Bonjour tout le monde,

Je suis très contente de vous présenter ma nouvelle fic. Je l'ai écrite spécialement pour remercier celui qui a la corvée d'être mon bêta-lecteur depuis maintenant presque deux ans, Remus James Lupin. Il fait ce travail à merveille et j'espère que notre collaboration durera encore longtemps.

Bien entendu, le choix de son pseudo et son affection particulière pour ce personnage a largement facilité le sujet de cette fic.

Il y a quelques semaines que je travaille sur cette histoire, j'ai donc quelques chapitres d'avance. J'espère que vous prendrez autant de plaisir à la lire que moi à l'écrire.

Bonne lecture.

Auteur : Falyla

Titre : Crois en moi

Paring : Remus Lupin/Nymphadora Tonks

Rating : PG -13

Disclaimer : Les personnages de cette fic appartiennent à JK Rowling mais l'histoire est à moi.

CROIS EN MOI

Chapitre 1

Mercredi, 19 avril 2000

Nymphadora Tonks gémit sourdement en entendant son réveil. Elle marmonna une phrase inintelligible puis enfouit sa tête hirsute dans l'oreiller en se bouchant les oreilles avec les mains. Malheureusement pour elle, ce n'était pas suffisant pour assourdir complètement les pépiements déchaînés du coucou.

Après plusieurs secondes, voyant que sa victime ne réagissait pas comme elle aurait dû, l'oiseau sortit de son chalet en piaillant furieusement, persuadé qu'elle allait se rendormir. Il plongea sur elle et il se mit à lui piquer vigoureusement le crâne avec son bec.

Tonks poussa un cri de douleur et porta vivement la main à sa tête. Tout en grommelant des imprécations furibondes, elle extirpa maladroitement le petit volatile surexcité qui s'était pris les pattes dans ses cheveux et lui jeta son regard le plus noir en le menaçant de lui arracher les plumes une à une si l'envie lui prenait de lui refaire un coup pareil. Il couina piteusement et retourna dans son chalet en voletant aussi vite que ses battements d'ailes saccadés le lui permettaient.

La jeune femme regarda la bestiole se terrer peureusement dans son abri avec une moue satisfaite.

Saleté de piaf.

Elle avait bien essayé de le faire taire mais apparemment, le sortilège du Silencio était totalement inefficace sur ce maudit oiseau ensorcelé. Elle nota dans un coin de son cerveau encore embrumé de remercier chaleureusement Hestia pour son merveilleux cadeau. Un coucou suisse version sorcier dans sa petite maison, tout en bois, avec des géraniums rouges peints à la main sur le rebord des minuscules fenêtres ! Pouvait-on réellement qualifier de meilleure amie quiconque vous offrait un présent aussi kitchissime en revenant de son voyage aux pays des Helvètes ?

Tonks et Remus l'avaient reçu – parmi beaucoup d'autres – lorsqu'ils avaient pendu la crémaillère de l'appartement qu'ils avaient pris ensemble deux ans plus tôt. Remus, qui travaillait avec Hestia depuis plusieurs années, avait éclaté de rire en découvrant ce que contenait le cadeau de sa collègue et s'était empressé de fixer l'horloge magique au mur.

Le léger sourire qui avait fleuri sur les lèvres de Tonks à ce souvenir s'effaça brusquement pour laisser la place à une expression beaucoup plus amère ; elle ne parvenait pas à se rappeler la dernière fois qu'elle avait entendu Remus rire de si bon cœur.

Elle soupira lourdement quand son regard se posa sur l'autre côté du lit qui était à peine froissé.

Comme tous les mois depuis qu'ils faisaient ménage commun, Remus retournait dans son vieil appartement pendant trois jours. Il n'avait jamais accepté qu'elle fasse aménager chez eux le même genre de pièce sécurisée dans laquelle il s'enfermait pendant les nuits de pleine lune. Bien qu'elle lui ait assuré maintes fois que sa condition de loup-garou n'était pas un problème pour elle, qu'elle savait qu'il ne se montrerait jamais imprudent, Remus avait refusé catégoriquement. Les lycanthropes pouvaient adopter un comportement très agressif à l'approche de la pleine lune – sans parler de leur transformation en monstre assoiffé de sang. Il n'aurait pas supporté de voir la crainte dans ses beaux yeux bruns si son attitude était devenue violente et incontrôlée. C'est pourquoi il préférait s'isoler.

Tonks secoua la tête en poussant un autre soupir et se dirigea lentement vers la salle de bain. Ils traversaient une passe difficile, inutile de le nier et, comme chacun campait sur ses positions, leur pomme de discorde n'était pas près d'être résolue. Elle espérait seulement qu'une fois revenu, elle pourrait à nouveau aborder le sujet de l'adoption. Deux jours auparavant, la discussion posée qu'elle avait prévue avait rapidement tourné au vinaigre et il avait finalement quitté la maison beaucoup plus tôt qu'il le faisait habituellement. Mais Tonks était d'une nature optimiste. Elle refusait d'imaginer que ce n'était pas l'approche de la pleine lune qui avait influencé l'attitude fermée et hostile de Remus.

Elle jeta un vague coup d'œil au miroir et tira une langue dégoûtée en voyant l'image peu flatteuse que lui renvoyait son reflet. Elle ne comprenait pas ; ces derniers temps, elle se traînait lamentablement. Hestia lui avait conseillé de se coucher plus tôt – ce qu'elle avait fait sans peine, elle tombait littéralement de sommeil. Mais le matin, c'était encore pire, elle se sentait vidée.

Où était passée la pétillante Auror qui épuisait son entourage par sa personnalité débordante d'énergie ? Pourquoi avait-elle disparu au profit de cette copie terne et sans entrain qui la fixait de ses yeux légèrement cernés ?

Chassant rapidement d'éventuelles réponses qu'elle ne souhaitait pas explorer plus avant, elle se glissa sous la douche. En sortant, elle ne se sentait pas plus vaillante mais au moins, elle était propre. Après un rapide sort de séchage sur ses courtes mèches, elle s'examina attentivement et décida, une fois de plus, que le rose pétant qu'elle avait si souvent arboré, ne s'accordait plus vraiment à son humeur. Après un court instant de réflexion, elle se concentra un instant et ses cheveux prirent une teinte noir corbeau. Ensuite, elle se maquilla légèrement pour tenter de camoufler ses cernes. Pas trop mécontente du résultat si on n'y regardait pas de trop près, elle adressa une grimace moqueuse à son reflet avant de regagner sa chambre. Là, elle choisit un jean noir dans sa penderie et un haut de survêtement rose pâle. Quand elle fut habillée, elle enfila une paire de tennis blanches et se dirigea vers la porte. Elle décrocha sa cape de la patère et jeta un coup d'œil distrait à sa montre. L'heure inscrite la fit sursauter.

Merde ! Je suis à la bourre !

Elle verrouilla magiquement la porte et se précipita dans l'escalier. Quand elle sortit dans la rue, le ciel encore sombre de ce matin d'avril était chargé d'énormes nuages. Il promettait une pluie ininterrompue fine et glacée qui faisait la renommée de l'Angleterre. Une journée pourrie en perspective. Une de plus. Tonks plissa son nez de dépit et transforma discrètement sa robe de sorcier en imperméable moldu. Avec un temps pareil, comment s'étonner que l'économie touristique britannique sombre lentement mais sûrement dans l'abîme ?

Puis se disant finalement cette grisaille ambiante s'accordait parfaitement à son humeur, elle se dirigea à grands pas vers une arrière-cour jonchée de poubelles et transplana dans une ruelle proche de son lieu de rendez-vous. Quelques minutes plus tard, elle entrait dans un petit bar à café situé à deux rues des bureaux du Ministère. Remus et elle l'avaient découvert plusieurs mois auparavant et c'était rapidement devenu un rituel que d'aller boire une de leurs spécialités avant de se rendre au travail. Ils avaient convenu de s'y donner rendez-vous trois matins par semaine. L'établissement, le Da Pepone, était tenu par des Moldus italiens qui avaient immigrés en Grande Bretagne après leur deuxième grande guerre. Le tenancier, qui avait récemment fêté ses soixante-dix ans, était veuf depuis quelques années. Sa sœur, qui vivait alors en Ecosse, l'avait rejoint pour l'aider dès quand il avait enfin admis que la gestion du café ne pouvait être assumée seul.

Lorsque Tonks entra, Camillo, le patron astiquait le dessus du comptoir en fredonnant une vieille chanson en patois napolitain tandis que sa soeur, une impressionnante matrone à l'air revêche, desservait une table.

- Buon giorno (1), Pepone, le salua chaleureusement Tonks en utilisant son surnom, comme tous les habitués.

Camillo leva la tête et sourit largement en la reconnaissant, faisant frétiller son épaisse moustache grise.

- Dora mia ! l'interpella-t-il avec une exubérance toute latine. Come va stamattin' ? (2)

Avant que Tonks puisse répondre, sa soeur se retourna vers lui et le fixa sévèrement un bref instant avant de lâcher sèchement quelques phrases dans un italien si haché qu'il en devenait incompréhensible. Camillo fronça ses sourcils broussailleux et répliqua d'une voix agacée.

- Sta t'zit, Maria ! Non mi romp' i cuglion' !(3)

Le visage de sa soeur se ferma aussitôt en entendant ces mots et elle s'éloigna avec la raideur d'une diva offensée. Tonks, qui suivait l'échange d'un oeil amusé, haussa un sourcil interrogateur en direction du patron. Celui-ci se pencha vers la jeune femme et expliqua à mi-voix, dans un anglais fortement teinté d'accent transalpin.

- Elle veut que je cesse de parler in italiano aux clients. Pourtant, personne ne s'en est jamais plaint… Parce qu'elle a cinq ans de plus que moi, elle croit qu'elle peut me commander comme quand nous étions bambin'. Capisc' ? (4)

Tonks acquiesça d'un hochement de tête.

- Alors, reprit-il plus fort à l'intention de sa soeur, tu prends comme d'habitude, Dora mia ? Capuccino au caramel ?

- Oui, merci.

- Ton amie est déjà là, piccolina.(5) Elle est assise là-bas.. Accomodati. Vengo subito.(6)

Tonks le remercia encore une fois et se dirigea vers le fond de la salle. Elle repéra Hestia qui lisait un exemplaire de la Gazette du Sorcier qu'elle avait soigneusement plié afin de masquer les photos mouvantes qui illustraient les différents articles. Tonks s'affala sur la banquette.

- Tu es en retard, Tonks, une fois de plus, fit Hestia en abaissant son journal.

- Bonjour à toi aussi, rétorqua la plus jeune.

Hestia lui adressa un sourire taquin puis un pli soucieux marqua son front.

- T'as une mine de déterrée, ce matin.

- Merci pour ce compliment si gracieux, grinça Tonks entre les dents.

Hestia prit un air penaud.

- Désolée…

Tonks agita la main devant elle pour l'interrompre.

- Oh, pas de quoi. D'ailleurs, c'est tout à fait vrai. Je ne sais pas ce que je couve depuis quelques temps mais je me sens perpétuellement sur les rotules. Je me suis couchée plus tôt comme tu me l'as dit et pourtant je ne me sens pas reposée du tout. Si ça continue, je vais me transformer en marmotte.

Son trait d'humour tomba à plat et Hestia la dévisagea longuement sans rien dire. Pepone s'approcha de la table et y déposa une tasse de café fumante devant Tonks.

- Ecco la, Dora mia ! Voi mangiare qualcosa ?(7) Un croissant ? Du panetone ? De la pizza ?

Tonks secoua poliment la tête en signe de dénégation. L'idée de manger de la pizza au petit-déjeuner avait été assez étonnante au début. Mais une fois la première surprise passée, la jeune femme en avait fait une habitude en buvant son café. Mais ce matin-là, l'idée même lui retourna l'estomac.

- Il faut manger, insista Camillo, tu es toute pâlotte, piccolina.

- Merci mais je ne veux rien.

Le tenancier soupira et s'éloigna.

- Il a raison, tu sais. Tu devrais peut-être consulter un médicomage, proposa Hestia, la mine inquiète.

- Peut-être, fit Tonks en haussant les épaules, pas vraiment convaincue de la nécessité de cette visite. Je vais d'abord essayer une potion fortifiante et ensuite, on avisera. Tu te rappelles que j'ai fait une mauvaise grippe cet hiver, peut-être que ce sont des séquelles…

Hestia émit un petit reniflement sceptique.

- Tu me le promets ? Tu iras voir l'apothicaire, aujourd'hui ?

- Oui, maman, répliqua Tonks d'une voix moqueuse, avec un hochement de tête agacé.

Hestia lui répondit par un froncement de sourcil sévère.

- D'accord, abdiqua Tonks en soupirant. Je te promets d'y aller à la pause de midi.

°°°§§§°°°

La matinée de Tonks ne se déroula pas bien. En voyant son évident manque de forme, Kingsley Shaklebolt, son chef de service décréta qu'il préférait ne pas l'envoyer sur le terrain. Elle prit alors très mal ce qu'elle considérait comme une injuste éviction. Elle laissa éclater sa colère face à ses collègues médusés puis courut jusqu'aux toilettes pour y pleurer tout son soul. Quand les larmes se tarirent, elle resta longtemps sans bouger, à fixer la porte sans vraiment la voir, puis se leva finalement. Elle baigna son visage rougi et ses yeux gonflés avec de l'eau froide.

Elle ne se reconnaissait plus, ni physiquement, ni mentalement. La décision de Kinglsey l'avait plus profondément ébranlée qu'elle ne l'aurait cru possible. D'accord, elle n'était manifestement pas bien. Comment aurait-elle pu ? Son état physique et la crise qu'elle traversait avec Remus la minaient. En étant tout à fait honnête avec elle-même, elle devait reconnaître que Remus avait certainement des bonnes raisons de vouloir mettre quelques distances entre eux. C'était sans doute la première fois qu'il accueillait la pleine lune avec soulagement, ce qui n'était pas peu dire quand on savait quelle lente agonie elle représentait pour lui.

Elle ne comprenait pas pourquoi, ces derniers temps, elle réagissait de façon excessive à tout, les nerfs constamment à fleur de peau. Chacun de leurs désaccords – mêmes mineurs – tournaient en âpres disputes. Tonks secoua tristement la tête. Elle devait se raisonner, il fallait qu'elle cesse de harceler Remus à propos de son désir de fonder une famille sinon elle allait le perdre. Après tout, des milliers de couples vivaient sans enfant et ils étaient heureux, n'est-ce pas ?

Et comme si cette somme de problèmes de suffisait pas, Kingsley la mettait sur la touche. Si on lui ôtait, en plus, un travail qu'elle adorait… Que lui resterait-il ?

Elle soupira lourdement. Elle devait le convaincre qu'elle méritait parfaitement sa place au sein de l'équipe, même si elle accusait une baisse de régime momentanée. Elle sortit des toilettes et alla présenter ses excuses à Shaklebolt.

Ce dernier, en la voyant debout dans son bureau, eut la même expression soucieuse que son amie Hestia.

- Tonks, tu es sûre que ça va ? demanda-t-il avant de se réaliser à quel point sa question était absurde.

Bien sûr que non, elle n'allait pas bien, le premier imbécile pouvait s'en rendre compte.

- Je me sens sincèrement mortifiée par mon éclat, Kingsley, mais, à part ça, je me sens bien et je peux reprendre le travail sans problème, affirma-t-elle sans sourciller.

Le grand sorcier noir haussa un sourcil hautement dubitatif mais ne répliqua pas. Il ne voulait pas qu'elle se mette dans un état de fureur rarement atteint chaque fois qu'il estimerait qu'elle n'était pas apte pour aller sur le terrain. Le mieux serait qu'elle se rende compte par elle-même que sa décision était justifiée. Il chercha fébrilement une solution en parcourant sa table de travail des yeux. Puis il eut une idée. Il sortit un dossier de son bureau et le tendit à Tonks qui l'ouvrit. Sur le dessus du rapport, il y avait l'image mouvante d'une femme blonde excessivement maquillée et fort peu vêtue qui lançait des imprécations accompagnées de gestes obscènes au malheureux qui avait été chargé de la photographier.

- Charmante, commenta brièvement Tonks.

- En effet, une vraie dame du monde. J'ai besoin que tu prennes sa place pour récolter des renseignements sur le proxénète qui l'emploie. Il semblerait que certaines de ses connaissances soient des amis à nous. Regarde bien cette photo, Tonks. En plus de la dupliquer, j'ai besoin de savoir si tu arrives à adopter ses… bonnes manières.

Tonks acquiesça, trop heureuse de voir qu'elle l'avait convaincu de ses capacités à reprendre les missions. Elle se redressa et ferma les yeux un bref instant. Son visage commença à se transformer ; ses traits délicats s'arrondirent un peu, sa bouche se tordit et afficha le pli désabusé de quelqu'un qui a tout vu, ses lèvres se colorèrent d'un rouge vermillon qui débordaient un peu dans les coins, ses yeux prirent une teinte bleu porcelaine et se soulignèrent d'un large trait de khôl noir qui durcissaient son regard plus qu'il ne l'embellissait et ses cils s'allongèrent démesurément. Les courtes mèches de Tonks se changèrent en un blond jaunâtre très artificiel et se déroulèrent jusqu'à atteindre une longueur identique à son modèle. Son jean se métamorphosa en minuscule jupe de skaï, son pull rose disparut au profit d'un haut très minimaliste qui soulignait plus qu'il ne cachait son buste. Quant à ses tennis blanches, elles devinrent la paire de talons la plus haute que Tonks avait jamais portée de sa vie.

Shaklebolt se leva et siffla d'admiration entre ses dents. Il était toujours stupéfait par le don des métamorphmagi. Il était sur le point de faire un commentaire élogieux et reconnaître qu'il s'était trompé en l'évinçant de la mission du matin quand un phénomène étrange se produisit. Il cligna plusieurs fois des paupières, pas vraiment certain de bien comprendre ce qui se passait. Après quelques instants, il se rassit en soupirant et demanda à Tonks de faire de même ; apparemment, elle ne s'était rendue compte de rien ; ce qui à son avis, rendaient les choses encore plus dangereuses. Il avait escompté qu'elle ne pourrait pas du tout se métamorphoser dans son état de faiblesse mais il ne s'était certainement pas attendu à… ça.

- Tu veux que je m'exerce à déambuler comme elle le fait dans l'Allée des Embrumes ? s'enquit candidement la jeune femme.

Il s'éclaircit la gorge.

- Heu… non. Ce ne sera pas nécessaire.

- Ah… Pourquoi ?

Kingsley fit apparaître un miroir et le lui tendit sans un mot. Tonks le porta à son visage ; ce qu'elle y vit la fit écarquiller des yeux et poussa un cri d'effroi. Sa transformation si réussie n'avait duré qu'un bref instant ; ses traits avaient repris leur forme initiale mais incomplètement et formaient un étrange mélange. Le maquillage outrancier de la prostituée et ses iris bleues étaient restés mais le visage était incontestablement celui de Tonks. Quant à la chevelure, si effectivement de longues mèches blondes lui retombaient sur les épaules et dans le dos, le reste ressemblait à nouveau à un amas froissé de petites mèches noires. Seuls les habits n'avaient pas subi de modification.

- Oh putain ! s'exclama Tonks, atterrée, tirant désespérément sur la peau de son visage puis empoignant ses cheveux, incrédule. Mais qu'est-ce qui m'arrive ?

Kingsley soupira lourdement.

- C'est ce que j'aimerais savoir, Tonks. Honnêtement, je pensais juste que tu n'y arriverais pas mais là, c'est presque pire parce que tu y parviens mais tu n'arrives pas à rester concentrée sur la métamorphose et que, peu à peu, tu reprends tes propres traits.

- C'est vrai, je suis un peu fatiguée mais…

- Un peu ? Tu es allée voir un médicomage ?

- Ce n'est que passager, je te le promets. J'irai voir l'apothicaire pour une potion fortifiante à la pause de midi, ajouta-t-elle précipitamment.

Cette fois, Kingsley afficha une grimace moqueuse en regardant ostensiblement sa montre.

- La pause de midi d'aujourd'hui est passée, Tonks. Et tu n'es pas allée chercher de médicament alors je suppose que tu parles de celle de demain ?

Tonks sentit ses joues s'embraser. Elle avait donc passé l'heure du déjeuner enfermée dans les toilettes ?

- Evidemment, confirma-t-elle d'une toute petite voix.

Kingsley se pinça l'arrête du nez et plissa fortement les yeux. Il ne savait pas quoi faire, ni que dire ; ce qui le plaçait dans une situation des plus inconfortables. Tonks était un de ses meilleurs éléments, sans parler de Remus Lupin avec qui il était ami. Il prit finalement la seule décision qui semblait raisonnable. Il la toisa d'un air sévère si bien imité qu'elle se tassa sur sa chaise comme une petite fille prise en faute.

- Bien, je ne peux pas me permettre d'avoir une équipe qui n'est pas au mieux de sa forme. Ta sécurité et celle des autres en dépendent. Imagine ce qui se passerait si tu reprenais tes traits en cours de mission…

Tonks baissa la tête, elle imaginait parfaitement bien.

- Alors, je te conseille vivement de ne pas attendre demain pour aller acheter cette potion. Vas-y maintenant. Fais-en une cure, prend quelques jours de repos…

- Je suis juste sans entrain, pas impotente, le coupa Tonks assez sèchement. Il n'y aucune raison pour que je ne travaille pas le reste de la journée.

- D'accord. Je souhaite juste que tu te remettes au plus vite. Dès que tu te sentiras mieux, tu retrouveras ta place. Mais en attendant, si tu veux vraiment occuper cette fin de journée, le Bureau Général des Aurors attend le rapport sur les conséquences du cambriolage de la boutique de Barjow & Beurk…

°°°§§§°°°

Tonks quitta son service vers 18 heures. Elle se sentait épuisée. Elle n'avait même pas pu terminer le rapport qu'on attendait d'elle et s'en voulait énormément. Son état la rendait inattentive et déconcentrée. Sans cesse ses pensées s'envolaient vers ses préoccupations personnelles qui n'avaient que peu de rapport avec un inventaire d'objets dédiés à la magie noire.

Elle se rendit sur le Chemin de Traverse. Elle n'avait guère envie de flâner et se dirigea directement vers la boutique de Simmons, le fabricant de potions. Une fois qu'elle lui eut exposé ses symptômes, l'apothicaire la regarda fixement quelques secondes puis ôta le monocle qui grossissait démesurément son œil gauche. Il se mit à l'astiquer consciencieusement avec un coin de son gilet.

- Mademoiselle, commença-t-il d'une voix lente comme s'il cherchait ses mots, y a-t-il la moindre chance pour que… ? Enfin… Se pourrait-il que vous soyez… enceinte ?

Tonks se raidit brusquement comme si un flot d'eau glacée se déversait soudain dans ses entrailles.

Oh Merlin ! Je crois qu'aujourd'hui rien ne me sera épargné !

Elle ferma douloureusement les yeux, réprimant son envie de hurler.

NON ! Je ne suis pas ENCEINTE ! Parce que celui qui partage ma vie est un FOUTU loup-garou ! Et que les loups-garous sont STERILES !

Elle n'en fit rien, bien sûr, elle se contenta de marmonner entre ses dents, sans lever les yeux :

- Non.

L'homme se troubla un peu en voyant la tension soudaine qui émanait de sa cliente. Il toussota maladroitement.

- Je suis vraiment navré d'insister mais… En êtes-vous absolument certaine ? La plupart de nos fortifiants sont fortement déconseillés aux jeunes dames qui…

Tonks serra inconsciemment les poings, sentant qu'elle allait craquer pour la seconde fois de la journée.

- Non, répéta-t-elle, les yeux trop brillants. Il n'y a pas la moindre chance pour que je sois… enceinte. Je suis juste… très fatiguée.

L'apothicaire parut se rendre compte de la détresse de la jeune femme. Il la conduisit à une chaise.

- Je vous prie de m'excuser, Mademoiselle, si je vous ai embarrassé de quelque manière que ce soit. C'est que ce que je vais vous donner est parfaitement contre-indiqué pour un fœtus. Je voulais simplement m'assurer que… Bref… Voulez-vous un peu de thé le temps que je vous prépare le fortifiant ? Oui ? Un Earl Grey bien sucré ?

Tonks s'assit sur le siège indiqué et hocha faiblement de la tête.

- Très bien, dit-il en faisant apparaître une mug fumant dans ses mains. Je n'en ai pas pour long.

En effet, Simmons revint après quelques minutes avec une fiole à la base rebondie remplie d'un liquide blanc laiteux.

- Voilà, 3 cuillères à soupe à prendre avant chaque repas. Commencez dès ce soir, fit-il en la lui tendant. Je veux que vous me promettiez une chose, cependant.

- Laquelle ? demanda la jeune femme qui faisait machinalement tournoyer le liquide dans sa bouteille.

- Si vous ne vous sentez pas mieux, allez consulter un médicomage. Ce fortifiant n'est là que pour effacer les effets de votre fatigue, pas pour en éliminer la cause. Seul un médicomage peut se prononcer là-dessus et établir un diagnostic.

Tonks lui offrit un pâle sourire.

- D'accord.

Elle se leva.

- Merci pour le thé.

- Je vous en prie. Reposez-vous.

°°°§§§°°°

Tonks rentra chez elle en transplanant. Presque soulagée de pouvoir encore le faire. Après son entretien avec Kingsley, elle avait craint, sans oser se l'avouer à voix haute, d'avoir perdu une partie de sa magie. Elle était donc retournée dans les toilettes pour y tester différents sortilèges, certains très difficiles. Tous les sorts avaient été exécutés avec beaucoup d'habileté et ils avaient tous fonctionné. Visiblement, son épuisement empêchait surtout une concentration de longue durée. Et une parfaite concentration était déterminante pour appliquer ses dons de métamorphmagus.

La barbe !

Elle déboucha la fiole de l'apothicaire avant même d'avoir ôter sa cape et but directement au goulot. La potion était épaisse et sucrée – sans doute pour cacher le goût des ingrédients qui la composait. Avec une grimace, elle reboucha la bouteille et examina le contenu. N'en avait-elle pas trop bu ? Simmons avait dit trois cuillères à soupe…

Elle haussa les épaules ; maintenant que c'était avalé, il n'y avait plus rien à faire. Elle bailla en se dirigeant vers la cuisine. Elle n'avait pas faim mais elle se força à sortir un reste de gigot qu'elle avait dans son frigo. D'un coup de baguette, elle réchauffa la tranche de viande et les légumes qui l'accompagnait et se mit à table sans enthousiasme.

Une fois fini, elle déposa son assiette dans l'évier, alla dans la salle de bain, se brossa les dents et passa son pyjama. Après cette rapide toilette, elle se mit au lit et s'endormit dès que sa tête se posa sur l'oreiller.

Quelques heures plus tard, elle se réveilla en sursaut, d'abominables crampes lui tordaient l'estomac. Elle gémit de douleur, en se mordant la lèvre, une sueur froide couvrit son front et ses mains se mirent à trembler. Elle sentit une vague de nausée remonter dans son œsophage et n'eut que le temps de courir aux toilettes pour y vider le contenu de son estomac. Suffocant sous la violence du rejet de ses entrailles, elle laissa son corps évacuer son repas et sa potion fortifiante. Quand se fut terminé, elle se leva, pantelante, les yeux débordants de larmes et alla se rincer la bouche et le visage. Elle se regarda ensuite dans le miroir. L'image que lui renvoyait son reflet était celle d'une jeune femme blafarde et hagarde. Ses courtes mèches étaient plaquées sur son front moite, ses pupilles étaient dilatées par la sourde angoisse qui nouait son ventre. Elle était terrifiée.

Doux Merlin, mais qu'est-ce qui m'arrive ?

(1) Bonjour.

(2) Comment ça va, ce matin ?

(3) Tais-toi, Maria. Arrête de me casser les c !

(4) Quand nous étions enfants. Tu comprends ?

(5) Petite.

(6) Assieds-toi. Je viens tout de suite.

(7) Voilà. Tu veux manger quelque chose ?

A suivre…

Voilà. Merci d'avoir lu jusque-là. Si ça a plu ou même déplu, faites-le-moi savoir.

Bisous

Falyla