement noirs de monde lorsqu'il y vivait l'année, et l'appréhension de l'avenir.
Marchant sur des oeufs, et suant sous sa cape, Harry pénétra enfin dans la salle sur demande après être passé trois fois devant son entrée. Il vérifia que personne n'était à l'intérieur – la salle consistait en une table recouverte de livres et une chaise à côté. Recouverte DES livres dont il avait besoin.
« Mille ans d'Horcruxes... » lut-il à voix haute . « Les fondements de la magie de l'âme, Des dix moyens pour sauver sa peau, Danse avec les mages noirs, Abominations de la magie... » Satisfait, il s'installa sans plus attendre et se plongea dans une lecture qui lui demanderait du temps, de la concentration, et beaucoup de courage.
&
Satisfait de tout ce qu'il avait appris, Harry s'empara d'une pelle qu'il avait demandée à la salle, ainsi que de dix petites boîtes de carton toutes plates, à l'intérieur desquelles semblaient bouger des choses. Un peu réticent à les mettre dans sa poche, Harry y fut contraint. Il essaya d'oublier que c'étaient des araignées qu'il y avait dedans, et que si elles sortaient, elles monteraient sur ses jambes, escaladeraient son corps, et pourraient le piquer. De toutes petites araignées frémissantes, noires comme la mort, aux pattes longues et fines, si fines qu'une brise légère pourrait les briser si ces êtres n'avaient pas été si habiles.
Empoignant sa baguette magique, sa cape d'invisibilité et la Carte des Maraudeurs, il sortit de la salle, puis en veillant bien à ne croiser personne, et à ne pas trébucher sous sa cape à cause de la pelle, se dirigea vers le parc... vers le cimetière.
Il essaya de ravaler ses larmes. Depuis sa sortie de Poudlard, un mois auparavant, c'était la première fois qu'il venait sur la sépulture de Dumbledore. Le temps qui s'était écoulé était court, mais la rupture avec le monde magique si forte qu'il avait oublié ce que c'était que Poudlard sans Dumbledore. Ce que c'était qu'un monde sans saveur.
Pressé d'en finir, il ensorcela la pelle qui, en sautillant, alla se placer juste au dessus de la tombe. D'un mouvement de baguette souple et léger, Harry commença à creuser. Harry devait déterrer Dumbledore. Harry voulait que son corps, si sacré à ses yeux, soit investi d'une partie de son âme.
Harry voulait faire de lui son premier Horcruxe. Le plus important...
Sans cesser de faire des moulinets avec sa baguette, il réfléchissait aux objets qui pourraient être ses autres Horcruxes. Bien sûr, il y avait déjà lui-même – il devait garder une partie de son âme, s'il voulait vivre – et bientôt le corps de Dumbledore. Sans vraiment réfléchir, deux objets lui vinrent tout de suite en tête. Deux objets qu'il serait sûr de toujours avoir sous la main, et en sécurité : sa propre baguette, et l'album photo. Quelque part, ses parents qui avaient déjà donné leurs vies pour sauver la sienne seraient encore les gardiens de son âme. Jugeant que ces deux choix étaient bons, il compta que cela lui faisait quatre Horcruxe, et que comme Voldemort, il en voulait sept.
Sept. Comme l'âme déchirée de Voldemort.
Sept. Comme les chats d'Astharoth.
Sept. Comme le nombre de leurs vies.
Sept. Comme le nombre magique et fortement symbolique qu'il était.
Sept. Comme sept années à Poudlard.
Soudain, la pelle frappa contre ce qui semblait être un linteau de bois. Grimaçant un peu en repensant à ce qu'il était en train de faire, Harry continua de creuser. Il dégagea les bords du cercueil ouvragé en veillant à ne pas l'abîmer, puis d'un geste leste de la baguette désenchanta la pelle, et ouvrit le tombeau.
Les pieds au bord du trou, le regard rivé droit devant lui, Harry n'osait pas baisser les yeux. Il ne voulait pas le regarder, mais il allait pourtant le falloir.
Une odeur de mort, délétère, s'échappait de la tombe. Les relents de la terre mêlés à ceux du cadavre lui donnèrent le tournis. Le sol tangua, sembla basculer, puis revenir à un niveau normal. Le choc mental était fort. L'image saisissante.
Dumbledore était là, mort, ses mains à moitié dévorées par la vermine posées sur son ventre, sans souffle pour l'animer. Sa peau n'était plus pâle, mais grise après avoir passé tant de jours sous terre plutôt que dessus. Ses yeux, clos, n'étaient crispés par aucune frayeur, aucune crainte. Il avait pour ainsi dire retrouvé la paix en mourant. Dumbledore avait très certainement peur de perdre le monde autour de lui, Harry en était désormais certain. Là, comme il le voyait, le jeune sorcier brun se disait que le vieil homme était resté jusque-là pour tous les protéger, était mort pour les protéger encore, était mort en protégeant Harry...
L'homme avait gagné une victoire quelque part. Sa mort avait été salvatrice au survivant, et il était parti dans les premières victimes de cette nouvelle guerre... Les souvenirs affluèrent : les sourires, les joies, les peines, les expressions de profonde tristesse, ses yeux qui brillaient derrière ses lunettes en demi-lune... Harry avait perdu un homme qu'il aimait tendrement, à la manière d'un parent, mais comptait bien le retrouver.
Et pour cela, il allait d'abord les unir l'un à l'autre d'une manière plus forte que toute autre. Il allait faire de Dumbledore son premier Horcruxe. Remémorant dans son esprit les gestes et paroles qu'il fallait prononcer, et sortant de sa poche l'une des boîtes qui contenaient les araignées, Harry se positionna au dessus de Dumbledore, debout, comme s'il s'apprêtait à s'effondrer pour l'étreindre et puis pleurer.
Il métamorphosa de manière très maladroite une pierre en serpent, puis lui parla en fourchelang. Les mots sortirent seuls de sa bouche :
« Que l'archange déchu m'entende. Qu'il exauce ma première prière. J'appelle Astharoth, et son ombre, le serpent du premier paradis des hommes, à venir en moi, et à déchirer mon âme d'un premier coup de mâchoire... pour la première fois. Donnez cette âme-ci à ce corps-ci. »
Et sa baguette alla de son front à celui de Dumbledore. Quelque chose de formidable se passa.
Un fil, si fin qu'on aurait pu douter de son existence, les lia durant quelques secondes. La lumière qu'il dégageait était forte, puis elle s'amenuisait peu à peu, au fur et à mesure que l'âme – car c'était là la première moitié de celle de Harry – allait d'un corps, vivant, à un autre, mort.
« Je demande mon dû. » fit une première voix, de l'intérieur de son âme. Harry sentit ses tympans se déchirer. Il ne se rendait pas compte que, sous la douleur, encore lancinante pourtant, il commençait à pleurer à chaudes larmes. Les torrents salés coulaient sans qu'il le veuille.
« Voilà ta vie, Astharoth. Astharoth... » Harry pointa sa baguette sur la boîte qui contenait l'araignée, et prononça deux mots, deux petits mots : « Avada... Kedavra... »
L'araignée mourut, Harry s'effondra dans de terribles hurlements. Ses bras allèrent enlacer le cadavre desséché d'Albus Dumbledore. Malgré la vermine, malgré les vers, malgré l'odeur de mort, et malgré cette ombre qui planait au dessus de leurs têtes – l'ombre du diable Astharoth qui, goulûment, avalait la première vie donnée pour ce premier Horcruxe – Harry embrassa le front de son ancien directeur, puis se releva en ignorant les lames de douleurs qui le transperçaient et les larmes d'angoisse qui coulaient de ses yeux verts.
La boîte contenant l'araignée morte fut laissée dans la tombe, le cercueil recouvert, et le caveau refermé. La main crispée sur sa baguette, le jeune Harry, le Survivant, s'écroula à genoux devant la sépulture qu'il avait souillée. Il hurla sa douleur, une douleur indéfinissable, celle qui faisait que vous sentiez, que vous saviez, que la moitié de votre âme vous avait été arrachée.
Il hurlait d'autant plus qu'il savait qu'il allait devoir répéter l'expérience cinq fois encore, afin que son âme soit divisée en sept parties. Il savait exactement quels objets choisir, prendre, et transformer en Horcruxe, mais il ne savait pas encore vraiment quelle serait l'ampleur de sa douleur une fois tous les rituels accomplis...
Une fois son âme déchiquetée par les dents du démon vorace, Astharoth, avec lequel il venait de passer un premier pacte .
Le pacte du diable.
&
« Trinquons ! » fit la voix joviale de James Potter.
« Mais à quoi donc ? » interrogea son ami, sur sa droite, Remus Lupin. L'autre leva les yeux au ciel, tandis qu'un troisième s'esclaffait, le nez déjà fourré dans sa bièraubeurre. « Sirius, attend ! » le réprimanda le loup-garou. Le jeune homme, dont les longs cheveux bruns balayaient le dos aux muscles saillants, but une nouvelle gorgée, et ce par pure provocation.
« Te faut-il vraiment une occasion précise pour boire, Lunard ? »
« C'est à boire... » chantait Peter, déjà complètement ivre rien qu'au fumet – pourtant très léger – de la boisson un peu alcoolisée. Le lycanthrope hocha lentement la tête, en signe de négation, puis s'expliqua patiemment :
« Il y a quelques petites choses que nous pourrions fêter dignement, tout de même... » continua t-il. James l'interrogea de son regard de bigleux, ses yeux chocolat cachés derrière le voile de sa frange mal coupée et coiffée, et ses lunettes rondes. « Eh bien... » commença Remus. Il se leva, pour se donner une contenance, puis leva son verre au plafond au un peu trop bas. Il se plaignit lorsque son crâne toucha le plafond suscité, et, sous les rires moqueurs de ses meilleurs amis, commença un petit discours. Emmitouflés dans leurs couvertures, cachés au milieu des caissons d'alcool dans la cave du père Potter, ils écoutèrent attentivement :
« Nous pourrions fêter, et célébrer, le fait que Sirius ait enfin quitté sa famille de dingues, et qu'il aura bientôt dix-sept ans... »
« Bravo ! » cria James. Et il se leva pour applaudir chaudement son ami, qui le saisit aussitôt par les jambes. L'attrapeur vedette de Gryffondor se retrouva le cul par terre, plus vite que jamais.
« Tais-toi, imbécile, il dit des trucs intelligents ! » Remus sourit, et continua en voyant l'air ravi et sincèrement reconnaissant que lui lançait Sirius. D'un geste maîtrisé, il balaya l'onde de ses cheveux presque blonds, qui dégoulinaient régulièrement sur son visage et devant ses yeux de miel à la manière d'une coulée d'ambre claire.
« Fêtons aussi la nomination de James au poste de Capitaine de l'équipe de quidditch, ainsi qu'à sa mutation au poste de poursuiveur ! »
« Et mes avances qui n'ont pas été repoussées par Lily ! » hurla-t-il en déversant les trois quarts de sa chopine par terre. Il articula un mot grossier et sorcier, puis fit disparaître le liquide, qui revint à sa place, à savoir dans son verre. En même temps, il tapa son meilleur ami de cabot qui avait ajouté que la demoiselle n'avait pas non plus acquiescé.
Remus se tourna ensuite vers Peter, et leva sa chope en son honneur :
« Célébrons également la première petite copine de Peter cet été, et de ce fait son premier baiser ! »
« Ouais ! » cria celui-ci en buvant un grand coup.
« Et à nous, les Maraudeurs ! » scanda Remus d'une voix aiguë, imitant les groupies, au sens propre du terme, qui les pourchassaient à Poudlard. Il fit également une pirouette en tenant de sa main gauche une jupe imaginaire. Sirius eut une grimace – il se souvenait encore d'un patin que lui avait roulé une fille qu'il n'avait jamais vu au détour d'un couloir après qu'elle l'ait plaqué au sol avec autant de force qu'un joueur de rugby, et décampé aussi rapidement — puis James s'exclama soudain : « Et Remus ! Il faut aussi célébrer quelque chose en ton honneur, vieux ! »
Le binoclard releva ses lunettes, se leva, et posant la main sur l'épaule du lycanthrope, dit d'une voix claire et faussement ampoulée, mais pas dénuée d'émotion pour autant – ils avaient beau faire les pitres, les mots les atteignaient quand même :
« A tes métamorphoses de moins en moins douloureuses, et à ta sagesse légendaire ! »
« À Remus ! » crièrent-ils ensemble.
« Et puis à moi ! » fit Sirius en se levant. Il passa un bras autour des épaules de son ami, et gueula de sa voix la plus puissante : « Et puis, à l'amitié, et merde à Voldemort ! »
« À l'amitié ! » répéta Peter en buvant.
« Et à Lily ! » James but un grand coup, mais il se reçut un coup derrière la tête, en même temps qu'un autre imbécile relevait sa chopine pour l'embêtait. Moralité, il recracha tout ce qu'il avait avalé, et la chopine vomit son contenu sur lui.
« Bandes de bouses ! » Mais il se contenta de sourire, trempé, et de se sécher. C'est là qu'il sortit d'autres bouteilles, autrement plus rouges et plus fortes en goût. Du Firewisky. « Heureusement, voici venir Fire le Grand Whisky ! »
« Elle est pourrie ta blague. » éructa Peter.
« C'était pas une blague, je crois... » nuança Remus.
« On aurait pourtant cru. » s'excusa Pettigrow, qui portait si bien son nom – et cette fois-ci, vous pouvez rire. James, dépité, tentait d'ouvrir la première bouteille avec l'aide inutile, mais néanmoins insistante, de Sirius.
« N'empêche, on aurait pu trinquer au Fire plutôt qu'à la bièraubeurre, non ? »
« Je sais pas si on aurait été capable d'articuler un mot, ou même d'émettre une pensée cohérente... »
Le bouchon de la bouteille sauta enfin – James avait dû forcer les protections que son père avait mises sur l'alcool avec la magie puis mettre toutes ses forces physiques pour l'ouvrir enfin – et le brun aux cheveux décoiffés servit largement ses amis. Ils trinquèrent encore une fois.
« Il rentre quand ton père ? »
« Demain soir. »
« Bon... » fit Sirius en souriant à son meilleur ami. « Ça nous laisse le temps de nous bourrer sans remords, de dessaouler, et de recommencer ! »
« Au rythme où j'ouvre les bouteilles, on n'ira pas loin... »
« Boire c'est mal. » dit Remus qui entamait allègrement son verre de FireWhisky.
« Une fois par été, ça va pas nous tuer... »
« Sûr. »
Ils trinquèrent à nouveau, en pensant que dans deux jours c'était la rentrée, puis commencèrent à boire, à boire, à boire...
Et à se remplir comme autant de barriques pleines.
&
Dans la tête de Lily Evans s'affrontaient deux humeurs, très distinctes : tout d'abord, la perspective de retourner à Poudlard l'enchantait totalement. Le château et ses pierres millénaires l'avaient toujours passionné, elle n'arrivait pas à ne pas penser à Poudlard, même en vacances. Lily n'étudiait pas par soif de connaissance, mais plutôt par passion. Par passion pour Poudlard et la magie. Et Poudlard et la magie le lui rendaient bien.
Cependant, elle savait que c'était la dernière année qu'elle retournerait à Poudlard, et en sachant cela, elle ne pouvait s'empêcher de frôler la crise de larmes à chaque fois que la pensée effleurait son esprit.
Et puis elle allait revoir Potter. Les années précédentes, il avait été exécrable avec elle, un vrai goujat, et elle aurait volontiers clamé au monde entier que, grâce à lui, la balance de ses humeurs penchait du côté noir de la force. Cependant, cette année, ce n'était pas pareil... Ses dernières insistances avaient été courtoises, pour ne pas dire charmantes, et Lily avait rougi malgré elle, bien qu'elle espérât que le jeune homme n'avait rien remarqué. Ainsi, cette année, ce ne serait pas Potter qui ferait la différence de poids sur son « humeur-mètre », comme Lily se plaisait à appeler ses airs lunatiques, souvent.
La jolie rousse passait une main absente dans ses cheveux lorsque sa mère, qui était au volant de la Ford Anglia, se retourna pour lui signifier de descendre : « Tu es arrivée ma chérie, tu as bien tout ton argent ? » Surprise que le voyage jusqu'au chaudron baveux ait été si rapide, elle hocha lentement la tête, sortant de ses pensées comme on s'extirpait d'un sommeil de plomb. Ses yeux papillonnèrent un instant, puis elle embrassa sa mère, ouvrit la portière, et se leva du siège passager. La porte claque derrière elle, et Lily se retrouva seule devant la portée d'entrée du chaudron baveux. La jeune fille attira quelques regards – l'adolescence ayant fait son oeuvre, elle entrait maintenant dans la fleur de l'âge, et la longue paire de jambes qui sortait de sous sa courte jupe d'été mettait en valeur ses formes généreuses un peu plus haut. Elle n'était pas un canon de beauté, mais pas non plus un boulet de laideur, si l'on peut se permettre un tel jeu de mots. La jeune fille tripotait anxieusement la bretelle de sa jupe, qui avait de petites cerises rouges en guise de motif, et qu'elle avait tant hésité avant de mettre.
Elle verrait de nombreux sorciers sur le chemin de traverse – ce qui était somme toute normal – c'était son monde à elle, et elle ne mettait ce genre d'habit que lorsqu'elle était dans le monde des moldus. Elle allait certainement revoir ses amies, elle se demandait si elles la trouveraient bien habillée, et les garçons sorciers jolie dans sa robe moldue...
Mais Lily secoua la tête, cessant d'observer la porte d'entrée du chaudron baveux comme si elle la voyait pour la première fois, puis poussa le battant, se disant que ces pensées parasites n'étaient dignes d'intérêt que pour une ado-pré pubère, ce qu'elle espérait ne plus être.
Son nez, parsemé de tâches de rousseur, se retroussa dès qu'elle fut entrée. Une forte odeur de tabac et d'alcool flottait dans l'air, bien que la pièce soit propre d'aspect et pas encore trop enfumée. Quelques personnes la regardèrent, puis préférèrent reporter leur attention sur leur chope de bierraubeure, de firewhisky, ou d'autres boissons non identifiées.
Lily regarda l'heure à sa montre-bracelet, et constata qu'elle était bien en avance. Ses amies ne la rejoindraient que dans une demi-heure, et encore... si elles avaient de l'avance. Avisant une table où il y avait une place de libre, elle demanda au jeune homme qui y était assis :
« Je peux... ? » La question, non terminée, reçut une réponse positive. Un peu maladroitement, elle s'assit en face du garçon, et attendit qu'une serveuse vienne prendre sa commande.
Lily retrouva avec plaisir le chaudron baveux. L'endroit lui avait manqué. Sa magie surtout, et les gens qui le peuplaient. Ici, il y avait nombre de voyageurs, mais aussi des professeurs parfois, des élèves qui passaient, tout le monde transitait par ici afin d'aller au chemin de traverse, surtout les enfants de moldus qui ne pouvaient pas passer par la poudre de cheminette.
Le chaudron baveux était un carrefour de voyage fort confortable, quoi qu'un peu vieillot et délabré, mais pas dénué de charme. Les chaises qui raclaient le sol à chaque fois qu'on les changeait de place étaient faites d'un bois usé, les tables que les clients martelaient de leurs chopines et autres tasses recouvertes d'éraflures, et la vaisselle utilisée en étain reluisant de magie. Lily observa avec amusement un balai nettoyer, sans l'aide de personne, un coin de la pièce, et s'excuser même lorsqu'il envoya un peu de poussière sur les chaussures d'un client. Elle pouffa quand elle vit que ce client n'était autre qu'Hagrid. Ce dernier la reconnut, elle lui sourit largement, se leva, et supporta sans broncher l'étreinte qu'il lui donna. Le demi-géant lui coupa littéralement le souffle, mais heureusement, elle avait de grands poumons !
« Comment vas-tu Lily ? » La jeune et jolie rousse sourit une nouvelle fois de toutes ses dents, répondant que tout allait pour le mieux maintenant qu'elle remettait un pied dans le monde magique. Elle faisait par là allusion à sa soeur, une vraie peste depuis que Lily savait qu'elle était sorcière, et son attitude qui s'était empirée depuis que cette dernière savait que c'était là sa dernière année d'études à Poudlard et faisait tout pour lui rendre la vie impossible.
« Moi ? » fit Hagrid, répondant à la question de Lily quant à sa santé. « Couçi cousit... Mais tu ne sais pas, toi ? Je comptais te le dire à la rentrée seulement, je sais que tu adores les chiots... J'ai trouvé un nouvel ami. »
« Oh ! » s'exclama Lily en voyant ce que sortait Hagrid de sa poche. C'était là un adorable petit chiot, au nez encore un peu aplati, et dont les babines pendaient de sa bouche aux petits crocs. Il avait de grandes oreilles, et une bouille absolument adorable.
« Je l'ai appellé Crocdur ! » s'écria le géant en éclatant d'un rire gras. Hagrid fourragea dans sa grosse barbe, sortit une saucisse de sa poche – Lily évita de se demander quel âge elle avait exactement ainsi que sa provenance – et la donna au chiot qui s'en saisit avidement.
« Il est magnifique ! » fit Lily, volant sa saucisse à Crocdur afin de le faire jouer. Le chien réagit au quart de tour – Hagrid l'avait posé sur la table, car il était tout petit — et se mit à sauter. Il faillit renverser la chope de bièrraubeure de leur voisin de table, qui les observait avec un air étrange sur le visage.
« Désolée. » fit la rousse, ramenant le chiot vers elle en ignorant les crocs minuscules qui mordillaient ses doigts.
« Pas grave. » répondit le jeune homme, le souffle visiblement court. Lily se demanda ce qui lui arrivait – il la fixait comme si c'était la première fois qu'il voyait une fille – puis reporta son attention sur le chiot qui repassait à l'assaut de la saucisse grillée.
Hagrid, qui avait ignoré l'échange, dit avec joie : « Je crois qu'il t'a adoptée, Lily ! » Puis il se leva, et ce faisant remit le chiot dans sa poche. Le chien sortit la tête du tissu, jappant joyeusement. Il en profita pour lécher la main que lui tendait la Gryffondor. Lily lui rendit sa caresse, et fit la bise à Hagrid qui partait.
« Ca te fera une raison de plus pour venir me voir, de temps en temps. » Et il lui fit un clin d'oeil, auquel elle répondit par un air entendu. Le jeune homme près d'eux les regardait, comme abruti. Un peu triste également.
Lily fit un signe de la main au demi-géant, le remerciant pour sa gentillesse, et le félicitant pour son nouvel ami, puis il la quitta. Une serveuse vint prendre sa commande, elle s'empressa de demander un thé à la menthe, boisson qu'elle affectionnait particulièrement, et ce à toute heure. De la même manière qu'il n'y avait pas de jour pour faire la fête, il n'y avait pas d'heure précise pour boire le thé. Au diable les convenances des dix-sept heures tapantes !
Du coin de l'oeil, Lily vit que le jeune homme en face d'elle l'observait avec avidité, presque. Elle se sentit rougir. Elle ne l'avait pas beaucoup vu, mais elle le trouvait très beau. Et être si proche de lui, et si assidûment observée, lui fit perdre toute retenue.
« Tu... tu t'appelles Lily ? » demanda-t-il en confirmation, comme il avait écouté la conversation entre elle et Hagrid. Elle se tourna vers lui, hochant la tête en silence. Puis elle ajouta :
« Lily Evans. » Le jeune homme eut un regard stupéfait. Plusieurs émotions semblèrent traverser son regard aussi vert que le sien. Lily plissa les yeux, elle discerna dans les siens autant de mélancolie que de joie, de tristesse que d'allégresse. C'était un mélange détonnant qui donnait à son regard une profondeur semblait-il inégalable. « Et toi ? » demanda-t-elle à son tour, en en profitant pour le détailler elle aussi.
« Euh... » Il sembla hésiter un instant, puis avec un sourire à faire fondre la glace au coeur des tempêtes les plus glaciales, répondit franchement : « Ralph Brocklehurst. » (1)
Elle lui sourit aimablement, remerciant la serveuse pour son service rapide. Elle allait sortir son argent, mais le jeune homme, Ralph, la devança.
« J'offre. » Lily rougit furieusement, ce à quoi il répondit que ce teint se mariait très bien avec la couleur de ses cheveux. Mais il se défendit ouvertement d'aucune tentative de drague. Lily rit doucement, et la barrière céda. Elle aimait bien ce jeune garçon.
« Tu es à Poudlard ? Je ne t'ai jamais vu. »
« Je vais y achever mes études, afin de passer mes ASPICs dans les règles de l'art. »
« Tu as dix-sept ans alors ? »
« Précisément. » Il passa une main dans ses longs cheveux noir – qui descendaient apparemment juste en dessous de ses épaules – geste qui ne déplut pas outre mesure à la belle Lily, qui habituellement était répugnée par cette attitude, chez un autre individu, autrement plus prétentieux, arrogant, stupide, et... « Et toi ? » continua Ralph. Il avait de beaux yeux verts que Lily trouvait sublimes. Un peu perdue, elle répondit, hésitante dans le ton de sa voix : « P-pareil. »
Il avait une étrange manière de la regarder, qui la mettait à la fois mal à l'aise – il la dévorait du regard – et sûre d'elle – il y avait une sorte de révérence, de respect, dans chaque regard qu'il lançait vers elle. Lily regarda l'heure, et juste au moment où elle se disait que ses amies ne devaient pas tarder à arriver, elle entendit la voix familière de l'une d'entre elles.
« Lily ! » Et Marlene McKinnon (2) s'affala de tout son poids sur les épaules de son amie. Lily, étouffée, agita bras et jambes. Elle entendit le rire un peu moqueur de son voisin de table, et jura vertement quand elle sentit sa jupe remonter au fur et à mesure que son amie la serrait dans ses bras. « Marlene ! » cria-t-elle.
Heureusement que son appel au secours ne dépassa pas le volume sonore ambiant de la pièce ou sinon elle aurait été bonne pour une honte en bonne et due forme devant l'assemblée tout entière. L'Irlandaise desserra son étreinte, souriant largement.
« Oh, tu dragues ? »
En face d'elles, Ralph rougit furieusement. Lily s'épargna une honte cuisante en répondant à voix qu'il était certes joli garçon, mais qu'elle ne sautait pas sur tous les jolis minois qu'elle croisait, sinon elle n'aurait plus sa réputation de « vierge de feu ». En effet, nombre étaient les garçons à Poudlard à qui elle avait refusé les avances – dont Potter – et ceux qu'elle avec qui elle avait cassé au bout de quelques jours. c'était ce satané Black qui l'avait affublée de ce sobriquet ridicule et humiliant, mais elle en riait quand c'était elle qui en parlait, ou ses amies. Mais c'était moins drôle dans la bouche de Black, et pire encore dans celle des Serpentards.
Passer pour la pire des traînées était aussi humiliant que le fait de passer pour une prude. Lily était encore vierge, et elle se doutait que nombre de filles de son âge l'étaient encore, mais celles qui ne l'étaient plus avaient plus de prestige que celles qui l'étaient toujours, pour ainsi dire.
Perdre sa virginité était une sorte de fierté dans cette jeunesse un peu dépravée – libérée selon les dires de ladite jeunesse, qui préférait ne pas appeler un vice un vice – comme si l'on passait un cap, une étape de la vie, et qu'alors on avait plus d'expérience que les autres. Comme si on se sentait plus femme que celles qui n'avaient pas encore offert leur première petite fleur à leur premier amoureux.
Marlene ne fit pas de commentaire sur la robe de la jeune Lily, mais l'observa néanmoins d'un oeil appréciateur. La rousse ne s'en offusqua pas outre mesure, sachant parfaitement que sa jeune amie était lesbienne, et que si elle savait que Lily ne l'était point, n'était pas pour autant dénuée d'yeux.
« Marlene McKinnon, enchantée. » fit-elle en tendant la main à Ralph, qui, passant une main dans ses cheveux un peu emmêlés répondit à sa poigne ferme. Il lui sourit avec une tendresse que Lily avait retrouvée un peu partout chez lui, puis se leva.
« Je vais vous laisser à vos retrouvailles. »
« Tu peux rester, tu sais ! » s'écria Lily, haussant la voix sans s'en apercevoir. Mais il balaya l'invitation d'un geste, laissant l'argent de leurs commandes sur le table, puis monta vers les chambres en leur adressant un dernier signe. Marlene prit sa place. Lily vit qu'elle avait coupé très court ses cheveux blonds, qui lui arrivaient à la fin de l'année dernière au niveau des épaules. Sa nouvelle coiffure lui allait très bien, ce que Lily se hâta de lui faire remarquer.
« Où est Elena ? » demanda la rousse.
« Justement... Je me demandais si tu savais, ou pas. »
Lily eut une moue inquiète, qui resta gravée dans ses traits le restant de la conversation.
« Elena a été... enfin... attaquée. » Le visage bronzé de la rousse vira blême. Elle mordilla ses lèvres rouges qui devinrent carmines. Ses grands yeux de poupées s'écarquillèrent, fous d'inquiétude, et d'angoisse...
« Des mangemorts ? Elle va bien ? Pourquoi ne pas m'avoir prévenue ? Je... »
« Lily... Je ne l'ai appris qu'hier. Jusqu'à samedi dernier, Elena allait très bien. Ça s'est passé dimanche soir apparemment... Il y a moins d'une semaine. Elle a des chances de s'en sortir, mais... mais... »
« Quoi, Marlene ? » Les jointures de ses mains étaient blanches. Lily serrait les dents à n'en plus pouvoir, un hurlement sourd montait en elle, comme une plainte, morne et silencieuse.
« C'étaient pas des mangemorts. Ils revenaient d'un match de quidditch. C'est bête, hein ? »
« Marlene, arrête de tourner autour du pot. »
« Lily... J'en sais pas plus, alors me demande rien, mais... Fenrir Greyback, tu sais, le loup-garou, eh bien il lui a sauté dessus, elle a été mordue. Elle a perdu beaucoup de sang, et elle est à Sainte Mangouste. »
« Oh Merlin... »
« Les médicomages ne savent pas si elle s'en sortira. Elle entre en phase terminale. Dans tous les cas, Elena ne... Enfin... Si elle ne meurt pas, ce sera comme si. »
&
Regulus pressa le pas, il avait hâte d'arriver au Poudlard Express, et de voir les crachats de fumée grise qu'exhalerait sa cheminée toute rouge. De voir le monde de Poudlard s'activer autour du grand train. D'entendre des voix familières, autrement familières que celle de sa mère qui ne cessait de le couver. À cet instant précis, Mme Walburga Black vomissait toute sa bile sur son fils, le seul encore digne qui lui restait, en le prévenant incessamment de ne pas approcher leur aîné, Sirius Black.
« Ne vous inquiétez pas, Mère. »
« Regulus, votre frère a quitté la maison, a déshonoré notre nom ! Je sais, certes, que vous n'êtes pas amis, mais vous n'êtes pas non plus ennemis. Alors je... »
« Seriez-vous en train de me demander de ne plus parler à mon frère que par des insultes et des jurons ? » Regulus avait coupé sa mère dans sa diatribe, et cette dernière le considérait maintenant d'un air hautain. Un peu importunée par ce ton de rébellion qui perçait dans sa voix, elle dit sèchement :
« N'appelez donc plus cet être infâme un frère. Il ne le sera bientôt plus. À la prochaine réunion, Votre Père Mon Mari, Orion, (3) aura tôt fait de brûler son nom de notre arbre généalogique. »
« Hmmoui... Toujours purs. » énonça Regulus, un peu blasé. Dès qu'il aperçut l'entrée de la voix neuf trois quart, il se dépêcha d'embrasser sa mère – avec quelque répugnance – puis de courir vers le mur. Il le traversa sans problèmes, et se retrouva enfin seul.
« Je ne savais pas Mère si loquace. » éructa-t-il, peu satisfait de la tournure que prenaient les choses dans la famille depuis que son abruti de frère aîné – pas si abruti au demeurant puisqu'il avait eu le courage de faire ce que Regulus ne ferait jamais, à savoir s'enfuir. Père et Mère envisageaient de lui donner l'avenir couvert d'or et de ténèbres qu'ils avaient prévu, à l'origine, pour leur fils aîné. Mais Sirius avait déserté, Sirius avait laissé Regulus seul... et c'était maintenant à son tour d'assumer son appartenance à la famille des Black...
« ... Toujours purs... » répéta-t-il, peu convaincu . Puis, Regulus passa une main fatiguée sur son front. À peine avait-il fait tomber son masque de suffisance avec Walburga Black qu'il devait déjà l'endosser avec d'autres, sa bande d'amis arrivait.
« Salut Regulus. » fit Amycus Carrow, (4) un jeune homme de très grande taille. Il avait des cheveux bêtement bruns, et des yeux d'un marron commun. Sa soeur, Alecto, taillée dans le même roc, avait un an de moins qu'eux, mais traînait avec la bande. Elle salua Regulus d'un geste distrait, comme toujours plongée dans ses bouquins obscurs.
« Salut. » Loïc Parkinson les rejoignit bientôt, un sourire étrange aux lèvres. Regulus se dit qu'il avait dû croiser un première année et lui faire peur. Parkinson était d'un sadisme effrayant, le jeune cinquième année se dit qu'il était heureux de faire partie de ses amis, et non pas de ses ennemis, ou de ceux qui n'étaient ni l'un ni l'autre. Même Malefoy, un septième année de Serpentard qui s'était pompeusement autoproclamé Roi des Serpents, ne lui inspirait pas tant de terreur. Parkinson avait dans son regard cette lueur démente que le blond platine n'avait pas.
Regulus pouffa. Par contre, Parkinson n'avait pas la tête aussi gominée que Malefoy, ça non ! Il était plutôt du genre « coiffure en pétard », un peu comme...
« Voilà Potter, et ton cher frère... » susurra Alecto, levant pour une fois les yeux de son bouquin.
« Et leurs deux toutous. » Amycus parlait certainement de Lupin et Pettigrow. Regulus eut un renâclement de dégoût, et inspira profondément, prêt à affronter pour la première fois depuis un mois le regard perçant de son grand frère.
« Ey, Regulus ! » s'était exclamé Sirius. Le jeune homme avait arrêté sa marche au niveau du groupe de cinquième année. Le plus jeune des deux Black toisa le plus vieux, et ne répondit pas, se contentant de garder un air impénétrable et venimeux à souhait. « J'espère que tu auras fait s'étouffer notre chère mère, et que Père sera mort de tristesse. »
« Non, ce n'est pourtant pas faute d'avoir essayé... » Regulus ne put retenir un léger sourire en coin, qui échappa malheureusement à Sirius. Ce dernier prit sa réponse pour de l'arrogance, et de la moquerie, et le réprima vertement sur cette voix de ténèbres qu'il suivait en aveugle. Regulus ne trouva rien à répondre, il se contenta d'hausser les épaules.
« Toi tu as eu le courage de faire le choix, moi, ce choix, je ne le vois même pas. Je ne suis pas toi, Sirius. Je ne suis pas cette montagne qui surplombe les gens, ni cette onde qui engloutit ceux qui s'opposent à toi, et pas non plus cet air qui se soustrait à tes ennemis. Je ne suis rien de plus que le cadet de la famille, ainsi que le cadet de tes soucis puisque tu t'en vas, et que tu as oublié de me demander ! De me demander ce que j'en pensais lorsque nous étions seuls... de me demander si, moi aussi, je voulais faire ce choix. Si moi aussi, je voulais me détourner de ce Voldemort, et de ses sbires. De ces amis, toujours purs, que je hais tant. »
Regulus aurait voulu lui dire tout ça, mais aucun mot ne sortit. Atone, il regarda ses amis le défendre à sa place, puis il se laissa emmener vers le Poudlard Express qui sonnait le départ.
Sans pouvoir mettre le doigt dessus, le jeune Black sentait que cette année serait différente. Non pas que les BUSEs l'effrayèrent, mais plutôt que les relations avec son frère seraient tendues.
&
Sirius aperçut son imbécile de frère traverser la gare, et rejoindre ses abrutis d'amis de Serpentard. Il sentit une boule monter dans sa gorge : où était passé ce lien qu'ils arrivaient encore à entretenir cet été, avant qu'il ne fugue ? Il semblait avoir disparut, s'être envolé. Avoir été coupé.
« Je ne vois pas Servilo. » dit James. Puis, il remarqua l'air nostalgique de son ami. « Oh, Patmol ! » Mais Patmol était déjà parti rejoindre la bande de Serpentards. Sans grande conviction, Remus proposa d'aller le rejoindre, afin de l'aider au cas où les événements tourneraient au vinaigre.
« J'espère que tu auras fait s'étouffer notre chère mère, et que Père sera mort de tristesse. » cria Sirius. James sentit que son meilleur ami était hystérique. Il passa une main gênée dans ses cheveux en bataille.
« Sirius... »
Le ton calme de voix qu'employa son frère en réponse laissa le jeune animagus cerf pantois. Puis, après qu'il eut décidé que l'autre faisait de l'ironie, il rejoignit Sirius dans sa diatribe.
« Arrêtez ! STOP ! » criait Remus, qui tentait de séparer les deux parties. Sirius s'était jeté sur son frère, qui n'avait pas l'air de l'avoir même remarqué, et observait d'un air absent le train rouge derrière eux. Ses amis le défendaient.
« FILS DE P... »
« SIRIUS ! » hurla Remus. Beaucoup de têtes s'étaient retournées, et commençaient maintenant à parler, chuchoter. Le conflit tourna court, et mis à part la chemise froissée de James et les cheveux longs emmêlés de Sirius, il n'y eut rien à déplorer. Les parents aux alentours leur jetaient des regards peu amènes. James replaça son col et prit sa valise. Sirius empoigna la sienne avec autant de hargne que s'il avait étranglé Regulus, puis dit qu'il montait dans le train.
Peter, un peu tremblant, traîna sa valise à sa suite. Il jetait de petits regards apeurés de lui vers les autres, et couinait qu'il le suivait, et qu'ils devaient les suivre.
James jeta un dernier regard mauvais à la bande de cinquièmes années de Serpentard. Il eut à peine le temps de se retourner qu'une voix, puissante et féminine, lui fit stopper tout mouvement. Devant lui se trouvaient deux grands, très grands et profonds, yeux verts.
« POTTER ! »
« Lily ! »
« Non, elle est derrière. » firent les yeux verts. James se retourna à nouveau, voyant qu'il était face à face avec un jeune homme qu'il ne connaissait pas, et croisa le regard couleur « avada-kedavra » de l'électrisante Lily.
« Y a pas à crier au loup, hein ? Y a pas eu de vraie bagarre, hein ? » supplia-t-il, comme un enfant.
Lily, fulminante, devint toute douce, un peu pantelante. L'attitude que Potter avait adoptée l'avait surprise, à tel point qu'elle ne termina pas sa phrase. Elle bégaya un instant – ce que le jeune home trouva absolument adorable.
« Oh, Ralph ! » James se retourna, peu amène, vers ledit Ralph. Ce dernier eut un sourire maladroit tandis que la jolie Lily lui plantait un baiser sur chaque joue, et que James le mitraillait de son regard noir.
« Je te cherchais... » dit Ralph, puis il sûr qu'il avait encore gaffé vis-à-vis de James. Il essaya de se rattraper : « Vu que tu es la seule personne que je connaisse... un peu... ahem... »
Lily contempla le monde tout autour d'eux, qui bougeait, discutait, riait, pleurait, vivait... Elle comprit tout de suite qu'il a eu besoin de la voir, cependant, elle ne se sentait pas vraiment prête à assumer son « initiation à Poudlard », et ce, pour une raison tout à fait compréhensible.
« C'est ton petit ami ? »
Contrairement à ce qui pourrait se croire, et être cru, ce ne fut pas James qui posa cette question, mais bien Ralph.
« Non, parce qu'il me fusille du regard depuis tout à l'heure... »
Lily se retourna vers Potter, haussa un sourcil sceptique, puis se détournant de lui glissa à Ralph : « S'il continue sur cette voix, non. À cet instant, c'est surtout un abruti congénital. »
« Phase drague. » commenta Ralph avec un sourire entendu.
« Exact. »
« Pas de messe basse sans curé. » fit Potter, s'interposant entre eux deux.
Elle eut un sourire pour les deux garçons, puis s'excusa, comme quoi elle devait partir. Elle demanda à Ralph, malgré sa lassitude et sa tristesse, s'il voulait l'accompagner pour le voyage avec Marlene et les autres.
« C'est ça, ouais... » maugréa James en saisissant sa valise. « Le loup est dans la bergerie. »
Sans qu'il le comprenne vraiment, Lily se retourna vers lui, le gifla, et partit tandis qu'elle criait : « LA FERME AVEC TES LOUPS, LA FERME ! »
Hébété, James n'eut plus un regard d'elle, et hocha à peine la tête quand Ralph le quitta en s'excusant. Puis, sans qu'un mot de plus ne fut dit, ils embarquèrent, et le Poudlard Express démarra.
&
« Tu vas où Ralph ? »
« Aux toilettes. »
Harry avait envie de vomir. Ce n'était pas tant le voyage qui l'insupportait, mais plutôt la compagnie – bien qu'elle fut agréable et qu'il en fut fort aise. Cependant, la conversation lui était difficile, aussi prétexta-t-il une envie pressante pour s'éclipser. Dès que la porte du compartiment fut refermée, il se sentit déjà plus à l'aise, presque libéré d'un poids qui lui courbait le dos. Ses épaules se relevèrent.
Il s'était senti extrêmement mal lors de la première confrontation avec son père, incapable d'articuler la moindre parole durant les premières secondes, puis mou, incroyablement mou... Comme s'il flottait, un peu. Pour la première fois de sa vie, il voyait sa mère et son père réunis, vivants, et surtout, jeune. Après coup, il s'était dit qu'il aurait dû réagir un peu plus vivement, mais s'il l'avait fait, il se serait certainement mis James Potter à dos, ainsi que les maraudeurs, ce qu'il ne voulait surtout pas.
Non seulement parce qu'ils étaient les maraudeurs, mais parce qu'en plus Harry avait besoin de toutes les bonnes âmes, de tous les alliés possibles, dans ce qu'il avait entrepris. Marcher dans le couloir central fut chose périlleuse, surtout avec tous les élèves qui y circulaient. Harry gagna les toilettes après dix minutes d'une marche entrecoupée d'événements aussi variés qu'uniques. Il se rinça le visage, notant au passage qu'il avait drôlement pâli, et qu'il se préférait avec les cheveux longs plutôt que courts.
Un autre qui avait les cheveux longs était Sirius Black, et il se trouvait qu'il sortait justement de la cabine des toilettes sur sa gauche.
Sans un mot, ce dernier se lava les mains, l'air de rien, et, toujours en l'ignorant, sortit de la pièce. Harry trouva dommage qu'il l'ait ignoré, mais Sirius ne savait pas forcément que, oui , l'inconnu croisé aux toilettes venait du futuuuuuuuuuuuuuuur pour sauver le monnnnnnnnnnnnde.
Ahem.
Le Survivant ne pouvait pas non plus espérer le coincer dans une cabine de toilettes pour lui dire qui il était. Harry devrait gagner l'amitié des maraudeurs comme un élève normal, malgré toute l'amitié et la sympathie qu'il ressentait envers eux.
« Si seulement ils avaient survécu... » pensait-il en buvant . « Si seulement. »
Puis, alors qu'il arrêtait l'eau du robinet, il entendit du bruit dans la cabine d'où venait de sortir Sirius. Curieux, il rabattit la porte, et ce qu'il vit l'abasourdit.
Tentant tant bien que mal de cacher son cou rougi par la marque fraîche de dix doigts, Regulus Black avait les larmes aux yeux. Il jeta un regard haineux à Harry.
Sans ménagement, le jeune Black le bouscula afin de sortir. Harry ne le retint pas.
(1)Brocklehurst : Nom de famille emprunté à Mandy, du même nom, citée dans le chapitre sept du tome deux des aventures de notre sorcier préféré.
(2)Marlene McKinnon : Nom cité dans le tome six d'Harry Potter and the Half-Blood Prince, on sait seulement que sa famille tout entière fut décimée par Voldemort et ses mangemorts.
(3)Orion et Walburga Black : véritables prénoms des parents Black. Source : arbre généalogique publié par JKR.
(4)Amycus et Alecto Mangemorts arrêtés, respectivement hommes et femmes, cités dans le tome six.
Carrow : famille mangemorte citée dans le tome six, qui apparemment aurait cru Voldemort mort. Par choix, j'ai décidé que les deux personnages suscités seraient de cette famille, mais cela n'est pas sûr. Une simple supposition.
Prochain chapitre : « Des Jumeaux Barjots Et Des Frères Ennemis ».
Review ? )